Chapitre 26 : Louise
Six heures du matin. Louise est déjà levée depuis un bon bout de temps. Hier, elle a demandé à Léo de venir la chercher plus tôt que d'ordinaire. Il a accepté sans poser de question. Seulement, la jeune fille sait que lorsqu'il apprendra quels sont ses projets, il réagira très violemment.
Aujourd'hui se tient le procès de Damien. Louise ayant promis d'y assister, elle ne put rompre sa promesse et prévoit de sécher ses cours. Elle aurait pu prendre un taxi pour l'emmener jusqu'au tribunal de Caen.
Cependant, la jeune fille préfère passer cette journée en la présence d'une personne qu'elle connaît bien. En dépit de leurs problèmes, Léo compte tout de même beaucoup pour elle. Très organisée, la jeune fille réunit ses affaires dans un son sac et sort de sa chambre.
Tout le monde dort encore, Louise souhaite s'éclipser en silence mais c'est sans compter sur Baptiste qui la surprend alors qu'elle traverse le salon à pas de loup. Assis sur un fauteuil, le jeune homme a les yeux rivés sur l'écran de la télévision, tel un zombie.
Ses migraines l'ont très certainement amenée à se rendre dans le salon, afin de passer le temps devant la télévision. Le visage de Baptiste affiche un réel manque de sommeil qui se veut inquiétant. Louise s'arrête net et croit pendant quelques secondes que Baptiste ne l'a pas remarquée jusqu'à ce qu'il s'exclame :
- Tu t'en vas sans me dire au revoir ?
- Au revoir, lâche-t-elle en ouvrant la porte d'entrée .
Baptiste lâche un rictus mesquin.
- Tu passeras le bonjour à Léo ! lance-t-il.
Louise referme la porte derrière elle aussi sec. Restant plantée sur le paillasson, la jeune fille tente de comprendre comment son frère a compris qu'elle fréquentait de nouveau Léo. Souhaitant mettre fin à ses interrogations, Louise entre de nouveau dans l'appartement et retrouve Baptiste à l'endroit où elle l'a laissé.
- Je t'ai vu entrer dans sa voiture, il y a deux jours, dévoile Baptiste, sachant d'avance quelle question sa sœur s'apprêtait à lui poser. J'étais avec Vanessa. Elle se réjouissait que vous vous soyez remis ensemble.
- Et toi non, j'imagine ?
- Tu lis dans mes pensées, déclare-t-il, en décrochant son regard de la télévision.
- De tout de façon, je me fiche pas mal de ce que tu penses.
Baptiste saisit sa télécommande et éteint la télévision.
- On sait tous les deux que c'est faux. Et c'est justement parce que j'ai conscience que mon avis tient beaucoup à tes yeux que je te demande de rompre illico avec Léo.
- Ce ne sera pas nécessaire, on ne s'est pas remis ensemble, signale-t-elle.
- Ne joue pas sur les mots, Louise. Quitte le sinon...
- Sinon quoi ? demande-t-elle.
- Sinon je révèle tout à maman. Je lui dis que tu revois Léo alors qu'elle te l'a formellement interdit.
Louise secoue la tête avec réprobation. Entre frère et sœur, on est censé faire preuve de compréhension et d'entraide. Baptiste a très certainement occulté ces valeurs de son esprit.
Depuis que Vanessa a pris son indépendance, le jeune homme semble refuser que les gens qui l'entourent soient heureux. C'est un constat accablant mais pourtant vrai. Occultant sa menace, Louise use à son tour d'un moyen quelque peu scrupuleux pour le faire taire : le chantage.
- Très bien. Crache le morceau à maman et j'en ferais de même.
- Comment ça ?
- Tu te souviens quand je t'ai ramassé complètement bourré en pleine nuit, dans les rues de Paris, avec cette greluche qui te sert d'amie.
- J'ai bien le droit de faire la fête avec mes potes, se défend Baptiste. Maman n'y trouvera rien à redire.
- Je ne compte pas en parler à maman mais à Vanessa, rectifie Louise avec un malin plaisir. Je pense qu'en tant qu'amie, je me dois de lui confier que l'homme qu'elle aime fricote avec une pétasse.
Le teint de Baptiste devient livide. Louise comprend alors que tous deux détiennent un secret sur l'autre et qu'il est préférable de ne pas le révéler afin de briser leur vie respective. Le frère et la sœur se toisent quelques secondes quand Baptiste s'enquit :
- Ce que je souhaite avant tout, c'est te préserver. Tu finiras par comprendre pourquoi lorsque Léo arrêtera de se foutre de ta gueule.
Louise reste pantoise et l'interroge plusieurs fois sur sa remarque mêlée d'empathie et de sous-entendus à l'égard de Léo. Seulement, Baptiste ne répond pas, trop absorbé par l'écran de la télévision qu'il vient de rallumer. Louise soupire et s'en va pour de bon.
Elle décide de faire table ras de cette querelle afin de se concentrer uniquement sur l'imminent procès de Damien. Elle doit se montrer forte devant son ami. Qu'est-ce que représente sa vulgaire histoire d'amour avec Léo face à la sanction que s'apprête à recevoir Damien ?
Louise contourne sa rue et aperçoit la voiture de Léo qui l'attend sagement à l'intérieur. Elle entre dans le véhicule et lui annonce de but en blanc que leur destination est tout autre ce matin.
- Caen ! s'exclame-t-il, surpris. Tu veux que je t'emmène à Caen ?
- Si ça te dérange, je prendrais un taxi, répond Louise, déjà lassée des questions qu'elle s'apprête à recevoir de Léo.
- Cela ne me gêne en rien. Mais, j'aimerais bien savoir ce que tu veux faire à Caen.
- Tu verras bien. En attendant, démarre, je n'ai pas envie d'être en retard.
Le trajet se fait en silence. Louise est dans ses pensées et Léo tente de méditer quant aux raisons qui amène Louise à se rendre si loin. Il n'ose pas la questionner. Elle ne semble guère disposer à lui répondre.
D'autant que tout comme elle, il a sa part d'ombre qu'il ne souhaite toujours pas lui dévoiler... Voilà déjà une heure qu'il roule sur l'autoroute. Louise s'est tout naturellement endormie. Léo s'autorise à jeter quelques coups d'œil sur la jeune fille.
Pour une fois qu'il peut se permettre de la regarder sans qu'elle ne se détourne de lui. Léo éprouve alors des remords. Il culpabilise d'avoir laissé s'échapper une telle perle rare. Elle ne méritait pas d'être abandonnée de la sorte, alors qu'elle venait à peine de sortir de cette clinique pour traiter se problèmes d'anorexie.
Le jeune homme comprend qu'elle se montre méfiante. Il l'a abandonnée au moment même où elle avait le plus besoin de lui. Il s'est montré aussi lâche que courageux. Quitter une personne qu'on aime justement pour ne pas la faire souffrir, n'est-ce pas honorable ? Léo tente de se convaincre mais il y parvient de moins en moins.
Désormais, les rôles sont inversés. Il traverse une dure période et a cruellement besoin de son soutien mais il a peur que sa maladie la fasse fuir. Il craint sa réaction face à son cancer et souhaite avant tout ne pas bouleverser son quotidien à cause de ce putain de cancer.
D'un autre coté, Léo a conscience de repousser l'échéance de ses aveux afin de se protéger. Révéler sa maladie à Louise revient à l'accepter lui-même. Depuis des mois, Léo prend les choses à la légère, refuse toute prise en charge, malgré les conseils véhéments de ses parents et de Caroline.
Cela peut paraître étrange qu'il ne veuille pas se soigner mais pour Léo, entamer un traitement l'obligerait à se confronter à la maladie. Chose qui lui semble insupportable du haut de ses dix huit ans... Des larmes coulent sur le visage du jeune homme, dans un silence pesant.
Louise est à la fois proche et si éloignée de lui. Comment ne peut-elle pas voir sa détresse ? Léo se ressaisit lorsqu'un bruit de moteur anormal se fait entendre. Le jeune homme commence à réaliser qu'une panne pointe le bout de son nez quand une fumée grise et épaisse s'échappe du capot. Agacé par cet imprévu, Léo peste violemment en donnant un coup sur son volant. Son élan de colère réveille aussitôt Louise qui prend peur.
- Qu'est-ce que tu as fait ? s'écrie-t-elle. Ne me dis pas que tu me fais le coup de la panne !
- Franchement, tu me crois vraiment capable de faire ça, s'irrite Léo en ralentissant considérablement son véhicule.
Louise s'agite sur son siège et lui crie à tue-tête : « Gare-toi sur la voie de détresse ! ». Léo finit par s'exécuter et suit le protocole que tout bon conducteur doit entreprendre lors d'une panne. Louise ne lui ait d'aucune aide et reste dans la voiture, le visage fermé.
Décidé à trouver l'origine de cette soudaine panne, Léo s'emploie à ouvrir le capot et examine son contenu avec le peu de connaissance qu'il détient sur la mécanique automobile. Un quart d'heure se passe sans que la situation ne se bloque. Louise se décide à le rejoindre et lance sur un ton sec :
- Arrête de te prendre pour le meilleur mécano' au monde et trouve une solution !
- On va appeler une dépanneuse, propose Léo, qui tente de garder son calme.
- Une dépanneuse ! Tout ce cirque va prendre énormément de temps ! se plaint-elle.
- Quelque heure, tout au plus...
- Je ne peux pas me permettre de perdre du temps ! s'écrie Louise, en faisant les pas autour de la voiture qui vient de les lâcher. On ne peut vraiment pas te faire confiance.
Léo ignore sa critique et se met à la recherche d'une société de dépannage dans les alentours, sur son portable. A ses côtés, Louise l'incendie de reproches et semble profondément bouleversée par cet imprévu.
Léo finit par contacter un garage qui lui indique qu'ils seront pris en charge dans deux heures. La perspective de cette attente interminable provoque une véritable crise d'hystérie chez la jeune fille. Léo a l'impression de retrouver cette jeune fille si fragile qu'il a longuement côtoyée, pendant des mois.
- Il va falloir que je fasse du stop, déclare-t-elle, avec conviction.
- Tu plaisantes, j'espère ! Tu ne vas certainement pas entrer dans la voiture d'un inconnu.
- Je fais ce que je veux, dit-elle, en attrapant son sac à main sur son siège.
Louise fait quelque pas et pointe déjà son pouce en l'air, bien déterminée à se rendre sur Caen coûte que coûte. Léo voit rouge. Par les temps qui courent, il est fortement déconseillé qu'une jeune fille accorde sa confiance à n'importe qui. Léo la rattrape rapidement et la pousse presque de force à réintégrer sa voiture. Louise se débat violemment. Une crise de larmes s'en suit.
- Tu ne comprends pas ! hurle-t-elle, en pleurant. Je dois y aller. Je lui ai promis de venir le voir.
Léo parvient tant bien que mal à la faire entrer à l'arrière de sa voiture. Tous deux sur la banquette arrière, ils se chamaillent telles des bêtes sauvages. Louise veut partir et Léo l'en empêche. Des souvenirs douloureux reviennent à l'esprit du jeune homme.
Cette jeune fille hystérique qu'il tentait en vain de faire manger d'innombrables se retrouve face à lui. Il pensait l'avoir perdu mais il n'en ait rien. Louise s'est juste contentée de cacher sa vulnérabilité derrière une certaine froideur.
- Laisse-moi sortir ! vocifère-t-elle, avec hargne. Il faut que je le voie.
- Calme-toi.
- Il a besoin de moi. Tu comprends ? demande-t-elle. Je suis tout ce qu'il lui reste.
- De qui tu parles ?
Louise cesse immédiatement de s'agiter. Telle une petite fleur fanée, elle se recroqueville sur elle-même et se met à sangloter brutalement. Léo hésite quelques secondes avant de la prendre dans ses bras.
Et là, la jeune fille s'effondre littéralement. Un prénom s'échappe de ses lèvres. Damien... Léo tente de réfréner sa jalousie et s'emploie à l'écouter attentivement. Finalement, c'est ce dont elle avait cruellement besoin : se confier à lui. A Léo. L'être qu'elle aime depuis toujours. Louise explique alors ce qu'a été sa vie lorsqu'ils se sont séparés.
Sa rencontre avec Damien ainsi que leur premier vol jusqu'au dernier qui fut de trop. Elle justifie sa réaction quelque peu exagérée par cette culpabilité forte qu'elle ressent à l'encontre de Damien. Toute autant responsable de ces vols, Louise devrait à cette heure être jugée par un tribunal au même titre que Damien.
Mais, ce dernier s'est sacrifié pour elle et vit un enfer en prison pour deux... Voilà pourquoi Louise se devait d'être à Caen, à l'heure et prête à soutenir Damien. Cette révélation retire le voile sur de nombreuses interrogations. Louise n'a en rien entamé une relation amoureuse avec un autre homme.
Bien au contraire, sa rupture avec Léo l'a conduite à faire des choix peur recommandables... Léo est davantage attendri par Louise. Cette fille l'a toujours plus touchée que n'importe qui. Profondément tendre, le jeune homme relève la tête de Louise et l'incite à le regarder dans les yeux.
- Maintenant, je comprends pourquoi j'avais l'impression que tu me cachais quelque chose.
- Désolée, lâche-t-elle, en séchant ses larmes.
Léo passe la main dans ses cheveux. Malgré le caractère cocasse de cette situation, il n'aimerait être nulle part ailleurs qu'ici et avec Louise.
- Tu m'as tellement manqué, glisse-t-elle, d'une petite voix. Promets-moi de ne plus jamais m'abandonné.
Léo occulte sa maladie et tout ce qui s'y rapporte et lâche non sans mal :
- Nous deux, c'est pour la vie. Jamais plus je ne commettrai l'erreur de te laisser m'échapper.
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Chapitre 26 : Posté.
Louise et Léo se sont remis ensemble ! YOUPI !!!!
Une question plane tout de même : Léo trouvera-t-il le courage de lui parler de sa maladie ? A moins que quelqu'un s'en charge à sa place...
N'oubliez pas de voter et de commenter.
Bises !!!
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