chapitre - 15
Retour en cours
J'éteins mon réveil avant qu'il ne sonne en soufflant une millième fois, depuis que j'ai décidé d'aller me coucher je n'ai pas fermé l'œil.
Et pour cause, je stresse beaucoup trop, ce qui fait que j'ai eu une très longue nuit, où j'ai pu admirer tous les recoins de ma chambre, sans compter le nombre de bourrasques de vent qui m'ont fait plusieurs fois sursauter à venir frapper contre le volet, et dont je me suis mis à en compter le nombre.
Tout ça dans l'espoir de finir par m'endormir, mais en vain car j'ai passé la nuit complète à m'imaginer des scénarios envisageables, ou complètement tirés par les cheveux, de cette journée.
Le fait de ne pas savoir ce qui va se passer me paralyse, j'ai peur et je n'aime pas ça, mais je n'ai pas le choix et dans un sens plus vite c'est fait plus vite tu seras tranquille, donc c'est sur cette pensée que je me décide à sortir du lit incompétent dans lequel je suis.
Je fais le tour de mes habitudes matinales, passage à la douche, un coup de rasoir, brossage des dents, admiration de mon visage pendant quelques minutes avant de m'habiller.
Après ça je suis descendu avec mon sac de cours, j'ai rejoint la cuisine où je croise mon père qui boit son café.
Je lui dis bonjour en lui faisant la bise et m'installe à ses côtés, j'ai une mine à faire peur je le sais, mais il n'est pas obligé de me regarder avec une tête effrayée tout de même.
Bon faut dire que je suis blanc comme un cul, que j'ai les yeux rouges de fatigue et en plus je tire la gueule.
- J'imagine que tu as mal dormi ? Me dit-il un peu inquiet.
- Tu es voyant ma parole, tu devras penser à en faire ton métier, répondis-je de mauvaise humeur.
-Aujourd'hui je t'emmène en cours, j'ai rendez-vous avec ton directeur, me prévient-il en me jaugeant du regard sans faire attention à ma réplique
-Ok, répondis-je simplement.
Je pensais être assez courageux pour me défendre seul, et il vient mettre son grain de sel dans cette histoire, et sur qui ça va retomber, sur moi, et ça il doit le savoir mais il doit se dire qu'il arrivera à me protéger.
Enfin je préfère ne pas y penser, ça sera mieux pour moi et ma santé morale.
On se retrouve rapidement sur la route, je ne dis rien et lui fait de même, je me contente de regarder par la fenêtre, admirant la beauté du paysage, ces belles maisons en brique, ce ciel grisonnant qui s'apprête à passer à l'attaque des terriens en détresse, eux qui marchent vers leur destination dans le silence.
La radio de la voiture diffuse une chanson d'Adèle, je reconnais son timbre de voix si particulier, une voix forte et puissante.
Mais bon j'ai beau porter mon attention sur autre chose, je finis toujours par sentir mon stress envahir mon corps, mon ventre me fait de plus en plus mal, plus on se rapproche et moins ça va.
-ça va aller tu ne dois pas stresser, me dit mon père en plaçant sa main sur mon genou dans un geste réconfortant.
Mais comment suis-je censé ne pas stresser, faut me le dire, car je ne contrôle rien, et ce n'est pas en jouant de ma respiration que je me sens mieux.
Mon père se gare sur le parking du lycée et l'on sort pour rejoindre le bâtiment.
L'air frais me fait du bien, j'en inspire de grandes bouchées avant de suivre mon père.
Le trajet jusqu'au bureau se fait sans encombre, faut dire que l'on a croisé personne à part une femme d'entretien, il est 8h en même temps, les élèves n'arrivent pas si tôt pour venir en cours.
-Bonjour messieurs, excusez mon petit retard, ma fille ne voulait pas aller en cours et a fait du grabuge, dit-il souriant, sûrement pour détendre un peu l'atmosphère.
Il nous invite à entrer et à nous asseoir, ce qu'on fait rapidement, mon père me regarde analysant mon état, il me sourit pour que je sois plus souriant, mais je n'en fais rien.
-Alors voilà, je ne sais pas la raison de cette interaction de vendredi dernier, n'aimant pas trop croire les versions des autres élèves sans celle des personnes concernées, aucune sanction n'a été donnée pour le moment, mais il y en aura une je vous l'assure, peux-tu me donner ta version des faits, Fabien ? Nous explique le directeur.
- C'est encore confus dans ma tête, je me rappelle être arrivé dans le réfectoire, ensuite je me suis installé dans mon coin, et la minute d'après je me faisais ennuyer par une bande de mecs, ils m'ont insulté puis frappé violemment sur la table, et quand je me suis relevé et que j'ai parlé, ils m'ont assommé, dis-je difficilement en essayant de rester fort.
-Vos dires correspondent aux témoignages et aux images des vidéos surveillances, dis-moi la raison de tout ça, pourquoi sont-ils venu te chercher la misère, il doit y avoir une raison, demande-t-il en me toisant du regard.
-À vrai dire... c'est à cause d'une photo prise à mon insu lors d'une soirée, on m'a donné un gage que j'ai fait sans me soucier de ce que cela pourrait engendrer, cette photo a été affichée ce matin-là et certaines personnes ont dû la voir.
-On m'y voit embrasser un mec, mais c'était qu'un gage, rien d'autre, mais cette photo ne le dit pas, expliqué-je.
Je suis mal à l'aise face à lui et à mon père, que penseront-ils de moi à présent, puis pourquoi j'ai peur de ce qu'ils peuvent dire ou penser, je n'ai rien à cacher au contraire même.
-Je vois on a donc affaire à de l'homophobie, c'est assez grave et je suis contre ça dans mon établissement, dit-il d'un air grave.
-Quelle sera cette sanction, si je puisse me permettre, il a quand même été à l'hôpital, se questionne mon père au directeur.
-Le renvoi ne sera pas une option, car je ne pense pas que ça sera bénéfique pour les deux camps, les représailles seront certaines, je vais déjà convoquer les parents de ceux en cause et ensuite ils auront quelques jours de renvoi avec un dossier écrit à faire, un avertissement leur sera donné et à la prochaine plainte d'un élève ou d'un prof il sera renvoyé, explique monotonement le directeur.
Ça ne me rassure pas plus que ça cette histoire, bon je sais plus vraiment qui m'a fait ça, car ma mémoire est encore incomplète et je me rappelle d'aucun visage.
En même temps je ne connais personne ici, à part ceux de ma classe et de quelques autres personnes, je ne suis pas du genre à regarder ceux qui m'entourent pour passer le temps.
-Bien, je pense que ça devrait convenir, mais la prochaine fois je porte plainte, dit mon père en se levant.
Il parle encore un peu mais je ne l'écoute déjà plus, l'heure d'aller en cours approche et j'ai très peur de ce qu'il pourrait se passer.
Je rejoins la cour avec mon père avant de lui dire au revoir, il me réconforte un peu et part un brin rassuré.
Mais je ne le suis pas moi, certains me regardent déjà de travers dans la cour, je rejoins ma classe et m'installe à mon banc, je suis rejoint par le reste des élèves qui me remarquent pour la plupart pas.
La prof arrive et le cours commence calmement, la boule au ventre que j'ai depuis ce matin disparaît progressivement et je me plonge entièrement dans le cours.
-Eh tu as vu, le PD est là, dit un mec à son voisin, sans aucune discrétion.
La moitié de la classe qui l'a entendu se retourne vers lui puis leurs regards dérivent sur moi.
Je commence à stresser quand la prof intervient.
-Bon Sacha, tu peux répéter ce que tu as dit, demande la prof sur un ton sévère et calme.
-Bah j'ai dit que le PD est de retour.
-Ah oui et peux-tu me dire la définition de ça.
-Qu'il aime sucer des bites madame.
-Ah oui tu crois ça, qui pense comme lui ici, demande-t-elle alors que plusieurs mains se lèvent.
Elle regarde la classe et un sourire mauvais se dessine sur son visage, elle fait peur quand même.
-Bien vous aurez donc tous un devoir à remettre là-dessus, sur la véritable définition de ce terme, quant à toi Sacha tu peux prendre la porte, je ne veux pas d'homophobe dans ma classe.
-Quoi mais je n'ai rien dit de mal madame, je n'ai rien contre lui, j'ai juste dit qu'il était de retour.
-Donc cela ne te dérangerait pas de finir ton année assis à côté de lui en cours et ce dans chacun des cours que tu auras, dit-elle alors qu'il la regarde les yeux grands ouverts.
-Bah... hee je vais prendre la porte madame.
Certains viennent à rire et la prof leur lance un regard noir.
Elle nous explique ensuite qu'elle sera intransigeante là-dessus, la moindre remarque déplacée sur ce sujet envers un autre élève sera mal perçue.
Je suis soulagé, les profs ont dû recevoir un topo de la situation et me soutiennent.
La journée a été vraiment surprenante, j'ai reçu aucune autre remarque de ce genre et on ne m'a pas embêté ou posé de questions, tout le monde évite mon regard et moi-même, mais je préfère ça.
Je peux enfin me détendre et ne plus stresser comme un malade, mais bon je sais déjà que ça ne va pas durer, qu'ils trouveront sûrement un moyen de m'insulter.
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