Chapitre 23.


Précédemment :

Eleandra...

Je me tourne vers Hayes avec lenteur, comme si le temps autour de moi avait ralenti.


Eleandra Woods.

Jours 60 – 16h50.


Un silence de plomb règne maintenant dans la salle, Hayes m'observe sans regarder une seule fois les dix personnes au sol.

Au bout de ce que me semble environ cinq minutes, j'avance d'un pas vers lui avant de briser le silence.

T'étais où ? Je l'interroge d'une voix tremblante.

Il ne me répond pas, alors j'avance de nouveau d'un pas, mon cœur bat douloureusement dans ma poitrine, à cause de la trahison, à cause de la douleur, à cause de la peur.

Tu étais où, Hayes ? Réitéré-je ma question.

Son silence commence à m'être insupportable, j'avais besoin de lui, il n'était pas là, j'ai besoin de lui et il n'est toujours pas là.

Hayes, tu as dit que tu revenais, alors où est-ce que tu étais ? Je lui redemande en haussant un peu la voix malgré les tremblements palpables de celle-ci.

La colère envahie mes veines, son mutisme joue avec mes nerfs, comment peut-il être aussi calme face à ça ?

Mais merde, Hayes ! Je craque en effaçant la distance entre nous définitivement. Réponds-moi ! J'avais besoin de toi ! Je fonds en larmes tout en lui frappant le torse pour le faire réagir.

Il me laisse faire, toujours sans un mot, pendant de longues secondes avant d'arrêter mes poings.

Il plante ensuite un regard vide d'émotion, complètement blasé dans les miens, et je revois le Hayes du début, ce constat me fait froid dans le dos et je suis persuadée de ne plus vouloir de réponse, parce qu'à l'instant où elle passera la barrière de ses lèvres, toutes ces fissures qui apparaissent depuis quelques jours céderont et mon cœur ne le supportera pas.

Tu n'avais pas besoin de moi, la preuve. Tu t'en es très bien sortie, je penserais que ça durerait plus longtemps que ça.

Tu savais ce qu'ils allaient me faire... Je murmure tellement cette vérité est douloureuse.

Évidemment. J'ai donné l'ordre moi-même.

Je le dévisage avec effroi tandis que je sens chaque cellule de mon corps s'imprégner du sentiment de trahison.

Tu n'as toujours pas compris ? Il m'interroge en fronçant les sourcils, l'air amusé. C'était ça, ton test final. D'ailleurs, félicitation pour ta réussite.

J'enfonce mes ongles dans ma peau, à défaut de pouvoir le faire dans mon organe vital qui me martèle douloureusement la cage thoracique.

Ils avaient autorisation d'abuser de moi si j'échouais. Je prononce, en observant attentivement sa réaction.

Il n'en a aucune...

Il le savait.

L'échec n'est pas une option ici.

Ils pouvaient m'abuser, Hayes. Je répète en essayant de le faire réagir.

Je sais. Crache-t-il avec froideur et indifférence.

Le choc est si brutal que je ne réagis plus, je ne pleure plus, je n'ai plus mal... Ça ne dure qu'une fraction de seconde dans laquelle, je ne ressens plus rien. Une petite fraction de seconde de paradis avant que tout mon être se déchire, se brise.

Je n'avais jamais ressenti une telle douleur, pas même lorsque j'ai appris que ma mère était morte, c'est insupportable, inhumain. Je veux que tout s'arrête.

Je te faisais tellement confiance... Je murmure, incapable de parler à voix haute. Je t'ai tout donné... Mon cœur, mon corps. Tu savais mon passé avec les hommes et tu...

Les mots me manquent tellement j'ai mal, chaque inspiration est une souffrance et elles sont de plus en plus difficiles.

Ce n'est pas mon problème si tu as fait confiance à un homme comme moi, encore moi si tu es tombée naïvement amoureuse de moi. Il me répond comme pour m'abattre définitivement.

Ma vision commence à être floue, mais je ne sais pas si c'est à cause des larmes ou non, j'ai l'impression de recevoir des coups de marteau dans le crâne. Ma vision noircit complètement et mon corps me lâche sous la pression de cette douleur.


(...)

Eleandra Woods.

Jours 60 – 19h00.


Lorsque j'ouvre les yeux dans ma chambre, tout va bien la première seconde puis mon corps douloureux et mon cœur agonisant me rappelle la trahison que vient de m'éclater à la gueule.

Ce matin encore, je me suis réveillée, nue dans les bras de Hayes, me demandant comment allait se passer la suite, pensant à la dernière soirée avec mes amis, celle qui aurait dû être ma « fête de départ ».

Les larmes me montent de nouveau et je suis incapable de les retenir, toute fois, je ne reste pas dans mon lit, je me redresse – trop rapidement – ignorant mon crâne qui me lance, je sors du lit et je ne perds pas de temps pour faire mes valises avec pour seul et unique but : me casser loin d'eux.

Dans mon vieux sac de sport, je balance tous mes vêtements sans prendre la peine de bien les ranger, j'enchaîne ensuite avec mes affaires de toilette avant de descendre pour sortir d'ici. Tout cela en pleurant dans un mélange de rage et de tristesse.

J'étais tellement pressée que j'en ai oublié que la porte d'entrée était verrouillée, avec le bruit que j'ai fait, je sais déjà que Hayes n'est pas ici, je peux donc fouiller sa chambre sans qu'il ne me dérange.

Je monte alors les marches, toujours en ignorant chaque partie douloureuse de mon corps. Je pose ma main sur la poignée de sa porte, mais impossible pour moi d'ouvrir la porte, il l'a fermé à clé avant de partir.  

Je m'écarte de la porte fermée et l'observe plusieurs secondes, le cerveaux sur pause.

Mon seul moyen de partir désormais, c'est d'attendre que Hayes daigne revenir, c'est pourquoi j'installe une chaise près de l'entrée sur laquelle je m'assois, attendant patiemment que Hayes déverrouille la porte. J'en profiterai pour sortir en le prenant par surprise.

Je me triture la lèvre inférieure jusqu'à sentir le goût du sang dans ma bouche, mes jambes tremblent de manière incontrôlée tandis que les secondes s'allongent en minutes.

Le son de clés dans une serrure me ramène à la réalité près d'une heure plus tard, je bondi de ma chaise – toujours trop rapidement – et me m'apprête à sortir d'ici.

Il ouvre enfin la porte et je sors sans manquer de lui rentrer dedans, il lui faut peu de temps pour claquer la porte derrière lui et m'appeler.

Tu crois aller où là ?

L'avantage que j'ai eu à poireauter une heure devant la porte, c'est que j'ai arrêté de pleurer pour lui, maintenant, je bouillonne de rage contre lui et contre moi aussi, alors s'il pense que je vais sagement retourner dans l'appartement parce qu'il le veut...

Je retourne vivre ma petite vie loin de toutes vos trahisons. Je lui réponds en martelant le bouton de l'ascenseur.

Il commence à ajouter quelque chose, mais les portes de l'ascenseur s'ouvrent sur Vaughn et sa voix s'éteint.

Tu vas quelque part ? M'interroge le boss de la mafia en arc en sourcil.

A vrai dire, oui. Je lui réponds en essayant de passer, mais il me bloque le chemin avec sa carrure imposante.

J'ai une proposition à te faire.

Je le dévisage, aucune peur ne circule dans mes veines, seulement une douloureuse colère.

Je n'en ai rien à foutre de votre proposition. Je crache sans prendre de pincettes.

J'ai observé le combat en direct. Il commence malgré tout, sans écouter ce que je lui ai dit. Et j'ai été épaté, tu es bien plus forte que ce à quoi je m'attendais, que dirais-tu de rejoindre mon organisation, ma petite ?

Je ne trouve rien d'autre à faire que d'éclater de rire avant d'essayer de passer de nouveau, mais il me bloque plus fermement cette fois.

Qu'en dis-tu ? Il me demande, comme si ma réponse n'avait pas été assez claire.

Que vous êtes sacrément culotté de me demander une telle chose. Je n'ai rien à voir avec vous et tous vos hommes ! Jamais je ne trahirai pour un ordre, jamais je ne tuerai d'hommes parce qu'ils sont simplement de l'autre côté du camp ! Je m'énerve en haussant la voix.

Un sourire dégelasse apparaît sur ses lèvres, me donnant envie de vomir.

Je vois que Hayes ne t'as rien dit...

Je fronce les sourcils et jette un coup d'œil au blond qui est resté silencieux jusque-là.

Qu'est-ce qu'il ne m'a pas dit ? Je lui demande, la peur nouant mes tripes.

Vaughn. Elle n'a pas besoin de savoir. Dit Hayes, la mâchoire serrée.

Savoir quoi ? Pourquoi tu m'as menti encore ? Je m'énerve contre lui.

Une sorte de combat de regard prend part entre Hayes et Vaughn et l'appréhension commence à gagner du terrain.

Eleandra, mon enfant... Tu as fracassé le crâne du compère de Tobias tellement de fois contre le sol, qu'il en est mort.

L'information me fait le même effet que si je venais de prendre une balle, je recule d'un pas en dévisageant Hayes qui m'a caché ça.

J'ai tué un homme.

J'ai battu à mort un homme.

Tu comprends pourquoi je veux que tu rejoignes l'organisation, tu es un atout majeur et j'ai de gros projet pour toi.

La ferme. Je coupe l'homme sans même le regarder.

Il faut que je sorte.

J'ai envie de vomir quand je repense avec le bien être dans lequel je me suis sentie après ça, j'ai avoué avoir aimé ça... Avoir aimé tuer un homme.

J'entends de nouveau le bruit de son crâne contre le sol et je sens mon corps commencer à trembler.

Laissez-moi passer. Dis-je à voix basse. Le deal était que je parte après avoir réussi la phase finale. J'ajoute en gardant un maximum le contrôle de mon corps.

Le... "deal" a changé, vois-tu. Dit Vaughn en regardant maintenant derrière moi. Emmène là chez toi et ne la laisse pas sortir. Ordonne-t-il à Hayes.

Les paroles de Vaughn montent jusqu'à mon cerveau seulement lorsque la main de Hayes se pose sur mon bras.

Ne fais pas ça. Je le préviens en le suppliant du regard.

S'il m'enferme dans son appartement comme vient de le demander Vaughn, il m'aura perdu à jamais, je l'aurais perdu à jamais.

Mais le problème, c'est que je sais que je l'aime, je ne pourrais pas avoir aussi mal dans le cas contraire. Mais lui, est-ce qu'il m'aime ? En a-t-il quelque chose à faire de me perdre ?

Il me lance un regard désolé tout en continuant d'exécuter les ordres de Vaughn, si sa prise était d'abord douce, elle se fait plus brusque lorsque je commence à protester.

Hayes, non ! Le supplié-je alors qu'il me tire jusqu'à chez lui.

Je commence à pleurer alors qu'il me force à monter les escaliers pour finalement me pousser dans "ma" chambre avec mon sac.

Il ferme la porte derrière lui et je suppose que maintenant, il doit verrouiller la porte d'entrée et que je n'ai plus aucun moyen de sortir d'ici.


À suivre...


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" la trahison est un coup terrible qui peut briser le cœur d'un amour"

Voltaire.


<3

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