Vos intentions !
De la même manière dont elle avait dompté son chakra, Sakura avait traversé l'entraînement ninja en quête d'une discipline émotionnelle inébranlable. Cette épreuve se dressait comme l'une des plus redoutables, car l'être humain, par nature, était l'esclave de ses émotions, qu'elles soient bienveillantes ou hostiles. Peu d'individus parvenaient à rompre complètement avec cette emprise, à se transformer en de simples instruments dénués de toute passion. Une réalité que Sakura, ayant observé de près et expérimenté maintes fois, connaissait trop bien : les émotions constituaient le destin inéluctable de l'humanité. La haine pouvait conduire au meurtre, tout comme la compassion pouvait retenir la main prête à frapper.
Son maître lui avait inculqué que, même si l'éradication totale des émotions restait hors de portée, leur gestion demeurait réalisable. Pour atteindre cet objectif, la méditation se révélait être un outil inestimable, dévoilant également le chakra intérieur des shinobi. Toutefois, rares étaient ceux qui maîtrisaient cet art pour parvenir à une harmonie totale avec leur chakra. Et c'est précisément cette quête ardente que Sakura poursuivait avec détermination depuis un mois.
Se tenant en équilibre au bord du promontoire de son jardin, les mains de Sakura reposaient avec une délicatesse infinie sur son abdomen, paumes tournées vers le ciel.
Son attention était entièrement captivée par son chakra, cherchant à le percevoir en elle-même, à le ressentir parcourant chaque fibre, à traverser chaque Tenketsu. En un mois, elle avait réussi à découvrir comment s'harmoniser avec son chakra, une harmonie qui lui permettait d'économiser cette énergie vitale. Pourtant, cette réalisation ne comblait pas entièrement la jeune femme. Elle désirait percer le mystère qui entourait la composition du chakra : cette fusion entre l'énergie physique et l'énergie spirituelle. Elle savait que ce pouvoir émanait de l'union de ces deux forces, mais l'endroit précis où elles fusionnaient pour créer le chakra demeurait insaisissable. Où se rejoignaient-elles pour donner naissance à cette essence mystique ?
C'était exactement ce que Sakura cherchait depuis près d'une heure, sans se douter qu'elle était observée depuis un moment par Madara, adossé dans l'ombre de son lit. Comme à son habitude, chaque matin, il observait Sakura ouvrir grand les portes-fenêtres, dévoilant une vue imprenable sur le jardin et la vallée.
Madara contemplait cette jeune femme qui lui tournait le dos avec une certaine perplexité. Elle avait accompli tant de choses pour lui, allant jusqu'à lui sauver la vie, une dette qui ne pouvait être ignorée. Dans l'univers impitoyable des shinobi, peu pouvaient se vanter d'avoir Madara dans leur dette. C'est pourquoi, au cours des derniers jours, l'homme avait maintenu le silence. C'était sa façon de la remercier, mais aussi une stratégie pour l'observer et déterminer sa véritable nature.
Il suivait silencieusement et attentivement la routine qu'elle avait établie pour ses soins. À chaque séance, Sakura posait délicatement ses mains sur son torse, laissant son chakra pénétrer en lui, une sensation douce, agréable, réconfortante. Ensuite, elle inspectait ses organes vitaux et scrutait l'état de ses sceaux pour s'assurer que tout était en ordre.
Invariablement, elle lui posait les mêmes questions pendant ces inspections : ressentait-il une gêne ? Une douleur ? Ou une démangeaison ? Une fois la routine terminée, elle se retirait dans ce qui semblait être une cuisine pour revenir avec un plateau de nourriture. Jusqu'à présent, il n'avait droit qu'à un unique bol de soupe et de riz, loin de satisfaire sa faim. L'envie de réclamer davantage le titillait, mais sa bouche demeurait obstinément close hormis pour répondre à ses questions, peut-être parce qu'il reconnaissait que cette femme maîtrisait son art. Une fois son repas achevé, elle l'incitait au sommeil, prétendant que son corps nécessitait un repos abondant, dénué de tout stress.
Était-ce là un Genjutsu qu'elle lui imposait, le plongeant ainsi dans le sommeil ? Ou bien s'agissait-il d'un effet de son Kekkei Genkai ? Pour Madara, le chakra vert qu'elle maîtrisait ne pouvait être que le fruit d'un Kekkei Genkai d'une rareté, voire d'une singularité exceptionnelle. Il n'avait jamais croisé pareil prodige au cours de son existence, et elle maniait cette énergie avec une dextérité comparable à la sienne dans l'art du Ninjutsu.
Ainsi, plongé une fois de plus dans ses pensées, Madara observait silencieusement sa sauveuse à travers les fenêtres de la demeure.
Que signifiait désormais sa vie ? Paralysé, à moitié aveugle, il dépendait d'une femme pour survivre. La honte qui l'envahissait en cet instant le submergeait d'une colère sourde. Il se sentait misérable d'avoir échoué dans sa quête de paix, d'avoir été impuissant face au destin funeste de son clan, de n'être finalement... rien du tout !
Madara était tellement plongé dans ses remords qu'il sursauta légèrement au son de la voix de Sakura, émanant à proximité de lui.
— Bonjour, Uchiha-san. Avez-vous bien dormi ? interrogea poliment Sakura en déposant le grand coussin sur lequel elle était assise. Madara acquiesça alors que Sakura déposa délicatement ses mains sur les zones fraîchement opérées. "Ressentez-vous une douleur au niveau du torse ?"
— Seulement lorsque je prends une grande respiration.
— Il faudra du temps avant de pouvoir respirer pleinement à nouveau, expliqua Sakura avant de prendre une paire de ciseaux pour délicatement couper les bandages autour de son corps.
— Il faudra du temps avant de pouvoir respirer pleinement à nouveau, expliqua Sakura avant de prendre une paire de ciseaux pour couper les bandages autour de son corps.
— D'où tirez-vous ces compétences ? interrogea Madara, Sakura levant son regard pour plonger dans les yeux de son patient. Elle nota qu'aucune animosité ne s'y trouvait, seulement de la curiosité.
— La plupart de mes compétences, je les ai développées en autodidacte, révéla Sakura tout en retirant les bandages souillés de sang. Grâce à son Iryô Ninjutsu, les cicatrices superficielles avaient entièrement disparu. Cependant, les trois opérations qu'elle avait réalisées laissaient des traces indélébiles. Les cicatrices étaient encore d'un rouge rosé, mais semblaient bien refermées.
— Vous avez appris cela... seule ? répéta Madara, exprimant un scepticisme léger.
Il ne décelait aucune trace de mensonge dans le regard de Sakura, mais il nourrissait tout de même d'énormes doutes quant à la véracité de ses dires.
— Je vais vous redresser lentement. Si vous ressentez la moindre douleur au niveau de votre ventre, dites-le-moi immédiatement, ordonna Sakura avant de s'atteler à la tâche. Son bras gauche se glissa derrière l'Uchiha, tandis que ses yeux scrutaient alternativement son ventre et les expressions de Madara.
— Stop ! s'exclama Madara avec difficulté une fois presque en position assise. Sakura le ramena légèrement en arrière.
— Est-ce une douleur diffuse ou une douleur aiguë au niveau de la cicatrice ?
— C'était une douleur aiguë, comme si on me plantait une lame dans le ventre, répondit le brun, habitué en tant que Shinobi à la sensation d'une arme pénétrant la chair, surtout après son affrontement contre Hashirama Senju.
— Parfait ! La cicatrisation se déroule mieux que prévu.
Sakura poursuivait son Iryô Ninjutsu, sans se soucier de leur proximité. Alors que leurs visages étaient à seulement vingt centimètres l'un de l'autre, Madara tourna le sien vers celui de la jeune femme aux yeux verts.
— Répondez à ma question, Haruno-san, demanda doucement Madara d'une voix grave.
Sakura fut prise au dépourvu. C'était la première fois que Madara l'appelait par son nom de famille en ajoutant le suffixe -san, signe d'un respect minimal.
— Au début, je n'ai pas appris seule... comme tout le monde, j'ai eu un maître, révéla Sakura avant de détourner le regard. Son esprit était en conflit. Une partie d'elle aurait voulu qu'il se comporte mal, à la manière du Madara qu'elle connaissait, pour savoir comment réagir. Mais une autre partie était satisfaite de constater qu'il pouvait faire preuve d'un minimum de civilité.
— Qui est votre maître ?
— Était..., répondit Sakura alors qu'elle inclinait à nouveau l'homme en avant avant de demander : toujours la même douleur ?
— Mieux... toujours douloureux, mais supportable.
— Essayez de prendre une grande respiration et dites-moi si la douleur est la même au niveau du poumon.
Madara s'exécuta, constatant qu'il lui était plus aisé de respirer.
— Mieux.
— Bien, il semblerait que votre poumon ait légèrement repris sa place et que la pression sur vos côtes ait diminué, remarqua Sakura avant de basculer complètement Madara sur le lit. Cependant, continuez à ne prendre que des respirations légères le temps que votre organe guérisse.
Madara replongea dans ses pensées alors que Sakura quittait la pièce. La théorie du Kekkei Genkai restait plausible, bien que les compétences de Sakura aient été enseignées en partie. Était-il envisageable d'apprendre d'elle ?
Pendant ce temps, Sakura se trouvait à l'extérieur de sa maison, affairée à remplir d'eau une baignoire en bois. Un petit tabouret et une grande table étaient disposés à proximité. Des serviettes étaient disposées ici et là, et divers flacons étaient posés sur la table.
Cela faisait plusieurs jours que son patient était alité, incapable de bouger. Jusqu'à présent, elle n'avait pu le déplacer en raison des opérations récentes, mais ses organes étaient maintenant stables. Il était grand temps de donner un bain au convalescent, car il était toujours couvert de saleté et de sang, tout comme le lit sur lequel il reposait. Il fallait à tout prix réduire les risques d'infections.
Sakura versa également une perle de bain qu'elle avait rapportée du futur. Alors qu'elle versait encore de l'eau, la perle libéra une mousse qui permettrait de camoufler l'intérieur de l'eau. Elle espérait ainsi que Madara se sentirait moins gêné lorsqu'il serait dans le bain.
Plongeant ses mains dans l'eau, elle utilisa son chakra pour la réchauffer à une température agréable avant de retourner vers la maison.
Arrivée près de son patient, elle posa ses mains au niveau des sceaux sur son ventre. Sa vessie était actuellement vide, tout comme ses intestins, signe que les sceaux fonctionnaient correctement. Elle émit un pic de chakra pour les désactiver, l'eau pouvant altérer l'encre, ce qui aurait pu causer des dégâts irréversibles. Ensuite, elle dégagea les couvertures du corps de Madara avant de le prendre dans ses bras comme une mariée.
— Que faites-vous ?! se plaignit le concerné, détestant être porté de cette manière.
— Arrêtez de faire votre mijaurée, rétorqua Sakura en ignorant ses protestations. Il n'était pas le premier homme à avoir honte d'être pris dans ses bras de cette manière.
— Reposez-moi, femme !
— Non... Il est temps de prendre un bain, Uchiha-san. Voilà quatre jours que vous pataugez dans votre crasse, et maintenant que votre état est stabilisé, il est temps d'y remédier.
Une fois son corps entièrement immergé dans l'eau chaude, un soupir de bien-être s'échappa de sa bouche. Seules ses épaules, son bras gauche, et sa tête n'étaient pas plongés sous l'eau. Son bras gauche ne devait surtout pas être mouillé à cause de tous les sceaux inscrits dessus, alors Sakura l'enveloppa dans une serviette par sécurité.
— Essayez de vous détendre, vos muscles en ont besoin, conseilla Sakura en retroussant ses manches jusqu'à ses biceps avant de plonger ses mains dans l'eau chaude.
— Qu'est-ce que vous faites encore !? s'insurgea Madara en sentant que cette femme lui retirait son sous-vêtement.
— Je vous enlève votre sous-vêtement, vous avez besoin d'être lavé partout, Uchiha-san.
— C'est humiliant, grogna Madara, maintenant énervé.
— Écoutez, commença Sakura en se pinçant l'arête du nez à l'approche d'un mal de crâne potentiel à cause de cette argumentation. Vous n'êtes pas le premier patient que j'ai entre mes mains, et vous n'êtes également pas le premier homme que je vois nu. Vous avez besoin d'être lavé, alors ravalez votre fierté mal placée et laissez-vous faire !
— Ne me donnez pas d'ordres, femme !
— Je vous donne des ordres si je veux, Uchiha-san. Vous êtes actuellement sous mes soins, et si je vous ordonne de faire quelque chose pour votre santé, vous vous exécuterez, prévint Sakura avant de prendre un gant et du savon dans ses mains.
— À qui croyez-vous parler ? demanda Madara de plus en plus énervé.
— Pour moi, vous n'êtes rien, alors arrêtez de geindre. Cela ne m'amuse pas plus que vous de faire cela, et ne songez même pas à activer votre Sharingan pour tenter de me faire changer d'avis ! N'avez-vous jamais eu une femme qui vous a lavé dans le passé ?
— Hn ! fit Madara en détournant la tête, vexé.
Cette fameuse onomatopée confirmait aujourd'hui à Sakura que cette particularité appartenait à la famille Uchiha. L'espace d'un instant, elle eut un pincement au cœur en se remémorant l'amour de sa vie.
— Si vous êtes à ce point gêné, fermez les yeux et profitez de l'eau chaude.
Dans toute sa colère et sa honte, Madara commença doucement à se détendre et à apprécier l'instant présent, mais bien entendu, c'était quelque chose qu'il n'avouerait jamais.
Il ne se souvenait pas de la dernière fois qu'il avait pris le temps de se détendre et de se reposer correctement. Sa vie n'avait été que batailles, complots, trahisons et guerres. Prendre un bain et se faire laver lui paraissait étrange.
Cependant, il devait admettre que Sakura se montrait délicate dans ses gestes, prenant soin de ne pas l'incommoder ni de laisser transparaître la moindre allusion. Cette attitude éveillait en lui un nouveau flot de questions insaisissables. Après un certain laps de temps, une sensation humide lui effleura le visage. Instinctivement, il ouvrit les yeux pour réaliser que Sakura s'affairait à lui nettoyer le visage.
Pourquoi ? Pourquoi se donnait-elle tant de peine après les actes commis par son propre clan à son encontre ? Elle n'évoquait pas directement le sujet, mais ses réponses antérieures suggéraient que des membres de sa propre famille pouvaient être responsables de la destruction de son village. Avait-elle l'intention de le faire payer en cultivant en lui un sentiment de honte ? En le contraignant à vivre avec le fardeau d'une existence handicapée ?
— Pourquoi faites-vous cela ? interrogea-t-il après un silence pesant.
— Que voulez-vous dire, Uchiha-san ?
— Pourquoi m'avoir sauvé ce soir-là ? Je ne suis plus que l'ombre de moi-même, répondit-il avec dégoût. C'est ainsi que je me perçois, une épave.
— Parce que j'en avais le pouvoir, dit Sakura en tapotant doucement son gant sur la paupière droite de Madara.
— Espérer quoi au final ? Finir ma vie alité, attendant la mort ? rétorqua Madara avec sarcasme.
— La vie est un cadeau qu'on nous a offert, c'est pourquoi on l'appelle le présent, dit Sakura avec sagesse.
— En quoi être paralysé est un cadeau ? s'indigna le brun, peu enclin à philosopher sur la vie.
— Qui a dit que vous alliez rester paralysé ? questionna Sakura avec un haussement de sourcils.
— Pardon ?
— Croyez-vous vraiment que vous allez rester paralysé ? interrogea Sakura avec un sourire amusé.
Cela n'échappa pas à l'Uchiha, qui apprécia de voir sourire la jeune femme. C'était d'ailleurs la première fois qu'il voyait cette expression sur son visage. Toujours en souriant, elle laissa sa question en suspens pendant quelques secondes avant de poursuivre :
— J'ai bien l'intention de vous faire remarcher, Uchiha-san... certes, cela va prendre du temps, mais je peux vous garantir qu'un jour vous pourrez de nouveau être un Shinobi.
— Nous verrons, dit Madara avec une étincelle d'espoir dans son cœur. Sans aucun doute, cette femme en était convaincue et était déterminée à y parvenir. Le brun décela que ses yeux disaient la vérité alors qu'elle lui assurait le remettre sur pieds et lui rendre sa dignité de ninja.
— Fermez votre œil gauche, demanda Sakura afin de lui nettoyer la paupière.
— Comment se fait-il que je n'aie jamais entendu parler de vous ?
— Je suis quelqu'un de plutôt discret, dit Sakura, mais Madara n'était pas disposé à accepter cette réponse. Les secrets qu'elle préservait le frustraient au plus haut point.
— Arrêtez de me prendre pour un imbécile, Haruno-san. Vous possédez des connaissances que même moi, avant de vous rencontrer, ignorais. Vos compétences surpassent nombre de ninjas, et votre maîtrise du corps humain pourrait révolutionner le monde Shinobi. Combien d'existences pourraient être sauvées si vous partagiez ce que vous savez ? Alors, répondez-moi franchement.
En entendant ces paroles, Sakura comprit qu'il subsistait une lueur d'espoir en cet homme. Il avait discerné qu'elle était une ninja, que ses compétences ne relevaient pas du commun, mais il avait évalué ces aptitudes dans une optique humaniste plutôt que guerrière. Une mentalité rare qui réchauffa son cœur.
— Je vous prie de m'en excuser, Uchiha-san, mais c'est quelque chose que je préfère garder pour moi pour l'instant. Nous avons tous nos secrets. Penchez la tête en arrière, dit Sakura avant de se lever et de prendre un seau qu'elle remplit d'eau.
Elle versa délicatement l'eau sur les cheveux de Madara, veillant à ne pas laisser le liquide s'écouler sur son visage. Puis, elle saisit un récipient de shampoing et en appliqua généreusement dans sa chevelure. Madara ressentit l'énergie de ses doigts massant vigoureusement ses cheveux et son crâne.
— Vous avez été formée aux arts ninja, n'est-ce pas ? questionna Madara, bien que ce fût plus une affirmation qu'une interrogation.
— Vous semblez surpris que cela soit possible ? Pourquoi une femme ne le pourrait-elle pas ? interrogea sincèrement la fleur de cerisier, cherchant à comprendre la perspective du brun sur les femmes.
— Ce n'est pas un métier de femme. Habituellement, elles sont soit trop faibles, soit trop sensibles pour accomplir ce qui est nécessaire, affirma-t-il sans scrupule, avec une éloquence assumée.
La réponse ne surprit guère Sakura, alignée sur ce que le Rikudô lui avait préalablement exposé avant son arrivée ici. Bien que vexée par ces propos dépourvus de considération envers les femmes, elle préféra garder ses émotions enfouies en elle. Elle poursuivit sa mission en cours ; rincer toute la mousse de la chevelure du brun avant de saisir un grand peigne pour se lancer dans la tâche laborieuse de démêlage.
— Ne vous y trompez pas, Uchiha-san, ce n'est pas parce que je suis une femme que je suis faible. Je suis tout à fait capable de prendre la vie de quelqu'un. Mes connaissances font de moi une personne mortellement dangereuse. J'ai autant de sang sur mes mains que vous en avez sur les vôtres, et ce malgré moi, exposa-t-elle calmement, continuant son ouvrage sur la chevelure du brun.
— Si vous regrettez la mort de vos ennemis, alors cela fait de vous quelqu'un de faible, rétorqua l'homme avec mépris.
Sakura ne riposta pas immédiatement, maîtrisant ses nerfs. Cet homme était vraiment une énigme. Un instant, il semblait susciter l'espoir qu'il pouvait changer et être ouvert d'esprit, pour redevenir, l'instant d'après, un parfait imbécile.
— C'est au contraire ce qui me rend humaine, répliqua-t-elle avec sagesse alors qu'elle achevait de démêler la crinière noire de l'homme. Elle saisit une serviette sèche pour les frictionner, éliminant ainsi le maximum d'humidité. Est-ce être faible que de tendre la main ? Est-ce être quelqu'un de faible que d'aider son prochain ? Est-ce que cela fait de moi quelqu'un de faible pour vous avoir sauvé de la mort, Uchiha Madara ?
Aucune réponse ne s'échappa de l'Uchiha, et d'ailleurs, Sakura ne s'attendait pas à une réponse, car elle savait au fond d'elle qu'elle avait raison. Elle plongea ses bras dans le bain pour soulever le corps de Madara et le déposer délicatement sur la table, veillant à préserver son intimité. Une fois sec, elle lui enfila un sous-vêtement, suivi d'un pantalon en soie noire, puis le prit de nouveau dans ses bras.
— Comment diable accomplissez-vous un exploit pareil ? s'enquit Madara, subjugué par la puissance manifeste de cette femme. Ses bras, bien qu'athlétiques, demeuraient étrangement délicats. Il aurait été logique qu'une personne de sa stature ne puisse jamais le soulever avec une telle aisance. Non pas qu'il se sentît particulièrement massif, mais il avait une conscience suffisante de son propre poids.
— Que voulez-vous dire ? répliqua Sakura, affichant un sourire audacieux qui avait le don d'irriter l'Uchiha. Elle le déposa délicatement sur les coussins disposés autour de la table basse, puis se dirigea vers le lit pour ôter les draps maculés de sang.
— Comment se fait-il que vous me portiez comme si je ne pesais rien du tout ? insista Madara.
— Je l'ignore, répondit Sakura avec aplomb, toujours ornée de son sourire énigmatique. Elle était consciente du pouvoir d'agacement qu'elle exerçait sur l'Uchiha en entretenant délibérément le mystère autour de sa personne.
— Vous cherchez à me faire croire que vous ignorez l'origine de votre puissance ? insista le brun, mécontent de sa réponse précédente. Il savait pertinemment qu'elle prenait plaisir à maintenir le mystère qui entourait sa personne.
— Non, je dis simplement que je ne compte pas dévoiler mes compétences à n'importe qui. Est-ce que je vous harcèle au sujet de votre Sharingan ? De ses spécificités ? Ou de ce que vous pourriez en faire ? rétorqua-t-elle tout en tirant de nouveaux draps d'un des placards.
Madara concéda d'un léger mouvement de tête, ses yeux scrutant attentivement la femme en face de lui. Il était conscient qu'elle détenait des secrets, dissimulait des pans entiers de vérité derrière ses yeux pénétrants. L'Uchiha, habitué à dominer les arcanes de l'information, se sentait intrigué par cette énigme vivante qui se démarquait nettement des femmes qu'il avait croisées auparavant. Sa manière subtile de contourner les questions tout en incitant à la réflexion révélait sans équivoque des talents de ninja affûtés. Un sourire énigmatique flotta sur les lèvres de la femme, renforçant le mystère qui l'enveloppait.
— Peut-être, mais notre métier consiste à recueillir des informations, révéla-t-elle, un éclat malicieux dans le regard.
Le silence s'installa, Madara observant attentivement chacun de ses gestes alors qu'elle refaisait le lit avec une aisance déconcertante. Il la suivit docilement lorsqu'elle le guida vers une position semi-assise, laissant la confiance s'installer entre eux, aussi fragile soit-elle.
— Aucune gêne ou douleur ? s'enquit-elle avec sollicitude.
— À part ma fierté ? Rien, bougonna Madara, un soupçon d'humour teintant sa voix grave.
Sakura demeura impassible face à la remarque, dissimulant tout sourire intérieur qui aurait pu naître. Bien que Madara Uchiha fût un Shinobi émérite, il n'échappait pas à sa part d'humanité, se comportant parfois comme un enfant contrarié par le refus d'obéissance. Sans se départir de sa maîtrise, elle se dirigea vers son bureau, saisissant de nouveau encrier et pinceau. Installée confortablement sur le lit, elle lui offrit une position idéale pour redessiner avec minutie les sceaux de la vessie et des intestins, effacés lors du bain.
— Êtes-vous affilié au clan Uzumaki ? poursuivit le brun, scrutant à la recherche d'indices sur la jeune femme.
— Non, répondit Sakura sans hésitation, même si en son for intérieur, l'espoir de rencontrer un jour les membres du clan Uzumaki pour discuter de l'art subtil du Fûinjutsu persistait.
— Comment se fait-il alors que vous portiez le même sceau que Mito Uzumaki ? interrogea-t-il avec suspicion. À sa connaissance, seul la fille du chef du clan Uzumaki détenaient pareil sceau frontal.
— Les Uzumaki ne détiennent pas le monopole de l'art subtil qu'est le Fûinjutsu. Certes, ils excellent dans ce domaine à l'échelle mondiale, mais rien n'atteste que ce sceau soit l'apanage exclusif de leur clan, ni même qu'il ait émergé de leurs rangs. Quant à cette Mito Uzumaki, j'ignore qui elle est, mais je doute fortement que son sceau puisse rivaliser avec le mien, déclara-t-elle sans la moindre once d'humilité.
Madara perçut une certaine arrogance à travers ces paroles, tandis que la jeune femme esquissait des tracés sur sa peau. Elle affirmait, sans la moindre réserve, que son sceau surpassait celui de Mito Uzumaki, réputée virtuose en Fûinjutsu. Pourtant, elle prétendait ne pas la connaître.
— Mais qui êtes-vous, au juste ? Vous surgissez de nulle part, dotée de compétences que personne n'a jamais vues, et vous prétendez être supérieure à Mito Uzumaki, s'exaspéra le brun.
— Ne le suis-je pas ? rétorqua naturellement Sakura, tout en poursuivant les tracés complexes sur le corps de son patient.
— Donc, vous connaissez Mito, pour affirmer cela avec tant d'assurance, conclut-il par déduction.
— Uniquement de réputation, répliqua Sakura avant de poser ses outils et d'activer les deux sceaux.
— Qui êtes-vous ? répéta-t-il une fois de plus, chaque mot prononcé avec une insistance marquée, Madara cherchant à percer le mystère qui entourait la jeune femme.
— Est-ce vraiment si crucial de connaître mon identité ? Ne pourriez-vous pas simplement accepter Sakura Haruno, celle qui vous a préservé de la mort et prend soin de vous ? soupira la jeune femme, face à cette obstination. Elle n'avait nullement l'intention de dévoiler davantage d'informations concrètes sur elle, que ce soit dans l'immédiat ou plus tard.
L'Uchiha comprit qu'il n'obtiendrait rien de plus pour le moment. Il se résigna à cette réponse, s'abstenant d'insister, bien qu'il doive admettre que l'aperçu qu'il avait eu confirmait potentiellement la supériorité de la jeune femme sur Mito.
— Je vais préparer à manger. Préférez-vous rester ainsi ou auriez-vous une préférence pour de la lecture ? proposa-t-elle.
— Auriez-vous un ouvrage traitant de ce que vous avez accompli sur mon cœur ? demanda sérieusement Madara.
— Vous en êtes sûr ? Vous risquez de ne rien comprendre, s'étonna la jeune femme, surprise par sa demande inattendue.
— Oui.
Sakura se dirigea vers l'une de ses bibliothèques, sélectionnant un livre en particulier. Sa couverture marron dénotait une épaisseur conséquente. Il s'agissait d'un ouvrage rédigé par son ancien maître, mais cette information était une exclusivité de Sakura. Prévoyante, elle avait fait changer le nom de certains livres avant son voyage dans le passé, anticipant toute éventuelle découverte. La kunoichi se réjouissait maintenant d'avoir pris cette précaution, surtout compte tenu de la demande de lecture de son patient.
— Le cœur humain par Tsunade Haruno, lut Madara en saisissant le livre d'un geste assuré malgré son seul bras valide. Votre mère, peut-être ?
— Oui... Bonne lecture, répondit Sakura succinctement.
Elle n'avait nullement l'intention de se soumettre à un nouvel interrogatoire, même si, d'une certaine manière, cette réponse constituait une demi-vérité. Tsunade Senju avait toujours été pour elle une figure maternelle. Se retirant ensuite vers la cuisine pour préparer le repas, Sakura laissa Madara seul quelques instants, perdu dans ses pensées, son regard fixé sur l'endroit qu'elle avait quitté, avant de revenir à la réalité, rappelé par les sons provenant de la cuisine.
La théorie du Kekkei Genkai reprenait vigueur en découvrant le nom de Tsunade Haruno sur la couverture du livre. Madara l'ouvrit à une page au hasard, tombant sur un schéma minutieusement détaillé qui lui fit écarquiller les yeux. Trop de détails, trop d'informations.
Avec son Sharingan, Madara avait acquis la capacité de lire rapidement, et il se plongea instantanément dans la lecture. Le fonctionnement du cœur humain était exposé en détail, agrémenté de schémas dépeignant sa physiologie. Chaque composante de cet organe était soigneusement nommée, et des instructions opératoires spécifiques étaient fournies pour chaque type de blessure. Comme l'avait averti Sakura auparavant, de nombreux termes médicaux semblaient dénués de sens pour lui. Après vingt minutes de lecture, Madara prit conscience de l'ampleur de l'exploit accompli par la jeune femme qui s'affairait à cuisiner dans la pièce voisine. Sans aucun doute, c'était une compétence qu'il lui serait totalement impossible de reproduire.
Si un ouvrage tel que celui-ci existait, pourquoi en était-il informé pour la première fois ? Pourquoi des individus tels que Sakura ou sa mère n'étaient-ils mentionnés dans aucun de ses rapports ? Pourquoi personne n'avait évoqué leur existence ? Ces questions tourmentaient son esprit.
La lecture de Madara fut brusquement interrompue par l'arrivée de la personne au cœur de toutes ses pensées. Elle déposa un bol fumant de riz et de légumes sur son bureau avant de s'approcher avec un plateau. Comme chaque jour, seulement deux bols et un verre d'eau étaient posés.
— Pourquoi votre mère n'a-t-elle jamais publié ce livre ? questionna Madara en dégustant lentement la soupe que lui servait Sakura.
Sakura ne répondit pas immédiatement. Elle réfléchissait à ce qui aurait pu se produire si Tsunade avait réellement tenté de publier ce livre à l'époque de Sengoku.
— Elle a essayé de le faire... mais, parce qu'elle était une femme, on ne l'a pas prise au sérieux. On estimait qu'une vulgaire femme ne pouvait rien comprendre à la médecine et qu'elle devait laisser ce domaine à ceux qui en savaient plus, expliqua Sakura, une pointe d'amertume dans sa voix.
— Vous ne semblez pas avoir une haute opinion des hommes, observa Madara.
— Ce n'est pas la question, Uchiha-san. Ce que je méprise, ce sont les hommes qui se croient supérieurs aux femmes simplement parce qu'ils ont une paire de couilles entre les jambes, répliqua Sakura en fixant Madara droit dans les yeux, pour que son message soit clair.
— Est-ce une menace ?
— Prenez-le comme bon vous semble, cela ne changera rien pour moi, répliqua vivement Sakura avant de glisser délibérément une bouchée de riz entre les lèvres de Madara.
— À quoi aspirez-vous dans la vie alors ? interrogea le brun par curiosité.
Madara ne reçut pas de réponse immédiate, mais plutôt un regard intense de la part de la jeune femme. Elle semblait l'évaluer, cherchant à déterminer s'il était prêt à recevoir une réponse sincère de sa part.
— J'aspire à beaucoup de choses dans la vie, Uchiha-san, et aucune n'est facile à obtenir, avoua Sakura à moitié avec une pointe de tristesse. Elle désirait revoir ses amis, ses mentors, sa famille, son monde. Mais par-dessus tout, elle aspirait à instaurer la paix dans ce monde. Cependant, elle ne pouvait pas encore dévoiler toutes ses motivations. Elle reporta son attention sur le bol de riz entre ses mains, comme si la solution à ses préoccupations résidait peut-être dans la nourriture, une échappatoire momentanée à la question du brun.
— Est-ce pour cela que vous m'avez sauvé ?
— Peut-être, murmura Sakura d'une voix feutrée.
— Vous ne m'avez pas sauvé sans raison alors, insista Madara, recevant en réponse un regard dur et impassible de la part de la jeune femme.
— J'avoue au départ que j'avais envie de vous écraser la cervelle de la même manière que j'ai détruit Zetsu Noir l'autre soir, déclara Sakura avec froideur. Le visage de la guerrière était de nouveau impassible, une des facettes que Madara appréciait le plus. Mais... je ne pouvais pas vous juger avant de vous connaître, alors je vous ai sauvé... pour voir si vous étiez comme tous les autres Uchiha que j'ai croisés... Et...
Sakura marqua une pause, détournant brièvement le regard vers l'extérieur. Madara préféra garder le silence, conscient d'avoir déjà appris beaucoup en peu de temps et soucieux de ne pas tout compromettre. Certaines paroles semblaient éveiller une facette plus expressive chez elle. Une femme de caractère, elle ne se laissait pas intimider, mais une fois qu'on savait s'y prendre, elle devenait moins intimidante.
— Et ? encouragea doucement Madara.
— Et je me suis dit que si vous étiez différent, peut-être vous pourriez m'aider, conclut Sakura en déposant le deuxième bol. Cela donna matière à réfléchir au brun, jusqu'à ce qu'un détail ne lui vienne à l'esprit.
— Qui était ce Zetsu Noir ?
À peine sa question s'évaporait dans l'air, un fracas de verre brisé résonna. Son regard descendit promptement, révélant que la jeune femme avait pulvérisé le verre entre ses doigts. Un visage imprégné de haine et de colère se dessina à la simple évocation de ce nom.
— Il était l'un des artisans de la disparition de ceux que j'aimais, articula Sakura avant de soupirer, se penchant pour récupérer les éclats de verre éparpillés. Il serait avisé que vous vous reposiez, Uchiha-san, insista-t-elle vivement pour clore le sujet.
— Est-ce vraiment nécessaire ?
— Oui, votre corps réclame encore du repos.
— Une dernière question : vous contribuez à quoi, exactement ? persévéra l'Uchiha.
Les yeux de Sakura rencontrèrent les siens, mêlant espoir et appréhension. Elle ne se débattit plus avec les dilemmes de ce qu'elle devait ou ne devait pas révéler, énonçant clairement : « Apporter la paix à ce monde gangrené », avant de poser rapidement ses doigts sur la tempe de Madara. L'échange l'avait drainée, et elle n'avait aucune intention de débattre davantage avec lui sur ce sujet.
— Reposez-vous, murmura-t-elle alors qu'il plongeait déjà dans le sommeil.
Saisissant le livre qu'il tenait, Sakura le déposa délicatement sur la table de chevet tandis que des larmes tracèrent silencieusement leur chemin le long de ses joues.
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