«Il est sympa ton beau père.»

Samedi.

Jeudi soir, j'étais rentrée sans encombre chez moi. Ni ma mère ni Chris m'avaient posé de questions suspicieuses mais je voyais dans le regard de ma chère et tendre mère qu'elle savait que je n'étais pas allée à la bibliothèque.

J'étais dans la voiture avec elle en direction d'un magasin de robes de mariée afin que j'assiste à son dernier essayage et que je donne mon avis. Elle était toute excitée alors que dans ma tête c'était encore la confusion, l'angoisse et le doute.

- Alors Avery, commença-t-elle avec une voix enjouée, raconte moi comment ça était jeudi.
- Comment ça ? fis-je l'innocente.

Je l'entendis glousser.

- Je ne suis pas née de la dernière pluie ma puce, dit-elle amusée.

Je pinçai mes lèvres et un sourire naquit sur mon visage. Je posai mes yeux sur elle et elle me sourit. Elle ne me connaissait que trop bien.

- C'était bien, répondis-je.
- Je suis certaine que bien n'est pas le mot adéquat pour ce qu'il s'est passé, rétorqua-t-elle.
- Pourquoi ? Tu en sais quelque chose ?
- Je pense que Justin et toi avez besoin de satisfaire votre libido, répondit-elle en souriant.

Je me sentis soudainement très gênée. Mes yeux s'écarquillèrent et je les détournai vers la vitre. Je ne pourrais pas échapper éternellement à cette discussion que toutes les mères et filles devaient avoir au moins une fois dans leur vie.

- Il ne te fait pas mal au moins ? continua-t-elle.
- Non, répondis-je tout bas.

Je sentais mes joues rougir. C'était déstabilisant. Moi qui pensais faire ma première fois à trente ans avec le peu de succès que j'avais auprès des garçons, je me trouvais ainsi dans une situation inattendue.

- Tu y prends du plaisir ?
- Maman ! m'exclamai-je en me tournant vers elle trouvant cette question beaucoup trop personnelle.
- D'accord ! Je me tais ! leva-t-elle les mains en l'air.

Je ris et secouai la tête avant de reposer mes yeux sur la route.

- Il se débrouille vraiment bien, avouai-je un sourire aux lèvres.

Elle rit.

- Si vous vous protégez, c'est parfait, dit-elle.
- Toujours.
- Je pense que le meilleur moment pour annoncer la nouvelle à Chris serait le jour du mariage, déclara-t-elle. Il sera tellement occupé avec la cérémonie qu'il ne réagira pas mal.
- Tu penses ? me mordis-je la lèvre inférieure.
- Oui ! Ça va passer sans souci !
- Je le prendrais à part et je lui dirais alors la vérité, dis-je.

Évidemment, ce n'était pas pour lui dire que Justin et moi étions en couple que je le prendrais à part mais pour le plan qui avait été mis en place. Mais cela, ma mère ne le savait pas.

Nous arrivâmes devant le magasin et nous nous garâmes juste devant. Ma mère s'empressa de sortir de la voiture et m'obligea alors à me dépêcher de faire de même. La façade de la boutique était blanche comme la plupart des robes qu'elle vendait et son nom était tout simplement Wedding Dress. Nous entrâmes à l'intérieur et le mouvement de la porte enclencha une petite sonnette qui signala notre arrivée. Une vendeuse sortit alors de l'arrière de la boutique pour se présenter à nous et nous renseigner.

- Bonjour ! En quoi puis-je vous aider ? commença-t-elle très souriante.
- Je suis Olivia Jenkins, je viens pour essayer une robe, répondit ma mère.
- Oh oui ! s'écria la vendeuse. Madame Jenkins ! Venez !

Elle nous emmena gentiment dans une pièce adjointe. Il y avait des robes, chacune protégée d'un plastique, disposées sur des cintres un peu partout. On pouvait trouver des robes classiques, blanches en dentelle avec une traîne ou bien des robes plus originales, rouges, noires ou encore violettes d'un style différent. Il y avait un grand miroir posé en plein milieu de la pièce et une cabine d'essayage au fond.

J'avais hâte de voir quelle robe ma mère avait choisie même si j'étais contre son mariage.

- Alors... murmura la jeune demoiselle à elle même, Madame Jenkins...

Elle cherchait, parcourant de ses doigts les robes, celle de ma mère. Puis elle s'arrêta sur l'une d'entres elles et s'exclama de joie et de soulagement l'ayant trouvée. Elle la retira de la tringle pour l'amener à ma mère qui sourit, les yeux remplis d'étoiles en la voyant.

Je me rapprochai doucement afin de la voir de plus près. Elle sortit le tissu qui paraissait très long hors de sa protection et mes yeux s'agrandirent découvrant parfaitement la merveille que ma mère avait choisie pour ce que serait, pour elle, le plus beau jour de sa vie.

Pas très différente de la robe blanche que j'avais mise lors de mon rendez vous au restaurant avec Justin, elle avait juste une plus longue et épaisse traîne et des diamants qui l'ornaient aussi. Ma mère avait vraiment du goût.

- Vite ! Mets la ! dis-je. Je veux te voir dedans !

Elle rit et s'exécuta. Je pris place sur un petit fauteuil. La vendeuse se trouvait debout à côté de moi.

- C'est la première fois qu'elle va se marier ? me demanda-t-elle.
- Deuxième, répondis-je mes yeux rivés sur le rideau gris de la cabine qui cachait ma mère. Mais la première fois par un prêtre.
- Quand est-ce qu'est le mariage ?
- La semaine prochaine.
- Tu dois être super excitée et contente pour elle !
- Oui.

Ceci était faux mais j'aurais aimé l'être. Je l'aurais été si Chris n'était pas celui qu'il était. J'attendais impatiemment que ma mère sorte vêtue de sa robe. J'étais ravie qu'elle eût pensé à moi et qu'elle n'avait pas oublié que c'était un moment qu'on devait passer ensemble. Après dix minutes interminables et l'intervention de la vendeuse pour l'aider, elle sortit enfin de la cabine.

Ma bouche s'entrouvrit. Le temps s'arrêta quelques secondes. Je la voyais marcher dans ma direction au ralenti. Elle était magnifique. Plus que magnifique ! Elle était époustouflante ! La robe lui allait parfaitement. Elle n'était ni trop longue ni trop courte. Elle reflétait sa douceur et sa bonté. Elle avait l'air d'une princesse.

- Wow, lâchai-je, tu es splendide !
- Merci ma puce !

Je sentais les larmes me monter aux yeux. J'étais émue pour une raison qui m'était confuse. Je ne pouvais pas être fière ni contente de la voir ainsi parce que je savais qu'elle avait fait le mauvais choix en épousant Chris mais en même temps elle était tellement rayonnante et elle respirait la joie de vivre que je ne pouvais pas être indifférente face à ça.

Elle croyait à l'amour à nouveau et s'imaginait un futur radieux tandis que je savais ce qui l'attendait au bout et pourtant je ne lui disais rien. Je m'en voulais de garder ça pour moi. Je ne faisais que rendre sa tristesse plus grande quand l'heure serait venue pour elle de se séparer de celui qu'elle aimait. Une culpabilité immense m'envahit soudainement et je me détestais d'être aussi secrète avec elle.

- Il faudra qu'on te trouve une robe aussi ! déclara-t-elle.

J'hochai la tête. La journée allait être dure.

...

Après une journée entière de shopping passée entre mère et fille pour la première fois depuis trop longtemps, nous rentrâmes à la maison. J'étais contente d'avoir retrouvé notre complicité, loin de Chris et de Justin pour une fois, juste elle et moi.

Nous avions acheté tout ce qu'il nous restait à avoir pour le mariage et elle ne pouvait plus attendre jusqu'à la semaine prochaine pour enfin dire oui à son futur mari.

Je me demandais de mon côté si le plan tenait toujours et s'ils n'avaient pas plutôt trouvé mieux. Je n'étais toujours pas rassurée à l'idée de me retrouver seule avec Chris pour lui convaincre de quitter ma mère.

Je retournai dans ma chambre et posai mes sacs d'achats au pied de mon lit. J'attachai mes cheveux et ôtai mes chaussures pour me mettre à l'aise quand je me rappelai que je portais avec moi le collier. La peur m'envahit. Je me mis à paniquer. Merde merde merde ! J'avais parlé de Justin avec ma mère dans la voiture et encore plus pendant que nous faisions les boutiques ! Chris allait entendre tout ce que j'avais dit ou alors il l'avait déjà entendu ! Je venais de tout foutre en l'air ! Le plan, la vie de Justin et la mienne par la même occasion !

Quand je pris mon téléphone pour le prévenir, on toqua à ma porte au même moment.

- C'est Chris !

Je me raidis et déglutis. Allait-il régler ses comptes avec moi maintenant ? Oserait-il le faire alors que ma mère se trouvait juste à côté dans sa chambre ? Je lui dis d'entrer contre mon gré et le vis apparaître un grand sourire aux lèvres.

- Ça va ? me demanda-t-il. Tout s'est bien passé avec maman ?

J'hochai la tête et il referma la porte derrière lui. Je me mordais la joue secrètement. Je le craignais. Je le regardais s'approcher de moi puis s'appuyer sur mon bureau. Il fallait que je réfléchisse à un mensonge, il fallait que j'arrive à le duper.

- Elle m'a dit que tu as trouvé ta robe, c'est cool, dit-il.
- Oui.
- Je voulais te demander si tu acceptais de m'accompagner à mon dernier essayage de costume, déclara-t-il. Comme c'est un jour important pour ta mère comme pour moi, je me disais que ça me ferait très plaisir que tu viennes avec moi et que tu donnes ton avis sur le costume que j'ai choisi.

Je fus très surprise de sa demande. Je pensais qu'il avait choisi quelqu'un d'autre à ma place.

- Oui, bien sûr, j'accepte, dis-je un sourire timide sur mes lèvres.
- Super ! s'écria-t-il. Merci Avery !

Il vint m'embrasser le front puis il quitta la chambre. Je m'écroulai sur le lit et soufflai. Il ne m'avait pas parlé de Justin. Peut être qu'il n'y avait pas de micro dans le collier. Peut être que Justin avait exagéré et qu'en réalité il n'en savait rien comme moi. Même si les attitudes de Chris vis à vis du bijou étaient suspectes, je me disais que je ne devais peut être pas m'inquiéter pour ça. Mais je resterais toujours vigilante.

...

Lundi. Je venais de terminer les cours. Je quittai le lycée. Le jour du mariage approchait à grands pas et mon angoisse s'accentuait. J'avais encore mille questions dans ma tête qui fusaient et les réponses ne se trouveraient qu'après ma part du plan faite.

- Avery ! m'interpella-t-on.

Je me tournai vers la voix et fronçai les sourcils découvrant Jake s'avancer vers moi. Quel ennui allait-il encore me causer ?

- Avery, répéta-t-il arrivant à ma hauteur.
- Qu'est-ce que tu veux ? demandai-je sèchement.
- Wow Avery, tu pourrais être plus aimable avec moi, dit-il amusé.
- Jake, je n'ai pas de temps à perdre avec toi.
- Avery ! s'exclama une autre voix qui m'était familière derrière moi.

Je me tournai en direction de cette dernière et je vis par surprise Chris arriver. Dans sa fidèle tenue de travail, les clés de voiture à la main, il me sourit. Qu'était-il en train de se passer ?

- Ça va Avery ? me demanda-t-il.
- Oui... répondis-je intriguée.

Il ne m'avait pas prévenu que l'essayage de son costume était aujourd'hui s'il était venu me chercher pour ça.

- Et toi tu es ? s'adressa-t-il à Jake.
- Euh... Un très bon ami d'Avery, répondit ce dernier hésitant. Jake.
- Ah bon ? Elle ne m'a jamais parlé de toi avant ! dit-il étonné. Content de faire ta connaissance ! Chris.

Il lui serra la main et je roulai des yeux ayant les deux personnes les plus hypocrites en face de moi.

- Ça fait longtemps que vous vous connaissez ? nous demanda Chris.
- Quelques mois, répondit Jake sans me laisser parler.
- Vous alliez peut être faire quelque chose là ?
- Non on...
- Oui, me coupa Jake. Mais ce n'est pas grave.
- On n'a qu'à aller à un fast food tous les trois ! proposa Chris. C'est moi qui invite !
- D'accord ! dit Jake enchanté.
- Non ! refusai-je catégoriquement. Je ne peux pas.
- Pourquoi ? me demanda Chris.
- J'ai beaucoup de devoirs pour demain, mentis-je.
- Tu pourras les faire plus tard ! insista-t-il.
- Non, vraiment... soufflai-je.
- Allez Avery ! On ne restera pas longtemps là bas !

Je mordis ma joue comprenant que j'allais passer un moment avec les deux personnes - hormis mon père - que je détestais le plus au monde. Pourquoi fallait-il que ça tombe toujours sur moi ?

Nous prîmes la direction du parking et je priais pour que nous ne croisions pas Justin et qu'il ne me voyait pas avec Jake. Sinon, il s'énerverait sûrement après moi.

Jake décida de prendre sa voiture et de nous suivre afin de ne pas la laisser dans le parking et dans ce cas de devoir y retourner pour la récupérer. Quant à moi, je montai dans celle de Chris, à l'avant, côté passager.

- Tu ne m'avais jamais parlé de Jake avant, dit-il en démarrant.
- Tu sais, on est juste amis.
- Juste amis ? Tu es sûre ? insista-t-il d'un air amusé. Je parie que c'est lui que tu es allée voir jeudi soir !
- Oh...
- Ne t'inquiète pas, je ne dirai rien à ta mère, dit-il avant de me faire un clin d'œil.

Ma mère qui cachait ma relation avec Justin à Chris et Chris qui cachait ma pseudo relation avec Jake à ma mère étaient très ironiques. C'était très mal parti pour la confiance entre eux.

- Tu l'aimes bien ? m'interrogea-t-il.

Je grimaçai. L'aimer bien n'était pas du tout le terme adéquat.

- Ouais, mentis-je.
- Il a l'air sympa.
- C'est le cas de le dire, dis-je avec sarcasme.
- Il s'est déjà passé quelque chose entre vous ?

Je posai mes yeux sur lui étonnée qu'il osait me demander ça. Il prenait son rôle de futur beau père très au sérieux.

- Non, rien, répondis-je. Il n'est juste qu'un ami.
- Je vois, sourit-il en coin.

Il ne semblait pas me croire mais je n'allais pas m'attarder sur le sujet. De toute façon, c'était bien la vérité, il n'y avait rien entre Jake et moi. Si ce n'était de la haine. Oui. J'avais toujours de la haine envers lui.

Nous arrivâmes au fast food le plus près. Jake gara sa voiture juste à côté de celle de Chris et nous entrâmes ensemble dans l'établissement. Il n'y avait pas beaucoup de monde. Tant mieux, je ne voulais pas que des bruits courent que Jake et moi s'étions réconciliés ou quelque chose du genre.

Après avoir pris notre commande sur différents plateaux, nous prîmes place à une table à quatre. Jake s'assit en face de Chris et moi. J'avais envie de le trancher en deux mais heureusement pour lui que nous étions dans un fast food ce qui voulait dire pas de couteau à ma disposition pour mettre fin à ses jours.

Je gardais un regard noir sur lui tandis qu'il affichait un sourire moqueur sur ses lèvres. Pourquoi faisait-il ça ? N'en avait-il pas déjà eu assez ?

- Vous êtes dans la même classe ? nous questionna Chris.
- Non, répondis-je sèchement.
- Alors comment vous êtes vous connus ?
- On prenait le train ensemble il y a un certain temps, répondit Jake.
- Et tu es en quelle classe Jake ?
- En terminale comme Avery.

Je commençai à manger mes frites sans les attendre. Je voulais en finir au plus vite avec eux.

- Tu es un bon élève ? continua Chris.
- Ça va, je me débrouille bien.
- C'est bien, Avery ne doit avoir que de bonnes fréquentations.
- Ne vous inquiétez pas monsieur, je ne me permettrais jamais de pousser votre fille à faire quelque chose de mal.
- Ce n'est pas mon père, intervins-je méchamment.

Jake me regarda confus et Chris se racla la gorge quelque peu mal à l'aise. Je ne voulais pas qu'on dise que Chris était mon père même si le "père" que j'avais eu avant lui n'était pas mieux.

- Je ne suis que le fiancé de sa mère, expliqua-t-il à Jake.
- Ah... d'accord... lâcha ce dernier ne savant pas quoi dire d'autre. Oui, j'avais oublié. Elle me l'avait dit.

Je roulai des yeux et entamai mon hamburger.

- Mais sa mère et moi allons nous marier samedi, précisa Chris.
- Ah oui ? Félicitations !
- Merci Jake.
- Je suis sûr que vous serez un meilleur père pour Avery que l'était son père biologique.

Je mordis violemment dans mon hamburger pour contenir ma colère. Je détestais savoir que Jake savait beaucoup trop de choses sur moi comme le fait que mon père avait refait sa vie avec une autre femme nous laissant ma mère et moi seules. Pourquoi m'étais-je dévoilée autant à lui ?

- C'est gentil, merci, lui remercia Chris flatté, j'espère que je le serai.

Je gardais mes yeux baissés sur mon plateau et les écoutais échanger des stupidités. Je priais pour que quelqu'un interrompe ce moment horrible où je ne me sentais pas à ma place.

- Je pense qu'Avery est très contente de vous avoir, renchérit Jake.

Le fait qu'il faisait semblant de s'intéresser à ma vie me faisait sortir de mes gongs. Si je pouvais dire ce qu'il avait été capable de me faire devant tout le lycée à Chris, je le ferais mais c'était beaucoup trop humiliant pour en discuter.

- Elle me parlait souvent de sa tristesse de voir sa mère seule et maintenant elle est très contente que vous soyez là, poursuivit-il.

Il me lança un regard moqueur et je serrais les dents. À quoi jouait-il ? À quoi cela lui servait-il d'inventer des choses pareilles ? Pourquoi ne pouvait-il pas rester en dehors de choses qui ne le regardaient pas ?

- Ah bon ? se tourna Chris vers moi. Pourquoi tu n'es pas venue me le dire ? Ça m'aurait fait très plaisir.
- Je... Je n'osais pas, bégayai-je.

Il rendait la situation encore plus insoutenable. Je ne savais plus où me mettre.

- Tu devrais commencer à te sentir à l'aise avec moi Avery, on va devoir vivre ensemble, déclara-t-il.
- Oui je sais mais ce n'est pas facile.
- Elle est de nature timide, dit Jake. C'est normal.

Mais de quoi se mêlait-il ? J'attrapai ma boisson et en bus le quart d'une traite à l'aide d'une paille. Le gaz me piqua les yeux.

Jake et Chris continuaient de discuter, dérivant le sujet sur le football pendant que je restais silencieuse. Ils riaient et il n'y avait pas de gêne entre eux comme s'ils se connaissaient depuis longtemps. Cela m'irritait terriblement. Je pensais à Justin et je me demandais comment cela aurait été si Chris et lui s'entendaient aussi bien.

- Je vais vous laisser, annonça Chris après avoir terminé sa boisson. Comme ça vous pourrez discuter ensemble.

Il se leva et je le regardai paniquée.

- Je viens avec toi ! dis-je ne voulant pas me retrouver seule avec Jake.
- Non, tu peux rester encore un peu avec Jake. Il pourra te raccompagner à la maison, n'est ce pas Jake ?
- Oui bien sûr ! affirma ce dernier.
- Je dois faire mes devoirs ! rétorquai-je en me levant.
- Avery... souffla Chris. Si tu pouvais oublier tes devoirs au moins une fois... Ce n'est pas dramatique si tu n'as pas le temps de les faire. Je prendrais toutes les responsabilités.

Il me fit rasseoir me clouant le bec. J'entendis Jake émettre un petit rire.

- À bientôt Jake, j'étais très ravi de te rencontrer, lui serra-t-il la main.
- C'est réciproque ! sourit Jake.
- À tout à l'heure Avery.
- Ouais, dis-je contrariée.

Il nous laissa seuls au plus grand bonheur de Jake et à mon plus grand malheur.

- Il est sympa ton beau père, dit-il.
- Ce n'est pas mon beau père, rétorquai-je toujours aussi sèchement.

Je me levai et pris mon sac pour le mettre sur mon dos. Ce n'était pas parce que Chris m'avait dit de rester que j'allais le faire. J'étais encore en droit de décider toute seule de ce que je voulais faire.

- Où tu vas ? me demanda Jake.
- Je rentre chez moi.
- Attends, pas maintenant.
- Pourquoi ? T'as peut être une autre idée stupide pour te moquer de moi, crachai-je.
- Assis toi s'il te plaît, me demanda-t-il calmement. Il faut que je te parle.

Ça avait l'air sérieux vu le ton de sa voix et je décidai alors de me rasseoir, ôtant mon sac du dos.

- Je t'écoute.

Il se gratta la tête avant de commencer.

- Je sais qu'on ne s'est pas quitté en bon terme et je m'en veux d'avoir fait ce que je t'ai fait, déclara-t-il. J'ai abusé de ta naïveté et je n'aurais pas du.

Je ne le croyais pas. Il n'était pas sincère. Pourquoi s'en voudrait-il soudainement ? Une part d'empathie aurait pris vie en lui subitement ? Ce n'était qu'un mensonge pour avoir quelque chose de ma part en retour et j'allais découvrir quoi.

- Tu me pardonnes ?
- Qu'est ce que tu veux Jake ?
- Rien !
- Tu espères que je te laisserai la conscience tranquille en te disant que ce n'est pas grave et que je te pardonne ? Tu peux rêver !
- Avery, c'était une connerie, je n'ai pas réfléchi. Je voulais juste m'amuser avec mes potes au départ, je ne pensais pas que tu allais autant le prendre mal, se défendit-il.
- Tu pensais mal, dis-je.
- Est-ce qu'un jour tu me pardonneras ?
- Pourquoi tu veux que je te pardonne ?

Était-ce encore un pari pour savoir si j'étais encore assez naïve pour accepter ses excuses ou non ?

- Parce que je t'aime bien Avery, fit-il un rictus.
- Arrête de te moquer de moi.
- Je ne me moque pas de toi.

Je fixais ses yeux noisettes qui étaient loin d'être aussi beaux que ceux de Justin. Ils ne laissaient rien transparaître. Mais peu importe, je n'en avais rien à faire de lui et de ses excuses. Il pouvait garder ses mensonges pour quelqu'un d'autre.

Soudainement, ses yeux dérivèrent vers sa droite et son visage se ferma. Il contracta sa mâchoire et le temps de me retourner pour voir qui l'avait mis dans cet état, Justin se planta devant notre table les mains dans les poches.

Je glissai mes yeux vers le haut jusqu'à voir son visage et il semblait très en colère. Il fixait Jake d'un regard menaçant et je ne pus m'empêcher de sourire comprenant qu'il allait le faire déguerpir très rapidement d'ici.

Justin n'eut pas besoin de dire un mot et Jake se leva, très gêné, de la table et partit sans adresser une dernière parole. C'était incroyable comment il pouvait avoir peur de lui. Ça en devenait amusant.

Justin prit alors sa place et glissa le plateau sur le bord de la table furieusement. Puis il me demanda d'un signe d'ôter le collier et je m'exécutai même si je ne pensais plus qu'il possédait un micro.

- Tu m'expliques ? lâcha-t-il sèchement en plantant ses yeux dans les miens.
- Tu dois savoir puisque tu nous as suivi jusqu'ici.
- Qu'est ce qu'il te voulait ?
- Que je lui pardonne, répondis-je.
- Putain... jura-t-il. Il veut que je le défigure une nouvelle fois ?
- C'est bon, laisse le, il n'en vaut pas la peine.
- Ça m'énerve de savoir qu'il essaye encore de te tourner autour.

Je ne dis rien et terminai ma boisson. Je pouvais comprendre que cela lui déplaisait mais il devait savoir que je n'aimais pas qu'il tourne autour de moi non plus.

- Et Chris, il pense que c'est ton copain ? continua-t-il.
- Je crois.

Il feignit un rire amusé.

- Tant mieux, il pensera encore moins qu'on se voit toujours, dit-il.
- Sauf que je n'ai pas envie qu'il se mette à l'inviter chez moi, rétorquai-je.
- Pourquoi il le ferait ?
- Parce qu'il l'aime bien. Ils n'ont pas arrêté de parler et ils se sont très bien entendus.

Il contracta sa mâchoire et baissa les yeux quelques secondes avant de les reposer sur moi.

- De toute façon, Chris ne fera plus partie de ta vie samedi, dit-il.
- J'espère.
- Tu es toujours partante pour le plan ?
- Oui je crois mais j'ai peur Justin. J'ai peur que ça ne se passe pas comme prévu.
- Il y a un risque mais il ne faut pas que t'y penses.
- Comment veux-tu que je n'y pense pas ? On risque notre vie là dedans !
- Plus t'y penses, plus tu vas mal t'y prendre face à Chris, me fit-il la remarque.

Comme si ce qu'il me disait me rassurerait... Je ne pouvais pas devenir en quelques jours une personne que je n'avais jamais été. Être convaincante, menaçante, presque méchante, c'était impossible.

- J'ai accompagné ma mère à son dernier essayage de la robe de mariée, changeai-je presque de sujet. On a parlé de toi mais j'avais le collier sur moi, avouai-je.
- Tu te fous de moi Avery ?
- Non mais Chris ne m'a rien dit à propos de ça, le rassurai-je. Je ne pense pas qu'il y ait réellement un micro à l'intérieur.
- Ça ne veut rien dire. Peut être qu'il prépare un coup de son côté lui aussi.

Il souffla et frotta son visage de ses mains. Je déglutis. J'aurais du faire plus attention.

- Est-ce que j'ai foutu le plan en l'air ? grimaçai-je.
- Non, on s'en tient à ce qu'on a dit, répondit-il en retirant ses mains de son visage. Il n'a peut être rien entendu. Mais je te demande de faire plus attention la prochaine fois.

J'hochai la tête. Je m'en voulais d'être aussi tête en l'air. Je ne facilitais vraiment pas la tâche pour Justin et ses amis.

- Tu as trouvé une robe pour samedi ? me demanda-t-il.
- Oui. Pourquoi ?
- J'espère que tu m'impressionneras avec, sourit-il en coin.
- Je te rappelle qu'on devra faire comme si on se revoyait pour la première fois depuis longtemps.
- Ça ne veut pas dire qu'après on ne pourra pas se cacher dans une chambre et passer du bon temps, rétorqua-t-il du même ton.

Je pinçai mes lèvres et secouai la tête. Il rit. Il arrivait encore à penser à une chose pareille alors qu'on n'allait peut être pas sortir victorieux de notre plan.

- Tu ne peux vraiment pas arrêter de penser à ça, dis-je.
- Je reste un mec Avy, sourit-il.

J'ébauchai un sourire.

- Peu importe ce qu'il se passera après, tu n'oublieras pas que tu as été la première Avery.