Nuit

Finalement, Drago n'avait pas eu le courage de se rendre dans son dortoir. Il ne se voyait pas affronter le regard curieux de ses camarades, même s'ils ne poseraient aucune question. Il se sentait étouffer, et il préférait encore passer la nuit dans les toilettes hantées par Mimi Geignarde, au risque de se réveiller au milieu d'une inondation, plutôt que de retourner dans les cachots.


Potter n'avait pas eu l'air décidé à le laisser, et à l'approche de l'heure du couvre feu, il l'avait convaincu de le suivre avec un sourire malicieux. Drago s'était laissé faire, sans la moindre résistance ni protestation.
Ou plus exactement, s'il devait se montrer honnête avec lui même, il avait été soulagé de ne pas rester seul. Il s'était même obligé à masquer son enthousiasme lorsqu'ils s'étaient glissés dans les couloirs le plus silencieusement possibe.

Le seul endroit de Poudlard où ils ne pouvaient pas être surpris était bien évidemment la salle sur demande. Cette fois pourtant, la porte ne s'ouvrit pas sur la pièce que Drago connaissait, encombrée d'objets perdus, mais sur une vaste salle déserte.

Voyant son froncement de sourcils, Potter eut un gloussement ravi.
- Tu ne connaissais pas cette version, pas vrai ?
Drago secoua la tête et entra sans la moindre hésitation, suivi du Gryffondor.
L'avantage des toilettes du troisième étage était qu'ils se trouvaient en terrain connu. Ils avaient leurs habitudes, à force de s'y retrouver. Ici, c'était nouveau, et ils s'observaient du coin de l'œil, sans savoir comment se comporter.

Le blond aurait imaginé que le Gryffondor montrerait son courage habituel, mais Potter semblait soudain étrangement timide, les pommettes légèrement rosies, indécis, regardant autour de lui.

Drago sortit une plume de sa poche et plissa les paupières avant de se décider et de la métamorphoser en un grand coussin moelleux. Puis, souriant comme un gosse, il se laissa tomber dessus, et fit signe à Potter de le rejoindre.
- Allez viens, ça sera plus confortable que le sol nu.

Le Gryffondor s'approcha et s'assit, silencieux, observant Drago avec soin. Si le coussin était grand, il n'était pas non plus suffisant pour deux adolescents aussi grands qu'eux, et ils devaient êtres collés l'un à l'autre. Voyant que Potter glissait vers le sol, il le tira  brusquement vers lui jusqu'à ce qu'ils soient presque assis l'un sur l'autre.

Drago s'amusa de voir le teint de Potter se colorer un peu plus, comme s'il était gêné. Et puis, la réalité le frappa avec la force d'un cognard. Cet idiot de Gryffondor était réellement gêné, et visiblement ce n'était pas parce qu'il était dégoûté d'être si proche de lui.
Cette réalisation fit accélérer son rythme cardiaque, et Drago regarda différemment Potter, comme pour percer le secret de ses pensées.

Les yeux verts se tournèrent vers lui, Potter étant visiblement inquiet de son silence soudain et de son manque de réactions. Drago déglutit et fixa le brun, fasciné. Ce fichu Gryffondor s'était infiltré dans chaque cellule de son être, insidieusement, jusqu'à occuper ses pensées en permanence. Il avait l'impression que tout ce qu'il faisait tournait autour de Potter. Quoi qu'il se produise dans sa vie, il se retrouvait toujours face aux yeux bien trop verts.
Comme hypnotisé, il leva la main et la posa sur la joue du jeune homme, sans dire un mot. Son camarade déglutit nerveusement et se passa la langue sur les lèvres, sous l'œil fasciné de Drago, avant de chuchoter.
- Malefoy ? Qu'est-ce-que tu fais ?

Le Serpentard cligna des yeux, et eut un léger sourire en coin. Son ton était terriblement sérieux lorsqu'il chuchota.
- Quoi que je fasse, Potter, tu es toujours là. Toujours sur mon chemin, toi et ta tignasse indomptable, toi et tes foutus yeux trop verts.

Potter émit un son étranglé, mais il ne chercha pas à s'éloigner ou à repousser le blond. Bien au contraire, il le regardait avec fascination, comme hypnotisé par le regard mercure qui le fixait intensément.
Drago continua, perdu dans ses pensées.
- Je ne comprends même pas pourquoi tu veux m'aider. Tu n'as pas besoin de mon aide Potter, je sais que tu vas réussir quoi qu'il arrive. Tu parviens toujours à surmonter les obstacles, et tu restes toujours tellement... lumineux. Quoi qu'il arrive.

Le Serpentard ferma les yeux et se reprit, s'obligeant à écarter la main du visage brûlant de Potter. Mais le Gryffondor agrippa son poignet et enlaça leur doigts, caressant le dos de sa main de son pouce en un lent mouvement hypnotique et apaisant.

Ils se regardaient avec hésitation et envie, ne sachant pas quoi faire, craignant l'un et l'autre de faire le premier pas.

Ce fut l'éclair de peur dans le regard de Potter qui fit chavirer Drago. L'idée même que le Gryffondor lui fasse confiance le décida et il se pencha vers le brun, sans le quitter des yeux. Lorsque leurs visages furent presque collés, le Serpentard s'immobilisa, laissant la possibilité à son camarade de s'éloigner. De tout arrêter.
Mais le brun haletait presque, les yeux écarquillés, le vert de ses yeux assombri par l'envie, agrippé à sa main. Cependant, il n'eut pas le moindre geste de recul, et après quelques instants interminables, Drago combla la distance entre eux, et posa ses lèvres sur celles de Potter.

Ce fut juste une pression de leurs lèvres au début. Juste un contact appuyé.
Puis ils s'écartèrent, toujours en silence.

Ils avaient tous les deux une respiration rapide et les pupilles dilatées. Ils se fixèrent avec une certaine fascination, puis Potter - non Harry corrigea mentalement Drago - se passa la langue sur les lèvres une fois encore et Drago gémit, son cœur s'affolant.

Le Gryffondor eut un sourire malicieux, malgré ses joues rouges et son air un peu perdu. Pour leur second baiser, ce fut lui qui se pencha et pressa fermement ses lèvres contre celles de Drago.

Drago fut le premier à reprendre ses esprits, à sortir de l'ivresse qui l'avait saisit, et il s'écarta, stupéfait. Il ne pouvait pas dire qu'il regrettait - ce serait mentir. Mais il y avait toujours un obstacle majeur entre lui et Potter. La marque sombre sur son bras.

Il se releva maladroitement pour s'écarter du jeune homme qui le regardait, visiblement surpris de sa réaction soudaine, et il se frotta nerveusement le bras gauche, comme pour oublier à quel point il avait été bien dans l'étreinte du Gryffondor et se souvenir de ses terribles erreurs.
- Harry...
En voyant le sourire niais du brun, et son air ravi à l'entente de son prénom, Drago ferma les yeux et se reprit, repoussant ses émotions.
- Potter. On ne peut pas. C'est pas possible...

Le front du Gryffondor se plissa et un air buté que Drago connaissait bien apparut sur son visage.
- Et pour quelle raison ?
Avec un sanglot à peine réprimé, Drago remonta sa manche, arrachant au passage le bouton du poignet, et il exhiba la marque sur son bras, sombre et menaçante.

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