Chapitre 3
Pendant les deux semaines qui suivirent, Agan et Sparkessa restèrent à la maison, sous le prétexte officiel d'une mauvaise grippe. L'adolescent refusait encore d'adresser la parole à ses parents et sa cadette semblait triste de l'atmosphère tendue qui régnait dans leur foyer habituellement si plein de vie. Jarvis appela tout le monde dans le salon et apporta des tasses de chocolat chaud. Gloria se racla la gorge, un papier entre ses mains griffues. Pour une fois, ses longs cheveux roses aux pointes vertes n'étaient pas attachés.
— Agan, Sparkessa... Votre père et moi avons bien entendu et compris ce que vous nous reprochiez. Depuis, nous avons beaucoup discuté et en sommes venus à une seule et unique conclusion. Nous allons déménager.
Leur aîné se leva de colère, renversant l'une des tasses.
— Mais vous n'avez rien compris ! En quoi ça va changer quoique ce soit de vivre dans une autre ville d'humains ? Le problème n'est pas là !
— AGAN !
C'était Jarvis qui avait crié. De mémoire, ses enfants ne l'avaient jamais entendu. Même Gloria haussa un sourcil étonné devant la rareté de cet évènement. La dernière fois était au moins un siècle auparavant. L'adolescent se rassit immédiatement et saisit la main de sa petite sœur sous la surprise.
— Merci chéri. Bien, comme je le disais, nous allons déménager, juste après Noël. Nous pensions partir là-bas quand vous seriez bien plus âgés, mais visiblement c'est le moment parfait.
Elle déposa la brochure sur la table.
— Je vous présente la ville de Coppet, qui, depuis plus de deux siècles, est une cité réservée aux créatures surnaturelles. Aux yeux des humains, ce n'est plus qu'un village en ruine d'où s'échappe une aura repoussante. Hier matin, nous avons récupéré les clés de la maison ainsi que les papiers de vos inscriptions à l'école.
Kessa s'accrochait à son frère, les yeux écarquillés de surprise.
— Dès la rentrée de janvier, vous n'aurez plus jamais à prendre forme humaine. À l'école, vous pourrez être vous-même. Dans vos classes, il y a d'autres enfants démons de vos âges. Vous... J'espère que cela vous rendra heureux.
Sparkessa pleura et sauta dans les bras de sa mère.
— Merci, c'est trop trop bien. Tout le monde va voir mes beaux cheveux !
— Oui ma princesse.
Agan se leva, tentant de garder un air fier malgré les quelques larmes qui s'échappaient.
— Merci maman. Merci papa. Désolé. Je ne vous déteste pas, en vrai.
Gloria sourit.
— Allez, viens là toi aussi, mon grand.
L'adolescent enlaça sa mère qui lui rendit son étreinte. Jarvis observa ses trois précieux trésors, attendri, avant de les rejoindre dans ce câlin collectif.
— Mais ce n'est pas fini.
Les enfants levèrent la tête vers leur père, interrogateur.
— Pour le soir de Noël, juste avant de quitter Montreux, votre mère et moi, on vous prépare une surprise. Pour ce soir-là, il vous faudra vos plus beaux habits.
Dès lors, ils tentèrent d'en savoir davantage, sans succès.
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