Quand sonna dix-huit heures de ce 24 décembre, tous les cartons et meubles de la famille Killoran avaient été déménagés dans leur nouvelle maison. Gloria ajusta la coiffure de sa fille et descendit dans le salon rejoindre son époux et son fils. Tous les quatre portaient leurs plus beaux habits et Agan semblait bien mal à l'aise dans sa chemise noire et sa veste en cuir. Sparkessa ne cessait d'arranger les dentelles de sa robe, impatiente.

— Vas-y, chéri ! Dis-leur.

Les yeux glacés de Jarvis s'illuminèrent de joie.

— Ce soir les enfants, on a décidé de vous offrir votre premier véritable Noël de démon. En ce réveillon, votre mère et moi vous proposons votre premier festin d'âmes.

Agan et Sparkessa se jetèrent un regard interloqué. Peu certain d'avoir compris, ce fut l'aîné qui interrogea leurs parents.

— On va vous accompagner pour manger des âmes, c'est ça ?

Gloria sourit.

— Non mon poussin. Ce soir, les chasseurs seront ta sœur et toi. Nous serons juste là pour vous regarder. Et observer nos bébés déjà en âge de chasser seul.

— De plus, poursuivit Jarvis, nous avons prévu que vous choisissiez vous-même les proies. Élèves, professeurs... Libre à vous les enfants.

Agan et Sparkessa se tapèrent dans les mains de joie et remercièrent chaleureusement leurs parents. Enfin. Enfin, ils allaient pouvoir chasser comme de véritables démons. Quel beau cadeau de Noël !

Des cris étouffés, des larmes et du sang sur le sapin. Dès la troisième maison, celles de voisins insupportables, Agan et Sparkessa avaient chacun commencé à comprendre leur style d'assassinat. Celui de l'adolescent se voulait brutal et précis, à l'image des pouvoirs de Gloria, tandis que sa cadette tuait lentement, très lentement, torturant la victime. Jarvis en avait presque les larmes aux yeux, tant la technique de sa princesse ressemblait à la sienne.

Des yeux exorbités, des larmes et du sang sur les cadeaux. Dès la quatrième maison, celle de l'institutrice de Sparkessa, Jarvis et Gloria se servirent des plats encore fumants, tandis que leurs enfants s'amusaient avec les habitants. La démone mordit dans une cuisse de dinde et jeta un œil à son fils.

— Agan, utilise tes griffes plus à quarante-cinq degrés pour arracher le cœur d'un coup.

— Merci maman !

Jarvis avala une cuillère de potage et s'agenouilla à côté de sa fille, sous le regard terrorisé des humains encore plus ou moins vivants, bien qu'incapables de hurler.

— Kessa, si tu commences par là, la proie va se vider de son sang beaucoup trop rapidement.

— D'accord, mais... Papa, mama ! À la prochaine maison, montrez-nous !

Jarvis et Gloria acceptèrent avec fierté.

Des hurlements vains, des larmes et du sang sur leurs visages. À la dixième habitation, la dernière, les deux jeunes démons avaient réussi à tirer parti au maximum de leur technique, bien qu'ils ne maîtrisent pas encore tout à fait l'art de rester propre. Quelques projections d'hémoglobines avaient atterri sur leurs joues soulignant étrangement bien leurs iris violets. En les voyant ainsi, Gloria poussa un petit couinement d'adoration tant elle les trouvait mignons.

— Jarvis, sors l'appareil ! Ils sont si beaux, je les veux en fond d'écran de mon téléphone.

Son époux acquiesça avec un grand sourire. Ils prirent finalement de nombreux clichés, seuls ou à plusieurs, souvenirs d'un Noël magique.

Aux douze coups de minuit, ils se téléportèrent devant la porte de leur nouvelle maison. La neige tombait et leurs enfants souriaient. Jarvis attrapa la main de sa femme et l'embrassa.

— Joyeux Noël mon amour.

— Joyeux Noël mon chéri. Merci de nous avoir trouvé cette maison.

— Avec plaisir. Voir ton bonheur et leurs sourires sont mes plus beaux cadeaux.

Ils pénétrèrent dans leur nouveau foyer, ne se préoccupant pas de ce que les journaux humains appelleraient « le Noël sanglant ».

******************************************

Merci à mon amie pour la couverture et la quatrième de couverture, ainsi que pour les images internes au recueil. Et pour sa lecture en avant-première. Et pour sa patience face à toutes mes questions tout au long de mon processus d'écriture.

Merci à mon mari pour avoir répondu à mes questions.

Et merci à tous ceux et celles qui liront.