T W E N T Y T H R E E
Vous l'attendiez tous, et le voilà enfin !
Enjoy ;)
~•~
Darcy était en train de pousser de toutes ses forces sur la pointe de ses pieds, oubliant l'équilibre instable qu'elle avait, perchée sur son escabeau, pour aller jusqu'au fond des étagères où les provisions dont elle avait besoin étaient rangées. C'était tout de même une tache sacrément complexe : tout en esquivant sucre, pâtes et conserves, et en prévenant la chute des paquets de farine, elle devait faire serpenter son bras jusqu'aux quelques pots à confiture remplis d'épices qui l'attendaient gentiment dans le fond. Loki, qui la regardait faire avec attention et un air de consternation profonde, l'entendait râler et pester contre elle-même en lui tendant, un par un, les mauvais pots qu'il avait remonté près d'une demie-heure plus tôt, pour la confection de la tarte. Darcy était tellement absorbée par l'étagère qu'il n'en voyait presque plus sa tête.
Soudain, jaillissant, et accompagné de quelques jurons exotiques, le bras de Darcy réclama un nouveau pot (tout en manquant de s'étaler en plein dans la figure du Jotun). S'il n'avait pas été sûr qu'un mouvement brusque d'indignation ne l'ait fait tomber de son perchoir, il ne se serait pas gêné pour l'invectiver avec verve. Mais il se contint.
« OK, donne moi les deux qui restent, je vais juste les caser à gauche, et ensuite je te donne la cannelle »
Il hocha la tête de dépit, en totale négation avec la stupidité de l'acrobatie.
« Pourquoi, pour l'amour d'Yggdrasil, t'embêtes-tu à tout ranger ? Tu ne pouvais pas, juste, prendre ce qu'il fallait et poser les pots à un autre endroit ? »
Darcy bougonna quelque chose d'inintelligible, avant d'extirper le haut de son corps de son étagère infiniment profonde.
« Autant ranger dès le début, qu'on ne se perde pas à chaque fois qu'on redescend chercher un truc »
Elle se saisit des deux derniers pots, et replongea, tandis que Loki croisait les bras avec lassitude.
« Maniaque » susurra-t-il.
« J'ai entendu, Etchebest, et je tiens à te rappeler, au cas où tu ne t'en souviendrais déjà plus, que ta sainteté culinaire divine qui confond la cannelle et le paprika est la raison pour laquelle nous sommes ici... »
Il roula des yeux, s'adossant nonchalamment contre la charpente d'un second meuble de rangement, et la regarda galérer encore deux longues minutes, toujours incapable de comprendre pourquoi elle avait tenu à faire les choses elle-même, trop petite de surcroît, alors qu'il aurait pu s'en charger. Il était encore capable de remettre trois pots là où il les avait trouvés, tout de même.
« Ahah ! J'ai ! »
Darcy s'avança vers le bord de l'escabeau, qui commençait à trembler dangereusement, pour aller attraper la cannelle qu'elle avait repéré dans un coin, et qu'elle atteignait à bout de doigts.
« Tu vas tomber » constata simplement le Jotun.
« Au moins je sais que tu seras là pour me cueillir, et m'offrir un second livre de recettes dans une semaine »
Loki tiqua, mais se rapprocha quand même légèrement. Darcy, elle, était tellement concentrée qu'elle ne prit même pas une seconde pour rire à ses propres singeries. Concentrant toute sa force dans ses mollets pour grappiller les centimètres manquant à ses un mètre soixante, elle eut tout juste le temps de refermer ses doigts sur le pot en verre qu'une crampe la saisit. Avec un glapissement, elle se contracta vers l'arrière, et, sans surprise, bascula aussitôt de l'escabeau, ce que Loki avait eût le temps de voir venir à quatorze kilomètres. Darcy n'eut pas vraiment le temps d'analyser quoi que ce soit qu'elle se heurta au Jotun, qui était sur le point de l'attraper et de leur éviter une rencontre avec le carrelage à tous les deux, ceci sans compter le coude de la brune qui fila tout droit vers le visage de Loki et alla s'y encastrer comme une brique lego.
Darcy sentit un pic de douleur lui traverser le bras depuis la pointe du coude jusqu'à l'épaule, et la prise de Loki autour de sa taille disparaître complètement. Une demie seconde plus tard, elle s'étalait par terre de tout son long, fort heureusement, le pot de cannelle tendu en l'air par réflexe, en grognant d'avance contre les bleus qu'elle allait se coltiner à coup sûr. Elle n'avait chuté que d'un mètre cinquante de hauteur, mais le sentait quand même passer. Elle se redressa, s'appuyant sur l'escabeau, qui n'avait, lui, que pivoté légèrement, et se hissa sur ses pieds avec la délicatesse d'un éléphant, cherchant Loki du regard, qu'elle n'entendait plus railler.
Un râle sourd lui parvint dans son dos, rauque et visiblement douloureux, et un malaise la glaça quand elle le vit prostré sur le sol, les deux mains plaquées sur son nez quasi violet, tendu comme un string au point qu'il avait l'air de se retenir d'imploser. Le sang de la jeune ne fit qu'un tour, et elle constata avec horreur que c'était bien le heurt de son coude avec le nez du dieu qu'elle avait sentit lorsqu'il l'avait rattrapée, avant de rouler par terre deux mètres plus loin sous l'effet du coup qu'il s'était pris — le second en quelques jours à peine ! Darcy se précipita vers lui, hésitant à l'effleurer de peur de lui faire encore plus mal, ou de finir broyée comme punition pour sa maladresse.
« Par tous les Saints, Loki, je suis désolée ! »
Loki se releva, la tête tournant sous l'effet capiteux de la douleur qui anesthésiait tout son visage, maudissant son état de mortel qui le rendait si fragile et si vulnérable aux moindres petites choses. Darcy, précautionneusement, posa ses mains sur les poignets du Jotun, qui effectua un mouvement de recul animal.
« Laisse-moi voir » murmura-t-elle en écartant ses larges mains de son visage.
Elle grimaça en voyant la largeur de l'ecchymose, et en songeant qu'elle avait touché une zone déjà très sensible qui le faisait souffrir depuis une semaine déjà. La culpabilité l'envahit et toute envie de rire avait disparu aussi sec. Loki, lui, ne songeait même pas à parler ou à la menacer de quoi que ce soit, tant le choc l'empêchait de réfléchir.
« Je suis vraiment, vraiment, vraiment désolée... »
Elle tourna en rond, à la recherche d'une idée, et se saisit du pot qu'ils étaient venus chercher.
« Viens, on va remonter et je vais te donner de la glace. Je suis à peu près sûre qu'on a de la pommade quelque part »
Étonnamment docile, il obtempéra, et se laissa guider jusqu'aux escaliers par la jeune femme, qui se précipita à l'étage avant même qu'il n'ait eu le temps de poser le pied sur la première marche. Ouvrant le pot de cannelle à la volée, elle saupoudra sa tarte à l'arrache et le referma ensuite pour l'écarter, fit de la place sur le table, et ouvrit la porte du congélateur. Lorsque Loki fit irruption dans la piece, elle lui indiqua la chaise, et lui tendit un pain de glace qu'elle enroula dans un chiffon de cuisine qui traînait. Il le porta à son visage et l'appliqua très doucement, avec une tension palpable et une grimace évocatrice, tandis que Darcy, qui revenait avec la trousse de secours, enfournait la tarte pour libérer le peu d'espace qu'il leur restait sur leur table bordélique recouverte d'ustensiles, épluchures de pommes et autres déchets alimentaires.
« Tu t'en sors ? »
Elle accusa le regard mi blasé mi meurtrier qu'il lui renvoya et se posta face à lui, qui se cambra sur sa chaise.
« c'est trop dur »
Tâtant le pain de glace qui avait tout d'une brique, elle acquiesça, contrite, et s'en retourna vers le congélateur.
« Attends je vais te donner un sachet de légumes, ce sera plus efficace. À moins que tu ne veuilles faire pousser des stalactites au bout de tes doigts ? »
Son trait d'humour fut accueilli par un silence terrifiant, et elle se ravisa aussitôt.
Écartant les bacs à glaçons, elle partit en quête du sachet de petits pois qu'elle savait coincé derrière un autre sachet surgelé qu'elle retira pour pouvoir l'atteindre. Lorsque son regard se posa sur la photo des nuggets en forme de coccinelles, un sentiment étrange se diffusa dans tout son être, et avant même de réaliser comment, elle se revit avec un Loki blessé et menaçant, encore dans son armure dans la bibliothèque, durant les premiers jours de leur cohabitation. Elle revit comme si la scène défilait sous ses yeux, le saladier rempli de nuggets, l'air dégoûté du Jotun qui ne voulait pas manger, sentait presque le poids rassurant de son taser avec elle, qu'elle était prête à brandir à tout instant pour se défendre contre lui. Elle réalisa qu'ils étaient enfermés tous les deux depuis un mois comme elle se serait pris une claque dans le visage, et resta tout simplement figée, le sachet dans les mains, le froid lui brûlant les paumes.
Un court moment, presque par réflexe, elle tourna la tête vers Loki, et constata qu'il fixait lui aussi le sachet, en proie également à une résurgence subite de souvenirs et rattrapé par le temps comme s'il se réveillait d'un long sommeil. Troublée, Darcy prit le sachet de petits pois et replaça les nuggets au fond du congélateur avant de fermer la porte. Elle fit un noeud en enroulant le plastique sur lui-même, profitant que le sachet soit pratiquement vide pour pouvoir le prendre en main plus facilement, et s'approcha de Loki. Le Jotun le porta à son visage, le posa contre son nez en grimaçant, sans la quitter des yeux une seule seconde, et Darcy, comme en transe, se rapprocha davantage, se fraya un chemin de ses doigts sous les mains larges et blanches de Loki, afin de redresser légèrement le sachet, de le placer autrement, afin que le froid soit bien en contact avec l'ecchymose, sans trop appuyer dessus.
Ils ne parlèrent pas pendant une longue minute, mais tous les deux pensaient exactement la même chose (et quelque part, le savaient, à leur façon de se regarder, aussi distante et troublée qu'elle était étrangement contemplative) : cela faisait un mois entier qu'ils étaient enfermés tous les deux, et Darcy ne savait même pas où était son taser qu'elle ne prenait même plus la peine de chercher, ne sentait pas plus menacée par Loki que part une dalle de carrelage mouillée sur laquelle elle aurait risqué de glisser ; Loki n'arrivait même plus à savoir pourquoi il voulait s'en prendre à elle en premier lieu, d'où était sortie cette haine virulente et meurtrière à son égard, et où elle avait bien pu passer. L'un comme l'autre réalisaient le confort routinier qui s'était installé, les joutes verbales divertissantes, l'ennui qui planait lorsqu'ils n'étaient pas dans la même pièce, l'attention qu'ils se portaient. Loki ne pouvait pas arrêter de songer aux remarques qu'il se faisait lorsqu'elle ne portait pas ses lunettes, lorsqu'il surprenait ses petites moues involontaires, l'espièglerie au fond de ses prunelles bleues, la splendeur de ses mimiques juvéniles entre les fêlures de son masque de sarcasmes ; il ne pouvait pas arrêter de la regarder et de sentir poindre une colère sourde contre lui-même, l'incompréhension de voir qu'il s'était laissé absorbé entièrement par l'atmosphère dans laquelle ils baignaient. Darcy eut envie de s'enterrer vivante quand elle réalisa à quel point aucun de ses regards en biais n'était anodin ; elle n'aurait jamais dû se laisser prendre au jeu, lui accorder sa confiance presque aveuglément, se montrer aussi familière et complice. Elle ne devrait pas se sentir émue en croisant ses iris limpides, en découvrant une beauté gracile et brute sous le voile cruel de ses expressions, sous les angles de ses pommettes et de sa mâchoire, sentir la pression de ses mains noueuses et froides s'imprimer sur ses phalanges.
Darcy et Loki étaient soudains envahis par la même terreur, par la même fascination, le même trouble palpable ; un mois, un mois entier et la tension magnétique et lourde qui les écrasait en cet instant précis n'avait plus rien d'hostile et tout de dangereux pour ce qu'elle laissait sous-entendre. Où était passé le dernier mois ? Tout défilait à toute vitesse dans l'esprit de la jeune femme, et celui du Jotun était désert comme une banquise.
Merde.
Darcy sentit qu'ils auraient pu rester ainsi encore longtemps si leurs mains n'avaient pas commencé à dégouliner à cause de la condensation et des résidus de glace qui fondaient sur le sachet de petits pois, qui n'était plus vraiment froid. L'écartant précautionneusement et se libérant de l'emprise de ses mains, de son regard et de son souffle bien trop proche de son visage, Darcy retourna vers le congélateur.
Faisant tous les deux comme si de rien n'était, comme si l'instant tout juste partagé n'avait pas existé du tout, ils se cachèrent à nouveau derrière leurs railleries et moqueries habituelles, et étouffèrent la tension ambiante qui devenait insoutenable.
« Et moi qui te prenais pour un dur à cuire, je suis déçue » tenta-t-elle, soulagée de voir qu'il était réceptif.
« J'aurais mieux fait de te laisser te fracasser par terre la semaine dernière »
« Dommage que tu sois obligé de me supporter vivante et en bonne santé si ton petit cul veut un jour fouler le ciel d'Asgard de nouveau ! »
Darcy jeta un coup d'œil à la cuisson de la tarte, et revint vers Loki, qui s'était essuyé le visage.
« C'est que je t'ai pas loupé... » ricana-t-elle en extirpant un tube de crème anti-inflammatoire de la trousse de secours qu'elle avait ramenée un peu plus tôt.
Loki se recula avec un air méfiant, visiblement mécontent qu'elle s'approche encore de lui après lui avoir à moitié arraché le nez, oubliant presque sa douceur s'il y a quelques instants.
« Relax Princesse, ça va te faire du bien »
Une noisette de crème sur l'index, elle commença à l'étaler délicatement sur le nez gonflé du grand blessé. Elle voulait changer de sujet.
« Tu ne m'as toujours pas dit pourquoi tu voulais absolument faire une tarte »
Il lui répondit par une moue blasée.
« Après les péripéties qu'on a traversé pour la faire, j'estime que j'ai le droit de savoir, et ronchonner ne va pas changer ça »
« Dixit celle qui m'a littéralement enfoncé le nez dans le visage »
« Je t'ai pas demandé de me rattraper, je te signale »
Il leva les yeux au ciel, et elle se pinça les lèvres.
« Je suis désolée... ce n'était pas mon intention... » murmura-t-elle néanmoins après une brève pause. Loki la fixa, un instant, si près de son visage, étrangement détendu compte tenu du fait qu'elle lui étalait son baume Midgardien sur le nez alors qu'il avait affreusement mal, et qu'il la savait maladroite au point d'être capable de glisser subitement et de lui enfoncer les doigts dans les yeux. Elle avait, furtivement, posé ses étroites lunettes rouges sur son nez, ces affreuses lunettes qu'elle adorait mais qui cachaient ses traits, masquaient son regard.
Depuis quand Loki avait-il confiance en qui que ce soit ?
« Je n'avais pas... beaucoup d'amis, ni même de connaissances aimables, lorsque j'étais enfant... » commença-t-il en demi-teinte, la voix si calme, si profonde, que Darcy se sentit immédiatement gobée par son timbre. « Je passais la majorité de mon temps dans les écuries royales, ou dans la bibliothèque d'Odin, loin de ces infernaux asgardiens que je ne pouvais pas supporter. Mais il y avait cette femme, qui servait ma famille depuis des siècles, très vieille, mesquine... elle travaillait aux cuisines, supervisait les banquets... de tous les mets qu'elle était capable de préparer, il y avait ses tartes... »
Loki parut lointain tout à coup, comme avalé par le ressac de ses souvenirs résurgents, et Darcy, pendues à ses lèvres, suspendit les mouvements de sa main au dessus de son visage. Elle remarquait qu'il paraissait véritablement hanté par son enfance, qu'à chaque évocation de celle-ci, une plaie se rouvrait en lui. Elle le sentait, intuitive ; elle le voyait comme si c'était écrit au milieu de son front, et le Jotun lui-même ne soupçonnait pas complètement cette compréhension que la brune avait. Il s'était élevé, après tout, dans l'idée fermement enracinée que s'il n'était pas capable de se comprendre lui-même, alors personne ne le pourrait jamais.
« Il est arrivé, à plusieurs reprises, qu'elle chasse ces gamins perfides à coup de casseroles et qu'elle me dépose des tartes entières directement sur les genoux, m'ordonnant presque de manger »
« Elle ressemble à ma grand-mère » s'amusa Darcy. Mais Loki n'entendit pas. Il était sombre, sombre comme une tempête.
« Je la détestais, j'étais prêt à n'importe quoi pour lui causer du tort, plein de rage, de hargne... j'en voulais à tout le monde... »
Odin pour qui je n'étais jamais assez bien, Frigga et sa tendresse que je ne méritais pas, Thor, le préféré, le fort, le brave qui me défendait contre les enfants comme si j'avais été une petite chose fragile, tous les autres à qui je ne ressemblais pas, tous les autres qui me lançaient des pierres, m'ignoraient ou me tendaient la main... Mais de tout ça, il ne pipa mot.
« Un jour Odin l'a chassée, parce qu'il l'accusait d'avoir volé une pièce d'argenterie que j'avais dérobée en secret pour la faire enrager. Elle a disparu, du jour au lendemain, et j'ai haï Odin si fort ce jour là que j'aurais pu... »
Sa mâchoire se contracta, lentement, si lentement que Darcy, muette, glacée, pouvait presque en voir les muscles ramper sous la peau. Elle sentait toute cette colère, cette sourde violence qui émanait de lui, et était toute dirigée contre-lui, au point qu'elle avait envie de se recroqueviller sur elle-même. Il haïssait tout le monde oui, il se haïssait lui-même, probablement, le plus.
« Qu'est-elle devenue...? »
« Elle est morte il y a très longtemps maintenant. Elle avait déjà plusieurs milliers d'années, à l'époque »
Le four bipa, mais aucun d'eux n'esquissa le moindre frémissement. Les mots de Loki avaient en Darcy un echo insondable, inattendu. Finalement, en automate, elle s'essuya les mains en les passant sur sa cuisse, et s'équipant des gants de cuisson, extirpa le plat à tarte du four, qu'elle déposa sur les vieilles plaques à gaz de la cuisinière. En tournant la tête vers le Jotun, elle constata qu'il palpait doucement son ecchymose.
« La crème devrait te soulager. Si ça te fait trop mal, tu pourras toujours remettre de la glace... »
Il acquiesça, toujours perturbé, plus silencieux qu'il ne l'avait jamais été en sa présence, et se leva, rangea la chaise, machinalement, et s'apprêtait à quitter la salle de repos, avec le besoin désespéré de s'éloigner. Il se sentait nu, vulnérable, strié par sa fureur et l'amertume de ses souvenirs, regrettant déjà de s'être ouvert ainsi, comme s'il ne l'avait pas réellement voulu.
« Attends »
Il pivota. Darcy lui tendait une assiette creuse, avec une part de tarte fumante à l'intérieure, irradiant d'une odeur sucrée et chaude, qui pénétra sa peau comme s'il avait été un être immatériel, un courant d'air. Il se saisit de l'assiette, quitta la pièce sans rien ajouter et s'effaça dans les escaliers, mais son regard clair, si clair, avait parlé pour lui.
Darcy, cette nuit là, fut incapable de dormir.
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