Chapitre 38 : Quatre contre un

- roulements de tambour -
Nous changeons de point de vue pour ce chapitre ! Nous sommes dans la tête de...
- roulements de tambour -
... Lucia !

LUCIA :

- Je peux participer à la prochaine expédition ? demandé-je de but en blanc.

- Tu es sûre que ça ira ? s'inquiète Thiago.

- Oui.

- Eh bien, va voir Emma et Gabriel ils veulent participer à la prochaine aussi, déclare-t-il en se passant la main dans ses cheveux.

Je le remercie et me dirige tout droit vers le sas. Tout en marchant, je relève mes longs cheveux bouclés en queue de cheval. Depuis le décès de Carlo, les gens me demandent si je vais bien en me croisant. Comme si s'était moi qui était sous la pluie bouillante.

Avec Carlo, nous étions plus proches que d'autres, nous avons vécu ensemble les années d'entrainements avant le décollage. Notre origine Italienne nous a forcés à nous côtoyer. Carlo était quelqu'un de bien qui ne méritait pas ce sort.

Nous avons tous reçu la nouvelle comme une grosse claque dans nos petites têtes d'anges. Comme si nos bulles de bonheur et de sérénité avaient brusquement volé en éclats. C'est la façon de cette planète de nous saluer et de dire « Coucou les gars, petit cadeau de bienvenue ! ».

- Emma ! m'exclamé-je en entrant dans le sas.

La française se tourne immédiatement vers moi.

- Lucia, me dit-elle. Tu pars avec nous ?

- Ouaip.

Elle acquiesce.

Une lueur déterminée brille dans mon regard. Et si cette fois la pluie ose pointer le bout de son nez, j'irai lui dire d'aller se faire voir ! Elle nous a pris Carlo, maintenant c'est fini.

- Je ne sais pas si les combinaisons intégrales sont nécessaires, commente Gabriel. Il a plu hier et visiblement les pluies sont espacées les unes des autres.

- On devrait mettre au moins la veste résistante et garder le casque accroché à notre ceinture, dit-Emma.

J'approuve.

- Qui d'autre vient ? enchainé-je.

- Ce n'est pas encore décidé, explique Emma. Mais Anissa pourrait venir et puis un garçon ou deux.

- Je vais les chercher, dis-je en sortant aussi sec du sas avec comme idée de ramener des amis.

Je circule dans les couloirs blancs, tous blancs. Qui a décidé de cette couleur, sérieux ? Quand je vois des murs si unis j'ai envie de renverser des cafés dessus et de lancer des bombes de peinture. Non, mieux ! Faire un paintball ! Je souris toute seule en imaginant la tête de Daniel Hunter s'il savait ce que je pensais...

Je reviens dans le sas, suivie d'Anissa et de Jonas. Juste derrière, Mathias et Camilla qui font partie du groupe d'Elina entrent.

- J'ai ramené des médecins ! lancé-je. Je me suis dit que dans notre équipe du tonnerre il n'y en avait pas.

- Pas faux, dit Emma en penchant la tête sur le côté.

Quelques instants plus tard nous sortons un par un en posant notre doigt sur la petite plaque noire.

Je saute et je m'accroupis, fière. J'aimerais filmer cette scène, c'est vrai qu'on a la classe en sortant d'un vaisseau pour poser nos pieds sur une planète inconnue. Je souris une nouvelle fois toute seule. Nous observons en suivant le protocole et on commence à explorer, on recueille, on explore ou prend en photo. J'aime bien le petit bruit que font nos pieds en marchant sur les pousses, un peu comme au ski, le petit craquement de la neige.

Nous progressons, l'air est chaud. Nous enjambons les petites rivières qui s'avèrent très profondes. Je m'accroupis près d'une et je frotte à l'aide d'une pousse violette et dure la couche noire qui recouvre les parois. Aux endroits où je frotte, la couche noire tombe en petites miettes au fond de l'eau mais très rapidement, les petites miettes du tour semblent s'étendre et elles recouvrent aussitôt l'espace sans couche.

- Viens voir ! dis-je à Anissa.

Je lui montre le phénomène et elle semble étonnée.

- C'est vivant ces machins ?

- Je n'en sais rien du tout, réponds-je en en recueillant dans mon bocal.

Quand nous frottons nous pouvons apercevoir du rouge, comme des quantités de pousses tassées les unes sur les autres.

- Je peux avoir une pousse grande et sèche, demandé-je.

Nous nous sommes massés autour de cette rivière. Deux minutes plus tard Emma revient avec une longue pousse violette.

- C'est moche quand ça durcit, c'est tout fripé, commenté-je en l'attrapant.

Je frotte tout au fond de l'eau à 1m50 je dirais, et la surface sous la couche de miettes noires n'est plus rouge elle devient plus sombre.

- Ça ressemble à de la roche, déclaré-je.

Nous explorons encore une petite heure sans trop nous éloigner. Contrairement à ce que j'espérais nous ne découvrons rien d'exceptionnel. Un peu déçue mais fière de ma découverte, je franchis le sas. Thiago nous attend pour notre débriefing. Après avoir répondu à un milliard de questions pointues et pas franchement utiles je suis libre.

Je monte immédiatement dans ma chambre. C'est vraiment une pièce que j'adore, mon petit chez moi, mon espace vital. Le mur en face moi est vert sapin, de même pour celui de gauche et les deux autres sont gris pale. J'ai fixé des autocollants de plantes tropicales en bas de chaque mur et j'ai installé des fausses plantes un peu partout, suspendues. Quand on entre, on se croirait dans la jungle et c'est ça que j'adore. Je vous laisse deviner les motifs de ma couette. Sur le peu de place qu'il me reste sur les murs j'ai accroché quelques cadres avec des photos de mes proches restés sur Terre.

Mon bureau est surchargé d'affaires et des habits sales s'empilent sur mon fauteuil. J'ai en réalité juste la flemme de descendre dans la laverie, certains y vont toutes les semaines, moi je passe plutôt tous les deux mois, quand je n'ai vraiment plus rien à me mettre. Je rajoute à cette pile de vêtements ceux du jour et je vais à la douche.

Je partage mon appartement avec Anissa que j'adore et deux autres filles qui se racontent des petits secrets entre elles, on se retrouve un peu exclues avec Anissa. Mais ce n'est pas grave, on a d'autres amis ! On n'a pas besoin d'elles.

J'ai mon mode de vie et il me convient parfaitement. Je fais partie du groupe d'Izabella, pour activités variées. On organise des fêtes, des tournois. On rigole beaucoup, j'aime ça. D'ailleurs je pourrais lui proposer de faire un Paintball dans les couloirs blancs, mais je ne suis pas sûre qu'on ait assez de matériel, c'est dommage.

Après mon aventure, je m'autorise une petite sieste.

- Lucia ? appelle Anissa en entrant dans la pièce.

- J'espère que tu as une bonne raison pour me réveiller ? grogné-je.

- On mange, répond-t-elle simplement.

- Ah.

Avec tous ces changements d'horaires je suis complètement pommée. Quand je descends manger et je remarque que Kimiko n'est toujours pas là, je compatis avec elle, pour moi aussi Carlo était un être cher. Je dépose mon plateau à la table d'Emma et Gabriel. Anissa pose le sien aussi.

- Comment va Kimiko ? demandé-je.

La française baisse les yeux.

- Pas fort, elle ne bouge pas de sa chambre, je lui apporte un peu à manger mais elle n'y touche presque pas. D'ailleurs faudrait arranger un peu ses cheveux non ?

- Pas qu'un peu ! m'exclamé-je et Gabriel rit.

- Ne souris pas trop là-bas, les tiens ne sont pas mieux, rétorqué-je.

Cette fois, c'est Emma qui éclate de rire.

- C'est ce que je lui répète à longueur de journée, dit-elle.

Gabriel nous tourne le dos, vexé.

Après un repas dans une ambiance rieuse nous montons tous les quatre dans la chambre de Kimiko et d'Emma après être passée récupérer tout le matériel de coiffure.

- On s'occupe du cas de Gabriel juste après, décide la française.

- Quoi ?! s'exclame ce dernier. Non, non, non !

- On est trois, tu es seul, t'es foutu, remarqué-je.

Il pousse un long soupir.

- Kimiko que penses-tu de la coupe de Gabi ? demandé-je en entrant dans la pièce.

La japonaise a un maigre sourire et marmonne.

- Ce n'est pas fameux.

- Bim ! Quatre contre un ! dis-je.

Kimiko se laisse faire en prononçant des rares paroles tandis que l'on tente de rattraper sa coupe en un carré acceptable. Même comme ça elle est plutôt jolie. Mais elle a changé et ses joues paraissent plus creuses.

- C'est quand la dernière fois que tu as mangé ? demandé-je.

Elle hausse les épaules.

- Que tu as fait du sport ?

Nouveau haussement d'épaules.

- Il faut te bouger un peu ma petite !

Nous passons à Gabriel.

- Assieds-toi là et ne bouge pas, ordonne Emma.

Le pauvre islandais s'exécute. Tandis que nous lui coupons les cheveux sous ses soupirs de désespoir, je vois un minuscule sourire apparaitre au coin de la bouche de Kimiko.

- Arrête de bouger ! m'exclamé-je. Sinon, on serait obligées de tout raser et je ne sais pas si ça t'irait la boule à zéro...

Emma ricane.

- Je suis sûre que tu serais magnifique mon chéri !

Cette fois même Kimiko a un petit rire. C'est déjà ça.

Une fois notre mission accomplie, Anissa et moi nous nous retirons en les laissant tous les trois.

- Tu veux faire quoi ? demandé-je. On passe voir Thiago pour savoir ce qu'ont donné nos analyses ?

Anissa approuve et on descend à l'étage un. On apprend que nos miettes sont des microorganismes qui semblent vivants et qui se plaquent contre les pousses uniquement dans l'eau, selon les expériences.

Lors du dernier repas de la journée, Thiago fait des annonces et explique toutes les découvertes. Pour ceux qui sont déjà au courant comme moi, c'est un peu ennuyeux mais nécessaire pour les autres. Ensuite, je retourne dans ma jungle et j'enfile mon pyjama Winnie L'ourson, je dois offrir un drôle de spectacle. J'éteins la lumière et les étoiles phosphorescentes que j'ai fixées au plafond apparaissent une à une. Le ciel doit être beau sur Terre, loin d'ici.

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