Identité
Les premiers bruits de la ville avaient séparés les adolescents. Axel était le premier à avoir dévalé la colline, Elia juste derrière lui.
La confidence de hier s'envolait avec la brise légère qui faisait voltiger les cheveux d'Elia. Cette fois, ce fut Axel qui lança la dernière phrase :
-A ce soir, Elia !
Ensuite, il avait couru tellement vite que les sons et les couleurs s'étaient mélangés dans sa tête. Axel s'était retrouvé soudainement devant sa maison pittoresque, une main sur la porte rouge ensevelie de plantes aux odeurs envoûtantes et une autre tenant la petite clef grise et usée.
Une bonne odeur de croissant l'avait accueilli, et il s'était dirigé, le nez en l'air, dans la cuisine familiale dans laquelle mangeaient ses parents et ses frères, tous en pyjama et pantoufles. Il fut accueilli avec des vagues sourires et salutations, comme si le fait qu'il rentrait à cette heure si matinale était normal.
Axel s'assit à côté de son frère aîné, saisit un croissant, et s'immisça dans la conversation avec une habilité qui l'étonna lui même. Maman racontait sa nuit cauchemardesque(et personne ne l'écoutait) , Papa ricanait tout en lisant le journal, Maël demandait le beurre, Julien faisait son devoir de mathématiques sous les conseils avisés de Louis-pendant que celui-ci contait à Maël sa soirée en compagnie de la jolie Marie, une fille qu'il essayait d'embrasser depuis au moins trois mois.
Axel, lui, s'était fait discret, posant quelques questions ça et là. Quand il repensa à la nuit qu'il venait de passer. Un sourire grandiose illumina son visage.
Il s'était senti tellement vivant, tellement humain. Il avait écouté les peurs, et avait su les apaiser. Et ce sans vraiment s'en rendre compte.
Avalant rapidement la dernière bouchée de son croissant chaud, il se jeta hors de la salle à manger pour grimper à l'étage, pris d'une impulsion soudaine. Axel monta les marches quatre à quatre, et arriva au seuil de son atelier.
Ce n'était pas grand chose, cette petite pièce. Elle n'était que pour lui, et pourtant il ne s'en servait plus depuis au moins neuf ans.
Il effleura du bout des doigts ses vieux pots de peintures, ses pinceaux de toutes les formes, ses toiles immaculées encore emballées. Le jeune homme avait cru qu'il aurait à nouveau envie de peindre après cette rencontre. Petit, ce qui l'inspirait le plus étaient les gens. Leurs personnalités, leurs physiques atypiques.
Elia était spéciale, mais aucune tonalité de couleur, aucun mouvement de pinceau ne lui venait en tête.
Axel descendit l'escalier, dépité. Il avait cru redevenir un enfant de sept ans, et son espoir s'était envolé. Il ne sera plus jamais comme avant, Axel avait peur, honte, peut-être ?
Il chassa ses pensées moribondes de son esprit quelque peu embrouillé par le manque de sommeil et s'assit à son bureau, les mains nerveuses. Il décida d'étudier son vocabulaire, puisque de toute façon il lui fallait encore attendre ce qui lui semblait l'infini pour rejoindre Elia.
Et le moment arriva où il du partir. Ses parents, comme à leur habitude, ne trouvèrent rien à redire au fait qu'il s'en aille si tard de la demeure familiale. À croire qu'ils s'en fichaient de lui.
Il courut vers la colline. Il était en retard.
Elia était déjà là, couchée dans l'herbe avec de grosses bottines qui étaient bien trop chaudes pour l'été.
-Salut, Axel le peintre !
-Il est nul, ce surnom.
-Moi j'aime bien.
Axel s'effondra à côté d'elle.
-Je suis prêt à écouter.
-Je sais pas si j'ai envie de parler, aujourd'hui. Tu veux pas me raconter quelque chose ?
-Je ne sais pas vraiment parler de moi, désolé.
-Je vais devoir y'aller quand même, alors.
Elia avait l'air de douter, c'était un peu étrange.
-Le futur, c'était concret. Mais aujourd'hui, je voudrais te parler de quelque chose d'abstrait, on va dire.
-Je suis toute ouïe, Elia.
-C'est assez simple en réalité. Mon identité.
Elia avait un ton un peu fluet.
-C'est quoi, l'identité, déjà ? On m'a déjà posé cette fameuse question "Qui es-tu ? " pendant un cours de français. Contrairement aux autres, qui se sont mis à griffonner des phrases, moi, je suis restée tétanisée. Que devais-je répondre ?C'était trou noir.
Elle fit de grands gestes pour illustrer ces propos.
-Je ne sais pas comment on pourrait définir une personne. Bon, aussi con que ça puisse paraître, ça me fait peur. Si je sais pas qui je suis, comment puis-je aimer quelqu'un ? Comment je peux avoir des amis ?
Axel sourit, attendri. Elle en avait des amis, Elia. Il en était sur.
- Je ne peux même pas répondre à une question du genre "Qui suis-je ?".Est-ce que mon identité, c'est tout simplement le fait que je sois humaine ? Mon identité serait abstraite ? Dans le sens où moi même je ne pourrai jamais vraiment savoir qui je suis ?
Elle souffla nerveusement. Le stress l'envahissait.
-Dans les tests pour savoir ce qu'on doit faire plus tard, ils disent qu'il faut bien se connaître pour choisir un métier.
Elle fronça ses jolis sourcils.
- Mais comment ça, bien me connaître ? dit-elle en haussant le ton. C'est quoi se connaître ?
Son ton avait des allures ironiques.
-Ca me fait péter un câble, de me poser toutes ces questions.
Je me prend la tête pour rien.
Elle se tut un instant.
-Qui suis-je ? répéta t'elle.
Encore un autre silence, qui flotta entre eux. Axel pouvait presque le percevoir.
-Bref, j'en suis venue à douter de tout ce que j'aime. Est-ce que j'aime vraiment lire des livres ? Est-ce que j'aime vraiment mon style vestimentaire ? Des questions pareilles tournent dans ma tête quand j'y pense, si bien que j'en attrape un vertige, si pas un mal de tête atroce. Et ce que je voulais te demander, c'est si toi, tu savais qui tu étais. Parce que j'ai l'impression que tout le monde ne saisit pas la profondeur de la question. Savoir qui on est, c'est plus que savoir nos qualités et nos défauts. C'est savoir pourquoi on les a, ces défauts. Et moi, l'origine de mes traits de caractère est inconnue. Mais qui sait si l'identité c'est seulement notre humanité, et qu'en fait il n'y a rien de philosophique là dessous ? Que notre identité, c'est notre prénom. Mais il y'a d'office plus que ça.
Elia s'allongea sur l'herbe.
-Alors je répète ma question, je te laisse y réfléchir jusqu'à demain. Est-ce que tu sais si tu es, Axel ? Parce que si tu sais, dis moi comment il faut faire pour le savoir.
Et ses deux grands yeux bordés de petits cils le fixèrent intensément. Elia tentait peut-être de percer Axel à jour. Malheureusement, Axel et les émotions, c'était toujours une histoire. Dans ses yeux, jamais des étincelles brillaient. Alors il continua à la regarder, de marbre. Il sourit quand même, parce qu'elle était mignonne, allongée comme ça. Le jeune homme s'allongea sur le ventre, les coudes sur le sol, la tête coincée dans ses paumes.
Combien de temps restèrent-ils comme ça, à se fixer sous les étoiles ?
Des heures, ou une poignée de secondes ?
Le temps semblait s'être arrêté, et les clignements constants des yeux d'Elia hypnotisaient Axel. Si elle ne pouvait pas lire dans son esprit, lui pouvait deviner les émotions d'Elia.
Elle était chamboulée. Ses inquiétudes, qu'elle murmurait, déclamait, criait même, était en elle depuis des mois. Quand ça sortait, il y avait comme un vide en soi. Il fallait le remplir.
Au bout d'une éternité de réflexion, Axel se releva, les coudes endoloris.
-Elia, j'ai une idée.
Elle se leva immédiatement, intriguée.
-J'ai réfléchis à ta question. Et en fait j'ai trouvé la réponse dans tes yeux.
-Quoi ?
-On s'en fout. On s'en tape. On s'en fiche si on ne connaît pas notre identité. Si c'est les études qui te paniquent, alors arrête ! Tu as le droit de te tromper. Mais si c'est important pour TOI, pour ton bonheur, alors arrête d'y penser. Laisse le mystère planer sur ta vie. Est-ce que c'est important de savoir le pourquoi du comment de chacune de tes actions ?
Il marqua une pause. Les idées se formulaient tellement vite dans sa tête que sa bouche avait du mal à suivre. Axel mâchonnait un peu ses mots.
-Je vais te le dire. Non. C'est l'impulsivité et la non-logique de tes actions qui vont rendre ta vie mémorable. Quand tu seras vieille, tu te demanderas : pourquoi est-ce que je suis venue parler à cet inconnu sur la colline ? Et au lieu d'avoir une réponse toute faite, tu pourras dire : "J'en sais rien du tout. Peut-être le destin m'as t'il aidée ?"
-Mais c'est frustrant. Analyser qui je suis ne peut que être bénéfique !
- C'est pas bénéfique quand tu t'inquiètes comme ça.
-Tu sais qui tu es, toi ?
-Un mec.
-T'es sérieux? lâcha t'elle, un peu exaspérée.
-Moi, ce sujet ne me préoccupe pas plus que ça, alors je pense que mon identité, c'est mon sexe. Je suis un homme, et c'est tout ce que j'ai besoin de savoir.
-Je veux bien te croire, mais je suis persuadée que le mystère de la vie n'est pas savoir ce qu'est la vie elle même, mais bien savoir qui nous sommes. Certains naissent, vivent, meurent sans s'être posé de questions. Je sais pas, ça me dérange.
-Tu crois en Dieu ?
-Seulement quand je veux quelque chose.
-Alors arrête de te demander qui tu es.Ca va t'embrouiller, et il n'y a peut être pas de sens derrière tout ça.
Elle parut un peu perturbée.
-Pourquoi on s'est levé ? On va danser ?
-Non Elia. Tu vas hurler que la vie est belle et qu'elle n'a pas de sens caché.
-Mais je m'en fous, que la vie est belle ! Je veux savoir qui je suis, mais je ne sais pas répondre à cette question !
Elia était au bord des larmes.
-Alors tu vas dire : Je suis belle, et la question de l'identité n'a pas de sens.
-Mais j'ai pas envie de hurler ça dans le noir comme une débile, Axel. Surtout que j'ai envie qu'il y'ait un sens à ça.
-Tu l'as dit toi même. C'est ABSTRAIT comme concept. Alors maintenant, tu vas hurler comme tu n'as jamais
hurlé.
-Axel, t'es vraiment cinglé.
-Je m'en fiche.
Elle eut une tête sceptique.
-J'ai pas envie.
-Qui va t'entendre, Elia ?
-Toute la ville, peut-être ? ricana-t'elle.
Axel la fixa intensément.
-D'accord. Je vais le faire.
Une minute s'écoula, puis il l'entendit, très doucement.
"Je suis belle, et la question de l'identité n'a pas de sens".
-Ca doit venir de tes tripes. Plus fort.
-Tu es vraiment autoritaire.
-Plus fort, Elia.
-Je suis belle, et la question de l'identité n'a pas de sens.
-PLUS FORT !
Axel sautillait autour d'elle, tapant dans ses mains. Un sourire gargantuesque déformait son visage.
-JE SUIS BELLE ! ET LA QUESTION DE L'IDENTITÉ N'A PAS DE SENS !
Il n'eut même pas besoin de lui dire de hurler plus fort. Elle se mit à scander la phrase comme si sa vie en dépendait. Elle se déchirait la gorge, les yeux fixés vers le ciel. Ses pieds frappaient le sol avec une furie incroyable, et elle dégageait de l'énergie pure.
Axel n'y connaissait pas grand chose, mais quand il se mit à hurler avec elle, il aurait juré voir une étincelle de bonheur dans les yeux d'Elia.
Ils avaient l'air de cinglés, et ça leur faisait tellement du bien. Leurs éclats de rire fusaient dans la nuit, et leurs cris de répercutaient dans l'air.
Quand leurs gorges se mirent à gémir, ils arrêtèrent les cris, et, s'asseyant sur le sol humide, contemplèrent les lumières de la ville.
Salut !!! J'ai posté un message sur mon "mur" ahah et je voulais que tout le monde voient le message, donc voila le copié-collé❤️ :
Heyyy !
Je sais pas si certains l'ont vu, mais j'ai posté une nouvelle histoire intitulée Psychologue nocturne ;) C'est une histoire sur les doutes de l'adolescence, et j'ai déjà choisi un certain nombre de thème (+/- 4) et je me suis dis, si certains on envie de vie certaines de leurs inquiétudes dans la nouvelle, libres à eux de m'envoyer un message privé avec un thème qui vous tiens à cœur( bon, ca doit être dans la thématique quand même hn !! haha) et je le mettrai dans l'histoire si il m'inspire une réponse de la part de Axel ❤️❤️❤️
Donc voilà, n'hésitez pas à m'en envoyer si vous en ressentez l'envie ou le besoin !! ☺️
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