Une belle condamnation

Mitteland, 1982

|04h17|

« Tellement épuisé, il est quatre heures du matin, un 30 Avril, j'écris ce texte avec du cognac, des clopes et des cendres, je fuis mes péchés, en allant me cacher dans mes pensées, pour ne plus y penser. Mon œil, il rougit, il est trempé, ensanglanté.

Tellement marre, je demande à la vie de me laisser partir, surtout quand ça va très mal, je prie la nuit, souffrant le martyr en attente d'un signal. C'est difficile de vivre avec de tels souvenirs, si seulement je pouvais les supprimer, tout serait plus facile.

Tellement mon cœur a parlé que ça devient difficile même d'en parler, donc je ne veux plus trop parler. Fatigué du même sourire, j'encaisse différentes blessures, et je comprends maintenant que la vie est une belle condamnation, l'amour, une putain de caution.

Je crois que c'est à cause de ce soir-là que j'écris tout ça. »

De son verre, il avala une dernière gorgée de cognac. L'aube allait se pointer dans deux heures. Il attendait dans le salon, étendu sur le canapé, fumant une des cigarettes de sa sœur, bercé par le rythme du ventilateur qui tournait. D'habitude, il ne fume pas, mais parfois il est animé par une seconde nature qui se révèle en lui à chaque fois qu'il repense à tout ce qu'il a déjà commis comme exactions.

Ariane, étudiante en master de psychocriminologie, était allée en cours le jour précédant mais n'était toujours pas rentrée jusqu'à cette heure, il ne s'en inquiéta pas car elle lui avait laissé un texto, il y'a quelques heures auparavant, disant qu'elle devrait rentrer le lendemain.

À l'extérieur, les courants s'accrochaient aux bancs publics du quartier et le chant du ressac hantait les rues désertes. Une fine brume flottait dans la tempête, retombant sur la ville comme un voile de mousseline et brouillant la vue des fenêtres du salon.

Owen-Grégory se remémorait des évènements qu'il a longtemps essayé d'oublier. Il avait marre de faire semblant que tout allait bien dans sa vie.

Devant lui, une table en bois sur laquelle il croisait ses pieds, il y'avait également son revolver, un Smith & Wesson M10 argenté qui appartenait autrefois à leur défunt père, William Jameson.

L'arme brillait dans la pénombre, béante, attendant qu'on lui enfile son chargeur. Une arme puissante, compacte et parfaitement utile pour ses sombres désirs. Les chargeurs étaient posés à côté.

Mais il n'avait qu'une idée en tête.

Jouer à la roulette rousse, jeu suicidaire dans lequel on tire sur soi-même avec un revolver chargé d'une seule balle, placée aléatoirement.

Il suffit juste à O-G de mettre une balle dans le barillet du révolver, à tourner ce dernier de manière aléatoire, assez vite pour qu'il ne puisse pas suivre l'emplacement de la chambre chargée, puis à pointer celui-ci sur sa tempe avant d'actionner la détente.

Quoi de mieux qu'un jeu de hasard pour mettre fin à une vie dénuée de sens ?

|05h 13|

Tout compte fait, il enfonça plutôt l'arme dans sa bouche, après avoir retroussé la manche de sa chemise pour voir quelle heure il était.

On ne sait rien de toute notre existence mais Owen-Grégory pourrait connaitre l'heure de sa mort.

*PREMIERE TENTATIVE*

**Rien**

*DEUXIEME TENTATIVE*

**Toujours rien**

*TROISIEME TENTATIVE*

**...**

Étrangement il avait peur que cette fois-ci fût la bonne, il se découragea au tout dernier moment.

Au fond de son âme O-G su qu'il ne voulait pas mettre fin à sa vie, mais essaya de mettre fin à ce qui était mort dans sa vie.

Le pire n'est jamais de vouloir mourir mais plutôt le fait de ne plus vouloir poursuivre son vécu.

Il reprît son souffle, écrasa la cigarette, plutôt blasé, il est rentré dans sa chambre. Le sommeil glissant sur son visage, le jeune homme de la trentaine s'est laissé tomber sur le lit, il avait rivé son regard vers la fenêtre, à sa gauche, observant la nuit se déchirer. Le tonnerre a déferlé sur les fenêtres de la maison, les faisant résonner.

|05h 27|

Ariane rentra au domicile, elle vit le revolver de leur père posé sur la table du salon, instinctivement, elle s'en rapprocha pour vérifier s'il était chargé, elle remarqua qu'il n'y avait qu'une seule balle. Celle-ci observa aussi un mégot écrasé, au sol.

Elle sait que son frère ainé ne fume que très rarement, juste quand il a le spleen. Même chose pour l'alcool.

Malgré l'orage, l'atmosphère dégageant une sensation étrange dans la chaire de la jeune femme, elle ouvrit les fenêtres, à cause de la fumée de cigarette qui ne s'était pas complètement dissipée.

Au vu du calme de la maison, et de l'état dans lequel le salon est resté, elle avait déjà une idée de ce qui s'était passé ici.

Son ainé aurait fait une tentative de suicide.

Imaginant une seule seconde l'état dans lequel pourrait se retrouver son frère, elle se ressaisît et courut rapidement pour aller voir s'il était dans sa chambre.

-- Ogie ! Criât-elle sans toquer avant d'entrer dans la pièce.

Couché sur le ventre, il releva tout doucement la tête recouverte de cheveux ébouriffés, avant de vomir finalement par terre.

-- Ogie !! Elle insista en allant s'assoir près de lui. Tu as encore fait une rechute putain !

Pour elle, « Owen-Grégory » n'était pas assez joli à prononcer, surtout qu'elle n'étais pas fan des prénoms composés.

Depuis tout petit elle lui avait donné « Ogie » comme sobriquet, le prononçant : « Odji ».

Même s'il fumait et buvait par moment, son corps n'a jamais supporté ces consommations, Il verrouilla juste ses petits yeux de couleurs vertes sur la chevelure tombante de sa sœur.

-- Marvel, dit-il avec affection malgré sa voix à présent cassée. Tu ressembles tant à notre père, poursuivit-il en rangeant sur son oreille une mèche de cheveux aile-de-corbeau qui couvrait l'œil gauche.

Il a toujours préféré appeler sa sœur par cet autre prénom.

Cette dernière, écarquilla des yeux, comme si elle venait de tout comprendre et sans dire un mot de plus, elle se leva, alla dans la cuisine pour prendre un sceau accompagné d'une vieille éponge afin de nettoyer les vomis de tout à l'heure.

Elle revint aussi vite qu'elle put, nettoya soigneusement la gerbe et rentra ranger les outils.

-- Je suis complétement crevée, on en parle tout à l'heure, essaie de ne pas t'étouffer dans ton sommeil.

Owen-G. ne répondit pas, tellement fatigué qu'il fit un bruit acquiesçant les propos de sa sœur.

Profondément assoupi, il repensât à sa journée.

29 Avril, |10h 04|

Comme tous les jeudis à cette heure de la journée, il arriva au ZauberKaffee, la cafétaria du coin, avant d'aller vaquer à ses occupations.

Il passa la commande et en attendant, prit en main un livre qu'avait apporté quelqu'un de son entourage. Le volume n'avait pas de couverture, mais il put cependant identifier l'auteur : Oscar Wilde.

En feuilletant les pages, il tomba sur une histoire qui parlait de Narcisse.

Owen-Grégory connaissait la légende de Narcisse ; ce beau jeune homme qui allait tous les jours contempler sa propre beauté dans l'eau d'un lac. Il était si fasciné par son image qu'un jour il tomba dans le lac et s'y noya.

À l'endroit où il était tombé, naquit une fleur qui fut appelée narcisse.

Mais ce n'était pas de cette manière qu'Oscar Wilde terminait l'histoire.

Il disait qu'à la mort de Narcisse les Oréades, divinités des bois, étaient venues au bord de ce lac d'eau douce et l'avaient trouvé transformé en urne de larmes amères.

« Pourquoi pleures-tu ? demandèrent les Oréades.

-- Je pleure pour Narcisse, répondit le lac.

-- Voilà qui ne nous étonne guère, dirent-elles alors. Nous avions beau être toutes constamment à sa poursuite dans les bois, tu étais le seul à pouvoir contempler de près sa beauté.

-- Narcisse était donc beau ? demanda le lac.

-- Qui, mieux que toi, pouvait le savoir ? répliquèrent les Oréades, surprises. C'était bien sur tes rives, tout de même, qu'il se penchait chaque jour !»

Le lac resta un moment sans rien dire.

Puis :

« Je pleure pour Narcisse, mais je ne m'étais jamais aperçu que Narcisse était beau. Je pleure pour Narcisse parce que, chaque fois qu'il se penchait sur mes rives, je pouvais voir, au fond de ses yeux, le reflet de ma propre beauté. »

« Voilà une bien belle histoire », dit O-G avant de fermer le bouquin.

Après commande, une serveuse, vêtue d'une chemise bleu ciel, couvert d'un tablier noir, dotée d'un charmant minois lui apporta une petite tasse d'expresso avec un croissant.

Il la remarquait déjà depuis quelques jours, elle était nouvelle mais tous les clients d'ici appréciaient déjà sa compagnie.

-- Merci.

-- Tout le plaisir est le mien, souriait-elle avant de continuer. Monsieur est un client de la maison ?

-- Bien sûr, Owen-Grégory, se présenta-t-il pour l'occasion.

-- Enchantée, dit-elle avant de vouloir partir.

-- Et vous ? Comment puis-je vous appeler si j'ai besoin d'un autre croissant ?

-- Pas besoin de m'appeler monsieur, je sais lire dans les yeux, mais pour info, je m'appelle Carène.

Ils se regardèrent un bon moment avant qu'elle ne fût interpellée par un de ses collègues.

Il l'observa toujours, il remarqua que certains clients lui souhaitaient joyeux anniversaire, soit avec des petits cadeaux, soit avec des pourboires conséquents dans des enveloppes, les plus riches sûrement.

Lorsqu'il finit, une autre serveuse vint pour le débarrasser.

-- S'il vous plait, désolé si ça parait déplacé mais on dirait que Karen fête son anniversaire aujourd'hui, avez-vous une idée de son âge ?

-- Mais voyons, c'est très déplacé de poser ce genre de question monsieur...c'est une femme !

Carène qui les entendit, étant tout juste derrière sa collègue, répliqua en lui tenant les épaules.

-- Annette, ne t'en fais pas, c'était autrefois que ça l'était, moi je n'ai pas honte de vieillir ! Commença-t-elle par s'adresser à celle-ci. Par conséquent monsieur, sachez que j'ai vingt-sept ans aujourd'hui.

Annette s'en alla, dispersée entre les commandes, elle avait failli s'oublier dans la conversation.

-- J'ose profiter de cette occasion, pour vous inviter si cela ne vous dérange pas.

-- Mmh, que vous êtes rapides vous ! Mais pourriez-vous attendre jusqu'à midi ? Posa-t-elle en se plaçant devant lui cette fois.

-- Je vous attends à 11h 30, dit-il souriant avant de se lever.

-- Vous risquerez alors de m'attendre pendant longtemps mon cher monsieur, dit-elle avant d'être appelée à servir un autre client.

O-G la regarda partir, observait sa démarche, lui offrant la vue d'un joli déhanché. Plus il matait son postérieur, plus il avait des envies naissantes qui ne pourraient pas cacher la bosse dans son pantalon.

Il préféra partir avec un petit sourire sur le coin de sa lèvre.

30 Avril, aujourd'hui

|11h 39|

O-G se réveilla en sursaut, son regard tomba directement sur ce que les hommes appellent communément : une érection matinale.

-- Merde, je n'ai jamais compris cette merde ! s'exclama-t-il les yeux fixés sur son boxer.

-- Tu t'es enfin réveillé, déclarait Ariane confortablement assise sur une chaise lisant le journal papier du matin.

-- Fais chier ! tu fous quoi là !?

-- Je te vois bander, morte de rire, haha, dit-elle les yeux à moitié ouverts.

-- Tu me vois plutôt dans mon érection matinale, rassure-t-il en tirant son drap pour couvrir ses jambes velues.

-- Euh techniquement, ce que le troupeau masculin appelle l'érection "matinale", puisque vous ne vous en rendez compte qu'au réveil, ouais vous êtes des génies en fait, est en réalité une érection nocturne. En effet, ce phénomène apparaît dans la nuit, pendant le sommeil. Ce dernier est divisé en plusieurs phases : sommeil léger, profond ou paradoxal.

-- C'est ça qu'on vous apprend en psychocriminologie ?

-- Nan, juste le fruit de mes recherches personnelles.

-- Ah, d'accord, tu t'ennuies vraiment pour faire ce genre de recherches. Je suppose que tu as cours en soirée

-- Exactement.

-- Je vais te reposer la question, en m'exprimant mieux, annonce-t-il avant de racler sa gorge. TU. FOUS. QUOI. LÀÀ ??!!!

-- Juste me rassurer que tu n'es pas mort dans ton sommeil, mais bon ravie que tu pourras encore te branler, oh ? j'ai oublié je dois te laisser faire ça tout seul !

Il lui visa un oreiller mais elle esquiva et s'enfuit directement en rigolant.

-- Je t'aime frérot ! Lanca-t-elle une fois près de la porte tout en envoyant d'un geste de la main, un bisou volant.

|12h 12|

Il repartit au ZauberKauffee, mais c'était fermé, il ne comprit pas pourquoi, il marcha le long de la rue pour ne serait-ce trouver des habitués du lieu pour avoir plus d'explications.

Sur son chemin, il croisa un vieil homme qui venait aussi souvent boire du café.

Owen-Grégory lui questionna sur la raison pour laquelle la cafétéria était soudainement fermée.

-- Ah les jeunes ! Vous ne suivez donc pas les informations ?! Une des serveuses est décédée cette nuit !

-- Quoi ?! Comment ça ?! Qui ?!! Questionne-t-il en ayant un mauvais pressentiment qui s'immisçait dans son cœur.

-- Lisez donc le journal, non mais, dit-il avant de partir les larmes aux yeux.

-- C'est impossible, on s'est rencontré hier...Karen.

*****
Toutes mes salutations distinguées à vous.

J'espère que vous allez bien, voici le tout premier chapitre, j'espère que vous saurez l'apprécier !

Si jamais c'est le cas. Vous pouvez m'aider lorsque vous votez, partagez vos avis en commentaires, partagez l'histoire dans vos différents réseaux sociaux.

PETITE INFO : Si vous avez des remarques à faire, des critiques, des suggestions, je suis libre à écouter vos pensées ^^.

Sur ce, je vous dis au mois prochain, pour le chapitre suivant.

Portez-vous bien !

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