Chapitre 14 : Cérémonie d'adieux
EMMA
Edward et moi embarquons le soir même et nous arrivons le 24 au matin. Mon agent part de son côté tandis que mes parents m'emmènent pour une « virée souvenirs ». Anna nous rejoint évidemment et ils m'emmènent voir tous les lieux qui ont eu de l'importance dans ma vie. On va voir l'école primaire, le club de piscine, la patinoire, la forêt où on se promenait petites, le parc au kiosque, la maison de mes grands-parents, celle de mes oncles et tantes. On va au bord du lac où mon papy péchait. Et ainsi de suite toute la journée. Je ne compte plus le nombre de fois où j'ai pleuré ni le nombre de clichés que j'ai pris. Papa et maman sont heureux de me voir manier mon appareil photo et moi aussi j'en suis très contente.
Ce soir-là je m'endors entre mes deux parents, je sais que j'ai 16 ans, mais j'en ressens le besoin, ils me parlent et je les écoute jusqu'à sombrer petit à petit dans le sommeil, sous les caresses de maman et des larmes roulant silencieusement sur mes joues.
Le lendemain maman me demande de bien m'habiller car nous partons. Je comprends ce qu'ils ont prévu, ils vont réunir toute ma famille pour un grand au revoir. Je mets donc une robe noire, simple mais élégante et je renonce à mettre du mascara car je sais que je ne pourrai pas retenir mes larmes et ça pourrait faire de vilaines coulées noires.
Nous roulons pendant une petite heure avant de nous arrêter dans un parking. Mes parents ont loué une grande salle, comme celle pour les mariages. Une foule de gens attend déjà à l'entrée et je commence à saisir l'ampleur de cette fête.
- Bonjour à tous c'est incroyable de voir tant de monde réuni, déclare maman, une fois que chaque personne a pris place sur les centaines de chaises disposées au sol.
Dans la foule j'ai vu des anciennes amies de primaires, Anna évidemment, des vieux oncles ou tantes, des amis de mes parents que je n'ai vus qu'une seule fois, j'aperçois aussi des anciens maitres ou maîtresses, des entraîneurs de piscines, les autres candidats lors du test qui a eu lieu il y a deux ans, même Lyse qui m'a accueillie en Angleterre est là. Il y a tellement de visages tournés vers maman qui s'est placée sur la petite scène, un micro à la main.
Elle fait un petit discours d'introduction et elle répète que le but de cette cérémonie c'est de regrouper tous mes poches pour un grand au revoir. Elle les remercie tous chaleureusement d'être présent. Puis mes grands-parents, mes cousins, toute ma famille dit un petit mot. J'ai confié mon appareil photo à maman après son speech et elle se charge de capturer ces instants. C'est ensuite au tour de mes amies de la piscine qui parlent suivies de celles de primaires, tous les candidats potentiels qui auraient pu représenter la France enchainent en me félicitant, suivis de mes anciens maitres d'écoles ou des amis éloignés. Ensuite Anna s'avance et mon cœur se serre violement.
- Emma a toujours été avec moi, du CP jusqu'au aujourd'hui, commence-t-elle. Elle m'a accompagnée dans les pires moments comme dans les meilleurs. C'est la seule personne qui me supporte telle que je suis et à qui je peux tout dire.
Son regard glisse vers moi et je tente un sourire malgré mes larmes imminentes.
- Je sais que tu pars dans trois jours, mais sache que toujours toujours je penserai à toi et je croirai en ton retour. Je sais que ce n'est pas sûr que tu reviennes mais je serai là à y croire, je t'attendrai.
Cette fois, je ne peux retenir mes larmes.
- Tu vas laisser un vide en moi. Je continuerai à penser à toi et toi tu continueras à penser à moi. Mais dans mes crises de panique tu es la seule qui peut me raisonner, comment ferai-je ? Je te souhaite le meilleur une fois là-bas, j'espère que tu seras bien, mais moi il me manquera quelque chose.
Elle me fixe droit dans les yeux et conclut :
- Tu as été la meilleure des meilleures amies, je ne pourrai jamais t'oublier ni te remplacer, tu es unique.
Tout le monde applaudit et je fais de même. Mes parents, mon frère et ma sœur s'avancent. Ils mettent une projection de photos en fond et ils parlent de moi petite, ils racontent ma vie et me disent à quel point ils m'aiment encore et encore. Je vois qu'eux aussi retiennent leurs larmes et plusieurs dans l'assemblée ne sont pas loin de pleurer non plus.
Ensuite, vient le grand moment des cadeaux, je vous jure que tous réunis ne rentrerai pas dans ma chambre, je reçois des cadres, des bijoux, des décorations, un monsieur va jusqu'à m 'offrir un lustre. C'est de la provoc à ce point-là, non ? Ils savent bien que je ne pourrai pas l'emmener... Je reçois aussi tout un tas de vêtements que je ne pourrai pas porter, des carnets, des boucles d'oreilles, une enceinte et mes parents ont choisi le meilleur.
Ils me le tendent avec un sourire. Je déchire l'emballage sans aucun scrupule et à ma plus grande joie, je découvre une mini imprimante.
- Toutes les photos que tu prends tu pourras les imprimer là-bas soit sur du papier photo soit du papier normal, comme ça tu pourras décorer et garder des souvenirs, dit-maman.
Je les remercie chaleureusement, c'est parfait comme cadeau, et ça ne m'a pas l'air très lourd... puis la troisième étape arrive à son tour, le « repas », en fait tout le monde a apporté quelque chose de différent et ils ont tout posé sur une grande table de buffet. Chacun va donc se servir. On voit bien au caractère des gens ce qu'ils prennent, ceux qui goûtent du bout des lèvres un petit four aux épinards et ceux qui enfournent des grosses poignées de chips. Certains prennent carrément une assiette et s'assoient dans un coin, il y a aussi de ceux qui tentent de remercier l'auteur du gâteau en disant « Qui a fait ça ? », et puis moi. Moi qui passe de temps en temps chopper un petit truc et qui m'en vais.
Anna ne me quitte pas d'une semelle tandis que je circule pour remercier tout le monde, elle est là pour détendre l'atmosphère au bon moment. Elle a repris l'appareil photo et elle mitraille tout, je vous jure qu'elle est allée jusqu'à prendre en photo la porte des toilettes en attendant que je ressorte.
Des petits groupes se sont formés et papotent, je vais dire bonjour et merci. Les mêmes questions reviennent en permanence les « Tu es prête ? Tu te sens comment à l'approche du décollage ? Tu as peur ? ». Et moi je réponds patiemment et je passe au groupe suivant. Avec mes anciennes amies, je leur demande ce qu'elles sont devenues, ça me fait plaisir.
Je le sais bien la quatrième partie arrive sans surprise, c'est à mon tour de parler et de m'exprimer devant toute l'assemblée. Je m'avance avec hésitation mais une fois le micro en main, je n'hésite plus du tout.
- Merci beaucoup d'être tous là, ça me fait vraiment plaisir de revoir tout le monde avant mon départ. Un peu comme ça on dirait un enterrement cette assemblée où tout le monde se souvient de jours heureux sur une personne... -il y a quelques rires- je ne suis pas morte je pars juste. Je veux aussi rappeler qu'il y a un vol retour possible, pas certain mais faisable néanmoins. Je tiens à promettre qu'en premier, on accomplira notre tâche on fera tous les prélèvements, on recueillera tout ce qu'on doit recueillir et on enverra tous les résultats, on appliquera le protocole. Mais ensuite, notre priorité sera celle de rentrer, on ne sera pas forcément pressés mais je suppose que tout le monde ne souhaite que ça.
Je contemple tous les visages tournés vers moi et je reprends.
- Toutes les années que j'ai passées ici n'auraient pas pu être mieux, j'ai rencontré des gens extraordinaires, j'ai une famille extraordinaire et des amies extraordinaires aussi. Je suis heureuse d'avoir partagé tous ces moments, et d'avoir grandi à vos côtés. Maintenant il est temps pour moi de me tourner dans une autre direction et de m'élancer vers un autre monde.
Au fond de la salle mes parents pleurent, je remarque aussi d'autres larmes dans l'assemblée.
- Mais sachez que jamais je ne vous oublierai et que je ferai tout mon possible pour revenir vers vous, pas un jour ne se passera sans que je me souvienne de cette scène, de tous ceux que j'aime réunis. Merci pour tout.
Il y a des applaudissements mais je ne bouge pas, il me reste une dernière chose à ajouter.
- S'il vous plaît faites-moi une promesse.
Tous relèvent la tête.
- Ne vous perdez pas de vue, je sais bien que l'entraîneur de piscine n'a rien à voir avec ma maîtresse de CE2, ni avec ma grand-mère, mais on a vu aujourd'hui que vous vous entendiez bien, alors continuez à vous voir, à vous rassembler, Anna ne quitte pas ma famille, poursuis les activités avec mes parents.
Ils hochent la tête en concert et je prends une dernière inspiration.
- Il faut aussi évidemment que je remercie mon agent mille-fois, il était toujours là pour moi, il m'a tellement appris et toutes les épreuves que j'ai traversées grâce à lui, je ne les compte plus. Je te souhaite le meilleur et que toi aussi tu restes soudé à la famille. Un grand merci.
Cette fois je pose le micro et je descends les jambes tremblantes. Olaf se précipite aussitôt vers moi pour me lécher la main et me sauter dessus, provoquant des rires dans l'assemblée. Anna me fonce elle aussi dessus, aussitôt suivie de mes parents, de ma sœur et de Mattéo, puis de mes amies, d'Edward, avec son chewing-gum dans la bouche et tout ça se termine en énorme câlin.
Après, on se place dans le parc, pour effectuer des photos de groupe pendant près d'une heure et demie. Le photographe dit d'abord que la famille, puis que les amies, puis la famille et les amies, puis tout le groupe de piscine, puis... et ainsi de suite. À la fin, exténué, chacun rentre chez soi.
- Juste avant que tout le monde soit parti, j'interviens. Les vingt qui m'accompagnent jusqu'au décollage après-demain, j'ai une petite faveur à vous demander...
Les vingt en question restent donc un peu plus longtemps. C'est maman qui a choisi qui avait l'autorisation de s'y rendre car on a seulement le droit à vingt par personne.
- S'il vous plait ne m'amenez pas de cadeaux, je n'aurai pas le droit de les prendre, par contre j'aimerais que chacun de vous prenne avec lui une photo de lui. Si tout le monde m'amène une photo de lui ou avec d'autres, le principal c'est que la photo soit drôle, je vais pouvoir les accrocher au mur.
Tout le monde me promet donc d'apporter au moins une photo et le parc se vide petit à petit.
- Tu veux faire quoi demain ? demande maman.
- Je ne sais pas, j'aimerais faire une journée tous les cinq à la maison.
J'organise donc une journée entre nous, je bats papa au Monopoly, mais il prend immédiatement sa revanche au Catane. Mattéo nous écrase deux fois à un jeu tellement complexe qu'il faut la moitié du temps pour comprendre les règles. Pour le repas du midi, maman a sans surprise fait ses éternelles pâtes bolonaises et on mange en parlant de choses insignifiantes. Puis Romane insiste pour que je regarde une énième fois La Reine de Neige avec elle. On s'installe donc avec un gros plaid et des bonbons devant son film préféré qui a donné son nom à Olaf. Cette dernière s'est tranquillement installée entre nous deux, pour le plus grand bonheur de ma petite sœur. Anna vient ensuite à la maison et on se balade sous le soleil avec Olaf. On parle de tout et de rien, elle me raconte des anecdotes et j'écoute, rien de plus normal. Elle reste manger le soir et nous regardons tous ensemble un petit film. Tout est parfaitement parfait.
Puis je prends l'avion et les vingt qui viennent jusqu'au moment du départ viennent aussi. Nous arrivons vers 11h sur le lieu du décollage du vaisseau. Je fais un aller-retour avec Anna pour déposer tous les cadeaux et les photos que chacun a apporté dans la chambre et ça lui permet de visiter un peu le vaisseau. Vers midi j'ai une réunion avec tous les autres adolescents et je retrouve Kimiko.
Daniel Hunter prend la parole.
- Merci à tous pour votre attention, votre écoute et tout ce que vous avez fait pendant ces deux ans. Dans 15h, vous serez loin d'ici. J'ai aussi le malheur de vous annoncer que Nina de Lisbonne est introuvable. Si quelqu'un à des contacts avec elle, dites-le-nous.
J'échange un regard surpris avec Kimiko.
Daniel Hunter passe l'heure suivante à nous détailler une énième fois les consignes de sécurité. Puis il nous libère et nous assigne une salle où nous pouvons nous réunir avec nos proches.
- Ils sont où tes parents et tes proches ? demandé-je à Kimiko.
- Ils ne sont pas là, dit-elle en baissant les yeux.
- Pourquoi ? m'exclamé-je.
Elle ne répond rien.
- Viens avec moi dans ce cas-là, dis-je en l'entraînant par le bras.
On retrouve tous mes proches. Kimiko et moi en emmenons par groupe de cinq ou six, dans notre chambre. Ils veulent tous voir là où on dormira durant toutes ces années. On mange du gâteau, on discute dans la salle attitrée. Je présente aussi Elina à ma famille et elle fait de même avec la sienne. À 20h nous sommes appelés au micro, il faut qu'on se regroupe tous près du vaisseau à 21h. Je dis alors au revoir à tout le monde excepté Anna et mes parents, mon grand frère et ma petite sœur, qui eux m'accompagneront vraiment jusqu'au bout. Nous nous rendons avec Kimiko au point de rendez-vous. Edward me rejoint lui aussi et m'annonce.
- Je viens d'avoir les résultats, je suis pris au casting ! me dit-il.
- C'est trop bien, dis-je. Je suis tellement contente pour toi ! Et les adversaires de ton client n'auront qu'à bien se tenir ! Tu vas gérer comme d'habitude.
- Oui mais tu resteras quand même ma préférée, me dit-il avec son petit sourire en coin.
Vient ensuite le moment de tester les installations du décollage et de vérifier que tout est en place et nous convient. On reçoit tous une tenue, ainsi qu'un gilet pour nous protéger le dos. J'ai le droit ainsi que les autres Dix à un gilet rouge plutôt que le vert pour qu'on nous repère facilement. Après on se dirige en file indienne jusqu'à la salle du décollage. Ça peut paraître surprenant mais c'est en réalité une salle de cinéma avec un écran des rangées de sièges...tout ! Sauf que les fauteuils sont équipés de harnais imposants et de boutons. Je dois me placer au premier rang avec les Dix, je serais donc contrainte d'abandonner Kimiko à l'arrière pour ce moment si unique. Je me mets tout au bout de la rangée et Elina prend place à mes côtés. Des adultes passent nous harnacher un par un, pour contrôler que tout fonctionne. Brusquement, l'écran s'éclaire et on découvre un groupe d'adultes qui je suppose se trouvent à la Nasa, Daniel Hunter est parmi eux.
- Bonjour c'est comme un appel vidéo, on pourra rester comme ça en contact vingt minutes après le décollage, puis ça coupera. On ne vous voit pas, mais on vous entendra par le micro placé à l'avant. Les Dix seront donc chargés le plus vite possible de nous parler pour que l'on s'assure que tout est ok. Est-ce que quelqu'un a des questions ?
Personne ne répond et nous sommes tous désharnachés.
Jusqu'à presque minuit, nous passons une série de tests. Nous avons ensuite le droit à une heure et demi avec notre famille, cette fois c'est notre dernière, je ne les reverrai plus.
Ils me disent qu'ils m'aiment et qu'ils m'aimeront toujours. Je fais promettre à ma petite sœur, d'être heureuse et de réaliser ses rêves. Je souhaite bonne chance à mon frère pour son bac et son métier plus tard. Je dis à mes parents, de veiller sur eux et sur Anna, à qui je fais promettre de continuer à être comme elle est et de devenir vétérinaire comme elle le rêve.
Je leur donne à tous un cadeau choisi avec soins et le moment de se quitter arrive. Mes parents me serrent dans leur bras.
- Je t'aime ma chérie, me dit maman. Prends les décisions qui te paraissent justes.
- Je t'aime aussi, déclare papa. Suis ton instinct, mais reste prudente.
- Tu es la meilleure des meilleures ! s'exclame Anna. Moi aussi je vais donner un conseil qui sonne bien, Emma ait confiance en toi et n'oublie jamais qui tu es !
Je leur envoie des baisers avec ma main en me rapprochant à reculons de la porte, suivie par Kimiko qui a assisté à la scène sans rien dire.
- Prends soin de ma fille, lui recommande maman, et cette fois je n'ai pas besoin de servir d'interprète.
J'essaye d'imprimer dans mon esprit cette scène, mes parents serrés l'un contre l'autre, les yeux plein de larmes. Romane qui tient à la main de maman et Mattéo un bras passé autour des épaules de mon père. Anna se tient à coté les yeux rouges, en train de câliner Olaf une dernière fois. Cette dernière me rejoint en trottinant et je lance.
- Je vous aime je n'aurais pas pu être mieux entourée. Je vous souhaite le meilleur, vous resterez à toujours avec moi.
Et sans ajouter un mot je sors de la pièce. Rapidement, comme pour m'empêcher de changer d'avis. Une fois en dehors de la pièce je m'effondre à genoux et je sanglote dans mes mains. Kimiko s'accroupit près de moi et me caresse doucement le dos.
- Aller, vient, on y va, me dit-elle doucement.
J'essuie mes larmes d'un revers de main et je la suis vers le vaisseau.
🧡 FIN DU TOME 1 🧡
Je précise qu'il y a trois tomes dans ce roman (je ne reprends pas le comptage des chapitres à zéro) 🤗
Bonne lecture j'espère que vous allez aimer la suite !!😉
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