Chapitre 15

Incapable de pouvoir se libérer des liens qui le tenaient attaché, Grégoire ne savait plus quoi faire. Coincé dans un endroit isolé, avec la même rouquine qui avait tenté de l'agresser il y a une dizaine de jours, sans espérer recevoir de l'aide, il pensait que sa dernière heure était venue.

Katerine l'observait se débattre avec un air amusé. Son ricanement se répandait dans la sombre pièce telle une ombre machiavélique, prête à jaillir du noir pour saisir sa victime.

Pris par le désespoir, le jeune homme tenta une toute dernière fois de tirer sur les cordes qui le retenait.

Rapidement il s'épuisa et renonça. Il releva lentement la tête, le front et les yeux légèrement humides.

- Vous voulez me tuer ? C'est pour ça que vous m'avez amené ici ? demanda-t-il à la vampire.

- Oh voyons mon petit chou pourquoi le devrais-je ? répliqua cette dernière dans un faux geste de compassion.

Grégoire ne répondit pas, fixant le sol poussiéreux, les larmes qui commençaient à lui monter au yeux. Katerine se rapprocha de lui et caressa son visage. Ce dernier se retira vivement dans un spasme, voulant se soustraire au toucher de la rouquine.

La vampire le regarda un moment avant de rompre le silence qui s'était installé dans la pièce.

- En réalité, mes hommes t'ont amené ici, parce que je leur ai demandé, dit la femme.

Les yeux de Grégoire s'agrandirent. Son sang se glaça encore plus à cette révélation.

- Quoi ? Pourquoi ? demanda-t-il terrorisé.

- Parce que tu m'intrigues mon chou. Un Voyant ça ne se voit pas tout les jours.

- Un Voyant ? Mais de quoi vous parlez ?

- Oh alors tu ne sais pas ce que tu es ? Quel dommage.

Katerine s'agenouilla devant le jeune homme et le regarda avec une apparente tendresse.

- Chut n'ai crainte. Je pourrais t'aider à comprendre.

- Ah d'accord, alors... ça veut dire que vous allez me laissez partir ?

Le sourire qui se dessina sur le visage de la rouquine, ne plut pas du tout à Grégoire.

- Je le pourrais, reprit la vampire d'un ton froid. Hélas, j'ai bien peur de ne pas pouvoir.

Grégoire sentit avoir la chair de poule.

- P...pourquoi ? balbutia-t-il d'un ton angoissé.

- Vois-tu mon petit, il y a dans ce monde deux grandes menaces qui pèsent sur mon espèce: les chasseurs et les loups-garous, expliqua la rouquine. J'ai vécu pendant de nombreux siècles, et la seule chose commune entre toutes ces époques est la disparition de plusieurs espèces d'Occultés, les unes après les autres. Sais-tu pourquoi ?

Grégoire resta muet, les yeux rivés vers le sol. La vampire lui tira le menton vers le haut, obligeant le jeune garçon à la regarder.

- Parce que aucune espèce d'Occultés est assez forte pour tenir tête aux chasseurs, reprit-elle, assumant un air plus sérieux. Leur misérable Ordre existe depuis le Monde Grec, depuis les temps anciens ! Cela fait trop longtemps qu'ils s'amusent à nous chasser comme des animaux. Je ne tiens pas à ce que mon espèce, soit la prochaine à être effacée de la surface du monde.

- Et bien, j'avoue que je comprends votre colère et votre inquiétude. Cependant, je ne comprends toujours pas pourquoi vous ne voulez pas me laisser partir.

Le silence retomba à nouveau dans la pièce.

Grégoire sembla hésiter à vouloir poursuivre la discussion, mais s'il y avait la moindre chance de pouvoir s'échapper il devait la saisir.

- Écoutez, je vous jure je ne dirais rien à personne, reprit-il. Vous voulez rester caché et ne plus être embêté ? Très bien, dites-le et je vous assure que vous ne me reverrez plus.

- C'est très gentil de ta part mon chou, souffla Katerine d'une voix douce.

- Alors pourquoi ne me relâchez-vous pas ?

- Malheureusement, mon groupe n'est pas assez puissant pour combattre directement l'Ordre des Chasseurs. Pour cela il faut que nous soyons plus nombreux.

Les yeux de Grégoire s'écarquillèrent aux derniers mots de Katerine. Rapidement il comprit ce qu'elle voulait lui faire, son cœur battait de plus en plus vite.

- Vous... vous voulez me... balbutia-t-il, totalement paralysé par la peur.

- Ne t'en fais pas, ça ne sera pas long, dit la vampire de son ton glacial, alors que ses dents laissèrent place à de redoutables crocs pointus.

- Non attendez. Non ! À l'aide !

Katerine posa sa main sur la bouche du jeune homme, l'empêchant ainsi de pouvoir crier.

- Chut, n'aie crainte, dit-elle de sa voix ammaliatrice. Tout va bien.

Tandis qu'elle s'approcha lentement du cou de sa victime, Grégoire se tortilla pour se libérer mais en vain. La prise de la vampire était bien trop forte et sa voix douce et suave semblait le priver de toute volonté.

Alors que tout sembla perdu pour le garçon, un bruit de vitre cassée résonna dans toute l'épicerie. Katerine se redressa subitement, tout en grinçant des dents. À cause de la faible luminosité, la vampire était incapable de voir ce qu'il se passait, ni même qui pouvait être entré.

Soudain, quelque chose la percuta de plein fouet, l'envoyant heurter violemment une des étagères. La vampire poussa un cri de douleur avant de s'écrouler au sol. Grégoire releva la tête et vit avec étonnement son meilleur ami, tenant un tuyau à la main.

- On ne peut pas te laisser 5 minutes tout seul hein ? ironisa ce dernier.

- Et toi t'en as mis du temps ! répliqua le garçon aux cheveux brun, le sourire aux lèvres et les yeux humides.

Roman enlaça son meilleur ami, les yeux remplis de joie.

- Roman, écoute j'apprécie vraiment de te revoir mais... dit Grégoire, indiquant les cordes qui le tenaient attaché à la chaise.

- Oh oui bien sûr, dit Roman en comprenant ce que son ami insinuait.

Il tenta dans un premier temps de dénouer les cordes, mais rien à faire. Il jeta un rapide coup d'œil, pour comprendre comment défaire les noeuds complexes qui retenaient son ami prisonnier.

- Hum Roman, je ne voudrais surtout te presser mais... cette garce risque de se relever d'un moment à l'autre, avertit Grégoire.

Roman savait que son ami disait vrai. Il ne pouvait prendre le risque d'attendre encore plus longtemps.

Il ferma alors les yeux et se concentra. Sa respiration était lente et contrôlée, rien ne se produisît pendant quelques secondes. Lorsqu'il les rouvrit, ils étaient d'un jaune intense et profond, comme le feu. Roman fixa sa main droite et, d'un coup rapide et inattendu, ses ongles furent remplacés par de longues griffes.

Grégoire resta bouche bée devant cette ce spectacle. Il voyait pour la première fois son ami utiliser ses pouvoirs de loup-garou. Panique et émerveillement se mélangèrent dans son esprit.

Roman quant à lui, d'un geste rapide et précis, coupa le noeud principal qui reliait toutes les cordes l'une à l'autre. Les liens tombèrent comme des feuilles en automne, permettant à Grégoire de se relever et de regarder son ami droit dans les yeux, toujours jaunes.

- Roman ? questionna le jeune brun, se demandant si c'était son ami auquel il s'adressait. Mon vieux, est-ce que tu m'entends ?

Roman le fixa pendant un moment, avant de fermer ses yeux. Lorsqu'il les rouvrit, ils avaient retrouvés leur couleur d'origine et ses griffes étaient redevenues des ongles normaux.

- Ça fait plaisir de te retrouver mon ami, dit-il en regardant Grégoire, le visage souriant.

- Moi aussi. Mais, comment as-tu réussi à...

- À ne pas me transformer entièrement ? Je l'ignore. J'ai juste suivi les consignes de Marcus. Je me suis concentré sur ma respiration pour avoir le plein contrôle et... j'imagine que tu connais la suite

- C'est l'un de ses conseils ? Et depuis quand tu suis les conseils d'un loup-garou ?

- Depuis que j'ai suivi ceux de Sandra pour te retrouver.

- Attends, quoi ?

- C'est une longue histoire. Je te la racconterai une fois qu'on sera loin d'ici.

Grégoire hocha la tête tout sourire, en accord avec la dernière phrase de son ami. Malheureusement, son enthousiasme fut de courte durée, lorsqu'il remarqua les deux hommes, qui l'avaient amené ici, se tenir fermement devant la porte et la fenêtre brisée.

- Désolé mes garçons, dit Katerine alors qu'elle se relevait avec difficulté. J'ai bien peur qu'aucun de vous deux n'aille nulle part.

***

La nuit n'était pas de tout repos pour Ayla non plus. Elle n'arrivait pas à fermer les yeux, sans repenser à ce fameux baiser avec Roman. Elle se sentait désemparée: avait-elle bien fait ou était-ce trop précipité? Elle n'arrivait pas à trouver la réponse.

Aime-t-elle vraiment ce garçon, ou bien est-il juste une passade comme beaucoup d'autres ? Tant de questions auxquelles elle ne savait pas quoi dire.

Elle finit par se lever du lit et de rejoindre la salle de bain au rez-de-chaussée. Elle descendit les escaliers d'un pas léger, mais avant de rejoindre son objectif, elle entendit des voix provenants de la cuisine.

Toutes les deux lui étaient familières , mais elle n'arrivait pas à comprendre quel était le sujet de la discussion, donc elle s'approcha furtivement derrière le mur, tendit l'oreille et écouta.

- Ils n'ont toujours pas rappelés. Je commence vraiment à me demander si ça a été une bonne idée de laisser ces deux là mener ces recherches inutiles, dit Victoria agacée, tandis qu'elle faisait les cents pas autour de la table.

- Chérie, tu ne vas pas recommencer ? questionna Sébastien. Je t'ai déjà expliqué pourquoi on ne peut rien leur révéler, pour l'instant.

- Non je sais bien le pourquoi. Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi Beth et Kevin ?

- Parce que, outre le fait qu'ils sont les plus jeunes, ils se complètent l'un l'autre.

À cette phrase, une expression perplexe se dessina sur le visage de la fille, dont les longs cheveux blonds retombaient sur ses épaules.

- Qu'est-ce que tu veux dire ? demanda-t-elle.

Sébastien prit une profonde inspiration et lui répondit.

- En tant que chef, j'ai le devoir de planifier et de former les binômes de mon groupe. Par exemple, Jeff est beaucoup trop hyperactif alors que Sophie préfère plus étudier ses adversaires. C'est l'impatience du premier avec la sagesse du second, un duo qui peut marcher mais qui manque encore un peu d'équilibre.

Le garçon marqua une courte pause, pour être sûr que sa petite-amie suive son raisonnement. Constatant qu'elle comprenait où il voulait en venir, le jeune chasseur continua.

- En ce qui concerne Kevin et Beth, le premier démontre de bonnes capacités combattives, la deuxième fait preuve d'un très bon sens de l'observation. Mets les ensemble et il forme un duo parfait.

Victoria réfléchit aux paroles de Sébastien.

- Je vois. Et pourquoi tu ne m'as rien demandé ? questionna-t-elle.

- Parce que de un, tu es irrémédiablement impulsive. Et de deux, tu es la dernière personne au monde que je veux voir blessée.

Elle s'approcha du garçon et le fit s'asseoir sur une chaise. Elle se mît à califourchon sur lui et enroula ses bras autour de son cou.

- T'es vraiment trop craquant, chuchota-t-elle avant de l'embrasser langoureusement.

Ayla, qui voyait toute la scène, sentit un noeud se former dans son ventre et son visage viré au vert.

- Et sinon, tu as eu des nouvelles de notre allié? reprit Victoria, après s'être séparée de Sébastien.

- Oui, lui au moins nous a révélé l'identité du nouvel Occulté. Il a même dit qu'il s'agissait de son Bêta.

L'expression curieuse sur le visage de Victoria disparut, laissant la place à une expression d'incroyable stupeur.

- Alors c'était lui ?

- Oui, même si il prétend que ça a été un accident.

- Et tu le crois ?

- On ne peut pas se fier à lui. C'est pourquoi j'ai besoin que tu ailles demain à l'université, et que tu demandes à ma chère petite sœur de surveiller un certain Roman Vicars.

À l'écoute de son nom, Ayla fut déboussolée. Plusieurs nouvelles questions se formèrent dans son esprit, déjà fortement troublé.

- Alors c'est comme ça qu'il s'appelle ? Roman Vicars ? Pourquoi ne pas tout simplement le capturer et le tuer ?

- Selon notre allié, il semblerait que ce garçon lui ait volé quelque chose. Et puis, il m'a promis qu'il s'en serait débarrassé pour nous. Et s'il y a une chose que tu dois savoir sur notre allié: c'est qu'il tient toujours parole, quand il s'agit d'éliminer une cible. Mais surtout, lorsqu'il sait qu'il risque sa peau si son existence est révélée à l'Ordre.

Victoria acquiesça, comprenant ce que son partenaire voulait insinuer.

- Hum, tu as sûrement raison, dit-elle d'un air pensif. Mais si il y a une chose que je sais: il est particulièrement fourbe. Ce qui signifie qu'il peut nous manipuler sans que l'on s'en rende compte.

- Peu importe, soit notre allié respectera sa part du marché soit je le tuerai, déclara Sébastien d'une voix ferme et décidée . Quoi qu'il en soit, le plan se déroulera comme prévu et à la fin, du MythWorld il n'en restera rien.

Sur ces derniers mots, Victoria embrassa à nouveau Sébastien.

Ayla en revanche, était restée choquée par ce qu'elle venait d'entendre.

- Bon Dieu Seb, mais qu'est-ce que tu veux faire ? pensa-t-elle en remontant silencieusement dans sa chambre, totalement perdue et abasourdie par toutes ses révélations.

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