11. Bracelets
Nous restons immobiles un moment, réfléchissant à ce que nous allons faire. Puis Eléa se lève, et nous regarde tous tour à tour.
- Il y en a dix. Nous sommes dix. Ils sont cachés, et peut-être dans tout Epap. Nous n'avons le droit d'en parler à personne. Voilà ce que je propose : on commence par mettre nos idées en commun pour savoir où ils pourraient être, puis on se répartit les recherches. Le but est d'en trouver dix, le directeur n'a pas dit que ça devait être un chacun, donc on en prend un maximum possible et on les met en commun à l'animalerie. Qu'est-ce que vous en penser ?
Théo se lève à son tour, et fait face à Eléa.
- Je suis d'accord, mais il faut que quelqu'un coordonne tout ça. Si on y va chacun de sa propre opinion en même temps, on n'y arrivera pas. Je propose qu'on désigne quelqu'un pour prendre ce rôle. Ok ?
Tout le monde acquiesce. Enfin, sauf moi, mais je suis d'accord avec l'idée, et de toute manière personne ne semble le remarquer.
- Je propose que ce soit Eléa, puisque c'est son initiative. Quelqu'un est contre ?
Plusieurs secouent négativement la tête.
- Moi si. Je suis même contre l'idée de chercher ensemble, débrouillez-vous sans moi.
Sur ce, Steph Operion, avec ses épaules larges, sa carrure musclée, ses cheveux bruns coupés courts, et sa taille moyenne, se lève et quitte la salle. Bon, au moins je sais maintenant qu'il est solitaire, énervant, et fera bande à part. Pour le moment, et sauf changement, on ne peut pas compter sur lui.
- Bon, eh bien... d'autres objections ?
Cette fois, personne ne réagit. Théo prend ça pour un non, il s'assied en faisant signe à Eléa. Celle-ci prend une grande respiration, avant de commencer.
- Il nous faudrait un support visuel, pour qu'on puisse noter nos idées. Est-ce que quelqu'un à des feuilles, ou autre chose... ?
J'attends, un peu plus de trente secondes, avant de me lever. Je m'approche d'une paroi, analysant naturellement sa structure, puis je change les trois premiers centimètres de pierre en ardoise, et ce sur un mètre de hauteur et deux de long. Ensuite, je pose ma main contre le mur et commence à former une craie avec principalement du carbonate de calcium. J'en fais deux ainsi, les tenant dans ma main. Une fois que j'ai terminé, je retourne vers Eléa et les lui tend, puis je me pose sur mon coussin. C'est là que je vois l'air incrédule d'à peu près toute la classe.
- Alors, et à ce mot l'attention se reporte sur la « cheffe », où est-ce qu'ils peuvent être ?
Il y a un instant de flottement, puis :
- Sur un meuble.
- Ou dans un meuble, comme une armoire.
Eléa inscrit le mot « meuble » sur le tableau. Le fait que Julien, de taille moyenne, blond, yeux blonds, nez en trompette, et Jonathan, d'une tête de plus que Julien, assis à côté de lui, cheveux brun foncé, aient pris la parole semble être le déclencheur. Pendant près d'un quart d'heure, les propositions fusent, remplissant le tableau. Quant à moi, je reste silencieux, observant.
- Cordax ?
- Oui ?
- Tu es où ?
- Dans une sorte de salon, je crois. Pourquoi ?
- Il faudrait que tu cherches des bracelets en métal, tout simple. Si tu en trouves, ce serait bien de les prendre. Tu peux faire ça s'il te plait ?
- Ok. Mais pourquoi ? Tu veux changer de style ?
- Non, c'est une sorte de défi, ou devoir, je sais pas trop, lancé par le prof.
- Ah, d'accord. Dis, c'est possible qu'ils soient portés par quelqu'un ?
Je visualise le pont, l'image du bijou, et l'envoie à mon proche.
- Oui, du moment que c'est le même que celui-là.
- Compris !
- Ah, et va les chercher dans la partie est, s'il te plait.
- Une raison particulière ?
- Une intuition.
- Ok, j'y vais.
- Sur une personne.
C'est bon, j'ai capté l'attention de tout le monde.
- Ils pourraient être sur une personne. Et est-ce que vous avez des proches qui peuvent se promener dans les bâtiments ? Ils pourraient nous aider pour les recherches.
- Bonne idée ! Le mien ne peut pas, il n'y a pas assez de place, mais les autres ? C'est possible ?
Eléa a réagi au quart de tour, et sur le tableau elle fait une nouvelle colonne avec « recherches » inscrit au sommet.
- Le mien participera.
- Moi aussi !
Mis à part ma paire, Lia (son proche est un cheval) et Steph (logique, il est parti), tout le monde est d'accord. Plus qu'à découvrir si c'était vraiment une bonne idée.
En attendant, Eléa a dessiné un plan approximatif de l'établissement, et séparé en plusieurs zones.
- Il ne nous reste pas beaucoup de temps, donc je propose de se répartir les zones et de commencer à chercher. Ça vous va ?
Tout le monde acquiesce.
- Est-ce qu'on fait des groupes de deux ? C'est plus sûr, on aura plus de chances de les trouver.
Il faut une seconde au groupe avant de réagir à la proposition de Théo. Plusieurs acquiescent, tandis que d'autres s'échangent des coups d'œil afin de décider silencieusement de faire équipe. En cinq minutes, les endroits sont attribués, et nous quittons la salle pour commencer les recherches. Je pars en même temps que ma paire.
- Eléa, je me demandais s'ils ont des sandwichs à la cafet' ?
- Oui. Dis, ça va aller ? Je veux dire, c'est sympa de t'être dévoué pour aller chez les banos, mais ça ne va pas être trop dur, tout seul ?
- Je ne suis pas tout seul, il y a mon proche. Mais ne t'inquiète pas, j'ai quelques idées sur l'endroit où les bracelets pourraient se trouver, et de toute manière ce n'est même pas sûr qu'ils y en aient vraiment là-bas. Et toi ? Ça va aller avec Théo ?
Eléa se tourne vers moi, me jetant un regard quelque peu irrité.
- Tu me prends pour qui ? Bien sûr que ça va aller.
- Bon, alors à plus !
J'accélère un peu, la dépassant et prenant la tête du groupe. Toujours sans un mot, je parcours le chemin inverse de celui qui nous a mené jusqu'ici, afin de quitter la partie souterraine du bâtiment. Je continue, sans aller vraiment vite puisque les autres membres de la classe me suivent, pour finalement arriver dans un passage où ils ont la possibilité de se repérer. Alors, et seulement à ce moment-là, j'accélère vraiment, disparaissant de leur champ de vision en quelques secondes.
Je monte d'un étage, emprunte plusieurs passages, et finis par me retrouver devant une porte entrouverte. Passant son seuil, j'entre dans un salon accueillant, peuplé de deux personnes seulement, chacune accompagnée de son proche. Puis je me dirige vers une seconde porte, sur laquelle un panneau dit : « Sonnez et attendez ». Alors j'appuie sur la sonnette.
En attendant, mon regard se perd dans le vague tandis que dans mon esprit se forme un plan approximatif de l'établissement. J'ai retenu à peu près tous les chemins que j'ai empruntés, notamment ceux reliant ma chambre à la cafet', l'animalerie ou à l'extérieur. Ma mémoire visuelle m'y a bien aidé, je me souviens facilement de ce que je lis, même si ce n'est qu'une seule fois.
La porte s'ouvre, laissant apparaître Elstine Frayming. Il ne lui faut pas longtemps pour me reconnaître.
- Bonjour, Jasen. Tu vas bien ?
- Bonjour, bien et vous ?
- Bien, bien.
- Je m'excuse pour la dernière fois, je ne pensais pas que l'œuf s'ouvrirait.
- Oh, ce n'est pas très grave. Il n'a pas pu vivre bien longtemps.
- Ah bon ?
- Oui, un bébé tel que lui n'est pas capable de se protéger et se nourrir seul. Bref, je pense que tu es venu pour essayer de trouver ton proche ?
- Oui. Ça ne vous dérange pas, si je fais un tour ?
- Non, vas-y seulement. Je suis pas mal occupée ces temps, donc je ne pourrais pas t'accompagner. J'espère que ça ne te dérange pas ?
Je lui souris.
- Aucun problème.
Elle me laisse passer, refermant la porte derrière moi. Puis je me retrouve seul dans ce long couloir bordé d'enclos avec des animaux.
Lentement, j'avance dans l'allée. Du regard, je parcours les parcs, cherchant un éclat qui signalerait la présence d'un bracelet. En même temps, je regarde si un animal pourrait se faire passer pour mon proche, mais je ne pense pas en trouver, et ce n'est pas bien important. C'est juste pour que les gens n'essayent pas de deviner quel sera mon proche, ou ne se mettent en tête de m'aider à en trouver un. D'ailleurs, comment Hyba l'a su ?
Un scintillement attire mon attention. Je m'approche de l'habitat sur ma droite, où se trouve des moutons. Observant attentivement, je finis par distinguer un objet gris dans la laine de l'un d'entre eux. Souhaitant regarder de plus près, je pose ma main sur la vitre, et avant que j'aie le temps de faire quoi que ce soit, je me sens comme aspirer, me retrouvant sans que je sache comment de l'autre côté de la paroi en verre.
Je ne perds pas de temps à me demander ce qu'il vient de se passer, préférant approcher doucement le mouton qui a retenu mon attention. Il ne bouge pas, continuant de mastiquer tranquillement. Encore un pas... Tendant les doigts, j'atteins sa fourrure, et le sujet de mon attention. Il ne faut pas longtemps pour que je le tienne dans ma paume. Il s'agit bien d'un bracelet.
Me retournant, j'avance, touche à nouveau la vitre, et suis de l'autre côté en un battement de cœur.
Je vais un peu plus vite, continuant mon chemin jusqu'au bout, jusqu'à la pièce où j'ai rencontré Cordax. Puis, n'ayant aperçu aucun éclat, je fais le chemin inverse, avant de retourner dans le petit salon.
- Jasen !
Je me retourne au moment de quitter la pièce.
- Alors, toujours rien ?
- J'ai cru, sauf que non, ce n'était pas le bon. Je ne pense pas qu'il soit ici.
- Dommage, mais ça arrive. Tu es déjà allé aux écuries ? Essaye d'y passer un de ces jours. Autrement, tu le trouveras ailleurs, je ne sais où. Bon, je te laisse, bon après-midi !
- À vous aussi, madame.
Et je quitte le lieu, un des dix bracelets dans ma poche.
Empruntant une série de couloirs, je finis par sortir, et suis le chemin menant à l'est d'Epap.
- Cordax, tu as trouvé quelque chose ?
- Oui, je le surveille.
- Le ?
- Un gars qui porte un des bracelets. J'allais le récupérer par terre quand il est arrivé et c'en est saisi. J'ai préféré ne pas me montrer, et avec le groupe de gens qui l'entoure, je ne peux pas l'atteindre sans me faire voir, donc je le surveille en t'attendant.
- J'arrive. Tu es où exactement ? Et il est quelle heure ?
- Treize heures six. Depuis la cour, il faut prendre la porte la plus au sud, ensuite à droite, troisième porte sur la gauche. Il y a deux entailles au bas à droite.
- Ok. Et merci.
J'atteins le pont, le traverse. Cinq minutes plus tard, j'arrive dans la cour multicolore faite de toutes les teintes de gris, suis les indications de mon proche, repère les griffures et entre dans la pièce sans délicatesse. Et là, surprise : Il y a le type blond, le tombeur, que j'ai quelque peu insulté lors de mon dernier passage ici, entouré de deux amis.
- Ah, tiens, tu as trouvé mon bracelet. Je ne m'attendais pas à ce qu'il t'aille, mais il faut croire que tes poignets ont l'air plus gros qu'ils ne le sont vraiment. Bon, merci de l'avoir retrouvé, rend-le-moi maintenant.
Un. Deux. Trois. Quatre.
- Ah oui, t'es le type de l'autre fois, le détraqué !
Quatre secondes avant de réagir. Pas très rapide, le gars.
- Et ce bracelet ? C'est le mien, ça l'est devenu dès le moment où je l'ai pris. Quant à toi, je ne sais pas ce que tu fais ici, mais il semble que personne ne t'ait jamais appris les bonnes manières et le respect, je vais donc te faire une fleur et te l'enseigner.
- Je ne vois pas de fleur ici, et de toute manière, si tu en avais eu une, elle aurait déjà fané, vu ton odeur.
Il s'avance vers moi, et ses amis m'entourent. De mon côté, je ne bouge pas, me concentrant plutôt pour ne pas regarder le poignet du blond.
- Allez, sort les mains de tes poches, ce sera plus marrant !
- Ouais, et t'en fais pas, on te laissera un bras !
- P't'être une ou deux dents, aussi...
- Ouais, si t'es sage.
Le mec sur ma droite amorce un coup de poing. Je me baisse, aperçois un éclat, rentre dans le type à côté du blond. Il perd l'équilibre, je me redresse et passe par la fenêtre ouverte. Un des gars essaye de me retenir, je l'évite, puis utilise de la sève que je forme à partir d'un peu d'azote présent dans l'air afin d'apposer une sorte de colle sur le sol derrière moi. Ensuite je pars, marchant sur de l'herbe.
- Tu l'as ?
- Oui. Et j'en ai pas vu d'autres.
- Un c'est déjà bien.
Avec Cordax, nous prenons le chemin qui va dans la direction de l'ouest. Il me passe le bracelet qu'il a subtilisé au type pendant que je le distrayais.
- Tu as fait quoi du tissu ?
- Je l'ai posé par terre, près d'une porte. Je pense qu'il faudrait émettre un avis de risques de glissade pour les faux blonds.
- Oh, pas besoin, ils ont la tête dure.
Je marque un temps de pause.
- Merci pour tout.
- Mais de rien, c'était avec plaisir !
Nous continuons en silence, dépassant le pont.
- Il est quelle heure ?
- Quatorze moins vingt. On a le temps.
- Dis, tu sais comment Hyba l'a su ?
- Non, pas du tout. Quoique... Tu as reçu une liste avec des infos dessus, comme ton nom, ta particularité, ta paire... et ton proche. Je suis sans doute noté, et peut-être qu'il l'a regardée et qu'il s'est rendu compte de la différence.
- Ça se tient. Et comment a-t-il su que tu étais avec moi, juste avant d'entrer dans la pièce ?
- Un coup de chance.
- Non, il était sûr de lui.
- Tu connais sa particularité ?
- Pas du tout. Tu penses que ça a un lien ?
- Oui. Il pourrait voir la chaleur, détecter les pensées, ou autre.
Le silence revient. Nous atteignons Epap, contournons le bâtiment, et allons vers la porte extérieure de la cafétéria. En chemin, Cordax rejoint ma veste.
Je finis par l'atteindre, et la trouve à trois quarts vide. Il y a encore quelques rares personnes qui mangent, d'autres qui les accompagnent, mais sans plus.
Voyant une cuisinière derrière le buffet, je me dirige vers elle.
- Bonjour, je suis nouveau ici, est-ce que vous pourriez m'expliquer le fonctionnement de la cantine, s'il vous plaît ?
- Bien sûr. C'est ouvert de onze à quatorze heures, les plats sont gratuits pour les élèves et les profs, les tables sont à disposition toute la journée et les plateaux vides sont à mettre dans les chariots, là-bas. Tu as des questions ?
- Non, c'est tout bon. Ah, si, j'en ai une : Vous auriez des sandwichs ?
- Juste là.
Elle me désigne, un peu plus loin et de l'autre côté de la vitre de protection, une série de différents plats à emporter.
- Merci. J'en prendrai un au poulet pané, s'il vous plait.
- Et voilà. Quelque chose d'autre ?
- Non, c'est tout bon. Merci, Claire, dis-je en jettant un coup d'oeil à son badge.
- Mais de rien...
- Jasen.
- Bon après-midi, Jasen !
- À vous aussi.
Sur ce, je quitte la grande salle.
- Où va-t-on ?
- À l'animalerie. C'est là qu'Hyba nous a donné rendez-vous. Tu viens avec ?
- Je vais éviter. Ils ont des systèmes de sécurité contre les intrusions animales - comme moi - plutôt sophistiqué. On se retrouve après ? J'ai un truc à te montrer.
- Ok. Tu veux que je te dépose quelque part ?
- Non, c'est bon. Bye !
- À plus.
Je vérifie que personne ne passe par là, avant de laisser filer Cordax. Trois virages plus loin, j'atteins le lieu de rendez-vous et entre dans le salon vide. Là, je me pose dans un fauteuil, et commence à manger mon sandwich en attendant les autres.
Il ne faut pas longtemps avant qu'un gars de ma classe, Samuel, me rejoigne. Jusque-là timide, discret, de taille moyenne, les cheveux châtains avec une mèche qui retombe toujours devant ses yeux marrons, un peu rond, je pense qu'il est le moins à l'aise du groupe. Il me fait tout de même un hésitant signe de la main avant de s'assoir sur un canapé. Je prends encore quelques bouchées de mon repas, avant de le questionner.
- Tu en as trouvé combien ?
- Hein ? Quoi ?
Je le regarde. Il a l'air stressé, mal à l'aise.
- Est-ce que tu as trouvé des bracelets ?
Il devient rouge et secoue la tête en se dandinant.
- N-n-non, aucun...
Je n'ai rien le temps d'ajouter que la porte est ouverte. Bruyamment, Théo le charismatique, accompagné d'un certain Julien (intelligent, taille moyenne, blond, yeux bleus, nez en trompette) et de son inséparable ami, Jonathan (une tête de plus que Julien, cheveux brun foncé) pénètrent dans la pièce jusqu'à présent calme. Juste derrière eux arrive Eléa, qui discute avec Lia, le binôme de Samuel. Il a sans doute pris de l'avance sur eux, il ne parait pas très bavard.
Il me faut un aboiement pour remarquer que des animaux les accompagnent. En l'occurrence, un chien, ainsi que deux chats, un écureuil, un renard et, je m'en rend compte un instant après, une souris que Samuel tient dans ses mains. Quelques secondes après l'arrivée du dernier proche, Fabrice entre, accompagné de Julie, une grande fille aux cheveux teints en blond, maigre, avec des habits courts. Elle parait plutôt réservée.
J'ai le temps de finir mon sandwich avant que Théo prenne la parole.
- Votre attention s'il vous plait ! Il est quatorze heure moins deux, on a tout juste le temps de mettre en commun. Que tous ceux qui ont un ou plusieurs bracelets lèvent la main !
Eléa, Lia, Julien, Fabrice et moi en avons. Théo fait vite un tour, au total il y a huit bracelets. Nous les répartissons, Théo n'en prend pas.
À deux heures, les cloches sonnent. Nous attendons, certains pensent qu'Hyba est en retard, alors qu'il doit juste expliquer et être présent pour la formation des classes d'entrainement des particularités. D'ailleurs, ces classes devraient être relativement vites faites, puisque les élèves vont normalement avec leur tuteur, si j'ai bien compris. De notre côté, le dernier élève de la classe, Steph, arrive dix minutes en retard.
- Salut, t'aurais pas trouvé deux bracelets par hasard ?
- Yep.
- On pourrait en avoir un ?
- Nop.
- Et pourquoi ?
- Ben j'en ai un pour moi et l'autre j'l'ai jeté dans le lac. J'me suis dit que c'serait bien pour les poissons.
Le silence se fait. Être solitaire, passe encore, mais pénaliser tout le monde avec une attitude aussi égoïste ?
- Cordax !
- Oui, j'y suis.
- Petit crétin égoïste ! Tu penses y arriver comme ça ? Nous pourrir la vie et t'en tirer sans rien ? Tu me prends pour qui au juste ?
Julien s'est levé, il est maintenant debout face au solitaire. Théo bondit, pensant sans doute les séparer, mais il est trop loin et Steph est rapide. Ce dernier tend le bras, saisi la tête blonde et amorce le geste de la lancer comme on le ferait avec une balle. Il ne finit pas son mouvement. À la place, il le lâche et pousse un glapissement de douleur, à cause de son autre bras que je tords dans son dos. Il se fige. Lentement, je relâche la pression, avant de retourner m'assoir.
Plus personne ne parle. Steph, de son côté, me jette un regard noir, puis quitte la pièce en claquant la porte qui mène aux enclos.
- Quand tu veux.
- Tu es où ?
- Dans le mur.
- Pose-le sous un meuble, de manière à être visible.
- C'est fait.
- Merci.
Discrètement, je regarde autour de moi, cherchant l'endroit où Cordax l'a posé. Je finis par repérer un petit meuble, posé dans un angle, et un objet sombre en dessous.
Tranquillement, je vais le chercher, et vérifier par la même occasion que c'est bien le dernier. L'ayant récupéré, je me relève, avant d'aller le passer à Théo.
- Steph a menti, il ne l'avait pas trouvé.
- C'était juste pour nous énerver... Je ne sais pas comment il va faire pour tenir l'année.
- Ce qui importe, c'est que nous on ne se comporte pas comme lui.
- D'ailleurs, tu l'as trouvé où ?
- Sous le meuble, là-bas.
Je retourne à ma place. Cordax part, je suppose par un conduit dans le mur... ou par un trou de souris.
Après un moment, les discussions reprennent, mais elles sont beaucoup plus discrètes et moins fortes. Un peu plus tard, Hyba entre.
- Vous êtes tous là ?
- Non, Steph est vers les parcs.
Il nous regarde tous attentivement, décelant la tension qui s'est installée dès que son nom a été prononcé.
- Je lui parlerai plus tard. Combien de bracelets avez-vous ?
Encore une fois, Théo lui répond.
- Neuf, et Steph a le dixième.
- Bravo, je pensais qu'il vous en manquerait, mais je vous ai sous-estimé, j'en suis désolé. Mettez-les à vos poignets, et suivez-moi.
Notre prof n'attend pas, il quitte la pièce dès qu'il a fini sa phrase. Les autres échangent des coups d'œil, Eléa et moi nous regardons, puis tout le monde se dépêche de rattraper le prof.
Au bout d'une dizaine de mètres, le prof appelle Julie, lui désigne une porte et continue d'avancer sans ralentir un instant. Un peu plus loin, il montre une armoire à Fabrice, puis une entrée à Julien. Les personnes concernées s'arrêtent, indécises, et disparaissent de notre vue à chaque tournant, tandis que le prof ne cesse d'attribuer des passages. En quelques virages, il ne reste que Théo, Eléa et moi. À ce moment-là seulement, Hyba s'arrête et se retourne vers nous.
- Théo, les autres t'écoutent. Eléa, tu sais analyser les situations. Jasen, tu as d'excellents réflexes et techniques. Vous trois êtes les meilleurs de la classe, les meneurs. Cette année, vous allez devoir faire équipe pour veiller sur la classe, faire en sorte qu'elle soit unie, et la préparer pour les épreuves à venir. Est-ce que vous avez compris ?
Il règne une seconde de flottement, pendant laquelle nous ne savons pas comment réagir, puis Théo acquiesce, ma paire aussi et je fais de même.
- Très bien. Suivez-moi.
Hyba ouvre une porte et en passe le seuil. Je le suis, tout comme les deux autres.
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