Chapitre 1
"Flesh", Simon Curtis
Bite into me harder,
Sink your teeth into my flesh
Hold me up against the wall
Give it till I beg, give me some more
Make me bleed, I like it raw
**
Blayze changea l'eau des fleurs qui ornaient l'autel en granit gris. Enfin, il n'était pas certain quant au matériau utilisé, car il était persuadé que, lorsqu'il avait supervisé la construction de cette église, les ouvriers l'avaient quelque peu arnaqué sur certains détails. Toutefois, il n'avait rien dit et s'était contenté de les tuer. En général, Blayze n'assassinait jamais ses sources de repas... Mais ceux-là l'avaient cherché. Il fallait être d'une stupidité sans nom pour tenter de se jouer d'un vampire lorsque l'on était qu'un humain.
— Mon Père ?
Blayze se retourna, ses iris gris luisant derrière ses lunettes. Une cinquantenaire, l'une de ses habituées, lui souriait.
— Bonjour, comment vous portez-vous ?
La paroissienne arrangea son chandail.
— Mon Père, j'ai péché.
Blayze se retint de soupirer. Si cette femme venait encore lui raconter les mesquineries faites à sa voisine ou les soi-disant pensées impures qu'elle avait pour le livreur de lait... Alors qu'elle était veuve depuis vingt ans, il aurait le plus grand mal à ne pas l'étrangler. Ils se dirigèrent vers le confessionnal, mais furent stoppés par une voix d'homme avec un fort accent nordique, probablement norvégien.
— Père Blayze, bonjour !
Le vampire se crispa, sachant parfaitement qui se tenait derrière eux. Pourquoi cet imbécile se montrait-il si tôt dans la journée ? Habituellement, les paroissiens ne devaient pas le rencontrer. Surtout pas. Sous aucun prétexte. La cinquantenaire poussa un petit couinement étonné face au nouveau venu. Ses yeux bleus reflétaient une certaine malice et que ce soit sa tenue ou sa posture, tout en lui criait « mercenaire ».
— Kalma, je te saurais gré de patienter dans mon bureau. Tu es en avance sur ton rendez-vous et je n'ai pas terminé avec madame.
— Oui mon Père.
La femme jeta un regard apeuré et interrogateur au prêtre, qui se sentit obligé de justifier la présence d'un tel phénomène dans l'église d'un village écossais si tranquille.
— Il s'agit d'un ancien mercenaire qui souhaite se convertir et rentrer dans le droit chemin. Je le reçois en rendez-vous afin de le guider dans cette noble voie.
— Oh ! Soyez béni pour sauver cette âme !
Blayze leva les yeux au ciel tandis que la cinquantenaire s'installait dans le confessionnal. Les humains étaient si naïfs parfois.
Une bonne demi-heure plus tard, qui sembla pourtant une éternité au vampire, la paroissienne arrêta enfin de parler, le remercia et déserta les lieux. Blayze poussa un soupir de soulagement et rejoignit immédiatement son bureau où l'attendait Kalma. Ce dernier s'était installé sur un fauteuil et jouait avec une fiole vide.
— Tu es beaucoup trop en avance. Tu es censé venir la nuit.
— La routine, encore la routine. Et puis ces derniers siècles, ce n'est pas la première fois que je déroge à cette règle.
— Et ça m'exaspère toujours autant.
Kalma ricana et sortit une bouteille de sa besace. Il la déposa sur le bureau.
— Un petit souvenir que je t'ai rapporté de ma dernière mission. Du sang de fée sylvestre. Ton préféré.
Blayze haussa un sourcil surpris, mais ne fit aucun commentaire.
— Je te remercie. Si tu as faim, demain matin il y aura une messe et je compte me nourrir. Nous pourrons partager.
Les iris azur de Kalma virèrent au rubis et il posa ses coudes sur le bureau.
— Avec plaisir, cela fait plus d'une semaine que je n'ai pas eu l'occasion de manger un vrai repas.
— Sinon, que veux-tu ?
— Et bien, et bien, pourquoi cet air si renfrogné ? Ne t'ai-je pas manqué ces trois dernières années ? Je m'attendais à un accueil un peu plus chaleureux.
Blayze poussa un grognement exaspéré et ôta ses lunettes. Il passa une main dans ses courts cheveux bruns puis retira le col blanc de son uniforme qu'il posa sur son bureau. Il se quitta sa chaise, saisit Kalma par son gilet en cuir et le força à se lever. Ce dernier sourit, ses canines désormais sorties. Blayze le poussa contre un mur, faisant tomber quelques livres qui trainaient par terre.
— Blayze ?
Le prêtre plaça son genou droit entre ses jambes. Il posa ensuite son bras gauche en appui contre le torse de Kalma afin de le retenir contre la cloison, bien que ce dernier n'ait aucunement prévu de s'enfuir.
— Trois années sans nouvelle et tu reviens avec juste un sourire et une bouteille ?
— T'aurais-je manqué ?
— Là n'est pas la question. Tu ne m'as donné aucune nouvelle. Au minimum une par an. As-tu oublié ?
— J'ai eu un... Contretemps. Je suis d'ailleurs venu en discuter avec toi. Mais je m'excuse de ne pas avoir tenu cette promesse.
Le regard de Blayze vira au rubis et ses crocs s'allongèrent. Il posa son front sur l'épaule de Kalma.
— Je suis trop vieux pour ce genre de frayeur. Abstiens-toi dans l'avenir.
— Je ferai de mon mieux.
Blayze releva la tête, relâcha sa prise et passa sa main gauche dans les cheveux blond très clair de Kalma, tandis qu'il posa la droite sur sa hanche. Et, n'y tenant plus, le prêtre embrassa son compagnon depuis plus de trois siècles.
— Elle était longue cette mission.
— Oui, beaucoup trop. Blayze... Mords-moi.
Le prêtre lâcha quelques instants son compagnon, alla verrouiller la porte à une vitesse surhumaine et fondit à nouveau sur lui en un éclair. Sans aucune hésitation, il planta ses canines dans le cou de Kalma et goûta son sang, acte pourtant tabou, mais qu'ils avaient commis des centaines et des centaines de fois.
Chez les vampires, il existait un certain nombre de lois, dont deux qu'il ne fallait enfreindre sous aucun prétexte. Premièrement, tu ne boiras pas le sang de tes pairs. Deuxièmement, tu ne toucheras point au compagnon d'un de tes pairs.
— Nourris-toi de moi, ça fait une éternité.
Blayze grogna et ne se fit pas prier. Il se moquait bien des conventions. Kalma et lui étaient adultes et en couple depuis bien longtemps et étaient arrivés à un compromis qui les satisfaisait tous les deux. Le prêtre n'avait jamais eu aucun intérêt pour le sexe, mais prenait plaisir à mordre et goûter le sang des autres créatures, notamment les vampires. Kalma, lui, aimait le sexe, mais avant tout se sentir soumis. Soumis, mordu, et pourquoi pas légèrement malmené.
— Blayze, encore...
Le prêtre sourit et mordit son compagnon à un second endroit de sa nuque, sous le gémissement satisfait de ce dernier. Blayze pouvait sentir le désir grandissant de Kalma contre sa cuisse. Cela faisait partie intégrante de leur accord, car même si le sexe ne l'intéressait pas, avec son compagnon, cela ne le gênait absolument pas. Parfois, il en tirait un certain plaisir, même si, à ses yeux, cela ne valait jamais la puissance de l'étreinte qui suivait ou le goût du sang de son homme.
— Accroche-toi, on va dans la chambre.
— Depuis quand es-tu gêné de faire ça contre le mur ?
— Depuis que je ne t'ai pas vu depuis trois années.
Kalma émit un léger rire, passa ses bras autour du cou du brun et ses jambes autour de sa taille. Au passage, Blayze attrapa la bouteille de sang de fées sylvestres, ouvrit la petite porte à côté de la bibliothèque et grimpa les escaliers qui menaient à son appartement au-dessus de l'église. Il avait spécifiquement choisi de vivre-là afin que Kalma puisse le rejoindre en toute discrétion. Et aussi parce qu'il n'avait guère envie de se mêler aux villageois. Il était trop vieux pour vivre normalement au milieu des humains. Pas qu'il ne les aimait pas, mais... Il tenait à sa tranquillité.
— Tu aurais pu me déposer avec plus de délicatesse.
Blayze ôta ses vêtements noirs et grimpa sur le lit.
— Tu es la personne la moins délicate que je connaisse.
Kalma éclata de rire et attira son compagnon à lui.
— Tu n'as pas tort. Puis j'aime faire ressortir ton côté sauvage. Surtout qu'il n'est que pour moi.
— Pour qui d'autre ?
Kalma sourit et embrassa le prêtre.
— Tu m'as manqué, Blayze.
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