CHAPITRE 7 - 1/2

Las Vegas - Deux ans auparavant

Je vais m'la faire.

Ça devait au moins faire la quinzième fois que je me faisais cette drôle de réflexion en observant de loin - et de près - la nana qui se trémoussait comme une chienne en chaleur auprès d'Isaac.

Irina.

Et que je t'embrasse sur la joue... et que je te foute mon décolleté plongeant sous le nez... et que je minaude en roulant des hanches... et que j'te la joue pub pour shampoing avec ma longue crinière blonde...

Bordel !

En plus d'être sacrément douée pour allumer, à mon grand regret, elle était aussi canon.

Troisième coupe de champagne cul sec.

Anniversaire d'Isaac ou pas, je détestai ce genre de réception. L'art et la manière de joindre l'utile à l'agréable d'après ses dires. Son business n'était jamais bien loin. Et il avait beau me répéter que ça faisait partie du jeu, qu'il n'en avait rien à faire de ce type de fille, ça n'empêchait pas une de mes nombreuses personnalités de crier haut et fort au scandale.

« Détends-toi, trésor... »

Ça aussi, il me l'avait répété un paquet de fois depuis le début de ces festivités. Mais cette phrase qui repassait en boucle dans ma tête commençait à se faire dangereusement lointaine.

Des convives aux revenus à six chiffres mais surtout, des mafieux à tire-larigot. Tout dans l'excès, le guindé et l'exubérance. Privatiser un de ses casinos, transformer l'immense parking de ce dernier en boîte de nuit à ciel ouvert, et vous obteniez la définition de «soirée simple et sans prétention» selon Isaac Barrosa.

Je portai la coupe à ma bouche.

Merde, elle est vide.

D'une démarche qui se voulut maîtrisée mais qui ne l'était absolument pas au vu de la hauteur de mes talons, je regagnai le bar pour prendre un nouveau verre et partis m'asseoir sur un des nombreux fauteuils avec pour ligne de mire : la bécoteuse compulsive. Elle était toujours collée à ses fesses comme si sa vie en dépendait. Et même s'il ne paraissait pas en avoir quelque chose à faire, question de principe, j'enrageai.

Sérieux...

À force d'enchaîner les coupes pour calmer le flot d'insultes qui me suppliaient de leur ouvrir la barrière de mes lèvres, un marteau piqueur se la donnait grave dans ma boîte crânienne.

Tant pis.

Nouvelle gorgée et nouveau coup de pression.

Mademoiselle bien gaulée se pencha davantage vers lui et chuchota quelque chose à son oreille. Catastrophe pour ma santé mentale, cet abruti sourit.

Ok, je court-circuite.

Dans une rage muette déguisée en sérénité flippante, j'enlevai un de mes escarpins et visai la cible : ma nouvelle meilleure ennemie.

Dans le mille !

Cette dernière le prit en pleine face.

Je jubilai.

Elle hurla.

Tout le monde se figea avant qu'un vent de panique ne souffle sur l'assistance et que tous accourent vers la soi-disante blessée.

Tous, sauf moi. Évidemment.

Je levai les yeux au ciel.

Fou, le talent qu'elle avait pour rallier à sa cause tous ceux qui possédaient une paire de couilles. Néanmoins, il ne fallut pas plus de quelques secondes pour que le chef de gang ne trouve l'origine de sa misérable interprétation.

Bibi.

Ni une ni deux il se précipita dans ma direction. Je me levai aussitôt. Bancale, mais debout.

—Nan mais t'es complètement malade, ma parole ! Qu'est-ce qui t'as pris ?!

Nul doute qu'il était furieux, mais je m'en foutais. Œil pour œil, dent pour dent.

La manière qu'il eut de se tenir face à moi me confirma que j'allais m'en prendre plein la tronche. En revanche, l'alcool m'ayant fait pousser des ailes, je ne me démontai pas et croisai les bras sous ma poitrine, prête à me frotter avec tout la dignité qu'il me restait aux foudres qui allaient s'abattre dans un futur très proche sur ma petite personne.

—Oh, ça va ! C'était juste une petite piqûre de rappel.

Sourcils froncés, il se saisit de mon poignet et me tira brusquement à lui. Pour la délicatesse, on pouvait repasser.

—En quelle langue il faut que j'te le dise, putain, cracha-t-il. C'est du vent, tout ça. Rien que les affaires, point barre !

Un ricanement nerveux m'échappa.

Soit il se foutait de ma capacité à raisonner, soit il était idiot. Les deux options ne m'enchantaient pas.

—Et quand elle a fourré sa langue de sorcière dans ton oreille, c'était du business, aussi ?

Il souffla d'agacement.

Au moins, maintenant, nos humeurs respectives étaient branchées sur la même fréquence.

—J'te conseille de te calmer, rétorqua-t-il, d'un ton étrangement calme.

—Vraiment ? Et sinon quoi, tu m'vires, c'est ça ?

Isaac me considéra un laps de temps beaucoup trop long pour ma patience, mesurant très certainement mon degré d'audace.

Pas de bol, je l'avais mauvaise.

Il me relâcha et passa les mains sur son visage.

J'enchaînai.

—Te fatigue pas. Reste avec elle.

Je le contournai en le bousculant d'une épaule. Je le devinai jurer dans mon dos mais peu importe. J'avais ma dose. Je filai me réfugier à l'intérieur du casino en clopinant.

Indifférentes aux personnes présentes, je me précipitai dans les différentes salles puis m'engouffrai dans les premiers toilettes trouvées avant de claquer la porte derrière moi.

J'inspirai et expirai profondément tout en faisant les cent pas pour tenter de me calmer, mais lamentable échec. L'image de l'autre cruche avec celui qui me servait de petit ami ne voulait pas quitter mon cerveau. Mais alors que j'étais déjà en train de programmer un double homicide parfaitement réussi dans mon esprit, on toqua à la porte et celle-ci s'ouvrit dans la foulée.

Oh nom de dieu, manquait plus que lui.

Bex.

Mon étonnement fut deux fois plus conséquent dans la mesure où il avait dû s'absenter pour je ne savais quelle raison, il y avait déjà deux semaines de ça. Ce qui, on allait pas se mentir, me convenait très bien.

—Quoi ? l'attaquai-je.

Mon ton agressif comparable à un chaton feulant après un brin d'herbe eut l'air de beaucoup l'amuser. Il s'adossa contre le mur avec sa désinvolture légendaire en croisant les bras et me détailla, rictus au coin des lèvres.

—Rien, se contenta-t-il de répondre.

Je plissai le regard.

—Tu peux t'arranger pour ne «rien» faire hors de mon champ de vision, dans ce cas ?

Mode défensif à son paroxysme.

Il se contenta de laisser échapper un petit rire sardonique sans bien évidemment, bouger d'un pouce.

Oh, misère...

J'arquai un sourcil.

—T'es rentré depuis quand ? demandai-je

—Hier.

—Nan, en fait la vraie question c'est plutôt : quand est-ce que tu repars ?

Nouveau ricanement de sa part.

—Pas de sitôt.

Je fermai les yeux et me pinçai l'arête du nez.

Mais qu'est-ce que j'ai bien pu faire dans une ancienne vie, pour mériter ça ?

—T'es plutôt rigolote quand t'es jalouse.

J'ouvris aussitôt mes paupières et le mitraillai du regard par la même occasion.

—Et ça te fait rire ?!

Grave, dit-il en se détachant du mur et en s'approchant.

Septique, je le regardai faire avec une pointe d'appréhension. La dernière fois que nous nous étions retrouvés seuls, tous les deux, il s'était comporté de façon très bizarre. Depuis je le fuyais comme la peste. Et même si le contexte était différent, je n'avais pas la moindre envie de réitérer l'expérience. *

Pour me redonner un peu d'aplomb, je me répétai intérieurement qu'avec un peu de chance, il avait oublié.

—Qu'est-ce que tu veux, Bex ?

Sourire mesquin aux lèvres, il continua son approche et se stoppa à quelques malheureux centimètres. Visage levé vers lui, je m'efforçai de garder une expression des plus insensibles au possible.

—T'en as pas une petite idée ? murmura-t-il

Oh merde.

Pourquoi avait-il fallut que je la ramène, encore ?

Ça se finissait toujours mal quand je l'ouvrais.

Je déglutis péniblement.

—Euh... non. Besoin d'un renseignement, peut-être ?

Ses prunelles émeraude, rieuses et qui me défiaient ouvertement étaient plongées dans les miennes. Son souffle vint effleurer ma peau.

Je devais reculer, tout de suite.

Lentement, il leva une de ses mains et vint poser ses doigts sur ma joue. Encore une fois, je restai paralysée.

—Mauvaise idée, susurrai-je, difficilement.

Sa bouche avança alors jusqu'à mon oreille. Je me figeai.

—Je me rappelle parfaitement de tout ce que je t'ai dit, la dernière fois, souffla-t-il d'une voix grave. Et je me rappelle aussi parfaitement de ta réaction.

Heure du décès : 00h12.

Même si je n'étais pas croyante, j'en étais venue à prier pour qu'un miracle survienne et mette fin à cet échange.

Et c'était exactement ce qui allait se produire.

Mais preuve une nouvelle fois de mon karma plus que merdique, ce fut par la seule personne qui n'aurait jamais dû assister à cette conversation.

—Et j'peux savoir quelle a été ta réaction ?!

Deuxième décès : 00h13.

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*Voir l'OS sur mon profil : «Avec des Si»

Holà, les chatons !

Je vous poste la deuxième partie du chapitre 7 dans la journée.

À très vite ✌🏼

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