Les yeux de Baptiste s'ouvrent brusquement. Pendant quelques secondes, le jeune homme se demande si la soirée de la veille ne fut qu'un rêve. Mais, il réalise très rapidement que tout fut bien réel. Hier, sa petite-amie fut parfaite et lui accorda toute son attention, en dépit des nombreuses sollicitations auxquelles elle dû faire face.

Elle jongla entre son rôle d'égérie et celle de petite-amie, avec brio. Si bien d'ailleurs que Baptiste n'éprouva pas la moindre jalousie, tant il se sentit aimé par Vanessa. Finalement, il eut peut-être tort de douter de sa sincérité.

Malgré sa nouvelle célébrité, elle reste la même. La veille, les deux tourtereaux ont décidé de finir leur nuit dans l'appartement offert à Vanessa. Le couple ne prit la peine de visiter chacune des pièces et se précipitèrent dans la chambre à coucher dans laquelle ils ont peu dormi...

Cette nuit, Baptiste eut Vanessa et rien que pour lui. Pas de Patrick, d'Anton et des tas personnes pour l'empêcher de la toucher, de l'embrasser, d'être tout simplement avec elle comme il le voulait.

Se sentant revigoré par ce constat, Baptiste daigne enfin se lever. Il erre dans un couloir qui le mène rapidement à sa dulcinée. Il pousse une porte derrière laquelle se trouve une sorte de dressing gigantesque comportant une quantité indécente de vêtements. Baptiste aperçoit Vanessa dans un coin de la pièce. Elle porte encore sa nuisette et essaye des escarpins à la célèbre semelle rouge.

- Qu'est-ce que tu en penses ? demande-t-elle, en tendant ses pieds en direction de Baptiste.

- Tu sais, je ne suis pas un as de la mode.

- T'as raison, concède Vanessa, en se relevant. Je devrais appeler Anton pour lui demander conseil.

Baptiste se décompose. Vanessa se rattrape en s'exclamant :

- C'était une plaisanterie !

- Evite de parler de lui en ma présence, s'il te plait, scande le jeune homme, sur un ton froid.

Vanessa balaye sa remarque d'un revers de la main. Baptiste décide alors de changer de conversation.

- J'imagine que tu n'as pas porté encore un seul de ses vêtements.

- Exact. Ce sont uniquement des créations de styliste ultra connus. Jean Paul Gauthier m'a envoyé sa dernière collection et ce dans ma taille !

- Quelle chance tu as ! ironise Baptiste, en imitant ridiculement la voix de Vanessa.

Elle lève les yeux au ciel, saisissant qu'il est nécessaire qu'elle cesse de parler fringues avec Baptiste.

- Patrick a fait venir un chauffeur.

- Pour toi ?

- Bien sûr, dit-elle, comme si c'était une évidence. Il doit me conduire au QG d'Every Women. Patrick organise une réunion avec toute l'équipe afin que l'on mette en place le programme de cette année.

- Ok. Je pensais sécher pour qu'on passe la journée ensemble mais finalement je vais aller en cours.

Vanessa ne sait que lui répondre. Baptiste peut le percevoir à la manière dont elle le regarde. Elle est excitée par cette perspective de voyages et de rencontres enivrantes avec ces fans dans les mois à venir mais elle se retient d'exprimer son enthousiasme en sa présence. Vanessa reste Vanessa...

Elle ne veut pas blesser Baptiste parce qu'elle l'aime. Le jeune homme en prend conscience mais il ne parvient toujours pas à accepter son tout nouveau train de vie, justement parce qu'il en est exclu. S'il pouvait, Baptiste passerait chaque minute de son existence avec elle mais la vie en a décidé autrement.

- Mon chauffeur va t'emmener en cours. Ça t'évitera de prendre les transports.

- Ton chauffeur ? reprend Baptiste, amusé par l'assurance de sa petite-amie.

- Le chauffeur de Patrick, rectifie-t-elle, en plaquant une robe haute couture devant elle. Il te déposera chez toi avant. Il est préférable que tu portes une tenue plus classique pour les cours.

- La vérité, c'est que tu refuses que les filles de ma classe aient la chance de me voir en smoking.

Vanessa esquisse un sourire de connivence. Sans même se parler, les deux amants se comprennent parfaitement. Ils s'appartiennent l'un à l'autre et aucun de deux n'accepterait de partager sa moitié...

Voilà pourquoi Baptiste a dû mal à supporter toutes les attentions dont Vanessa fait l'objet. C'est si difficile d'être avec quelqu'un tant sollicité. Leur jeu de regard est interrompu par une sonnette criarde qui les fait sursauter. Vanessa dépasse Baptiste en vitesse et s'empresse de regagner l'entrée de l'appartement.

Elle regarde furtivement à travers le judas puis ouvre la porte à la volée. Baptiste marque un temps d'arrêt lorsqu'il aperçoit la tête du blondinet qui tourne autour de Vanessa, depuis déjà des semaines. Anton Müller en personne ne se gêne pas pour entrer.

On croirait voir un mannequin tant son style est travaillé pour paraître nonchalant. Vanessa lui saute dans les bras. Baptiste observe la scène d'un œil critique. Où donc est passée la pudeur de Vanessa ? S'afficher devant un autre homme que lui et ce en nuisette ne semble pas la gêner du tout.

Baptiste espère qu'elle agit de la sorte uniquement parce qu'Anton est gay... Vêtu d'un simple caleçon, Baptiste pensait attirer l'attention de ce dernier mais c'est à peine si Anton le regarde. A l'inverse, il dévore Vanessa des yeux comme si elle était une créature divine.

- T'as eu le temps de jeter un œil aux vêtements que l'on t'a offert.

- Hier soir, j'avais mieux à faire, répond Vanessa en lançant un regard complice à Baptiste. Par contre ce matin, j'ai cru rêver en découvrant toutes ses fringues.

- Et encore, ce n'est que le début ! déclare Anton, en se dirigeant dans le couloir, en ignorant Baptiste.

Vanessa le suit, à grande enjambée. Ils atterrissent tous dans le dressing. Baptiste reste en retrait. Sa présence est inutile mais il tient à surveiller Anton de près.

- Mon père m'a dit qu'il y avait foule devant le QG, donc il faut que tu portes quelque chose qui marque le coup.

- Ok, je te fais confiance, lance la jeune fille. Je vais prendre une douche.

- Dépêche-toi. Tu vas être en retard.

Vanessa disparaît laissant les deux garçons dans la même pièce, sans se soucier de la tension qui y règne. Anton ignore royalement Baptiste et fait mine d'être préoccupé par le choix d'une tenue pour Vanessa. Baptiste se contente de le dévisager tout en essayant de le cerner. Anton finit par rompre le silence en demandant :

- Tu comptes me reluquer encore longtemps ?

- Je ne te reluque pas.

- Explique-moi ce que tu fais, dans ce cas.

Baptiste ne répond rien et se contente d'afficher un visage encore plus fermé.

- Je me retiens de te péter la gueule.

- Cela signifie donc que je représente un danger pour toi ?

- Ça te ferait trop plaisir... Qu'est-ce que tu cherches au juste ?

- Une robe qui mettra en valeur le corps de ta petite-amie, répond doucement Anton.

La réponse de ce dernier coupe court à tout. Manifestement, Anton n'est pas disposé à lui expliquer quelles sont ses intentions envers Vanessa. Baptiste préfère quitter la pièce et retrouve Vanessa qui se sèche les cheveux. Apparemment, elle a pris les ordres d'Anton très au sérieux car elle a fait sa toilette à une vitesse folle.

- Je constate que tu as hâte de partir, s'enquit Baptiste, en parlant fort afin de couvrir le bruit du sèche-cheveux.

- Si je pouvais rester avec toi, je le ferais, garantit Vanessa.

Seulement, Baptiste a l'impression qu'il ne s'agit que des paroles en l'air, afin de le faire taire. Le bruit d'une porte qui claque vient aux oreilles du couple. Vanessa se retourne sur Baptiste, dans un silence énigmatique.

Puis, elle sort de la salle de bain pour regagner le dressing. Pas la moindre trace d'Anton. Il s'est volatilisé sans prendre la peine d'annoncer son départ. Sur un fauteuil, le jeune homme a placé en évidence une robe avec les chaussures assortis. Vanessa fait immédiatement volte-face et demande :

- Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

- Quoi ?

- Entre Anton et toi ? Vous vous êtes disputés ? Je me suis dit en prenant ma douche que je n'aurais jamais du vous laissez seuls. Visiblement, j'avais raison.

- On ne s'aime pas, c'est tout. Et je persiste à croire qu'il voudrait bien te mettre dans son lit.

Vanessa lève les yeux au ciel et change aussitôt de conversation.

- Bon, va te préparer. On sort dans un quart d'heure.

Loin de s'exécuter, Baptiste reste devant plantée Vanessa enfilant une robe pull qui lui donne un style décontracté.

- Vaness' ?

- Baptiste, dépêche-toi !

- Avant, j'ai une question à te poser.

- Alors, pose-la.

Baptiste s'approche d'elle et l'incite à le regarder dans les yeux. Il encadre son ravissant visage de ses mains fermes.

- Est-ce qu'il se passe quelque chose entre Anton et toi ?

- Il est gay.

- Tu ne réponds pas à ma question.

- Il n'y a rien et il n'y aura jamais rien entre lui et moi. Je t'en fais la promesse, déclare-t-elle, avant de déposer un chaste baiser sur sa bouche . Et maintenant, presse-toi !

Plusieurs minutes plus tard, le couple s'engouffre dans une voiture aux vitres teintées. Aucuns photographes n'attendaient la jeune fille en bas de l'immeuble mais d'après Anton, les paparazzis patientent devant l'entreprise de Patrick.

Le chauffeur ne se veut pas très loquace et leur informe simplement que le trajet ne sera pas long. Effectivement, la voiture parvient rapidement dans le quartier de Baptiste.

Ils s'apprêtent notamment à regagner la rue de son immeuble, quand soudain il distingue dans une rue étroite une jeune fille qu'il reconnaitrait entre mille. Vanessa qui regarde dans la même direction que Baptiste s'exclame alors :

- Ce ne serait pas Louise ?

- Si... murmure Baptiste, avant de demander au chauffeur de ralentir.

- Oh mon dieu ! s'écrie Vanessa. Elle parle avec...

- Léo, répond le jeune homme.

Vanessa pousse un cri de joie, tandis que la voiture s'éloigne des deux tourtereaux pris en flagrant délit.

- Alors Léo est sur Paris ! Décidément, j'ai un train de retard.

- Je me doutais qu'ils s'étaient remis ensemble car Louise a laissé échapper un lapsus il y a peu de temps qui laissait entendre qu'elle le revoyait.

- C'est merveilleux. Elle l'aime tellement ! J'espère qu'ils ont réglé leurs problèmes de couple.

Baptiste marque une pause, avant de soupirer :

- Ce n'est que le début des emmerdes... Ma mère lui avait pourtant interdit de le revoir.

- Mais pourquoi ? s'interroge Vanessa.

- Nous sommes arrivés, informe le chauffeur, en déposant les deux jeunes gens devant l'immeuble de Baptiste.

- Laisse-moi cinq minutes, le temps de me débarrasser de ce smoking et je reviens.

Vanessa hoche la tête, en souriant. Baptiste sort donc du véhicule, ses pensées tournées sur les agissements de Louise. Cette dernière va souffrir ; il en est convaincu. C'est malheureux mais elle n'écoute jamais les conseils que lui prodigue leur mère.

Si seulement, elle l'avait écouté, si seulement Louise avait rompu définitivement tout contact avec Léo, elle se serait épargnée d'une douleur future dont elle ne se relèvera sans doute pas. Baptiste s'inquiète pour elle.

Louise ne mérite pas de replonger dans la maladie, même s'il elle n'en souffre pas directement... Leur déménagement était signe d'un nouveau départ et non d'un retour en arrière. Léo est un égoïste. S'il aimait vraiment Louise, il ne serait jamais réapparu dans sa vie.

Baptiste pénètre dans son appartement vide, se change en vitesse et en ressort illico. Il rumine inlassablement sur l'avenir fragile que va devoir affronter sa sœur. L'ascenseur le dépose en un rien de temps dans le hall de son immeuble.

Rapidement, il pousse la porte massive qui le sépare du monde extérieur. Baptiste réalise que cette journée commence vraiment mal, lorsqu'il surprend Vanessa en grande conversation avec Fanny.

Fanny, cette serveuse avec qui il flirte gentiment et dont il a tut l'existence à Vanessa. Le jeune homme est pris de palpitations. De quoi les deux jeunes filles peuvent-elles bien parler ? Baptiste les rejoint sans plus attendre.

Fanny affiche un sourire éclatant en apercevant le jeune homme. Baptiste lui fait timidement la bise, gardant un œil sur la réaction de Vanessa. Cette dernière semble sereine et appréhende cette amitié avec bienveillance.

- Les présentations sont faites, constate Baptiste, en posant un bras autour des épaules de Vanessa.

Fanny remarque son geste anodin en soit mais qui témoigne bien du message que veut renvoyer Baptiste. En clair, il est en couple avec Vanessa et elle n'a pas intérêt à tout gâcher en racontant des inepties sur son comportement.

- Oui, se contente de réponde Fanny. Je voulais faire la connaissance de Vanessa ! Depuis le temps que tu m'en parles.

Vanessa relève la tête et plonge son regard dans celui de Baptiste. Elle attend quelque chose de sa part. Il saute sur l'occasion et tente de s'expliquer.

- Fanny est... c'est...

- Une pote, reprend Fanny. Je suis juste une pote à qui Baptiste parle quand il vient boire un verre, au bar.

- Au bar ? relève Vanessa.

- Je travaille dans la brasserie à deux pas d'ici, dit-elle. Baptiste et Côme y passent pas mal de temps.

Vanessa acquiesce, sans laisser apparaître la moindre trace de contrariété. Baptiste est terriblement gêné et ça l'énerve de ressentir un tel malaise. Il ne devrait pas se sentir embarrassé puisqu'il n'éprouve rien pour Fanny !

- Je ne voudrais pas me montrer impoli, commence Vanessa. Mais...

- Mais on doit écourter cette discussion, poursuit Baptiste, en ouvrant la portière. On est pressé.

Vanessa se glisse dans la voiture, en saluant Fanny d'un mouvement de tête.

- On se voit ce soir ? demande Fanny, en souriant.

- Non, j'ai des choses à faire, dit-il, en entrant dans la voiture. A bientôt peut-être.

Baptiste fait signe au chauffeur de démarrer. Plus la voiture s'éloigne de Fanny, plus Baptiste sent son rythme cardiaque revenir à la normale. Vanessa ne semble pas remarquer le stress dont Baptiste peine peu à peu à se débarrasser.

Elle n'évoque même pas cette rencontre avec Fanny, chose qui inquiète Baptiste. Pourquoi Vanessa ne se montre-t-elle pas un tant soit peu jalouse ? Dans le cas contraire, Baptiste aurait littéralement piqué une crise.

A l'inverse, Vanessa est rivée sur son téléphone qui ne cesse de biper. On doit sans doute lui reprocher d'être en retard à cette fameuse réunion. Très interloqué par cette rencontre, Baptiste ne remarque pas en premier lieu que la voiture s'est arrêtée devant son école.

- Comment as-tu fait connaissance avec Fanny ? s'interroge Baptiste.

- Je suis sortie en pensant t'acheter une viennoiserie dans la boulangerie de ton quartier et elle m'a interpellée, explique gentiment Vanessa.

- C'est tout ?

- Oui. Elle m'a parlé du concours et de ma victoire. Ensuite, tu es arrivé.

Baptiste soupire discrètement. Plus de peur que de mal : Fanny ne souhaite pas briser son couple.

- Elle a l'air gentille, souligne Vanessa.

- Tu trouves tout le monde gentil, affirme Baptiste.

- A t'entendre, on croirait que c'est mal...

Baptiste hausse les épaules.

- Quand est-ce qu'on se revoit ?

- Aucune idée, dévoile-t-elle. Je t'enverrai mon emploi du temps dès que possible.

- Autrement dit, je vais devoir prendre rendez-vous pour avoir l'honneur de te voir ? s'insurge Baptiste.

Vanessa pointe son index devant le visage de Baptiste pour répondre au téléphone. Elle discute avec Patrick, évidemment. Les Müller ont eu telle emprise sur Vanessa qu'elle en vient à placer Baptiste au second plan.

Finalement, le jeune homme réalise qu'il s'est réjoui trop vite. Hier, ce n'était qu'une parenthèse durant laquelle il eut l'impression de retrouver sa petite-amie. La magie des retrouvailles le rendit aveugle, car en vérité, Vanessa ne se préoccupe guère de leur relation.

Ils ne sont plus sur la même longueur d'onde. Alors que Baptiste est prêt à tout pour elle, c'est dernière est prête à tout pour accomplir sa carrière de bimbo des temps modernes. Dépité, Baptiste sort de la voiture. Vanessa prend tout de même la peine de baisser la vitre afin de lui lancer :

- Ne t'en fais pas, je trouverai bien un créneau pour te voir.

- Tu m'en vois ravi, maugrée-t-il, en baissant la tête.

- Je t'aime. Ne l'oublie pas, lâche-t-elle, avant de reprendre sa conversation avec Patrick.

De nouveau, la voiture démarre en trombe. Baptiste observe sa petite-amie lui échapper, encore une fois. Quelque goutte pluie l'incite à regagner son école. Le jeune homme rabat sa capuche sur ses boucles brunes et fait volte-face pour entamer une journée de cours aussi longue que fatigante.

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Chapitre 25 : Posté

Baptiste et Vanessa ont dû mal à trouver un terrain d'entente. Cette situation va-t-elle les éloigner davantage ?

Se pourrait-il que Baptiste trouve refuge dans les bras de Fanny et Vanessa dans ceux d'Anton?

Quant à Louise et Léo, leur relation secrète ne l'est finalement plus... Parviendront-ils à assumer leurs sentiments devant leur famille respective ?

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Bises