EMMA :

- On se retrouve demain pour préparer la prochaine réunion, déclare Thiago aux Dix. Je veux une organisation de pro, on n'est plus des gamins.

Petit à petit, c'est devenu lui le chef, sans vraiment qu'on s'en aperçoive, je pense que même lui ne s'en est pas rendu compte, mais personne ne se plaint et notre société tourne.

Une semaine plus tard, le grand moment arrive, nous devons constituer les 5 équipes qui partiront en expédition. Nous nous réunissons entre Dix, quelques minutes avant pour préparer.

- Il faut que tous ceux de médecine sur le terrain se mettent par binôme, ensuite le reste il faut essayer de mixer d'avoir au moins un Dix par groupe de douze et ensuite on regroupe le binôme et les douze, dit Thiago.

- On laisse libres les groupes, sans condition ? s'étonne Izabella.

- On n'est plus des petits enfants qui veulent se mettre avec leur copain, retorqué-je. On est grands et raisonnables. J'espère bien que les gens vont constituer des équipes mixtes avec un ou deux Dix, venant de groupes de travail différents et tout le bazar sans qu'on les oblige.

- Je suis d'accord avec Emma, lance Elina.

- On essaie et on verra bien ce qu'il se passe, dit Jun.

Nous tombons plus ou moins tous d'accord et petit à petit la salle se remplit. Entendre le brouhaha discret et cette sensation d'anxiété en moi, je me revois lors du premier stage tous ensemble, alors que je devais prendre la parole à la suite de Daniel Hunter. Où est-il celui-ci ?

- Thiago tu parles ? propose Izabella.

- Non j'organiserai après, quelqu'un d'autre, répond-il.

- Emma ? Demande Izabella.

J'acquiesce et je m'avance sur scène.

- Bonsoir, dis-je pour réclamer le silence.

Toutes les têtes devenues familières au fil du temps se tournent vers moi.

- On va procéder en deux étapes, les médecins sur le terrain vont se mettre par binôme, 5 binômes normalement, déclaré-je. Les 60 autres sur le terrain vont se mettre par douze, en 5 groupes. Nous n'avons pas de critères, à part votre bon sens, il faudrait au moins un Dix dans chaque groupe, des groupes mixtes avec un peu de chaque spécialité etc.

- On va tenter de faire ça maintenant, on se mélange et on essaye, déclare Elina.

Il y a immédiatement un grand brouhaha, les gens se lèvent, crient des noms. Je descends de la scène et je retrouve Gabriel.

- Ça va être un beau bordel, moi je dis, commente-t-il.

- On doit retrouver Kimiko, dis-je en ignorant sa remarque.

On se faufile et je finis par repérer ses longs cheveux noirs.

- Kimiko ! appelé-je.

Elle se retourne et sourit, Carlo se tient à ses côtés. Je hausse les sourcils de façon exagérée, en direction du garçon mais elle me lance un de ces regards qui tue en guise de réponse.

- On est déjà quatre, dit-elle. Plus Linda je pense et donc Kaitlyn.

- Pourquoi pas Lucia et Anissa je leur écris un message, dis-je.

- Attendez, ça fait que des filles, ça ne va pas du tout, déclare Gabriel. On va rajouter Samuel, Kevin et Théo.

Anissa arrive, Kevin la suit d'Indonésie aussi. Deux autres filles rejoignent notre groupe et un autre garçon ami avec Kevin.

- On est complet, déclare Kimiko.

Je note sur une feuille nos noms : « Emma, Kimiko, Lucia, Anissa, Julia, Katie, Linda, Kaitlyn, Gabriel, Carlo, Samuel, Kim, Théo, Alex et Kevin »

- Nickel, Carlo et Kimiko en médecine, Emma en Dix, un peu de filles et de garçons, on est au top ! Lance Lucia.

- Attendez, il manque quelque chose ! s'écrie Gabriel.

On se tourne vers lui.

- Un nom d'équipe, dit-il simplement.

Il propose une série de noms qui ne valent pas mieux que Bousette.

- On a qu'à faire comme dans Harry Potter, propose Anissa. On s'appelle Gryffindor.

Un silence accueille la proposition et nous finissons par accepter malgré les râleries de Gabriel qui ne trouve ça pas du tout original.

Si seulement tous les groupes avaient pu se faire aussi facilement ! Au bout de deux heures nous sommes deux groupes de prêt sur cinq.

- On va y passer la nuit, dit Gabriel tandis que nous attendons, assis dans un coin.

Un troisième groupe arrive maladroitement à se former et Jun essaye de départager les deux derniers, ça crie, ça râle, Gabriel avait raison, on peut dire que c'est un beau bazar.

Résultat, vers minuit nous allons nous coucher, les cinq groupes sont constitués mais nous partons tous avec un vilain mal de crâne. Le lendemain, c'est malheureusement à nous de faire le repas. Le réveil sonne bien trop tôt et je le laisse produire sa sonnerie stridente un long moment avant de trouver le courage de me redresser.

* * *

Quelques jours plus tard, une nouvelle grande réunion est organisée. Nous apprenons un langage de signe très simple, pour dire, danger, prudence, attention, tout va bien, venez, rentrez, regardez... etc. nous sommes tous enthousiastes et nous avons muri, on le prend au sérieux, mais avec bonne humeur.

- Ça ressemble un peu au signe nazi, non ? me chuchote Gabriel.

- La main, il faut que tu la mettes de profil, pas de face, lui répliqué-je.

Il lève les yeux au ciel et déclare.

- Tu crois que dans le feu de l'action j'aurai le temps de penser à l'orientation de ma main ?

Je pousse un profond soupir exaspéré, mais mon sourire en coin me trahit.

De son coté, Kimiko suit tout un tas de formations avec son Carlo, et elle continue de m'assurer qu'il n'y a rien entre eux. Je la taquine beaucoup et à chaque fois ses joues rosissent. Cette nouvelle ambiance de travail est agréable, nous avons un but, un objectif, on fait réellement tous quelque chose de nos journées. Entre le sport, les entraînements, les formations, Gabriel et Olaf, je ne m'en sors plus. Olaf est d'ailleurs elle aussi contrainte à des entraînements. Je la fais courir, sauter, reculer, et se tapir. Son petit quotidien s'accélère aussi. Globalement, dans le vaisseau, tout s'accélère. En arrivant à bord, on avait l'impression qu'il y en avait pour une éternité avant d'atterrir. Mais nous voilà presque au terme de ce trajet qui nous semblait durer toujours. J'effleure le bracelet argenté d'Edward, cette petite terre. Je lui avais promis de ne pas le retirer avant mon retour sur Terre, mais aura-t-il lieu un jour ?

- Tu as peur ? me demande Kimiko dans le noir.

- Pas vraiment, on est tous ensemble, dis-je.

- Pour combien de temps ?

Je ne réponds rien. Qu'est ce qui nous attend sur Aria ? Nous avons des analyses, des photos mais nous sommes les premiers à poser un pied dessus.

Lors de la réunion du lendemain, Ellias prend la parole avec une mine grave.

- Il y a quelque chose qui cloche, dit-il. Avec mon groupe, nous avons décidé d'observer les résultats des sondes qui ont été envoyée sur Aria, juste pour information.

- Quel est le problème ? Demande Thiago.

- J'y viens, poursuit Ellias. En tout, 120 sondes ont été envoyées sur Aria. Nous avons le retour de 63 d'entre elles, mais les autres sont introuvables. Nous avons fouillé tous les fichiers, les archives, 57 sondes n'ont donné aucun retour.

- Peut-être que leurs données sont ailleurs ? propose Tessa.

- Non, leurs données n'ont pas existé.

- Qu'est-ce que ça signifie ? demande Tessa.

- Que 57 sondes ont été détruites ou désactivées avant d'avoir pu envoyer la moindre donnée, déclare Ellias.

Il y a un long silence.

- Pourquoi nous ne sommes au courant de ça que maintenant ? s'exclame Elina en passant sa main dans ses cheveux blonds. Daniel Hunter ne savait pas ?

- Si, rétorque Ellias d'une voix dure. On ne peut pas passer à côté, ils ne nous en n'ont pas parlé volontairement.

Il y a des murmures scandalisés. Je me tourne vers Gabriel qui semble pensif.

- Toutes les sondes qui sont revenues montrent des résultats positifs et rassurants la question est : où sont passées les 57 autres sondes ? conclut Ellias.

- Si on récapitule, les adultes étaient au courant que 57 sondes avaient péri sur Aria, mais ils se sont dit « Pas grave ! On va quand même envoyer des gens dessus, sans les prévenir au passage ! Ce sera encore plus amusant. » lance Gabriel à côté de moi.

Personne ne répond, on médite. Qu'est-il arrivé à la moitié des sondes ? Pourquoi l'autre moitié envoie des résultats si positifs ? L'atterrissage est prévu dans un mois et demi et nous avons toutes ces questions sans réponses...