Chapitre 43.
Cassandra s'était perdue dans la forêt.
Ça avait marché, les autres fois, pour forcer Nikolai à la retrouver. Mais ça faisait plus de deux heures, maintenant, et aucun signe de son insupportable ours. C'était sa dernière tentative, elle se l'était jurée. S'il ne se montrait pas, alors elle passerait à autre chose. Mais il faisait tellement froid qu'elle n'était pas certaine de rester beaucoup plus longtemps. Elle ne sentait plus le bout de son nez, et la neige aveuglante qui recouvrait la forêt de toute sa blancheur commençait à s'infiltrer dans ses vêtements. Surtout depuis qu'elle avait failli finir ensevelie sous un tas de neige tomber d'une branche d'arbre.
Mais elle était perdue et elle se maudissait. Elle n'arrivait pas à savoir où aller pour retrouver Jaykam ou le campement et la Grande Maison. Super, elle allait mourir de froid dans la forêt tout ça pour un stupide ours mal léché qui lui avait fait voir le paradis avant de la précipiter en enfer.
Cassandra secoua la tête, voilà qu'elle commençait à penser des choses stupides. Nikolai n'avait pas le pouvoir de l'emmener en enfer, son chagrin, bien que fort, n'appartenait qu'à elle. Sentant sa gorge se serrer et ses yeux la picoter pour la millième fois ce jour-là, elle posa les mains sur son visage.
— Du nerf, Cassandra, grommela-t-elle. Tu ne vas pas te laisser abattre maintenant.
Elle avait juste été quittée. Alors pourquoi avait-elle l'impression qu'on lui avait enlevé une partie d'elle-même ? Elle ne connaissait même pas Nikolai depuis si longtemps que ça. Mais c'était comme avec Enzo, non ? Elle était tombée amoureuse vite et fort, avait été imprudente et là voilà à ramasser les pots casser. Sauf que dans le cas d'Enzo, c'était elle qui l'avait quitté pour sa sécurité. C'était son ego, en fait, qui faisait mal. Nikolai l'avait abandonné sans remords et sans un mot après avoir couché avec elle, et ça faisait mal. Elle se sentait utilisée et sale.
— Je te déteste, Nikolai Berserke, souffla-t-elle dans un nuage glacé.
Un bruit dans le fourré lui vit vivement tourner la tête. Il y avait quelque chose tapis dans la neige. Et c'était gros. Son cœur battit plus vite et en elle l'espoir et la peur se mêlèrent jusqu'à ce qu'une tête féline surgisse des bois.
Les épaules de Cassandra s'affaissèrent. C'était juste Tarik. Cassandra s'accroupit pour laisser la grosse panthère noire s'approcher pour la saluer en appuyant sa tête contre elle. Elle s'était faite à cette étrange manie des membres de la meute de venir lui réclamer des câlins quand ils étaient sous forme animale. Derrière Tarik, une biche élancée et gracieuse s'avança. Nahila ne venait pas lui demander des gratouilles, mais elle ne pressait jamais son compagnon quand ils se baladaient tous les deux.
Glissant les doigts dans l'épaisse fourrure d'hiver de la panthère, Cassandra laissa sa chaleur la réchauffer.
— Je suis un peu perdue, admit-elle.
La biche s'approcha et posa son museau sur son épaule, comme pour lui dire de la suivre. Cassandra soupira et délogea Tarik qui émit un son entre le râle et le miaulement avant de se lever et de les suivre. Ça avait toujours quelque chose de très curieux que de voir un prédateur si proche de sa proie sans que ni l'un ni l'autre n'agisse comme s'il était ennemi. Peut-être qu'un jour Cassandra oserait leur demander de raconter leur histoire.
En attendant, elle allait juste rentrer, et renoncer définitivement à son amoureux pour Nikolai. Si c'était si simple !
La Grande Maison en vue, Cassandra entra pour se mettre au chaud près du feu. Neo avait suggérer qu'elle prenne une des chambres libres le temps de son contrat, ça évitait à tous des aller-retour inutiles et Raphael était content de pouvoir jouer dans la grande cour. Tarik avait approuvé, et elle avait fini par ramener ses affaires. Puis une semaine après, ils lui avaient suggéré de résilier son bail, en lui assurant qu'ils l'aideraient à trouver un nouvel appartement dans ses moyens le moment venu.
Cassandra était... reconnaissante. L'endroit était plus chaud et plus confortable que son chez elle miteux. Puis ce n'était que le temps qu'elle finisse la décoration, ce qui était l'affaire d'un mois ou deux. Le seul à ne pas être content, c'était Hunter, qui l'évitait encore, mais honnêtement, elle s'en fichait.
— Ah, Cassandra, tu es rentrée, s'exclama Lilith assise sur un fauteuil dans lequel elle s'enfonçait à moitié elle et son énorme ventre. Je voulais savoir, tu crois qu'il serait possible...
Son regard se posa sur les jupes de Cassandra et elle interrompit sa phrase en haussant un sourcil.
Cassandra baissa le regard et s'aperçut qu'elle avait des poiles noirs partout. Rah, fichu félin.
— C'est Tarik, on a fait des câlins dans les bois, expliqua-t-elle.
Lilith écarquilla les yeux en posant le bout des doigts sur sa bouche, comme pour s'empêcher de rire.
— Pitié, Cassandra, fais attention à ce que tu dis.
Cassandra cilla, avant de réaliser.
— Non ! Je veux dire, pas ce genre de câlin enfin !
Lilith rit ouvertement.
— Je me doute. Ces curieux, tu ne trouves pas ? Les changelins sauvages ne sont pas des animaux apprivoiser, contrairement aux chiens ou aux chats, on n'est pas très fan des câlins qui ne viennent pas des membres de notre famille proche.
— Vraiment ? s'étonna Cassandra en se plaçant près du feu. Je croyais que vous réclamiez des câlins à n'importe qui ayant la patience de vous gratouiller derrière les oreilles.
Ce n'était pas une moquerie, elle ne voyait pas ce qui chez elle pouvait bien donner envie à un changelin sauvage de venir s'allonger sur ses jambes pour lui offrir son ventre en câlin. Le rire de Lilith réchauffa la pièce, claire et distinguée. Cassandra la soupçonnait d'avoir reçu une éducation élevée.
— J'imagine Tarik se faire gratouiller derrière les oreilles comme un gros chat et c'est si drôle, gloussa-t-elle.
— Cesse donc, gronda la voix de Tarik qui redescendait des chambres, humain et habillé. Je suis ton chef, n'oublie pas.
Le mâle s'avança vers Lilith comme pour l'embrasser sur le front, signe qu'il n'était pas vraiment contrarié. Mais avant qu'il ne l'atteigne, un jaguar surgit de derrière le fauteuil en grimpant sur les accoudoirs et feula d'un air menaçant à l'encontre de Tarik.
— Désolée, s'excusa Lilith en essayant de repousser Hunter. Il est particulièrement sensible. Je crois qu'il n'aime pas trop me savoir si prêt du terme. Moi j'ai hâte d'accoucher, j'ai l'impression d'être une baleine, mais une baleine avec au moins douze baleineaux dans le ventre, râla la renarde.
— C'est vraiment possible ? s'étonna Cassandra.
Elle savait que les naissances multiples étaient très courantes chez certaines espèces de changelins. Mais douze ? C'était énorme et improbable, non ? Lilith grimaça.
— Certaines espèces, mais Trablea merci, pas les renardes. Non, en général on table entre un et cinq, sept si vraiment on n'a pas de chance, mais plutôt quatre quand on fait des naissances multiples. Et là, il y en a clairement plus d'un.
Lilith grimaça de douleur, elle n'avait pas l'air bien.
— La réflexion de Lilith sur les caresses est juste, fit Tarik en recadrant la conversation. J'ignore ce qui chez toi nous donne envie d'être caressés.
Cassandra se sentit soudain mal à l'aise, et elle croisa les bras.
— Je ne sais pas non plus, c'est vous qui venez me voir, je n'ai rien fait moi.
Tarik s'approcha d'elle et lui caressa la joue des phalanges.
— Ce n'était pas un reproche.
Il alla s'asseoir sur un autre fauteuil.
— En fait, on pense que tu as un lien de parenté avec les Fleurs, expliqua Nahila qui avait suivi Tarik discrètement et venait maintenant s'asseoir sur ses genoux.
Cassandra était toujours un peu inquiète de les voir interagir. Elle se demandait si Tarik aurait un jour un creux et déciderait de taper un croc dans Nahila. Ce serait dommage. Mais celle-ci n'avait absolument pas l'air d'avoir peur. Au contraire elle s'abandonnait dans ses bras en toute confiance.
— Les Fleurs ?
— Les filles des cinq déesses soeurs, expliqua Tarik. Elstrya déesse reine, Akamantine déesse des océans, Kiioni, déesse des glaciers, Harenae, déesse du désert et enfin, Veleria, déesse des pleines et du vent. Elles ont dispersé sur terre il y a des siècles de cela, leurs filles, pour en faire les maîtresses de Miterra ou les compagnes des Dhrakonniers, s'ils le voulaient. Aujourd'hui, elles sont considérées comme une race éteinte, ça fait des siècles que personne n'en a vu naître. Cependant, ce sont des créatures immortelles, les changelins sont persuadés qu'elles marchent encore à nos côtés, en toute discrétion.
Cassandra connaissait son panthéon, et en vérité, le terme fleurs lui disait vaguement quelque chose, mais elle était presque certaine de ne pas avoir été très attentive à ce cours d'histoire, à l'époque. Aujourd'hui, cependant, ça l'intéressait, alors elle s'assied sur le canapé et écouta la suite.
— Les fleurs donnent naissance qu'à des filles, sauf si elles s'accouplent à des Dhrakonniers.
— Quel est le rapport avec moi.
— Eh bien, on leur prêtait certain pouvoir, et l'un des plus connus était être fascinante et apaisante pour les Dhrakons, les montures des Dhrakonniers qui les aimaient particulièrement, et c'est moins connu, mais certains changelins ayant eu l'occasion d'en croiser évoquait effectivement ce grand apaisement et cette envie de recevoir des câlins. Donc on se demandait si tu n'avais pas une ancêtre qui aurait pu être une fleur.
La théorie était intéressante et Cassandra visualisa dans sa tête son arbre généalogique. S'il y avait bien un truc qui lui avait été martelé enfant – avant d'en être rayé – c'était sa généalogie, qui remontait au premier colon ayant colonisé Miterra. Elle suivit tout le chemin jusqu'à s'arrêter.
— Une femme, rayée de notre arbre généalogique, parce qu'elle a quitté son mari, c'était... mon arrière-arrière-grand-mère. Elle n'a donné naissance qu'à une fille qui a été mariée à son cousin pour éviter que notre branche familiale perde notre titre.
— Hum c'est possible.
— Enfin ça n'explique pas que seule moi et Louise ne soyons pas attirée pour des câlins avec toi, fit remarquer Nahila.
Cassandra réfléchit une seconde à ça, et la réponse lui vint naturellement.
— C'est parce que vous n'étiez pas au Zoo.
Nahila cilla.
— J'y ai été, mais brièvement, contrairement aux autres.
— Tu penses que ça aurait un lien avec ce qu'on a vécu là-bas ? s'étonna Tarik.
Cassandra haussa les épaules.
— C'est ce qui vous lie tous.
— Oh putain !
Cassandra se tourna vers Lilith qui venait de crier cette insulte, le visage rougi et tordu de douleur.
— Je viens de perdre les eaux.
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Beaucoup de chose dans ce chapitre ! Et enfin Lilith accouche (là si mes calcule sont bon elle en est à dix voir onze mois de grossesse jpp, mais cette incohérence est pour la moi du futur XD)
J'espère que ce chapitre vous à plus ! Et c'est le moment des paris ! ding ding ding :
Combien de bébés ?
Quel genre ?
Allez je veux vos meilleurs théories !
Kiss
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