Chapitre 17 : Notre quotidien

EMMA :

Un matin Kimiko émet une idée.

- J'aimerais bien apprendre le français. On a le temps, et je ne sais pas, ça m'a toujours attirée. Tu voudrais bien me faire des cours ?

- Seulement si tu me fais des cours de Japonais en échange, réponds-je avec un sourire.

- Marché conclu dans ce cas-là.

Et c'est ainsi qu'une fois notre petit déjeuner avalé, je sors un nouveau carnet de mes affaires et Kimiko fait de même. On s'installe sur un bureau et on se regarde...sans rien dire. Je finis par éclater de rire et je dis.

- Je commence alors. Je vais déjà t'apprendre à prononcer les voyelles, tu verras c'est très simple. L'alphabet tu le connais déjà, c'est le même que l'anglais, enfin presque.

Je lui fais un modèle de ma plus belle écriture et elle recopie soigneusement toutes les lettres. Je lui apprends leurs rôles et leurs sons, puis elle fait de même pour sa langue. Sauf que le japonais est bien plus compliqué à saisir. J'apprends qu'il y a deux types d'écritures : Kanji et Kana.

- Les Kanji ça représente une idée, un mot tout fait en un seul symbole, m'explique-t-elle. Alors que les Kana ça représente une syllabe. Et puis il y a deux alphabets différents dans les Kana mais je vais d'abord t'apprendre le plus utilisé.

Je trace des séries de Kana, ils signifient des syllabes il y en a donc à peu près deux fois plus qu'en France où notre alphabet signifie des sons. Je m'applique à écrire une cinquantaine de symboles différents dans mon carnet tout neuf. Quand notre premier cours s'achève, on a toutes les deux le sourire aux lèvres.

- J'ai hâte de parler couramment ! dis-je.

Kimiko éclate de rire.

- Je vais sortir Olaf, elle ne tient plus en place, déclaré-je.

Comme ces derniers jours, je vais vers le terrain de foot et je fais mon footing Olaf gambadant à mes côtés. Mais au bout d'une demi-heure Gabriel et Samuel entrent à l'heure tour, un ballon sous le bras.

- Ça va ? me demandent-ils.

- Ouais, je défoule Olaf, dis-je, essoufflée.

- Nous on vient se défouler aussi, reprend Samuel.

Ils se placent devant les cages et marquent des buts à tour de rôle.

- Tu veux jouer avec nous ? Propose Gabriel.

- Non je vais aller me doucher j'ai déjà bien couru, réponds-je. Une prochaine fois.

Ce soir-là, au repas, Luka prend la parole.

- Maintenant voilà, une semaine et demie qu'on est à bord, on va dire que la période d'acclimatation est terminée. Mon groupe et moi sommes chargés de l'éducation. Vous allez être par binôme de pays, il y a plein de salles de travail vides, il faut que cinq fois par semaine au moins vous vous y rendiez pour bosser.

Il y a un grand silence.

- Il n'y aura pas d'examen et personne sur votre dos si vous ne le faites pas, mais c'est une question de culture générale et de faire marcher vos neurones. À vous de voir mais officiellement vous devez étudier cinq jours sur sept, mettez-vous d'accord avec votre binôme.

Nathan et moi échangeons un regard.

Ellias rejoint Luka et intervient à son tour.

- C'est pour ça qu'il faut absolument lancer les systèmes de communications entre nous pour pouvoir prévenir facilement son binôme et ses amis. La messagerie est déjà installée sur vos téléphones mais il faut la brancher pour que tous les noms et pays de tout le monde soient intégrés.

- La brancher sur quoi ? demande Anissa.

- Sur un serveur de données où mon groupe et moi avons rentré pour chaque téléphone le nom et le pays du propriétaire, explique Ellias. Demain vous passerez faire ce branchement.

Kimiko et moi nous y rendons le lendemain après avoir fait nos cours de japonais et de français. Je trouve ça vraiment agréable d'avoir un objectif comme le nôtre. On a un but à atteindre. Je vais courir avec Olaf, et les garçons nous rejoignent au bout d'une demi-heure.

- Ça roule ? lance Gabriel.

Je m'assois sur les gradins de devant et je laisse Olaf courir après leur ballon de foot. Elle saute dessus et évite tous les coups de pieds. Gabriel et Samuel se prennent au jeu et se font des passes de loin, la plupart du temps interceptées par Olaf. Je souris en la voyant courir comme une folle et faire des roulés-boulés dans l'herbe synthétique. Je les regarde s'éclater tous les trois pendant la demi-heure qui suit.

- J'amènerai mon appareil photo demain, dis-je. Elle est vraiment trop drôle !

- C'est vrai. Elle va être K-O pour toute la journée, lance Gabriel.

- Nous aussi, renchérit Samuel.

Je me dirige vers la piscine et Olaf souffle à côté de moi.

Après le repas du midi Nathan et moi devons nous retrouver dans une salle de travail pour étudier. On se plonge dans des manuels à contre cœur. Je me concentre sur l'histoire géographie de la France, on travaille aussi le français. On effectue quelques calculs et puis on descend au réfectoire. On discute avec les gens qui y sont. Avec lui, c'est un peu compliqué car quand on est seuls on parle français mais dès qu'il y a d'autres gens on est obligés de parler anglais, c'est toujours perturbant de ne pas savoir dans quelle langue s'adresser à lui.

Mes journées sont finalement bien remplies, après avoir discuté au réfectoire un moment je retrouve Soña pour notre petit tour chez les animaux. Ensuite je prends une bonne douche et je me lave les cheveux.

- Tu as fait quoi toi ? demandé-je à Kimiko.

- J'ai fait de la peinture, répond-elle.

- Ah bon ! m'exclamé-je. Je peux voir ce que tu peins ?

- Non pas pour le moment, dit-elle simplement. Et toi ?

Je lui raconte mon après-midi et elle hoche la tête. Nous commandons nos plats de ce soir, et vingt minutes plus tard nous mangeons sur une petite table ronde. Soudain, Olaf se lève de sous notre table et elle se faufile parmi les gens. Je la suis en courant, abandonnant Kimiko à la table. Ma petite chienne a filé voir Gabriel et Samuel qui étaient en train de la caresser.

- Tu as vu comment elle nous aime trop ! lance Gabriel en souriant.

J'acquiesce.

- Vous mangez où ? On peut se joindre à vous ? propose Samuel.

Je leur désigne notre table et ils s'y installent tranquillement.

- Tu es japonaise c'est ça ? demande Gabriel à Kimiko.

Cette dernière hoche la tête.

Ils nous parlent de leur pays et on rit plusieurs fois. J'aime bien discuter avec eux, ils sont sincères quand ils parlent et ils mettent beaucoup de bonne humeur dans ce qu'ils disent.

Le lendemain le réveil me sort brusquement d'un rêve étrange dont je n'arrive pas à me souvenir, j'ai le sentiment qu'il impliquait Anna mais je n'ai pas plus les détails. Dans le noir, je me demande ce qu'elle fait, je ne sais même plus quel jour de la semaine nous sommes. En regardant mon portable j'apprends que nous sommes jeudi 8h00 aux Etats-Unis, donc 6 heures de plus en France. Elle doit être à la mer ou chez elle, je n'ai absolument aucune idée de ce qu'elle avait prévu de faire de ses vacances. Peut-être qu'elle fait ses courses de fournitures sans moi.

Je sors de mes draps et me dirige vers la salle de bain. Comme à son habitude Olaf me suit, ravie. Je descends avec Kimiko, Mila et Amélie en pyjama, cette tradition est restée, et ça nous fait sourire le matin. Mais en entrant dans le réfectoire, Tessa, responsable de la consommation, ainsi que son groupe, attendent debout, l'air sérieux. On récupère nos plateaux de petit déjeuner et on s'installe toutes les quatre à une table sans les quitter du regard. Ils chuchotent entre eux en contemplant des fiches.

- Bonjour à tous, lance Tessa. Vous vous doutez que nous n'allons pas vous annoncer une bonne nouvelle, mais rien de catastrophique je vous rassure.

Je pose ma tasse sur mon plateau et je tourne la tête, intéressée.

- Nous surveillons la consommation d'eau et d'électricité de très près. Côté eau, tout va bien, la station d'épuration marche à merveille, l'eau sale est utilisée pour arroser les plantes et tirer la chasse d'eau, le reste est bu par nous ou par les animaux elle est aussi utilisée pour les douches évidemment, explique-t-elle. Bref tout va bien pour l'eau.

Elle s'écarte et laisse la place à une des filles de son groupe, qui s'appelle Kaitlyn il me semble.

- Le problème est donc au niveau de l'électricité, nous en consommons trop, elle sert à nous éclairer, nous chauffer pour maintenir une température à 21°C, elle sert aussi pour tous les appareils électroménagers, pour charger les portables et les ordinateurs...etc

Elle prend une nouvelle inspiration et poursuit.

- Avec nos réserves on doit tenir une dizaine de jours comme ça avant que certaines choses ne soient plus alimentées. Ce n'est pas catastrophique, mais il faut faire quelque chose.

Sa voix est claire et agréable à écouter.

- Nous cherchons des solutions, dit Tessa en reprenant la parole. On a déjà réduit la luminosité à certains étages mais ce n'est pas suffisant, on vous écoute.

- Je sais, dis-je à Kimiko. On n'a qu'à réduire le chauffage la nuit c'est meilleur pour le sommeil.

La japonaise hoche vigoureusement la tête.

- Dis-le !

Je m'exécute et prend la parole en me levant.

- J'ai une idée, il faut réduire le chauffage la nuit. La température idéale pour une pièce de vie est 21°C mais pendant notre sommeil c'est 16°C.

- Elle a raison, c'est agréable de dormir sous la couette quand il fait froid, renchérit Anissa.

- Pas faux, déclare Lucia d'Italie.

D'autres approuvent et Tessa acquiesce.

- Ça devrait réduire pas mal en effet, mais je ne pense pas que ce sera suffisant pour autant. Si quelqu'un d'autre à une idée...

Elle balaie l'assemblée du regard.

- Alors il faut que chacun réduise sa consommation en mettant ses appareils en mode Eco, et en éteignant bien la lumière. On va analyser les résultats et dans trois jours on fera un bilan. Merci beaucoup pour votre attention, conclut-elle.

Même s'ils sont en pyjama, ils se sont fait entendre, et ils rangent leurs fiches en rejoignant leur table. Puis, les conversations et les bruits de couverts reprennent et je bois une gorgée de café au lait.

- J'ai une super bonne idée, déclare soudain Mila.

- Pour la consommation ? demandé-je.

- Non pas du tout, j'ai pensé qu'on pourrait faire une soirée entre filles un de ces soirs. On prend des coussins et des plaids et on regarde un bon petit film avec mon ordinateur.

Elle a les yeux qui brillent quand elle dit ça.

- Olaf serait invitée bien sûr c'est une fille elle aussi, renchérit Amélie enthousiaste.

- Et je pourrais prendre de belles photos qu'on imprimerait, dis-je.

- Oh oui ! s'écrie Mila. J'ai plein de trucs pour nous faire belles.

- On n'a qu'à dire qu'on invite quatre ou cinq autres filles, déclare Amélie.

On échange des sourires.

- Soña parce qu'elle a Neba qui est trop chou ! Olaf se sentira moins seule, commence Mila.

- Elina est gentille aussi, propose Kimiko.

- Paulina, dit Amélie.

Il y a un silence et je propose.

- Lucia et Anissa sont supers sympas vous verrez.

Mila bat des mains, comme une enfant de cinq ans à l'approche de son anniversaire.

- Je me charge de les prévenir. On fait ça quand ? Demain ?

Personne n'y voit d'objection et c'est décidé.

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