Chapitre 66 : Je ne peux plus
- roulements de tambour -
Nous changeons de point de vue pour ce chapitre ! Nous sommes dans la tête de...
- roulements de tambour -
... Gabriel !
GABRIEL :
D'un coup de pieds, je me propulse vers le plafond et je prends une grande inspiration.
Des objets flottent. Je n'ai pas pied. Il doit rester une vingtaine de centimètres avant que l'eau ,'atteigne le plafond.
L'eau s'écoule à présent partout dans le vaisseau et le niveau redescend progressivement.
- Emma ! crié-je.
Ma voix est enrouée par le sel.
- Emma ! répété-je plus fort.
Je me sens lourd avec mes chaussures et mon gilet pour le dos. Je retiens mon souffle et je plonge sous l'eau. Je défais mes lacets comme je peux et avec de grands coups de pieds, j'arrive à me débarrasser de mes baskets. J'arrache les scratchs de mon gilet et je remonte à la surface. Je ne suis pas dans la même pièce l'eau m'a poussé plus loin et cette fois, mes orteils touchent enfin le sol.
Au loin, j'aperçois les cheveux clairs d'Emma. Je patauge du mieux que je peux en évitant les débris. La française semble perdue.
- Ça va ? demandé-je une fois à sa hauteur.
Elle hoche doucement la tête.
D'une main elle tient le haut de son bras où apparait une tache de sang. Je soulève délicatement ses doigts. La plaie ne semble pas profonde.
- Tu as mal ?
Elle hausse les épaules.
- Tu devrais retirer ton gilet et tes chaussures, on se déplace mieux.
Elle s'exécute et je la voix serrer la mâchoire au moment de s'immerger, le sel ne doit pas lui faire de bien.
L'eau m'arrive à présent à la taille et je suppose qu'elle a recouvert tout l'étage.
- On va couler ? demande Emma.
C'est la première fois qu'elle parle.
- Peut-être que le vaisseau va couler oui. Mais je peux t'assurer qu'on sortira vivants.
- Les animaux, murmure-t-elle. Ils sont coincés. Maya et Lilou !
J'essaye de garder mon calme malgré la panique qui m'envahit.
- Ils vont envoyer du monde nous secourir, affirmé-je. Il faut tenir le plus longtemps possible. Pour ça il vaut mieux être en haut.
- Mais en haut il n'y a pas d'issues, contre Emma.
- On va trouver une solution.
Ma voix tremble mais je lui agrippe la main et on s'approche des escaliers pour prendre de la hauteur. D'autres semblent avoir la même idée. Nous avançons comme nous pouvons.
- Personne n'a été blessé grave dans le coin ? demande Kim.
Je fais non de la tête.
- Pas que je sache.
- Je ne trouve plus Matéo, dit un autre.
Emma me regarde et je comprends tout de suite où elle veut en venir.
- Non Emma, on se met à l'abri, et après on avisera et puis si on en est là c'est un peu de sa faute.
L'eau gelée me glace les jambes mais je me force à continuer à braver le courant.
- Vous croyez que le niveau de l'eau va monter rapidement ? demande quelqu'un.
- Il n'y a qu'une entrée qui est bouchée par des débris de pans, dit un autre. Je ne pense pas.
Pour mon plus grand soulagement, on atteint enfin les première marches que l'on gravit avec grand plaisir.
- Comment savoir si tout le monde est là ? demande Katie d'une voix faible.
- On va tous mourir, dit un autre.
Je soupire, ce n'est pas le moment de se lamenter, c'est le moment d'être courageux et efficaces, comme on nous l'a toujours appris.
- Il faut prévenir la Nasa et les autorités de notre position le plus vite possible, dis-je.
- Montons voir Ellias, propose Emma.
Nous sommes environ une vingtaine agglutinés dans l'escaliers sans la moindre idée d'où sont les autres.
- Ok, nous on va essayer de voir si personne dans le coin n'a besoin d'aide, informe Kim. Venez, on y va en petit groupe.
- Et nous on se rend au sas pour bloquer l'arrivée d'eau.
Ah enfin, ils se réveillent, songé-je en entrainant Emma dans les couloirs.
Je l'entends claquer des dents, ses cheveux dégoulinent dans son dos. Mais elle ne se plaint pas, elle reste forte comme toujours. Malgré mes jambes raidies par le froid, je continue d'avancer. Les couloirs et les escaliers ne m'ont jamais paru aussi longs.
- On y est presque, grelotté-je. Plus que deux étages.
Emma acquiesce vaguement. On poursuit silencieusement notre ascension périlleuse. Le vaisseau penche légèrement et je tente d'accélérer encore l'allure. En bas, on entend des cris.
- Ellias ! dit d'une voix forte Emma alors que nous entrons dans la salle de contrôle.
Le finlandais est penché sur un écran, le visage crispé.
- Il faut prévenir la Nasa et les secours de notre position exacte, dis-je.
- C'est ce que je suis en train d'essayer de faire, répond-il d'une voix concentrée. Il y a des blessés ?
- Je ne suis pas sûr, on est venus vite, déclaré-je.
- J'ai réussi à envoyer nos coordonnées ! s'exclame le finlandais après d'interminables minutes d'attente.
Dans la pièce tout bipe rouge, le vaisseau est en alerte.
- Il va couler ? demandé-je.
- D'après les capteurs oui, dit calmement, Ellias. Mais pas tout de suite. On doit tenir jusqu' à l'arrivée des secours.
- La seule issue est immergée, dit Emma.
- Alors il faut en créer une autre, remarque Ellias. Où est Tessa ?
- Je n'en sais rien, pourquoi ? m'étonné-je.
- Non pour rien... Allez, il faut faire monter au dernier étage un maximum d'animaux et de personnes, enchaîne-t-il.
- Mais il n'y a aucune ouverture, répète Emma.
- On a des explosifs, dis-je. On pourrait faire péter une partie du toit.
Le finlandais semble réfléchir à la proposition.
- Pourquoi pas, finit-il par dire en frottant sa barbe d'un air songeur.
- Vraiment ? m'écrié-je.
- C'est une option pour obtenir une ouverture...
- Mais c'est hyper dangereux non ? s'enquiert Emma.
Je réfléchis, oui ça comporte des risques, mais honnêtement, vu notre situation, c'est ce qui me paraît le mieux à faire.
On finit par tomber d'accord et on redescend les étages pour retrouver le groupe et les prévenir, tandis qu'Ellias prépare le matériel, c'est le plus expérimenté et il n'est pas engourdi par le froid.
En bas, dans les escalier, l'eau a gravi bien deux mètres, elle tape inlassablement contre le les marches, à chaque fois un demi millimètre plus haut que la fois précédente.
- On va faire exploser le toit du dernier étage, indiqué-je au groupe rassemblé sur les marches. Ensuite, nous monterons tous en haut et on attendra les secours.
Personne ne bronche, certains pleurent en silence, d'autres, les lèvres bleues, ne semblent même pas capter que je parle.
- Il faut s'accrocher à la rampe, dès qu'Ellias redescendra, ça va péter et ensuite on montera tous ensemble, déclaré-je.
Toujours aucune réaction.
- Où est le groupe parti chercher du monde ? demandé-je.
- On est là, indique Kim dans un coin. On est presque au complet maintenant, mais on n'a pas retrouvé Matéo, ça semble être le seul avec Lindsay à manquer à l'appel. A présent les salles sont pleines d'eau et on n'est pas équipés, on est allés le plus loin possible mais l'eau montait et...
Il est interrompu par Ellias qui arrive en trombe dans les escaliers. C'est le seul qui n'est pas mouillé.
- Ça se déclenche dans - il jette un coup d'œil à sa montre – vingt-trois secondes.
On monte un peu plus haut dans l'escalier et on s'agrippe comme on peut à la rampe.
- Cinq secondes.
Emma se mord la lèvre et je passe mon bras autour de ses épaules.
- Je t'aime murmure-t-elle.
Je l'embrasse sur le front.
- Ne t'inquiète pas.
- Trois secondes !
Ellias regarde autour de lui comme pour chercher quelqu'un. Tessa, me dis-je. Je regarde à mon tour mais elle ne semble pas présente.
- Où est Tes...commence Ellias.
Mais il est interrompu par une détonation qui fait trembler les murs et gicler de l'eau. Alors que je relève la tête croyant que c'est fini, une série de craquements retentit et puis...plus rien.
- Ellias est tombé, il ne s'était pas accroché, dit d'une voix paniquée Kim.
On baisse la tête sur le bas de l'escalier, où l'eau tape contre le carrelage, montant à chaque instant un peu plus.
- J'y vais, dis-je.
- Moi aussi, déclare Max.
On se jette un coup d'œil en descendant les marches qui nous séparent de l'eau. Une fois à la dernière, je me laisse glisser après avoir rempli mes poumons. Dans l'eau, tout est silencieux. Je garde mes yeux grands ouverts à la recherche du finlandais.
- Laaaaaaaoaaaa, entendé-je.
Max désigne du bout du bras une masse sombre.
Je fends l'eau en faisant mes plus belles brasses et je descends à la verticale pour attraper le corps qui dérive d'Ellias. Il semble inconscient. Je donne de puissants coups de pieds pour remonter vers l'escalier mais Max ne me suit pas et ne m'aide pas. Je me retourne, le poids d'Ellias me fait descendre vers le fond.
Le hollandais semble essayer de dégager quelque chose. Mes poumons sont vides, je ne peux presque plus tenir. Résolument je pousse avec mes pieds vers l'escalier, abandonnant Max à son occupation, je n'en peux plus.
Quand ma tête émerge de l'eau, je commençais à voir des taches lumineuses je n'ai jamais été aussi heureux d'inspirer.
Kim attrape aussitôt le finlandais et je m'assois sur les marches, le souffle court. Je vois Kim donner des petites claques à Ellias qui se redresse bientôt en toussant et crachant.
- Tu vas bien ? me demande Emma d'une voix inquiète en s'approchant.
- Oui mais Max, y est encore, il essaye de dégager quelque chose... il faut que j'y retourne.
- On y va avec toi, décident Dylan et Soña.
Ils plongent dans l'eau, et après quelques secondes où je tente de reprendre mon souffle, je les suis. Le sel me pique les yeux que je force à garder ouverts. Mon corps fatigue, mes muscles sont endoloris par le froid, la crispation et l'effort.
Les trois, Dylan, Soña et Max sont regroupés en train de soulever ce qui me semble être une tige métallique. Quelqu'un semble coincé dessous. Je m'empresse de les aider sans vraiment comprendre ce que je fais. Je suis dans une espèce de torpeur. Je vois flou. J'ai froid. J'ai mal.
Dès que c'est possible, Dylan tire aussitôt le corps et nous relâchons la barre qui tombe sur le sol en créant un grand remous. Tout est silencieux. Je n'arrive pas à distinguer le visage, je ne vois presque rien. Malgré la catastrophe il n'y a pas un bruit, l'eau étouffe tout. Soña et Dylan nagent à énergiquement en trainant le corps et je tente de leur venir en aide.
J'ai des lumières qui dansent devant les yeux, je me sens étrange. Plus que quelques mètres me dis-je. Max semble ne plus avoir ni de souffle ni de force. Je m'approche d'un geste d'une brasse. Je passe mon bras sous le sien et on s'accroche l'un çà l'autre en s'approchant de l'escalier. Devant nous, Dylan et Soña semble être sortis de l'eau.
Des bulles s'échappent de la bouche de Max.
Plus que quelques centimètres... Enfin, ma tête sort de l'eau.
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