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— Où étais-tu ?
— Chez mes parents.
— OK...
Julien s'éloigne en soupirant. Il sait que je lui mens, mais il n'a plus la force de me confronter ou de chercher des explications.
Dans la salle de bains, je fourre mes affaires mouillées dans la machine à laver, puis me déshabille pour entrer dans la douche. Lentement, les gouttes d'eau brûlante tombent sur ma peau, courent le long de mon corps et après l'avoir arpenté, me quittent pour rejoindre les canalisations. Elles me rappellent ma terrible nuit, bien que cette pluie-là soit chaude et agréable. La buée s'accroche aux parois et m'enveloppe de son voile opaque, comme pour masquer ma nudité.
Je pense à toi.
Tes yeux, ta bouche, ton visage. Ta voix. Ton corps. Ton être tout entier me manque. Mon esprit semble avoir gardé en mémoire chacun de nos moments passés ensemble, chacune de nos étreintes. Ces mots d'amour qu'on s'est murmuré à l'oreille, ces paroles cruelles que l'on s'est jeté à la figure. Nos corps à corps passionnés, nos coups bas. Notre amour. Notre amour toujours plus fort que la haine.
Quittant la touffeur de la douche, je m'enveloppe dans une serviette puis m'assois sur le sol. Me saisissant de mon téléphone abandonné sur le tapis de bain, je recherche le message vocal conservé dans mes médias depuis des mois.
Nouveau message. Reçu le samedi dix-huit août à quinze heures vingt-quatre.
— Jade, c'est moi, c'est Alex... Je sais que tu n'as pas envie de me parler, mais on ne va pas se séparer à cause d'une dispute. Pas nous. C'est pas la première fois que ça nous arrive. On peut le surmonter, on l'a déjà fait.
«Je sais que je ne te le dis pas assez mais...
Je t'aime, Jade...
Je t'aime au point que c'en est douloureux.
C'est comme une plaie qui refuse de guérir.
« Tu sais,accepter de t'aimer, ça a aussi été accepter de prendre un risque. Comme on se lance un défi. Se glisser en moto entre deux camions roulant côte-à-côte à pleine vitesse sur l'autoroute. Poser le pied sur la surface d'un lac gelé, entendre la glace craquer, mais choisir de le traverser quand même.
Etre prêt à avoir mal quand on a peur de souffrir...
« On ne peut pas rester comme ça, Jade, il faut qu'on parle.
«Rejoins-moi sur la petite plage. Je t'attends.
J'ignore combien de fois j'ai écouté ce message, mais il me procure toujours la même émotion. Une profonde peine et un trouble intense. Je l'ai appris par cœur, je sais à chaque moment l'intonation de ta voix, quand tu vas marquer une pause parce que les mots sont durs à prononcer.
— Hey, ça va ? s'enquiert Julien à travers la porte.
La voix de mon ami venant interrompre le fil de mes pensées m'arrache un sursaut.
— Oui, merci... réponds-je en essayant d'avoir une intonation des plus normales.,
— Tu es sûre ? insiste-t-il.
— Oui Ju, promis.
— D'accord...
Le cœur lourd de culpabilité, je l'écoute disparaître dans le couloir. Il est si gentil avec moi, je ne le mérite pas. Pourquoi s'obstine-t-il à aider quelqu'un qui refuse d'aller mieux ?
Déjà trois mois.
Trois mois qui se sont écoulés depuis que tu m'as quittée.
Trois mois que j'aimerais reprendre ce que tu m'as volé.
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