Chapitre 10

  Un timide soleil, caché derrière de petits nuages, commença à illuminer le paysage. Les fleurs commencèrent à se réveiller, accompagnées par les chants des oiseaux.

Tandis que les habitants de la forêt se réveillèrent lentement l'un après l'autre, Sandra était déjà dehors, sur les rochers qui se trouvaient au dessus de la grotte, en train d'observer le lever du soleil. Elle repensa aux mots de Roman, qui depuis hier soir ne cessaient de la tourmenter.

- Maudit sois-tu Roman ! pensa-t-elle à voix haute.

- Cela ne te suffit pas d'avoir une dent contre un humain maintenant ? demanda sarcastique une voix masculine.

La jeune brune se retourna lentement, lançant un regard réprobateur à son alpha.

- C'est plus fort que toi hein ?

- Comment ça ma chérie ?

- Arrête papa ! Tu sais très bien de quoi je parle.

Marcus expira profondément.

- Je voulais juste savoir comment tu allais, répondit-il d'un ton innocent.

- Non c'est faux ! Tu voulais juste savoir comment je réagissais à l'idée que...

Sandra ne parvenait pas à terminer sa phrase. Son esprit était totalement confus, elle ne savait plus quoi faire.

Désemparée elle sauta de son perchoir et, tout en prenant la forme d'un grand loup au pelage brun, elle fonça droit vers le cœur de la forêt.

L'alpha secoua lentement la tête et rentra dans le repaire, après avoir jeté un dernier coup d'œil aux buissons derrière lesquels sa fille avait disparu.

- Ma chère fille, si tu savais que je fais ça pour ton bien, pensa Marcus.

***

  Parallèlement, de l'autre côté de la ville, Ayla était en train de poursuivre son entraînement matinal; même si ses pensées étaient ailleurs. Elle continua à se demander pourquoi ni Roman ni Grégoire ne l'avait appelé, plus particulièrement le jeune homme aux cheveux noirs.

Depuis son accident, elle avait du mal à reconnaître le garçon qu'elle avait rencontrée en cours de boxe, comme s'il n'était plus lui même. Certes ils se connaissaient depuis peu, pourtant quelque chose chez lui l'intriguait.

Cette distraction lui coûta toutefois un coup de bâton dans les jambes qui la fit tomber sur le dos.

- Et voilà ! La preuve que la distraction peut-être fatale, dit son entraîneur.

- T'étais vraiment obligé de faire ça ? demanda la jeune fille avec une colère retenue.

- Le jour où tu devras affronter un Occulté ou une quelconque menace, ces techniques te seront très utiles.

Michael s'approcha de Ayla pour l'aider à se relever, mais elle refusa. Il comprit alors que ce qui tourmentait son élève n'était pas quelque chose à prendre à la légère.

- Tu as envie de parler de ce qui te tracasse ? demanda-t-il sereinement.

Ayla agita la tête à droite et à gauche en guise de réponse. Elle ne voulait pas arriver à de conclusions trop hâtives; il fallait qu'elle comprenne par elle même ce qui arrivait à son ami.

- Merci Michael mais non merci. Je préfère me débrouiller toute seule, pour l'instant, dit-elle en regardant le sol.

La jeune blonde quitta la salle d'entraînement et partit prendre une douche.

Quelques minutes plus tard, elle quitta la maison pour rejoindre l'université, espérant y croiser Roman et comprendre ce qu'il lui arrivait.

Quelque chose n'allait pas et, malgré le peu qu'elle savait sur lui, elle avait aucune intention de laisser tomber.

***

  La première sonnerie retentit dans les couloirs de l'université. Un véritable calvaire pour ceux qui ont une ouïe très fine et qui ne savent pas encore la maîtriser.

En y ajoutant les claquements des casiers et les bavardages des autres étudiants, Roman sentait une nouvelle douleur à la tête; moins forte que celle d'hier mais pas moins insupportable.

Grégoire ne le quitta pas un seul instant. Il était à ses côtés en cas de besoin, tout le reste lui importait peu.

- Eh mon vieux ça va ? demanda le brun.

- T'inquiètes, je gère, répondit son ami avec légère difficulté.

- Je ne voudrais surtout pas porter la poisse, mais on dirait que tu ne maîtrises pas du tout.

Roman lui lança un regard réprobateur, puis ferma les yeux. Petit à petit il se redressa et sembla aller mieux.

- C'est bon, souffla-t-il avec soulagement.

- Allez viens, on a cours de biologie tout les deux aujourd'hui, ça me permettra de te surveiller et de t'aider en cas de besoin, ajouta Grégoire en posant une main sur son épaule.

Le noiraud observa son ami avec un léger sourire, mais il s'inquiétait également de ne pas pouvoir se contrôler et de le blesser.

Arrivé à quelques pas de la salle, Roman attrapa son ami par le bras et le stoppa. Grégoire leva les yeux vers le ciel.

- Ça devient clairement une habitude chez les lycanthropes, pensa-t-il en se retournant lentement vers son camarade.

- Greg, comment ça se fait que tu n'as pas peur de moi? demanda-t-il à la fois curieux et perplexe. Je veux dire, je suis un monstre maintenant. Imagine que je perde le contrôle et que je te saute dessus.

Son ami pencha la tête de côté avec une expression de surprise et de déception.

- Franchement ! T'es sérieux là ? questionna-t-il.

Le jeune noiraud ne savait plus quoi dire.

- Roman, t'es mon meilleur pote, ça n'arrivera jamais que je puisse te détester ou d'avoir peur de toi. Même si j'étais un vampire, je ne pourrai pas te détester.

- Attends une seconde, pourquoi tu me parles de vampire ?

- Bah ouais. Selon les folklores: vampire et loup-garou sont ennemis jurés. De plus, j'ai risqué d'être transformé en vampire par l'un d'eux.

- En même temps il faut dire que ton style de fille est très original.

Grégoire haussa légèrement les sourcils d'un air intrigué.

- Comment ça ? questionna-t-il.

- Tu te rappelles de Martine en 6ème ? Elle te tournait autour, seulement parce que tu étais doué en Maths.

- Et alors ?

- C'était une fille froide et méchante. Un peu comme cette vampire.

Les yeux du brun s'agrandirent d'étonnement.

- Oh Seigneur ! Tu veux dire que je tombe sur des filles froides et perfides ?

- C'est une possibilité, avoua le noiraud alors qu'un petit sourire se dessina sur son visage.

Grégoire comprit que son ami le faisait marcher et qu'il y prenait un malin plaisir. À cette pensée, il ne put se retenir de rire. Roman se joignit à lui.

Après s'être calmé, le jeune garçon aux cheveux bruns reprit son discours.

- Écoute, ce que je voulais dire au début c'est que quoi qu'il arrive, tu pourras toujours compter sur moi, conclut-il en regardant sérieusement son ami.

Encouragé par ses mots, ce dernier lui envoya un grand sourire amical, ils reprirent leurs marche vers la salle de cours.

Une fois rentré dans la classe, ils cherchèrent une place où s'asseoir. Soudain, Grégoire sentit l'étrange sensation d'être observé et, en levant les yeux, il aperçut Sandra qui les observait tous les deux.

Le jeune homme comprit rapidement qu'elle avait utilisée sa super-ouïe pour entendre leur discussion à l'extérieur.

Épuisé par ce comportement inopportun et ce mystérieux caractère, Grégoire décida de quitter la classe, mais Roman l'interpella.

- Oh oh attends, mais qu'est-ce que tu fais ? demanda Roman d'un air surpris.

- Écoute, je viens de me rappeler que j'ai à faire un truc super important. Faut que je file, répondit le brun en s'en allant.

Il l'aurait sûrement fait s'il n'avait été bloqué par la main de Roman.

- Quelle excuse bidon ! s'exclama ce dernier à voix basse.

- Tu peux me lâcher le bras s'il te plaît ? demanda Grégoire.

Roman baissa les yeux et resta muet en voyant sa main retenir le bras de son ami.

- Déjà il y a elle qui le fait et maintenant tu t'y mets toi aussi ? poursuivit Grégoire en indiquant du menton la brune qui continuait de les observer.

Cependant, le noiraud continua d'observer le bras de Grégoire toujours d'un air stupéfait. Il lâcha la prise et regarda son ami dans les yeux.

- Eh Roman ça va ? demanda le brun d'un ton un peu inquiet.

- Co... comment j'ai fais ? pensa-t-il à haute voix.

- Ce sont tes réflexes de loup, ils évoluent très vite, expliqua Sandra qui s'était levée et avait rejoint discrètement le duo.

Grégoire sursauta légèrement et la jeune fille ria intérieurement.

- Ok et c'est pas bon signe ? questionna le noiraud.

- Les « louveteaux » ont toujours du mal à se contrôler, continua Sandra calmement. N'étant pas habitué c'est plus que normal, tout ceci est nouveau pour toi et tu es donc plus sensible aux émotions.

- Et plus je suis sensible aux émotions, plus je suis incontrôlable, conclut Roman.

Sandra hocha lentement la tête.

- Pardon mais avant tu as parlé de « louveteaux », dit Grégoire intrigué. Qu'est-ce que ça veut dire ?

- Il y a plusieurs rangs chez les membres de notre espèce, même si je pense que ça vaut pour toutes les autres, répondit la brune.

Voyant que le jeune homme aux cheveux bruns leva les sourcils, elle réalisa qu'il n'avait pas compris. Tout en levant les yeux vers le ciel, elle expliqua.

- Nous les loups-garous avons un Alpha, qui nous guide et nous protège; puis viennent les Bêtas, les lieutenants de l'alpha. Ce sont les deux rangs principaux. Ensuite il y a la catégorie des « louveteaux », ceux qui ont été mordus récemment. Ces derniers se divisent en deux sous-catégories: les Novices, ceux qui rejoignent une meute, et les Omégas, c'est à dire les solitaires.

- Euh, j'ai... j'ai comme l'impression que les louveteaux ne sont pas appréciés dans votre société, ajouta le brun d'un ton timide.

Sandra lui lança un regard agacé et réprobateur.

- C'est difficile à expliquer et je doute que tu puisses comprendre.

Le jeune garçon leva les mains, montrant son accord, même s'il paraissait vexé.

Pour éviter que la tension entre les deux ne remonte, Roman prit les devants et reprit la parole.

- Qu'est-ce que tu fais ici Sandra ? demanda-t-il.

- J'ai « l'ordre » de te surveiller. Pour être sûre que tu ne fasses quoique ce soit qui puisse dévoiler l'existence des Occultés, répondit la brune.

Les deux garçons se fixèrent un bref moment, avant que Roman hoche la tête.

- Mais je suis également inscrite comme étudiante dans cette université, poursuivit-elle d'un ton plus léger.

Grégoire ne put s'empêcher de rire, ce qui attira l'attention de certains étudiants. Il se ressaisit rapidement et reprit un air aussi sérieux que possible.

- Toi étudiante dans cette fac ? Et en quoi voudrais-tu te spécialiser ? questionna-t-il amusé et à voix basse.

- En droit.

Le sourire moqueur de Grégoire disparut subitement. 

- Bon écoute Roman, continua Sandra. Je veux juste t'aider c'est tout.

Le professeur entra à ce moment même. Alors que tous prirent place, Roman finit par hocher la tête, acceptant la proposition de la fille.

- Bon et bien, puisque vous avez sûrement beaucoup à vous dire, je vais vous laisser, ajouta Grégoire en s'éloignant.

- Attends Grégoire, dit la brune en attirant l'attention du garçon. Il se pourrait que je puisse avoir besoin d'un coup de main.

Cette confession laissa Grégoire bouche bée pendant un court instant, avant que ce dernier n'accepte la requête de Sandra.

- T'es sérieuse ? demanda-t-il surpris.

- Je... je pense que cela aiderait beaucoup ton ami, s'il a quelqu'un de confiance à ses côtés.

Un petit sourire se dessina sur le visage de Grégoire . Malheureusement, ce dernier n'eut pas le temps de répondre, car le professeur l'interrompit.

- Jeunes gens, pourriez-vous vous asseoir s'il vous plaît ? demanda-t -il d'un ton cordial.

Le trio s'empressa de rejoindre trois chaises vides à proximité.

Grégoire prit celle tout à gauche, tandis que Sandra s'assit sur celle de droite. Roman se retrouva entre les deux.

La leçon débuta enfin, mais quelque chose attira tout de suite l'attention de la jeune loup-garou. En tournant la tête sur la gauche, elle vit Roman lui décocher un regard de joie retenue.

- Quoi ? demanda-t-elle à voix basse.

- Rien. Je veux juste te dire que tu es sur la bonne voie.

- Quelle voie ?

- Celle qui te permettra de résoudre ton problème avec Greg, conclut-il par un clin d'œil avant de reporter son attention sur le cours.

Sandra resta confuse quelques instants. Elle n'avait pas saisi où le jeune « louveteau » voulait en venir.

Puis, elle reporta son attention sur Grégoire assis un siège plus loin. Un petit sourire se forma au coin de ses lèvres, alors qu'elle le voyait positionner ses stylos sur la table par couleurs.

Elle dut faire appel à toutes ses forces pour ne pas rire.

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