Chapitre 9 :

L'ambiance était pesante pendant le reste de la matinée. Davy s'était enfermé dans le cabanon, Chester vagabondait dans les couloirs et Ludwig restait dans sa chambre. Quant à Forrest, il avait quitté le château. Hors de lui, le benjamin avait griffonné une lettre d'adieu, destinée à ses frères. Personne n'aurait pensé qu'il puisse réagir ainsi. Il a toujours été réservé, à se fondre dans la masse et à se cacher derrière les autres jardiniers. Toutefois, ses frères ne cherchèrent pas à le retrouver, souhaitant respecter sa volonté.

Ludwig réfléchissait sur cette décision et tentait de se mettre à sa place. En quelque sorte, leur situation se ressemblait. Néanmoins, avant que l'orphelin ne s'évade dans ses pensées, il se focalisa sur autre chose. Une odeur. Forte. Désagréable. De la fumée. Cela le fit se lever subitement et en chercher la source. Il parcourut sa chambre, vif comme l'éclair, et s'arrêta devant le mur commun avec celle de la princesse capricieuse.

— Oh punaise !

 Il sortit de la pièce avant de tambouriner la porte le séparant de l'origine de l'odeur. Il n'entendit que quelques cris étouffés et décida d'enfoncer la porte. Il rata la première tentative, puis la deuxième. Finalement, il tourna la poignée et la porte s'ouvrit sans mal.

— Super...

Pas le temps de s'agacer plus longtemps, il fit irruption et vit la princesse encerclée par des flammes qui n'étaient pas encore très hautes mais suffisamment pour bloquer le passage. Elle restait cette fois muette, avec un regard comme si elle se retrouvait devant la mort en personne. Ludwig chercha un objet pour stopper les flammes mais rien ne semblait faire l'affaire. Une idée lui vint alors subitement. Il s'approcha d'un petit buffet en bois et le tira, en vain. Le jeune homme se mit alors à vider son contenu, sous les exclamations indignées de la princesse.

— Tu tiens à la vie ou non ? lui demanda-t-il simplement.

Une fois débarrassé de la masse inutile, il déplaça sans problème le meuble et le positionna juste devant les flammes.

— Je vais placer le buffet au-dessus du feu, quand je le ferai, sers-en toi comme pont.

Elle n'avait pas confiance en ce plan qui était été élaboré en moins d'une minute.

— Si tu fais vite, tu passeras sans souci, rassura-t-il.

La princesse, transpirante, prit de longues inspirations et fit signe qu'elle était prête. Ludwig poussa alors le buffet et elle sauta dessus, courut sur la courte surface et rejoignit le jeune homme qui l'entraîna hors de la fournaise. Il n'y avait encore personne dans le couloir. Les deux jeunes gens prirent à gauche et coururent aussi vite qu'ils purent.

— Pour être honnête avec toi, commença Ludwig, je ne pensais pas que mon idée était bonne.

— Quoi ?

Elle s'arrêta. Il fit de même.

— Tu sais que tu aurais pu me tuer ?

— Mais ce n'est pas arrivé...

— Encore heureux ! s'écria la princesse avant de frapper son locuteur à la tête.

— C'est comme cela que tu me remercies ? Je vais finir par croire que j'aurai dû te laisser te faire dévorer par les flammes

Elle n'ajouta rien, sachant qu'il avait raison. Elle lâcha finalement un petit "merci" avant de reprendre un rythme de marche plus soutenu. Ludwig la rattrapa aussitôt. Ils devaient à tout prix prévenir tout le monde.

Une quinzaine de minutes plus tard, une fois les aristocrates évacués, les servants et majordomes s'occupèrent, avec une efficacité relative, d'éteindre l'incendie. Les nobles restaient à l'écart, hormis le roi qui manquaient à l'appel, ce qui inquiétait de plus en plus son épouse.

— Je vais le chercher ! s'exclama-t-elle, déterminée à se jeter dans les flammes.

— Non ! C'est beaucoup trop dangereux pour vous, intervint la duchesse. Et puis qui sait s'il est toujours à l'intérieur.

— Vous nous avez bien dit qu'il était déjà absent à votre réveil, rappela le duc.

— Exactement. Il est peut-être parti se promener mais je ne peux m'empêcher de m'imaginer le pire.

Elle observa le spectacle flamboyant d'un œil triste, tandis qu'un silence de plomb s'était installé. Pour une raison qui regardait la princesse capricieuse, elle et Ludwig n'avait pas rejoint le groupe et étaient cachés derrière des buissons.

— Bon, qu'il y a-t-il ? A-t-on réellement besoin d'être ici ?

Elle lui fit signe de se parler moins fort.

— C'est moi qui... qui est déclenché l'incendie.

— Tu as quoi ? s'exclama-t-il.

Heureusement, les nobles n'entendirent pas.

—  Sais-tu ce que cela signifie la discrétion ? 

— Pardon, mais ce n'est pas rien ce que tu m'as avoué.

— Je suis d’accord avec toi. Par contre, ne pense pas que je l’ai fait exprès.

— Je vais éviter de me mettre une princesse à dos, répondit-il simplement.

— Très bonne idée et c’est pour cela que tu vas aussi partir avec moi.

— Euh... Une explication ne serait pas de refus...

-- Vivre au château commence sérieusement à me peser.

-- Dit celle qui...

-- Ne me manque pas de respect s'il te plaît, le coupa la princesse. Avec tous ces évènements, j'ai réellement besoin de m'évader.

-- Et tu ne préfères pas prévenir ta famille ?

-- Surtout pas. Ils... Ils ne me laisseront jamais partir.

-- Soit. Et pourquoi devrais-je te suivre ?

— Oh arrête. Il n'est pas nécessaire d'être proche de toi pour comprendre que tu es mal à l'aise ces derniers temps. Voyager un petit peu te permettra de respirer. Et puis, tu pourras me protéger comme cela.

— Je me doutais que ta demande n'était pas anodine. Bon, quand est-ce que tu veux partir ? 

— Maintenant.

— Voilà pourquoi je te fréquente le moins possible.

— Malotru, lâcha-t-elle aussitôt en le giflant. 

— Mais c'est vrai après tout. Tu veux quitter le château sur un coup de tête. Ce n'est pas réfléchi comme décision. Je suis sûr que tu ne t'es même pas demandée comme on allait se débrouiller.

— Sur ce point, pas de problème, intervint une troisième personne.

Il s'agissait de Chester. Le jardinier s'était assis, dans le plus grand des silences, à côté d'eux.

— Je n’ai pas pu m’empêcher d’épier votre conversation. Et tant mieux. Il se trouve que je suis de votre avis. J’ai, moi aussi, besoin de prendre du recul avec cette situation.

— Tu m'as fais peur, commença Ludwig. Et alors, qu’as-tu en tête ?

— J’ai entendu parler d’un souterrain inutilisé depuis un certain temps. Cela pourrait nous faire un habitat correct.

— Vivre sous la terre ? conclut la princesse. Ce sera sans moi.

— Ce que vous pouvez être sceptique vous deux. Un peu d’aventure vous aidera à vous décoincer, plaisanta-t-il. Venez, on se tire.

Finalement, la princesse n’hésita pas longtemps, contrairement à Ludwig. Ce dernier jeta un coup d’œil à la petite foule, impuissante face à l’incendie. Winnie tentait notamment de consoler au mieux sa belle-sœur. Le jeune homme se mordit légèrement la lèvre puis chercha du regard Davy. Seulement, impossible de le trouver.

— C’est moi que tu cherches ? demanda-t-il, alors qu’il se postait derrière son ami.

— Que... Que fais-tu là ?

-- Je joins la fine équipe, quelle question. Vous n'êtes pas les seuls à vouloir prendre l'air. Chester, Blanche, mon petit Ludwig et moi, je sens qu'on ne va pas s'ennuyer.

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1161 mots.

Publié le 20/02/2021

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