Chapitre 24

  Quelques heures plus tard, alors que l'horloge du vieux salon de beauté indiquait minuit, Katerine attendait l'arrivée des jeunes chasseurs. Elle savait que c'était risqué, car elle n'avait pas tenu sa parole, à savoir: capturer le nouvel Occulté et le consigner à l'Ordre.
Toute la journée elle avait réfléchi à une solution, mais aucune idée ne lui vint à l'esprit.

Perdue dans ses pensées, la violente ouverture de la porte d'entrée la fit légèrement sursauter. Sans surprise, les chasseurs qu'elle avait rencontrés il y a deux jours se présentèrent, armes à la main, dans son repaire.

- Je constate que vous les chasseurs ne connaissez pas les bonnes manières, ironisa-t-elle même si cela ne semblait pas le bon moment.

Le chef du groupe s'avança d'un pas, d'un air sérieux vers la vampire.

«Nous ne sommes pas ici pour jouer Katerine!», répliqua-t-il, «Nous sommes ici en raison de l'accord que nous avons passé.».

Le temps sembla s'arrêter pour la vampire; son esprit venait d'élaborer un plan qui pouvait lui permettre peut-être de se sauver, mais il y avait toujours le risque que ça ne marche pas. Mine de rien, elle se releva lentement, d'un air calme, de sa chaise et observa attentivement le petit groupe qui se tenait en face d'elle.

«Bien entendu. Seulement, il y a eu un léger petit contretemps, qui fait que je n'ai pas le nouvel Occulté parmi nous.», expliqua-t-elle en remarquant que le regard sévère du jeune chasseur s'intensifiait, «Toutefois, j'ai très bien pu le voir et je peux même vous donner, outre sa description, deux informations supplémentaires qui pourraient se révéler être d'un grand intérêt pour toi et ta petite bande armée de couteaux.».

- Et tu crois vraiment que l'on va gober cette histoire ridicule ? ajouta la blonde qui s'avança d'un pas décidé vers la vampire.

«À vous d'en décider.», répondit Katerine avec nonchalance, «Mais si vous me tuez maintenant, d'un côté vous ne saurez jamais ce que j'ai découvert hier soir. De l'autre mes frères et sœurs vous traqueront toute la nuit et finiront par vous tuer.».

Sébastien s'approcha un peu plus de la vampire, le visage émanant une expression neutre, qui ne plut pas à cette dernière.

- J'aimerais te croire vampire, dit-il d'un ton amère. Seulement vois-tu, le fait est que je ne te crois pas.

«Alors tu ne me croiras pas si je te dis que l'Occulté que vous recherchez est en fait le Beta de La Bête ? continua Katerine qui ne flancha pas devant la menace du chasseur.

Sébastien haussa légèrement les sourcils, tentant vainement de masquer sa stupeur devant cette révélation. La vampire, entendant le rythme accéléré du cœur du chasseur, se mit à sourire.

- Oh, tu le savais déjà n'est-ce pas ? spécula-t-elle froidement

- Seb, de quoi parle-t-elle ? questionna Kevin perplexe.

Sachant qu'il ne pouvait rien révéler à ses camarades, du moins pour l'instant, le jeune chasseur rangea son poignard à la lame recourbée et regarda la rouquine droit dans les yeux.

- Très bien Katerine, dit-il d'un ton faussement courtois. Expose nous tes soi-disantes découvertes.

Pendant un bref instant, la vampire ricana. Elle pouvait facilement répondre à sa question pour qu'il s'en aille, mais elle savait que tôt ou tard il reviendrait un jour pour lui faire regretter de l'avoir défié.

Elle posa alors son regard sur Kevin, tenant une flèche sur son arc tendu.

- Votre jeune chef ici présent vous cache un lourd secret, dit-elle amusée.

***

Parallèlement, au repaire des loups-garous de la meute Lune, Marcus tentait vainement de calmer les membres de sa meute. Ce spectacle n'échappa pas aux yeux de Roman, de Sandra et de Grégoire, adossés au mur de pierre à l'entrée de l'infirmerie. Même Elias, qui jusqu'à alors n'avait jamais contredit son chef, commençait à douter de ses capacités de commandement.

«Tout ça ne serait pas arrivé si tu n'avais pas fais venir ces deux gosses dans notre repaire!», s'exclama-t-il, «Sonia risque de mourir et toi tu te préoccupes plus d'un autre loup-garou qui se promène dans cette ville. Qu'est-ce que ça peut bien nous faire?».

«Je m'inquiète pour ce loup là dehors justement, parce que vu l'état dans lequel il a réduit notre compagne, il ne représente pas un danger seulement pour les humains, mais pour nous également!», répliqua Marcus d'un ton énervé.

Malheureusement la situation ne s'améliora pas, car les membres de la meute s'inquiétèrent encore plus.

«Moi je propose que l'on jette ces deux garçons hors de notre repaire.», dit l'un d'eux d'un ton ferme.

«Pour qu'ils se fassent attraper par des membres de l'Ordre et qu'ils nous balancent? Sûrement pas.», ajouta une fille aux courts cheveux auburns.

«Alors qu'est-ce que tu propose hein?», reprit l'homme d'avant.

«Simple: on les tue et le problème est réglé.».

Les voix étaient très fortes et cette idée pétrifia brièvement les deux amis qui se fixèrent, le regard empli d'inquiétude.
Une sensation qui s'amplifia lorsque les autres membres de la meute s'accordèrent sur cette idée.

Marcus tenta de s'interposer, mais Elias le poussa brusquement avant de tourner son attention sur Roman et Grégoire. Il s'avança lentement, ses yeux devenus jaunes et les griffes aux mains, mais sa progression fut stoppée par Sandra qui s'interposât entre lui et les garçons.

«Pousse toi Sandra!», s'exclama le second de Marcus.

«Tu veux les tuer, faudra d'abord passer sur mon cadavre!», répliqua la brune d'un ton dur et déterminé.

Grégoire resta bouche bée face à cette réaction de la part de la jeune fille; tandis que Roman esquissa un léger sourire.

Elias grogna fortement, tout autant que Sandra. Les deux étaient sur le point de se battre, mais une voix provenant de l'infirmerie les arrêta.

«Arrêtez!», hurla une jeune femme aux cheveux blond-platine entourée d'une longue couverture en fourrure, s'avançant hors de la grotte soutenue par une canne en bois.

Les yeux d'Elias reprirent leur teinte normale tandis qu'il s'approcha de Sonia pour la prendre dans ses bras. Elle l'étreignit à son tour.

Marcus s'approcha mais au moment où il allait parler, Bertrand le devança.

«Sonia, peux tu nous dire quel genre de loup-garou vous a attaqué ?», demanda-t-il.

Sonia allait lui répondre mais Elias se retourna vers le sorcier, avec une expression agacée.

«Ça suffit!», s'exclama-t-il à la limite de la colère, «Vous ne voyez pas qu'elle est fatiguée?».

«Elias ça va aller.», dit la jeune femme d'un ton calme et serein.

«Non ça ne va pas! Tu as failli mourir Sonia, alors maintenant tu vas te reposer et ensuite...».

«Je t'ai dit que ça va!», l'interrompit-elle brusquement.

Elias recula face à la réaction de la jeune femme. C'était la première fois qu'elle agissait ainsi face à lui.
La jeune blonde avança encore d'un pas et s'assit sur un rocher juste à côté d'elle.

«C'était un loup énorme.», dit-elle calmement en commençant son explication, «Il était plus grand que n'importe quel autre loup-garou et ses yeux étaient d'un rouge ardent. Toutefois, la seule émotion que je ressentais, c'était de la haine. De la haine pure pour tout.».

Tous se regardèrent les uns les autres, d'un air étonné et préoccupé. Même Marcus resta ahuri face à cette révélation. Il ne le laissa pas paraître, mais une terrifiante hypothèse se forma dans son esprit.

Bertrand s'approcha de Sonia et lui posa une nouvelle question.

«Sonia, est-ce que ce loup t'a parlé? T'a-t-il dit quelque chose qui puisse nous permettre de pouvoir le retrouver?».

La jeune femme secoua lentement la tête.

- La Bête, dit soudain Roman, en attirant le regard toute la meute sur lui. Il m'a parlé pendant un long moment. Il a dit qu'il appartenait à un groupe d'Occultés appelés « Les Bêtes » et il parlait d'une soi -disant"Lune de Sang".

Bertrand écarquilla légèrement les yeux, détail qui n'échappa pas aux yeux de son fils.
Marcus quant à lui amena une main à la bouche, pour tenter de cacher un soupir de terreur et d'énorme inquiétude.

«Ce loup...», dit Philomène qui venait tout juste de sortir de l'infirmerie avec une gourde à la main, «...il avait une voix glaciale et menaçante n'est-ce pas?».

Roman hocha la tête en guise de réponse, mais il resta surprit de constater que la mère de Grégoire connaissait la voix du monstre qui avait essayé de le tuer il y a quelques heures de cela.

«Maman?», dit Grégoire d'un ton inquiet.

Cette dernière ne lui répondit pas, mais il paraissait clair aux deux garçons que la pharmacienne et ce loup-garou s'étaient déjà rencontrés et que, très probablement, cela ne c'était pas très bien terminé.

- Elias, dit Marcus d'un air perdu. Toi, Mélanie et Sonia allez dans ma grotte, je vous y rejoins dans un instant.

Elias voulut s'opposer, mais il fut stoppé par Sonia qui, d'un regard suppliant, l'invita à se retenir. Le Beta accepta et aida sa compagne à se relever.
Rejoins par Mélanie, les trois loups-garous partirent vers la grotte de leur leader.

«Les enfants...», continua l'alpha en regardant les ados, toujours adossés à la paroi de pierre, «...rentrez avec Philomène. Nous parlerons plus tard de cette histoire.».

À contre-cœur, Roman, Grégoire et Sandra suivirent Philomène qui se tenait devant un portail ouvert par Bertrand.

***

  Une fois franchi le portail, les garçons reconnurent la maison de Grégoire, entourée d'une haute haie d'orties, parsemée de fleurs.

Philomène les rejoignit et ouvrit la porte du jardin. Tandis que les garçons entrèrent sans regarder autour d'eux, Sandra resta bouche bée et émerveillée par ce qui se présentait sous ses yeux.

«Incroyable!», s'étonna-t-elle à voix basse pour ne pas déranger les voisins qui dormaient.

Un long sentier de petits galets, dont les bords regorgeaient de plantains, conduisait vers la maison.

La pelouse qui se trouvait tout autour du sentier, était parsemée de petites fleurs qui, grâce à la lumière du quartier de lune, exaltaient leurs couleurs roses et violettes.
Un peu plus loin, se trouvait de petits arbustes, sur lesquels pendaient des fruits, que Sandra reconnut comme étant des pommes.

«Ce jardin est tout simplement splendide.», s'émerveilla la brune.

Ils arrivèrent à la porte et Philomène l'ouvrît, laissant les jeunes entrés en premier.

Vu de l'extérieur la maison ne semblait pas très grande, mais l'intérieur c'était une toute autre histoire. Il y avait un long couloir, au bout duquel se trouvait un escalier qui menait au premier étage. Sur les côtés se trouvait 4 grandes ouvertures. Les deux du côté gauche donnait sur un grand salon spacieux, tandis que les deux autres sur le côté droit conduisaient à la cuisine et à la salle à manger.

Un détail attira l'attention de Grégoire pendant qu'il observait la porte d'entrée.

«C'est du bois de houx pas vrai maman?», demanda-t-il à sa mère, les yeux rivés sur le bois qui encadrait la porte.

Cette dernière hocha la tête en guise de réponse. Elle se dirigea vers la cuisine, laissant les jeunes ados dans le couloir.

«Quoi?», questionna Sandra en regardant également la porte d'entrée, «Attends comment tu le sais?».

«Mes parents voulaient que j'apprenne à étudier les plantes.», expliqua le jeune garçon, «Avant je ne comprenait pas pourquoi. ».

«Elles servent de protection contre les créatures mythiques.», expliqua la druide pendant qu'elle verrouillait la porte, «Mais ce sont aussi d'excellents remèdes.».

«Et depuis tout le temps que tu vis ici tu t'en es jamais aperçu?», s'interrogea Sandra.

«Et bien, je n'y jamais vraiment prêté grande attention.», répondit Grégoire, «Et puis j'ignorais l'existence des créatures mythiques.».

Terminée son explication, petit à petit Grégoire commençait à frissonner, comme si un courant d'air froid lui parcourait le dos. Sandra s'en aperçut et recula.

«Greg?», dit Roman en voyant son ami tremblé de plus en plus, «Grégoire mais qu'est-ce que tu as?».

«Il a faim.», répondit Philomène en revenant de la cuisine avec à la main un verre remplid'un étrange liquide rouge.

Le jeune brun se retourna et, malgré son visage pâle et ses canines pointues, la vue du verre a que sa mère tenait le dégoûta encore plus.

«Sérieusement maman?», questionna-t-il en soufflant du nez exaspéré et dégoûté.

«Je sais que l'aspect est peu ragoûtant, mais pour éviter que tu ailles mordre quelqu'un c'est la seule solution.», expliqua-t-elle en tendant le verre à son fils.

Sachant qu'il n'avait pas d'autre choix, Grégoire se mit à boire avec réticence.

Philomène quant à elle, invita le trio à s'installer dans le salon où ils s'assirent sur le sofa. La pharmacienne retourna en cuisine et en revint quelques secondes plus tard; elle posa un plateau avec des petits casse-croûtes sur la table basse et s'assît sur un canapé à côté.

- Philomène, commença Roman en se tournant vers elle. Probablement tu ne nous diras rien tant que Bertrand et Marcus ne seront pas là, mais il faut que l'on sache: qui est ce loup-garou.

La mère de Grégoire baissa la tête sans rien dire. Roman savait qu'elle ne parlerait pas, mais il se devait d'essayer. Malgré cela, il sentait les battements accélérés du cœur de Philomène; il comprit alors qu'elle ressentait beaucoup de peine, mais ce n'était pas pour le loup.

«Personne ne se souvient de son nom.», dit elle en brisant le silence qui s'était installé.

Les yeux des trois jeunes se tournèrent vers elle, le regard empli d'interrogations.

«Cela fait longtemps qu'il a été oublié.», continua-t-elle, «Malheureusement, il a réussi à laisser son empreinte dans l'histoire. Une empreinte marquée par le sang des centaines d'innocents qu'il a tués.».

«Madame Volta, qui est-ce?», demanda Sandra, d'un ton inquiet à la limite de la terreur.

- Il s'agit du loup-garou le plus connu de tous: la Bête du Gévaudan ! répondit-elle les yeux pleins de larmes et le cœur battant tel un tambour.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top