-Shikamaru, tu n'y penses pas ! Ce serait de la folie !

Assis à son bureau, Naruto regardait son assistant, le suppliant des yeux d'abandonner son idée. Mais c'était peine perdue, il connaissait son ami. Shikamaru Nara ne se résoudrait jamais à laisser son fils dans cet situation. Il le comprenait, et si ça arrivait à Boruto, la même idée lui traverserait l'esprit. Mais tous les facteurs à prendre en compte ne permettent pas de suivre ce plan.

Lors de l'affaire au village d'Iwa, quand Shikadai avait téléphoné en secret depuis le bureau du Tsuchikage, Shikamaru avait réceptionné son appel, et malgré son inquiétude, il avait consenti à rester à Konoha, pendant que Naruto se rendait là-bas afin de prêter main forte aux Teams 7 et 10 qui s'y trouvaient. Mais à ce moment-là, Shikadai n'était pas seul, il avait ses amis. Alors que là...peut-être était-ce ce fait qui faisait pencher la balance ?

-Naruto, nous ne savons pas où est Shikadai, qui l'a enlevé précisément, ce qu'ils veulent, ni ce qu'ils vont lui faire.

-Toi et moi ne pouvons pas facilement quitter ce village. Je comprends ton inquiétude, mais prenons le temps de réfléchir.

-Nous n'avons peut-être pas de temps.

Le Nanadaime baissa la tête, et jeta un regard à Boruto, qui n'avait toujours rien dis. Il soupira pour se calmer : ce n'était pas le moment de se disputer avec son ami, qui de toute façon, pourrait très bien partir sans son accord. Après tout, lorsqu'il avait dû rendre des comptes pour son sensei, l'avis de Tsunade alors à la tête de Konoha lui avait peu importé.

-Bon, que proposes-tu ?

-L'enlèvement de Shikadai par le village de Suna risque de causer des problèmes au conseil. Si on veut éviter qu'ils déclarent stupidement la guerre, tu dois te rendre là-bas afin d'apaiser la tension, et mener les opérations de sauvetage main dans la main avec Gaara. C'est la seule façon de prouver l'innocence de l'Etat du village du sable.

-Jusqu'ici, cela me semble être une bonne idée.

-Bien entendu, c'est Temari et moi qui t'accompagnerons, puisque je suis ton assistant, et nous avons tous deux eu de nombreuses fois l'occasion de faire un aller-retour Konoha-Suna.

-C'est là que ça pose problème ! Qui va s'occuper de Konoha en notre absence ?! Nous n'avons aucune idée de combien de temps nous partirons !

-Kakashi et Tsunade peuvent très bien s'en occuper. Au vue de la gravité de la situation, ils accepteront sans broncher.

Naruto se passa une main sur le front, fort peu convaincu. Cette histoire commençait à prendre une tournure plus dramatique que de raison. Mais les alliances sont encore fragiles, c'est un fait, et pour les anciens, ce genre d'acte peut effectivement mener à de graves conséquences. Il devait partir, il n'avait pas le choix. Et choisir Shikamaru et Temari comme escorte serait effectivement une bonne idée. Et Konoha ne pourra courir aucun danger entre les mains de Tsunade-baa-chan et Kakashi-sensei.

-Shikamaru, es-tu certain de pouvoir supporter ce séjour à Suna ? La raison pour laquelle tu n'étais pas sensé y aller n'a pas disparue en cinq secondes, tu sais.

-Je n'ai de toute façon pas l'intention de faire du tourisme. Les villageois ne me verront quasiment pas, je resterai avec Gaara et Kankurô pour superviser les recherches.

-Si tu es sûr de toi...nous partirons à la tombée de la nuit.

-Excusez-moi...

La petite voie de Boruto les surprit, et ils portèrent leur attention sur le jeune garçon. Il semblait seulement prendre conscience de ce qu'il se passait, comme si tout ceci ne pouvait être qu'un rêve. Même si avec l'affaire Mitsuki, il avait vu des choses incroyables, ce qui arrivait à son meilleur ami était tout de même bien différent. Il fit un pas en avant et regarda le Nara droit dans les yeux.

-Shikamaru-san, Shikadai nous a dit que vous évitiez Suna ces derniers temps. Pourquoi ?

Naruto et Shikamaru se jetèrent un regard, puis le Jinchûriki s'approcha de son fils. Il posa une main sur son épaule et s'accroupit à son niveau.

-Boruto, tu n'es pas sans savoir que Temari appartient au clan du Kazekage. De ce fait, son mariage avec Shikamaru avait une ampleur politique très importante, et a été sujet à beaucoup de discussions.

-Oui, mais ça fait longtemps qu'ils sont mariés ! Je ne vois pas en quoi ça pose problème !

-C'est compliqué à comprendre pour les enfants de ton âge. Shikadai étant le neveu du Kazekage, vous trouvez cool qu'il soit de la famille d'un tel homme. Mais pour les adultes, c'est une autre histoire.

Il se redressa et se tourna vers son ami, comme pour demander son autorisation afin de poursuivre. Pour toute réponse, Shikamaru déclara qu'il allait prévenir son épouse de leur départ, et s'éclipsa en fermant derrière lui.

-Papa, explique-moi.

-A Konoha, Temari a su être acceptée petit à petit, notamment par le fait qu'elle avait des amis ici. Je ne dis pas que tout le monde l'a accepté à Konoha, mais globalement, ça va. Au village du sable, par contre, Shikamaru n'est pas très bien vu. Pour eux, il n'est qu'un parvenu qui a touché le gros lot.

-Mais c'est complètement...

-Stupide. Je pense la même chose que toi, mais ce mariage entre un ninja de Konoha et une kunoichi de Suna est le premier officiel de l'histoire. On ne pouvait pas s'attendre à ce que tout le monde l'apprécie.

Il retourna à son bureau et prit place sur son fauteuil.

-Boruto, toi et tes amis ne devez pas vous mêler de cette histoire. Nous allons récupérer Shikadai, mais si vous mettez votre grain de sel, vous risquez d'aggraver les choses.

-Mais papa !

-Je sais que tu as envie d'y aller. Moi aussi j'ai couru après mon meilleur ami, plus longtemps que tu ne pourrais l'imaginer. Mais s'il-te-plaît, laisse-nous gérer.

A contre-cœur, le petit Uzumaki hocha la tête et quitta le bureau, laissant son père préparer le voyage. Il parcourait les rues, la tête baissée et les mains dans les poches. Chaque mot de la conversation lui revenait à l'esprit, aiguisé tel un kunai. Il décida finalement de mettre ses amis au courant, pour qu'ils se préparent au pire. Et de toute façon, avec tout ce qui leur était arrivé depuis leur entrée à l'Académie, ils avaient convenus qu'ils se diraient tout.

Il prévint donc tous ses amis, et leur donna rendez-vous le soir-même pour en discuter. Comme s'ils avaient senti la gravité de la situation, ils étaient tous venus en avance. Boruto leur raconta alors mot pour mot tout ce qui avait été dit, depuis son entrée dans la pièce jusqu'à son départ. Ses amis n'en revenaient pas. Ils se jetaient des regards, se trituraient les doigts, soupiraient, s'inquiétaient...

-Pourquoi Shikadai, murmura tristement Sarada. Il n'a rien fais...

-Ils attendaient peut-être simplement une occasion, déclara calmement Mitsuki. Ils auraient sans doute pu prendre Temari-san si elle avait été là. Tout dépend de leur objectif.

-Je me demande s'ils vont arriver à trouver qui a fait le coup...

-On ne peut pas rester les bras croisés, s'écria Inojin.

Les membres de la Team 7 le regardèrent avec surprise. Le Yamanaka n'avait pas pour habitude de hausser le ton ainsi, encore moins pour dire ce genre de chose. Inojin regarda Chôchô, qui hocha la tête d'un air déterminé. Depuis l'annonce de la nouvelle, pour eux deux, c'était évident. Il poursuivit en serrant les poings.

-On va aller le chercher, nous aussi !

-Mais, hésita Sarada en faisant la moue, le Hokage a dit...

-On est ses amis, ses coéquipiers. On ne va pas le laisser entre les mains de ces tortionnaires ! Alors on va aller à Suna, participer aux recherches...

-Je ne pense pas que ce soit une bonne idée, trancha Boruto.

Le fils de Saï se tut et se tourna lentement vers l'Uzumaki. Son regard se fit soudainement froid, et il lui demanda d'une voix pleine de reproches :

-Qu'est-ce que tu as dis ?

-C'est l'alliance entre les villages qui est menacée, on ne peut pas se permettre de faire de gaffes.

Sa discussion avec son père à propos du mariage de Shikamaru et Temari lui revint en mémoire, et il secoua la tête.

-C'est assez tendu comme ça.

-Je rêve, ricana Inojin, c'est toi qui dit ça. Monsieur le champion des conneries en tout genre nous fait la morale pour nous dire de rester bien sagement ici.

-Je...je pense juste qu'ils n'auront pas besoin de nous...

-Boruto, s'exclama Chôchô, à quoi tu joues ?!

Sarada posa une main sur l'épaule de son amie pour la calmer. Boruto recula de quelques pas, le regard d'Inojin sur lui devenait lourd à supporter. Jamais il n'avait fait preuve de tant d'hostilité dans le passé.

-Je...je ne veux pas prendre le risque de causer plus de mésentente entre Suna et Konoha ! Si on fait une faute, peut-être que les parents de Shikadai...

-S'ils perdent leur fils, ça reviendra au même ! Leur mariage se détruira peut-être même encore plus vite !

-Inojin, t'as entendu ce que j'ai dis ?!

-Oh que oui, j'ai bien entendu...

Il s'approcha de lui et le poussa contre un mur. Boruto grimaça de douleur, mais cela ne calma pas le Yamanaka.

-Tu ne veux pas prendre de risques, c'est ça ?! Mais quand il fallait aller chercher Mitsuki, t'as pas hésité à en prendre, des risques !

-C'est pas pareil !

-En quoi c'est différent ?! Bordel, j'arrive pas à croire que tu puisses dire une chose pareille !

Il attrapa le col de Boruto et rapprocha leur deux visages. Derrière eux, Mitsuki hésitait à intervenir, et regardait la scène avec son calme habituel.

-Shikadai t'as toujours voué une confiance aveugle. Il prenait tous les risques pour toi, et en ce moment-même, il doit croire que tu en feras autant pour lui. Mais finalement, tu n'es peut-être pas son meilleur ami. Tu ne le connais pas du tout...

Il le relâcha et s'éloigna en direction de chez lui, suivit de Mitsuki. Sarada se précipita vers Boruto pour l'aider à se reprendre. Chôchô s'approcha à son tour, et déclara doucement :

-Inojin et moi partiront demain matin. Venez si vous voulez...

Puis elle partit après les avoir saluer. Sarada la regarda s'éloigner d'un air triste, lorsqu'elle sentit que Boruto se dégageait violemment de son étreinte. Elle joignit ses mains au niveau de son cœur, inquiète pour son coéquipier.

-Boruto...

-J'ai besoin d'être seul, pour réfléchir.

Et il partit, les mains dans les poches, dans un état semblable à celui qu'il avait en sortant du bureau de son père. Il réfléchissait, il repensait à Shikadai. Cette situation était tellement similaire à ce qu'il avait vécu il n'y a pas si longtemps. Quand Mitsuki était parti, ce fut le déclic pour lui : il s'était rendu compte qu'il ne connaissait rien de son ami. Mais là, c'était de Shikadai qu'on parlait. Ils avaient grandi ensemble, ils savaient tous l'un de l'autre. Alors pourquoi Inojin affirme qu'il ne le connaissait pas ? C'est vrai qu'il ignorait pour ses parents, mais il ne l'avait dis à personne.

Est-ce que Shikadai lui cachait quelque chose que le Yamanaka savait ?

De son côté, Mitsuki suivait Inojin, sans se cacher, mais sans s'imposer. Le blond lui jetait un regard de temps à autre, se demandant pourquoi il le suivait. Finalement, irrité de son comportement, il s'arrêta et se tourna vers lui.

-Qu'est-ce que tu veux ?!

-Te parler.

-Pourquoi ne le fais-tu pas ?!

-Je ne savais pas si tu voudrais m'écouter.

-Bon eh bien, vas-y, je t'écoute !

-Est-ce que tu me détestes ?

Inojin écarquilla les yeux, et le silence s'installa durant quelques secondes. Le fils d'Orochimaru prit cela pour un "oui", et il s'apprêta à s'excuser, mais son ami lui mit une petite tape sur son crâne, ce qui coupa son élan. Il posa sa main à l'endroit du coup et le regarda sans comprendre.

-Mais...

-Baka, c'est à cause de ce que j'ai dis à Boruto que tu penses ça ?

-Il faut dire que ça porte à confusion.

-Mais non, tu n'as rien compris.

Il croisa les bras et détourna le regard. "Mignon", pensa Mitsuki.

-Je n'ai fais de reproches qu'à Boruto. Toi, on sait déjà pourquoi tu étais parti.

-Je pensais que tu m'en voulais, parce que Boruto était venu me chercher.

-Je ne comprends pas vraiment comment il fonctionne. Mais si tu veux mon avis, il ne le comprend pas non plus.

-Peut-être, oui...

-Bon, je te laisse, il se fait tard. Bonne nuit Mitsu...

Il fut coupé par une étrange sensation. Sans qu'il ne puisse en expliquer la raison, les lèvres du garçon aux cheveux bleus s'étaient retrouvées sur sa joue. Il l'embrassait, certes, ce n'était pas sur la bouche, mais tout de même ! Pourquoi ?! Mitsuki s'éloigna doucement et sourit tendrement.

-Bonne nuit à toi aussi, Inojin-kun.

Et d'un bond, il disparut dans la nuit, laissant le jeune Yamanaka complètement perdu, devant chez lui. Au bout d'un moment, il rentra chez lui, mais toutes les émotions de la soirée l'empêchaient de trouver le sommeil.

-Eh bien, je dois être un peu perdu, moi aussi...