Chapitre 2

  L'université d'Embursville.

Le lieu idéal pour tous ceux qui rêvent d'un avenir meilleur, tel était le slogan pour tous les nouveaux étudiants.

Roman et son ami Grégoire étaient parmi eux. Ils avaient toujours rêvé d'être acceptés et au bout du compte, c'est ce qu'il s'était produit. Les cours du matin venaient de se terminer et tous les deux se trouvaient dans les couloirs de l'établissement.

- Alors mon ami, comme s'est passée ta matinée ? demanda enthousiaste Grégoire.

- Oh non ! S'il te plaît, j'ai l'impression d'entendre ma mère, répondit sarcastiquement Roman.

Les deux amis se mirent à rire à cette remarque. Après quelques instants, Roman reprit son souffle et afficha un air plus sérieux.

- Non sinon, ça c'est bien passé merci, reprit-il. Et toi alors ?

Grégoire ouvrit grand les bras et secoua légèrement la tête, un large sourire dessiné sur son visage.

- Fantastique ! s'exclama-t-il joyeux. Tu n'imagines pas à quel point l'archéologie est superbe.

Grégoire était aux anges. Le jeune homme ne pouvait contenir sa joie. Il avait réussi à intégrer l'université, avec son meilleur ami, et maintenant il pouvait faire ce qu'il aimait le plus. Que pouvait-on vouloir de plus dans la vie ?

Les deux amis continuèrent de parler tandis qu'ils se dirigeaient vers la sortie. Une fois dehors un étrange bruit arriva aux oreilles de Roman, qui se tourna aussitôt vers son ami.

- C'était quoi ce bruit ? demanda-t-il inquiet.

- Quel bruit ?

- Tu n'as pas entendu ? On aurait dit de l'eau qui bouillonne sur le feu.

Le même bruit recommença, mais cette fois il n'échappa pas aux oreilles de Grégoire.

- Ah ça ? C'est rien, juste mon estomac qui crie famine, répondit ce dernier le sourire aux lèvres.

- Ah d'accord j'ai compris, dit son ami en levant les yeux aux ciel. Allez viens, allons prendre quelque chose à manger.

Ils se dirigèrent vers un food-truck garé de l'autre côté de la place en face de l'université. Malgré l'emplacement idéal pour attirer les clients, très peu de gens faisait la queue, tandis que tous les autres food-truck regorgeaient d'étudiants affamés.

- Le Red Wolf ? s'interrogea Roman, en voyant le titre écrit en rouge, entre les crocs d'un loup.

- Accrocheur comme nom je trouve. Pas toi ? dit Grégoire en se tournant vers son ami.

- Ouais, enfin, si ils ne vendent rien d'autre que de la viande, pour toi tout va bien.

La remarque de Roman fit rire son ami.

Ils s'approchèrent du véhicule pour voir le menu proposé.

- Bonjour jeunes gens, que désirez-vous prendre chez le Red Wolf ? demanda le cuisinier.

- Bonjour euh... nous voudrions savoir ce qu'est le plat du jour, dit Roman un peu hésitant.

- Oh très bon choix: il s'agit de côtelettes de porc avec de la sauce barbecue, le tout accompagné de frites ou bien d'une bonne salade, si vous préférez, expliqua le cuisinier.

- Hum... pour moi ce sera le plat du jour merci, exulta Grégoire. Avec des frites cela va de soi.

- Pour moi un double cheeseburger avec de la sauce cheddar s'il vous plaît, ajouta son ami, tandis qu'il sortit son portefeuille de sa poche.

Le cuisinier se mit tout de suite au travail.

En à peine quelques minutes, il servit les deux jeunes qui partirent s'asseoir sur des marches d'escalier.

- Tu sais, je trouve que ce food-truck fait des plats incroyables , dit Grégoire la bouche pleine.

Roman laissa échapper un rictus.

- Ouais tu dis ça seulement parce qu'il vend des plats à base de viande. Et on sait tout les deux que tu ne dis jamais non à un tel plat, ironisa ce dernier.

- Eh! Ma mère me prépare des légumes du matin au soir alors... soit un peu compréhensif je te prie.

Ils rirent une nouvelle fois et continuèrent leur repas.

- Alors, reprit Grégoire d'un ton plus sérieux. Qu'est-ce qui te tracasses aujourd'hui ?

- Pardon ?

- Ça va Roman, je sais qu'il y a quelque chose qui ne vas pas. Au début tu étais enthousiaste a l'idée qu'on aille à l'université ensemble, mais là...

Le jeune homme comprit où son ami voulait en venir. Mais comment pouvait-il lui expliquer ? Ce douloureux souvenir ne serait jamais parti de toute façon, alors à quoi bon en parler ?

Non ! Il ne pouvait pas faire ça, pas à son meilleur ami ! Ils s'étaient toujours tout dit, que ce soit bien ou mal. Hors de question de commencer à cacher des choses.

Roman inspira profondément, puis il céda.

- C'est aujourd'hui.

Grégoire écarquilla les yeux d'un air confus.

- Aujourd'hui ça fait vingt ans, continua Roman. Il est parti ce jour même, en quittant ma mère, sans aucune explication.

- Tu parles de ton père, devina son ami.

Roman acquiesça en hochant vivement la tête. Son regard était devenu noir sous l'effet de la colère. Cependant, Grégoire y perçut aussi une certaine tristesse.

Le jeune homme posa une main sur l'épaule de son ami et reprit la parole.

- Écoute Roman, ce qu'il s'est passé il y a vingt ans n'est absolument pas ta faute. C'est lui qui s'est tiré quand il a su que ta mère était enceinte de toi.

- Je ne me sens nullement coupable Greg. C'est juste que... je ne me l'explique pas.

- Alors arrête de trop y penser ! Parce que sinon ton cerveau va finir par exploser.

Roman releva la tête vers son meilleur ami et esquissa un discret sourire.

- Et puis, peu importe le problème, poursuivit Grégoire. Moi je serai toujours présent pour t'aider. On est les meilleurs amis du monde après tout.

Grégoire avait décidément un talent pour trouver les bons mots. Le petit sourire de Roman s'agrandit de plus en plus.

Soulagé de ce fardeau et fier d'en avoir parler avec son ami, le jeune homme retrouva son enthousiasme habituel. Il attrapa la mai de Grégoire et tous les deux serrèrent fortement leur poignée. Ils s'apprêtèrent à poursuivre leur repas lorsqu'ils entendirent une forte discussion.

***

  Devant le Red Wolf, une jeune femme aux longs cheveux bruns lisses s'approcha du cuisinier, occupé à faire du rangement dans son étroite cuisine.

- Je peux savoir ce que tu fais ? demanda-t-elle d'un ton indigné.

Le cuisinier se retourna et la regarda de bas en haut, sans pour autant perdre son calme.

- J'ai fais ce que chaque vendeur et chef de food-truck fait: j'ai servi des clients qui sont venus me voir pour manger quelque chose de bon.

La mystérieuse inconnue se retourna un bref instant vers les escaliers. Constatant que sa discussion avec le chef n'était pas passée inaperçue, elle se rapprocha de ce dernier et lui parla à voix basse.

- Tu oublies le fait que ces deux là ne sont pas comme nous ! On ne sert pas les humains ! répliqua-t-elle sèchement.

Malgré la remarque, le cuisinier ne faiblit pas et garda son calme.

- Ma chère, oublierais-tu que tu vis au milieu des humains ? Si tu ne veux pas te faire remarquer, comporte-toi comme eux, continua le cuistot.

La jeune femme secoua lentement la tête mais resta muette.

- Par ailleurs, quel mal y-a-t-il à essayer de socialiser avec d'autres personnes qui n'appartiennent pas à ton petit groupe ?

- Et toi tu sembles oublier que je n'ai absolument rien à voir avec les humains ! s'écria-t-elle à la limite de l'agacement.

Le chef observa les garçons sur les marches. Ils étaient en train de manger leurs plats mais, pendant un court instant, il crut qu'ils étaient en train d'écouter toute la conversation. Ou du moins, qu'ils essayaient.

Ainsi le cuisinier jeta le chiffon par terre et prit un air plus sérieux.

- Arrête avec ces histoires à la noix ! reprocha-t-il à la fille.

Cette dernière recula d'un pas, surprise et abasourdie.

- Si tu n'aimes pas mes plats, alors va voir ailleurs.

La jeune inconnue haussa les sourcils d'un air confus. Ce n'est que lorsqu'elle aperçut les garçons, toujours assis sur les marches d'un air surpris, qu'elle comprit le changement de comportement du cuisinier.

Ce dernier se rapprocha et reprit la parole, à voix basse cette fois.

- Je sais très bien ce que ça veut dire vivre dans la peur et continuer à vouloir se cacher. Mais crois-moi sur parole: le meilleur moyen de se cacher, c'est d'être vu en public.

Voyant qu'elle ne répliqua pas, le cuisinier en profita pour poursuivre.

- De plus, tous les humains ne sont pas cruels. Tu pourrais aussi te rapprocher de certains d'entre eux.

Face à cette dernière remarque, la jeune femme écarquilla les yeux, choquée par ce que le cuistot venait de dire. Surtout, lorsque ce dernier lui indiqua d'un rapide mouvement du menton les deux ados assis sur les marches.

- Et je suis censée faire quoi dans ce cas ? Leur révéler la vérité ?

La fille s'éloigna du food-truck, l'air agacé et fatigué. Elle se dirigea vers la ruelle qui se trouvait à coté des escaliers où se trouvaient Roman et Grégoire. Les deux ados la suivirent discrètement du regard.

- Wow, ça avait l'air sérieux, dit Roman perplexe.

- Ouais. D'après toi qu'est-ce qu'il lui a prit ?

Roman secoua la tête.

- J'en sais rien Greg, mais ça semblait très personnel.

Ce dernier leva et baissa lentement la tête.

- Heureusement que ça n'a rien à voir avec la nourriture. Ces côtelettes sont un vrai régal.

Roman souffla bruyamment mais il ne put s'empêcher de sourire. Son ami avait vraiment le don de lui remonter le moral.

***

  Les cours de l'après-midi venaient de commencer. Alors que la plupart des étudiants étaient rentrés chez eux, certains avaient rejoint leurs classes respectives.

Dans le cas de Ayla, elle avait rejoint le gymnase dans lequel elle s'était inscrite pour les cours de boxe, la seule activité sportive dans laquelle elle se sentait épanouie. Il y avait à peine une dizaine d'étudiants, mais la chose ne la gênait pas pour autant, étant donné le peu de gens que la jeune fille fréquentait.

Après quelques minutes, un homme entra dans le gymnase. Il avait dans les 40 ans, ses cheveux étaient d'une curieuse teinte grise foncée. Il avait une petite barbe et ses yeux étaient de couleurs noisettes.

- Bonjour à tous. Je suis le professeur Hans et cette année je serai votre instructeur de boxe, se présenta-t-il. Alors commençons par faire l'appel et ensuite débutons la leçon.

Le professeur prit alors la tablette et, tout en faisant glisser son doigt sur l'écran, il commença à appeler les élèves un par un.

Tout comme les autres, Ayla leva la main et répondit « présent ».

L'enseignant approcha de la fin lorsque deux jeunes étudiants arrivèrent essoufflés. Malgré ce petit contretemps, il ne s'arrêta pas et poursuivit l'appel.

- Grégoire Volta, dit-il en regardant les retardataires.

- Présent, dit le premier en inspirant profondément.

Le professeur hocha lentement la tête avant de poser nouvellement son regard sur la tablette.

- Et Roman Vicars, dit-il en regardant l'autre retardataire.

Tandis que le jeune homme reprit rapidement son souffle, Ayla l'observa attentivement.

- Oui, présent, dit-il apparemment moins exténué que son compagnon.

Le son de sa voix résonna dans les oreilles de la jeune fille, comme le doux son des plantes agitées par la brise. Elle reprit rapidement ses esprits et se concentra sur les mots du professeur qui expliqua la leçon du jour et les exercices de ce premier cours de boxe.

***

  Plus tard, après plusieurs pompes, squats, tractions et autres exercices, le cours arriva à son terme. Tandis qu'Ayla était en train de finir de ranger ses affaires, elle remarqua Roman en train de faire des tractions supplémentaires. Elle resta appuyée sur la porte des vestiaires tandis que le garçon terminait ses tractions. Lorsqu'il se tourna vers elle, Ayla détourna son regard du sien.

- Salut ! lui dit-il.

- Hum, désolée si je te regardais, ajouta rapidement la jeune blonde apparemment gênée.

- Ah non, t'inquiète pas. Ça ne serait pas la première fois non plus.

Elle le regarda de nouveau, l'air surprise.

- Quoi ? s'exclama-t-elle avec un léger sourire.

Si tôt compris son erreur, Roman se ressaisit.

- Euh non rien, c'était juste une... une pensée à voix haute désolé, s'empressa-t-il de dire.

Le voyant embarrassé, Ayla ne put s'empêcher de rire. Roman quant à lui, devint encore plus rouge d'embarras.

- Excuse moi, je suis Roman. Roman Vicars, ajouta-t-il en lui tendant la main.

- Oui je sais. Tu es le retardataire, dit Ayla d'un ton amusé, en lui serrant la main .

- Oui, enfin... je ne suis pas le seul alors, ça risque d'être dur de savoir à quel retardataire tu fais allusion si c'est le surnom que tu veux me donner.

Sur ces mots, Ayla tenta de contenir un rire. Roman s'en aperçut et son sourire s'élargit encore plus.

- Effectivement. Il va falloir que je réfléchisse quel surnom t'irais bien dans ce cas, dit la blonde d'un air amusé, tout en renvoyant son sourire à Roman.

- Et toi en revanche, tu es Ayla, la fille au crochet du droit.

Face à cette constatation, Ayla haussa les sourcils, ne pouvant masquer son étonnement.

- Ah bon ? Tu trouves que j'ai un bon crochet du droit ?

- Bah disons que par rapport aux autres filles, tu es celle qui frappe le mieux.

Elle sourit face son compliment, laissant paraître ses dents blanches comme neige.

Pendant un bref instant, Roman en resta ébloui, mais la jeune blonde qui se tenait devant lui ne le vit pas.

- Ravi de te rencontrer Roman, dit-elle enchantée.

- Ravi de te rencontrer Ayla.

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