Jour 5
Je saute de mon lit. Aujourd'hui on commence par visiter le musée du Caillou. En clair, ça va être ennuyeux à souhait, mais la soirée pyjama de ce soir rattrapera le reste ! Je m'habille en vitesse pour rejoindre Anna à la salle commune. Léon, lui, est encore en train de dormir. Je me demande à quelle heure il s'est couché hier... ? Je monte le couloir et me retrouve dans la pièce principale. Beaucoup d'adolescents sont déjà là. Je remarque Anna au fond, près du radiateur, et vais m'asseoir à côté d'elle.
" Bien dormi ? me demande-t-elle.
- Un peu de mal à m'endormir, mais après ça a été. Et toi ?
- Pas mal. " Elle croque dans sa pomme pour illustrer son propos. Je lui souris, puis vais chercher mon petit-déjeuner. Je me prends des céréales, deux tartines et un bout de chocolat. Je retourne à ma place, et me lance dans une longue discussion avec Anna, sur mille et un sujets différents. Léon arrive à ce moment là, en se frottant les yeux. Il a des cernes épouvantables. J'échange un regard avec Anna. Nous pensons exactement la même chose.
" Euh, Léon, tu t'es couché à quelle heure hier soir ? lui demande-t-elle.
- Sais plus, mais ça n'a aucune importance...," baille-t-il en retour. Je me lève d'un bond, si bien que ma chaise tombe en arrière.
" Bien sûr que c'est important, enfin ! Déjà que tu étais bizarre hier, et en plus tu ne dors pas ?! C'est une blague ?!" je crie. Il me regarde avec deux yeux ronds. Tous les autres adolescents me regardent, surpris. Je me sens rougir. Je délaisse mon petit-déjeuner et cours pour échapper à leurs regards. Hors de question d'aller au dortoir, autrement Léon va venir me parler. Je me dirige plutôt vers le jardin, et vais m'allonger sur une chaise longue, près de la piscine. Pourquoi est-ce que je réagis toujours excessivement ? C'est vrai, il n'a rien dit de mal... Je regarde les nuages. Il y en a un qui a la forme d'un lapin. J'aimerais rester là, tranquille, et que personne ne vienne m'embêter. Mais bien sûr, c'est impossible. Anna dévale les escaliers et se dirige vers moi. Je soupire. C'est vraiment impossible d'avoir la paix cinq minutes ???
" Hum, Léonie, je peux te parler un petit instant ?
- Ai-je vraiment le choix ? je soupire.
- Non. C'est à propos de Léon.
- Qu'est-ce qui se passe ??? m'écriai-je en me levant d'un bond.
- Il... Il a disparu.
- C'est une blague ? je m'exclame.
- J'aimerais bien... Après que tu sois partie, il a prétexté devoir aller aux toilettes et il ne revient pas ! s'affole-t-elle.
- Je vais le chercher ! " Je cours vers le bâtiment, tout en priant pour le trouver rapidement. Je me dirige vers les toilettes des garçons et frappe à la porte.
" Léon ? C'est Léonie, est-ce que tu es là ?
- Non, il n'y a personne !
- Ah, très drôle ! soupirai-je.
- Tu peux entrer, me souffle-t-il depuis l'autre côté de la porte.
- Tu rigoles ou quoi ?! Je vais pas... Non ! C'est les toilettes des garçons ! Tant que tu vas bien, c'est bon ! On se retrouve après ! " Je ne lui laisse pas le temps de répondre, et m'en vais précipitamment. Je retourne à la salle commune, où Anna m'attend patiemment.
" Tu l'as trouvé ? me demande-t-elle.
- Oui, il est juste aux toilettes, mais je ne sais pas ce qu'il fait..., lui répondis-je.
- Peut-être qu'il médite sur ton comportement...., rit-elle.
- Arrête, c'est pas drôle ! " je m'exclame, faussement agacée. Elle hausse les épaules. Soudain, Léon apparaît à l'autre bout de la pièce. Il nous rejoint, tout en regardant fixement ses chaussures. Nous n'avons pas le temps de l'interroger davantage : le directeur monte sur l'estrade et s'éclaircit la voix.
" S'lut les mioches ! J'espère que vous avez bien bouffé... Mais bon, on s'en fout ! Tout ça pour vous dire que le tas de... Hum... Que le BUS vous attend dehors... Alors grouillez ! " Et dire qu'il a dû s'entraîner pendant trois jours pour réussir à dire " bus ", plutôt qu'autre chose ! Je laisse mes pensées de côté, et nous nous rangeons par deux pour monter dans le véhicule. Cette fois je me range avec Anna, car je suis incapable de regarder Léon dans les yeux, et encore moins de lui prendre la main. Nous nous asseyons tout au fond, et je me mets du côté fenêtre. Une fois installées, Anna se tourne vers moi, elle veut visiblement me parler.
" Léonie, je veux savoir la vérité... Est-ce que tu es amoureuse de Léon ? " Je mets cinq minutes à comprendre la question, et encore plus de temps pour lui répondre. Qu'est-ce que je peux lui dire ? La vérité, comme elle me l'a demandé, ou un mensonge ? En fait, je n'en sais rien. Autant lui dire cela.
" Je ne sais pas du tout. Mais je ne pense pas. C'est... C'est juste un très bon ami ( et le premier ! ) ". Mais pourquoi ai-je rajouté ça, enfin ?!? Bien sûr que ça n'est pas " juste un très bon ami " !!!
" Tu sais, je ne te crois pas une seule seconde. Rien qu'en voyant comment tu t'inquiète pour lui lorsqu'il disparaît..., dit-elle malicieusement.
- Non.
- Non quoi ? s'exclame celle-ci.
- Non, je ne l'aime pas. " Elle se tait. Soudain, j'entends un petit bruit, comme un micro gémissement. Je me retourne vivement. Léon se trouve sur le siège de derrière. Bon sang, il a tout entendu ! Je me lève brusquement.
" Monsieur ! dis-je au directeur, je peux aller aux toilettes, s'il vous plaît ? " Il hoche la tête. Je fonce vers le devant du bus et descend dans la cale. C'est un de ces bus voyageurs, dans lesquels il y a des toilettes. Tant mieux pour moi, d'ailleurs ! Je m'y enferme, et m'assois sur la lunette, tout en ayant pensé à la baisser juste avant... J'enfouis mon visage dans mes mains. C'était bien la bêtise à ne pas faire ! Que vais-je pouvoir inventer comme mensonge maintenant ? Quelqu'un toque à la porte. Je prie pour que ce ne soit pas Léon...
" Léonie ? Ça va tu te sens bien ?" résonne la voix du garçon. Quelle poisse ! Mais pourquoi, pourquoi est-ce que c'est lui qui vient prendre de mes nouvelles ? Il devrait plutôt être sur son siège, à ressasser ce qu'il vient de se passer !
" Oui, t'inquiète ! Je dois juste... Ben faire ce qu'on fait aux toilettes, quoi ! " Je m'enfonce là ou quoi ? Sérieusement Léonie, tu te rends compte de ce que tu viens de lui dire ??? Je me frappe le front. Le prix de la fille la plus débile au monde revient à.... Léonie Thoen !
" Ah... Oui... OK... Hum... Je retourne à ma place.... " Je frappe mon crâne sur la porte. Imbécile, imbécile, imbécile... Je suis une imbécile. Je m'apprête à sortir, lorsque le bus freine brusquement, me projetant violemment contre la porte. Je souffle d'agacement, et sors des toilettes. Apparemment nous sommes arrivés. Tous les pensionnaires se bousculent pour sortir les premiers. Je joue des coudes pour me faufiler dans le troupeau, et me retrouve rapidement dehors. Ouf ! J'ai cru que j'allais mourir, dans ce bus ! Le directeur nous regroupe près de l'entrée du musée.
" Bon, j'vais vous diviser en deux groupes. L'un fera la visite avec le gardien du musée, l'autre avec moi. Alors... " Il commence à former les groupes. Je me retrouve avec Anna. Bientôt, il ne reste plus qu'un seul adolescent. Vous avez deviné ? Léon. Je croise tous mes doigts et prie le ciel pour qu'il soit dans l'autre groupe. Raté. J'ai vraiment la poisse. Il vient se poster à côté de moi. Je saute d'une jambe à l'autre, mal-à-l'aise. Le directeur reprend :
" Votre groupe va avec le gardien. Vous, vous v'nez avec moi ! " Je suis avec le gardien. Je sens qu'on va s'ennuyer comme des rats morts. Nous passons la porte du musée. Aussitôt une odeur d'eau de javel m'attaque les narines mêlée à celle, plus faible, du chlore. Un homme en uniforme bleu marine vient vers nous et dit :
" Bonjour, je suis le gardien et guide touristique du lieu ! Nous allons passer la matinée ensemble, puis nous ferons un pique-nique dans le jardin, et nous nous quitterons. Alors venez avec moi, commençons ! " Je soupire. Nous suivons le guide dans le musée, pendant que l'autre groupe part avec le directeur. Je suis sûre qu'ils vont s'amuser, eux, connaissant le directeur. Léon vient marcher à côté de moi.
" Léo', tu es sûre que ça va ?" me dit-il. Depuis quand me donne-t-il un surnom ? Je suis déstabilisée.
" Hum... Bien sûr ! Je me porte à merveille, pourquoi ?" réponds-je. Il hausse les épaules, mais je vois ses lèvres trembler. Le guide s'arrête brusquement, et se lance dans des explications interminables sur un caillou rond. Anna nous rejoint et nous glisse à l'oreille :
" J'espère que vous êtes prêts à passer la matinée la plus pourrie du siècle... " Nous soupirons à l'unisson. Le guide reprend sa marche, en plaçant quelques paroles barbantes de ci de là. Je commence sérieusement à m'ennuyer, et vu la tête de mes deux compagnons, eux aussi.
" Venez !" nous dit Anna. Je l'interroge du regard et elle répond à ma question muette.
" Le guide ne fait pas attention à nous, on a qu'à en profiter pour s'amuser un peu ! " J'hésite. Oui, ce serait plus drôle d'explorer, mais en même temps je n'ai pas envie d'enfreindre les règles... Léon aussi ne semble pas convaincu.
" Je ne sais pas si c'est une bonne idée, commençai-je.
- Oui, on ne sait pas ce qui pourrait arriver..., acquiesce mon ami.
- Oh, mais détendez-vous un peu ! Allez ! " Elle nous prend les mains et nous entraîne avec elle hors du rang. Je me laisse faire, impuissante. Nous arrivons dans une salle ovale, aux murs bleu pâle. Au centre trône un gigantesque rocher, qui tient en équilibre sur un socle en métal. Nous nous approchons, mais Anna ne semble pas satisfaite.
" C'est trop ennuyeux ici, je vais dans la pièce d'à côté ! "
Nous la laissons partir.
" Léonie, tu es toute pâle, tu es sûre que ça va ? me demande Léon. Je hoche la tête en faisant un petit sourire timide.
- Tu sais, dans le bus... Je... Je n'ai pas voulu te blesser...
- J'ai compris, ne t'en fais pas, assure-t-il. Sinon, es-tu chatouilleuse ?
- Euh... Je ne crois pas que ça ai un quelconque rapport avec la conversation... " Il se rapproche un peu trop de moi. Je panique intérieurement. Et puis il se jette sur moi et me chatouille. Je ris aux éclats.
" Non ! Arrête, je... Non !" j'halète. Il rit tendrement. Mais soudain, je heurte l'immense rocher. Je n'avais pas remarqué qu'il était juste derrière moi. Il tangue, vacille, et commence sérieusement à pencher vers nous. Je blêmis, tandis que Léon ouvre deux yeux angoissés. Le rocher tombe vers nous. Je saute devant mon ami et tend mes deux mains en direction du roc. Je ferme les yeux, me concentre et essaie de me laisser envelopper par la magie. Seulement, j'ai du mal à contrôler mes pouvoirs, et je suis obligée de serrer les dents, de me focaliser sur ce que je veux qu'il se passe. Ma vision se brouille, mais je vois que la lumière violette si caractéristique de mes pouvoirs commence à m'envelopper. J'y arrive ! Le rocher ralentit sa course, pour finalement s'immobiliser complètement. Je sens la sueur couler le long de mon front, mais je n'y fais pas attention. J'emploie toute ma force intérieure pour remettre le rocher sur son socle, en position initiale. Puis, lorsque je suis sûre qu'il est immobile, je relâche la pression, et me laisse tomber sur le sol. Je suis épuisée, toute en sueur, et mon cœur n'a jamais battu aussi fort. Léon se précipite vers moi et me prend dans ses bras. Il se tait, tout en me berçant contre lui. Je me laisse faire, essayant de récupérer un semblant de contenance.
" Calme-toi, respire à fond... Imagine que tu es chez toi, dans ta chambre, me dit-il. Voilà, détend-toi... " J'essaie de faire ce qu'il me dit. Mon rythme cardiaque commence à ralentir, et je me sens un peu mieux. Puis, je sens quelques larmes couler sur mes joues. J'ai tellement eu peur ! Ce rocher aurait pu nous écraser ! Il caresse mes joues pour essuyer mes larmes et colle son front au mien. Je le laisse faire, appréciant le contact de nos peaux.
" Ça va mieux ? me demande-t-il.
- Oui..., dis-je, perturbée. Ce que tu as vu... c'est difficile à expliquer... j'aurais dû te le dire, je sais... quand le banc s'est mis à voler... ou mon portable... " Mes mots se mélangent et sans m'en rendre compte, ma voix part dans les aigus et mes larmes recommencent à couler.
" Ne t'en fais pas, respire, voilà... Tout va bien " Il me sourit.
" Je... Je possède des dons surnaturels...
- Tu veux dire que tu peux contrôler les objets à distance ?
- Ça... et deux autres choses...
- Tu veux m'en parler ?
- Eh bien... Je ne veux pas t'effrayer, et surtout, je n'ai pas envie d'en parler maintenant...
- Je comprends, ne t'inquiète pas. Inspire encore un bon coup. Tu penses que tu peux te lever ?
- Je vais essayer...", dis-je. Il me prend par la taille - ce qui nous fait rougir considérablement - et me remet sur mes pieds. Mes jambes flageolent et ont un mal de chien à me porter.
" Appuie-toi sur moi", m'ordonne mon ami. Je le remercie d'un regard, et passe un bras autour de ses épaules, pour réussir à tenir sur mes deux jambes. Nous marchons ainsi, en clopinant jusqu'à la salle voisine, où nous trouvons Anna en pleine contemplation d'un morceau de météorite calciné. Nous la ramenons à la réalité.
" Anna, viens ! Il faut qu'on rejoigne le rang ! " Elle bougonne, puis se tourne vers nous. Quand elle voit dans quel état je suis, elle abandonne son air grognon et se précipite vers nous.
" Qu'est-ce qu'elle a "? demande-t-elle à Léon, comme s'il était mon médecin. Je panique. Va-t-il révéler mon secret ?
" Elle a eu un malaise. Elle est très faible. " Je le remercie en silence. Elle nous regarde, sceptique, mais finit par hocher la tête. Nous regagnons le rang sans nous faire repérer. Nous croisons le directeur avec son groupe, et Léon se dirige vers lui, avec moi accrochée à son bras.
" Monsieur, Léonie a eu un malaise et ne se sent pas bien, peut-on aller dans le bus ? Je veillerai à ce qu'elle se repose.
- Soit, répond-il, mais je veux que vous soyez là pour le pique-nique, c'est clair ? " Nous hochons la tête, et sortons du musée. Je trébuche sans arrêt, et Léon est obligé de me tenir les mains pour m'empêcher de tomber. Nous arrivons quand même, tant bien que mal, à notre bus. Nous entrons par la porte restée ouverte, parlons avec le conducteur pour qu'il nous laisse passer, et nous installons sur deux sièges, côte à côte. Je ferme les yeux. Je suis littéralement épuisée. Léon doit s'en rendre compte, puisqu'il dépose sa veste sur moi, comme une couverture, et pose ma tête sur son épaule.
" Repose-toi ", murmure-t-il. J'enfouis mon visage dans son cou. Sa chaleur m'enveloppe doucement et je sombre dans le sommeil.
Je me réveille lentement, et mon premier réflexe est de regarder l'heure. Il nous reste une dizaine de minutes avant de rejoindre les autres pour le pique-nique. Puis, je remarque que je suis dans les bras de Léon, qui dort, la tête posée sur la mienne. Je rougis fortement, mais une sensation de chaleur m'envahis dans le bas de mon ventre. Un frisson me parcourt l'échine, quand je me rends compte qu'une de ses mains est posée sur ma cuisse. Je tente d'ignorer les battements frénétiques de mon cœur, et secoue doucement mon ami pour le réveiller. Il ouvre les yeux et me sourit. Et puis il réalise dans quelle position nous nous trouvons, et se lève d'un bond, se cognant la tête au ventilateur du plafond. J'éclate de rire sans avoir pu me retenir. Il me fait une petite grimace et se masse douloureusement le crâne. Je me lève à mon tour et lui sourit.
" Ça va ? Tu t'es fais mal ? je lui demande.
- Non, non, ne t'inquiète pas.
- Viens, c'est l'heure de manger. Je meurs de faim. " J'attrape sa main et l'entraîne en dehors du véhicule. Il regarde fixement nos deux mains liées, comme s'il trouvait cela irréel, mais je refuse de rougir encore une fois. Nous arrivons dans le jardin jouxtant le musée. Tous les autres adolescents s'y trouvent déjà, allongés sous des arbres ou assis dans l'herbe, dégustant leurs sandwichs avec appétit. Nous nous installons près d'Anna, au bord d'un ruisseau. Je retire mes bottines et plonge mes pieds dans l'eau fraîche. Je pousse un petit rire léger, parce que l'eau me chatouille les orteils. Léon se joint joyeusement à moi. Nous sortons nos casse-croûtes et les mangeons, en gardant toujours nos pieds dans l'eau. Je me sens bien, en cette matinée d'été. Il fait chaud et les oiseaux gazouillent avec enthousiasme. Un petit poisson vient nager à quelques centimètres de mes pieds. Lui aussi à l'air heureux, même si les poissons ne peuvent pas sourire. Je donne quelques miettes de mon sandwich à l'animal, puis finis mon repas. Le directeur frappe dans ses mains, et s'exclame :
" C'est l'heure de partir ! Tous dans le bus ! "
Je ramasse mes chaussures et les enfile rapidement. Léon et Anna me suivent et nous faisons la course jusqu'au véhicule, tout en riant aux éclats. Je me sens tellement heureuse ! Je me suis trouvé les deux meilleurs amis du monde, et cela me réconforte considérablement. Nous montons dans le bus, et nous asseyons sur des sièges. Durant le trajet, Léon se fait tout pensif. Je remarque qu'à plusieurs reprises, il tente de me parler mais se ravise. Me cache-t-il quelque chose ? Le connaissant, c'est bien possible. Non pas que je le considère comme un menteur ! Juste qu'il est très timide, et a tendance à ne pas oser dire les choses. Et puis cela se transforme rapidement en mensonge. Je sais bien que ça n'est pas sa faute, mais j'aimerai bien qu'il me fasse un peu plus confiance. Bah, ça finira par venir... Le bus s'arrête. Nous sommes arrivés au centre. Nous descendons du véhicule et entrons dans le bâtiment. Mes amis me suivent jusqu'à notre chambre. Je me jette sur mon lit en riant aux éclats, parce que Léon vient de me chatouiller le cou. Il rit lui aussi. Anna nous regarde, un sourire aux lèvres, comme une maman fière de ses enfants. Je lui souris, car je sens qu'elle a fait beaucoup de choses pour moi depuis que l'on se connaît... Je les regarde un moment. Ils semblent joyeux, épanouis, leurs visages rayonnant me le confirme ! Je me dirige vers le balcon et ouvre la vitre, pour laisser entrer l'air frais du dehors. Frais... ça n'est pas totalement exact, puisque nous sommes en été ! Léon vient s'accouder au balcon, juste à côté de moi. Il est plongé dans ses pensées, le regard dans le vide, tandis qu'Anna vient derrière nous.
" Si vous étiez des figurines en bois, je vous garderai toujours avec moi, contre mon cœur..., nous dit Anna.
- Je ferais pareil", dis-je. Léon acquiesce. Nous nous sourions, et je me sens à ma place. Définitivement à ma place. Léon glisse une main hésitante - voire tremblante - derrière ma taille. Je rougis un peu, mais ne résiste pas à l'envie de poser ma tête sur son torse. J'ai l'impression que c'est mon grand frère, ou une sorte d'ange gardien... Anna nous observe avec un sourire attendris et je crois l'avoir entendue murmurer quelque chose... Mais je ne sais pas quoi. Léon dépose un rapide baiser dans mes cheveux, avant de prétexter devoir aller aux toilettes, et de sortir en courant. Je reste immobile un moment, essayant de comprendre ce qu'il vient de se passer, puis me laisse tomber sur mon lit en riant. Anna me regarde, amusée, puis demande :
" Qu'est-ce qui te fais rire comme ça ?
- Et dire que cette journée avait mal commencé ! je m'exclame en soupirant de bonheur.
- La pierre... " Je suis sûre qu'elle a murmuré cela ! Mais comment pourrait-elle être au courant pour le rocher qui a faillit nous écraser ? Elle ne va pas se mettre à me cacher des choses, elle aussi ?! Ou alors c'est moi qui deviens paranoïaque... Elle doit remarquer mon changement d'attitude, puisqu'elle commence un autre sujet de conversation :
" Donc, vas-tu enfin avouer que tu es folle amoureuse de Léon, ou il faut que je te fasse des chatouilles jusqu'à ce que tu agonises ? " J'hésite à lui répondre. Dois-je lui faire confiance ?
" Tu sais garder les secrets, n'est-ce pas ? " Elle pousse un long soupir.
" Et dire que tu te poses toujours la question... Bien sûr que je sais garder un secret ! " Je lui souris. C'est vrai que je devrais lui faire un peu plus confiance. Elle est mon amie, après tout !
" Je... en fait... O...Oui... Oui, je l'aime. " J'emprunte une intense couleur tomate. J'ajoute :
" Mais je crois que ce n'est pas réciproque... " De la tristesse se peint sur mon visage. Anna me regarde, complètement effarée, à en croire ses yeux exorbités, et le tressaillement de sa lèvre supérieure ( oui, je suis assez observatrice et j'adore les détails, cela m'aide à comprendre la personne en face de moi ). Elle se frappe le front du plat de la main.
" Toi, je crois que je vais aller te chercher des lunettes.... " Je hausse les sourcils, surprise. Sur le coup, je ne trouve rien à dire. Je crois que c'est elle, qui devrait se trouver des lunettes ! Léon n'est pas amoureux de moi, il me considère comme son amie, pas besoin d'avoir des yeux pour s'en rendre compte. Même si je n'ai jamais été douée pour voir ce genre de choses, ça me semble évident qu'il n'éprouve rien de spécial pour moi. Le concerné entre justement dans le dortoir à ce moment-là. Je me retourne si violemment que je manque de me cogner au mur.
" Euh... vous parliez de moi ? demande le garçon.
- Non, non ! On parlait de trucs de filles, tu vois... le shopping, les garçons, la famille...", explique mon amie. Il nous regarde tour à tour, cherchant visiblement à savoir si nous mentons. Finalement, il hausse les épaules. Je suppose qu'il a gobé les paroles d'Anna. Il s'assoit sur mon lit ( mon lit ?!? ) et tente de m'attirer vers lui. Je panique. Je m'apprête à partir, prétextant devoir prendre l'air, mais quelqu'un - que je devine être Anna - me pousse, et je tombe dans les bras du jeune homme. Je rougis violemment, d'autant que mes deux mains sont sur son torse. Il me sourit, tout content de m'avoir contre lui, peut-être. Il pose une main sur mon épaule. Je crie :
" Aïe ! Ça brûle ! " Léon sursaute et se cogne au lit du dessus. Il s'exclame :
" Qu'est-ce qu'il t'arrives ???
- Mon épaule ! Elle m'a brûlé ! " Anna devient aussi pâle que Léon, qui me fixe, horrifié. Il écarte la bretelle de mon débardeur, ce qui me fait rougir à un point que je ne pensais même pas atteindre un jour, et l'examine attentivement. Il court à sa valise, et en sort son matériel de secours, comme le premier soir que nous avons passé au centre. Anna me fixe, immobile, et j'ai l'impression qu'elle ne se sent pas bien... Je suis arrachée à mes pensées par la main tremblante de Léon, qui applique de la pommade sur mon épaule. Je regarde mes mains, en tentant tant bien que mal de dissimuler mes joues rouges. Il termine ses soins, puis remet ma bretelle. Il me semble quand même qu'il s'attarde un peu sur mon épaule, mais ça doit être une illusion. Il range ses affaires. Son visage est toujours pâle, ses mains tremblent et il ne cesse de jeter des regards inquiets vers moi.
" Léon, ça va ? je demande.
- Que... que... Mais oui ! B-bien sûr ! À merveille ! " Il ment. Pour une fois, je suis sûre et certaine de ce que j'avance : il ment. J'imagine qu'il a une bonne raison de me cacher la vérité, donc je préfère ne rien ajouter.
" Hey, on irait pas dans le jardin ? On n'y est jamais allé tous les trois !" s'exclame Anna, faussement enjouée. Nous hochons la tête, et la suivons jusqu'au jardin. Je m'installe près de la piscine. Les évènements d'hier me reviennent en mémoire. Quelle poisse ! Il a fallu que j'ai mes règles dans une piscine. Pourquoi moi, enfin ? Léon vient s'asseoir à côté de moi.
" Je suppose que tu as une dent contre la piscine, maintenant...", me dit-il. J'acquiesce. Pas question que je retourne de sitôt dans ce bassin. Il retire ses chaussures et plonge ses pieds dans l'eau. Il s'étire et pousse un long soupir.
" Il fait beau..., dit-il en regardant le ciel.
- Oui, j'adore le soleil ! " Je lui souris. Il me le rend. Soudain un cri retentit au-dessus de nous. Nous levons la tête.
" Encore toi ? crie Tiphanie par sa fenêtre. Vous pouvez pas aller ailleurs, non ?! J'ai besoin d'un silence total pour faire ma manucure !!! " Je grogne. Quelle peste ! Je me lève rageusement, et vais m'asseoir dans l'herbe un peu plus loin. Léon me rejoint, les sourcils froncés.
" C'est elle qui t'as embêté l'autre jour ?
- Non, tu penses ? " je m'exclame, en riant nerveusement. Il s'assoit à côté de moi, et pose sa tête sur mon épaule. Okay. J'ai l'impression qu'une colonie de fourmis vient de s'installer dans mon ventre. Ses cheveux noirs me chatouillent le cou. Bon sang, mon cœur va lâcher. Il murmure :
" Profite de cette journée, plutôt que de penser à elle... " Je hoche la tête, un sourire timide aux lèvres. Anna vient alors s'installer près de nous.
" Quelles pestes ! Je me suis occupé d'elles, croyez-moi ! " Elle nous sourit, comme pour se calmer, et remet de l'ordre dans ses cheveux. Son comportement m'amuse. Je m'adosse à l'arbre, derrière moi, et jette un coup d'oeil à ma montre : 15h01. La soirée pyjama commence à 20h00, il nous reste donc deux heures à tuer....
" Quelle est la chose pour laquelle vous êtes le plus doué ? demande Anna.
- La course..., répond rêveusement Léon. Ou, rougir, c'est un don ? Parce que moi, je suis un professionnel ! rit-il nerveusement.
Nous rions à sa remarque.
" Et toi, Léonie ?
- Hum.... Jouer de la flûte traversière... Ou écrire des livres.
- Anna ? intervient Léon.
- Quoi ?
- Tu es la seule à ne pas avoir répondu à la question !
- Oh... Hum.... J'aime bien peindre, mais je ne suis pas vraiment douée... Sinon, par simple curiosité, tu ne l'aurais pas amenée, ta flûte, Léonie ? " Je rougis et admets d'une petite voix :
" Je l'emporte partout avec moi... Pourquoi ?
- Tu ne nous jouerai pas un petit morceau ? demande-t-elle.
- Quoi ??? Mais... Mais... Je....Enfin...
- Allez, s'il te plaît !" s'exclame Léon avec la moue d'un enfant suppliant. Je fonds. C'est impossible d'être aussi adorable ! Ce garçon n'est pas humain. Mon cœur bat à tout rompre, j'ai l'impression qu'il va sortir de ma poitrine.
" Oh d'accord, c'est bon !!! je cède, désespérément, en tentant de maîtriser les battements de mon cœur.
Ils sautent de joie tous les deux. Je soupire, et vais chercher mon instrument, ainsi que mes partitions. Une fois que j'ai mes affaires, je retourne à l'arbre, où je trouve un Léon complètement rouge en train de bafouiller quelque chose, et une Anna avec un sourire pervers aux lèvres. Je n'ose même pas imaginer le sujet de leur conversation. Je viens m'installer à côté d'eux, et aussitôt, le silence se fait. Oui, je faisais sûrement partie de la conversation, et ils ne veulent visiblement pas que je sois au courant. Tant mieux.
" Parfait. Alors, tu nous joues quoi ? demande Anna.
- Attends, il faut que je regarde ce que j'ai...", dis-je. Je sors la flûte de son étui et la monte. Puis, je la porte à mes lèvres et souffle très fort pour la chauffer ( si elle est froide, le son n'est pas juste ). Ensuite je joue une petite gamme pour m'échauffer les doigts, et je feuillette mes partitions.
" J'ai quelques musiques de dessins-animés... Des classiques...
- Montre-nous, on va choisir, ça ira plus vite !" s'exclame Léon. Je lui tend mon porte-vues d'une main tremblante. Au bout d'un certain temps, ils se mettent d'accord pour une petite mélodie entraînante dont le nom m'a échappé. Je joue le morceau avec entrain, comme je le fais toujours. A la fin du morceau, je remarque que Léon est totalement fasciné. Mais pas par mon morceau, car il fixe l'embouchure de ma flûte, où se trouvent, soit-dit en passant, mes lèvres. Je rougis soudainement. C'est impossible qu'il soit en train de regarder cela ! Je repousse mes pensées, trouvant cela absurde. Je termine le morceau en vitesse, et pose ma flûte à côté de moi. J'ai la gorge tout sèche, ce qui est normal lorsque l'on vient de souffler dans un instrument pendant dix minutes. Mes deux amis applaudissent. Je leur souris, tout de même un peu gênée qu'on me prête autant d'attention.
" Tu es incroyablement douée, me souffle Léon, la voix un peu tremblotante.
- Merci beaucoup...", dis-je en rougissant. J'aimerai ajouter, juste pour le taquiner :" Tu as préféré le morceau, ou mes lèvres ? " Mais pour ça, il faudrait que j'ose. Et j'ai peur de la réaction qu'il aurait si je lui disais cela. Et Anna... Je n'imagine même pas !
" Tu nous en joues un autre ? " Je hoche la tête. Nous passons une heure ainsi, installés dans l'herbe, moi à jouer, eux à écouter, jusqu'à ce que le directeur nous appelle pour prendre le goûter. Une fois dans la salle commune, nous nous installons sur une table au fond, près du radiateur. Je vais prendre un plateau, sur lequel je mets quelques cookies, un verre de lait, et une banane, puis je retourne m'asseoir auprès de mes amis. Il est 16h01. Nous mangeons en silence. Ce n'est pas un silence lourd, mais plutôt reposant. Il est là pour nous rappeler qu'il n'est pas toujours essentiel de parler, et que ne rien dire peut se révéler reposant. Je termine mon goûter et me lève :
" Je crois que je vais aller faire une petite sieste pour être en forme ce soir. Ça ne vous dérange pas ? je m'exclame.
- Non, non..., me répond Anna, de toute façon il faut que j'ai une petite conversation avec Léon... " Les joues soudainement rouges du concerné me confirment ce que je craignais : Anna va lui parler de moi. Enfin, peu importe. Je leur fais un petit signe de la main tout en m'éloignant vers le dortoir. Je vais m'allonger dans mon lit et m'endors presque aussitôt.
∥ 19H21 ∥
Quelqu'un me secoue doucement par l'épaule et je me réveille.
" Léonie, tu es réveillée ? C'est l'heure de manger ! " me dit Léon. Je souris, sentant sa main s'attarder sur mon épaule. Il rougit et la retire rapidement.
" Okay, j'arrive. " Je m'étire, puis le suis jusqu'à la salle commune. Un bon fumet s'échappe de la cuisine. Ça me semble délicieux ce soir ! Nous rejoignons Anna, assise à notre table habituelle, près du radiateur. Nous mangeons en vitesse, puis c'est l'heure de la soirée pyjama.
" Allez, tous à vos dortoirs ! s'exclame le directeur. Extinction des feux au maximum à minuit ! " Je bondis de ma chaise et cours vers notre chambre, suivie de près par Léon et Anna. Nous entrons dans le dortoir en rigolant. Je me laisse tomber sur mon lit en souriant.
" Vous êtes prêts à passer une super soirée ? je m'exclame.
- Oh que oui ! Et je vous préviens, je ne me couche pas avant minuit ! " hurle Anna. Nous rions, puis Léon dit :
" Je vais aller me changer aux sanitaires... " Nous allons prendre nos douches, nous mettons en pyjama, puis nous nous retrouvons tous les trois assis en tailleur sur le sol.
" On commence par quoi ? demande Léon.
- Un Action ou Vérité ? propose Anna, avec un sourire coquin aux lèvres. Je rougis, et vois Léon en faire de même. Décidément, elle n'en rate pas une.
- Oui, pourquoi pas..., dis-je.
- Parfait ! Alors je commence ! Léonie, Action ou Vérité ? s'exclame-t-elle.
- Euh... Act-véri-... Je ne sais pas ! Bon, allez... Vérité.
- Mmh... As-tu déjà été en couple ?
- Oui, une fois, en sixième. Ça c'est très mal terminé, soupirai-je.
- Désolé...
- Non c'est rien. À moi, maintenant ! Léon ? Action ou vérité ? " Il rougit, et regarde ses mains, mais ne met pas longtemps à répondre.
" Action.
- Durant tout l'action ou vérité, tu devras faire le bruit de ton animal préféré à la fin de tes phrases.
- Euh okay. A moi, Léonie, Action ou vérité ? Ahoouuuu !!! " ( cri du loup très mal imité 😔 ). Je rigole. Il est trop mignon.
" Action... Non ! Non ! Je voulais dire...
- Trop tard ! Alors voilà, durant tout le Action ou vérité, tu devras m'appeler Mon chou. Ahoouuu !!!
- Quoi ? Ah euh bon, d'accord mon chou... " Il rougit puis marmonne.
" Je n'aurais peut-être pas dû dire ça... Ahooouuu !!!
- Bah, pourquoi ? Je trouve que c'est mignon... " Je souris. Anna éclate soudainement de rire.
" Vous faites la paire, tous les deux ! Entre le loup qui hurle à la lune et la folle qui aime les choux à la crème, je ne suis pas épargnée ! " Nous rions tous en chœur.
" A moi, maintenant ! dit-elle. Léon, Action ou vérité ?
- Bon, je ne supporterai pas une action de plus, alors vérité, ahooouuu !!!
- As-tu déjà embrassé une fille ? Je ne te parle pas de la joue, évidemment... " Léon se décompose complètement, rouge comme une tomate bien mûre.
" Non ! Non, non et encore non ! Ahooouuu !!!
- OK, OK, ça va, ce n'était qu'une simple question.
- A moi ! dis-je. Anna, action ou vérité ?
- Vérité.
- Quelle est ta plus grande peur ?
- De vous perdre.
- Quoi ? Mais tu ne nous connais que depuis quelques jours...
- C'est compliqué... Enfin, bref, vous êtes mes amis, je ne veux pas vous perdre, c'est tout.
- D'accord... Mon chou, je crois que c'est à toi. " Il rougit. Apparemment ce surnom met mon ami dans tous ses états.
" Léonie, Action ou vérité ? Ahoouuu !!!
- Vérité ? Puisque j'ai déjà fait les deux.
- Hum... Raconte nous ce qu'il s'est passé avec ton amoureux en sixième..., dit-il en regardant ailleurs, gêné. Ahoouuu !!!
- Pffff... OK, mon chou. Donc, il s'appelait Pierre. Il était dans ma classe, et certains de mes amis passaient beaucoup de temps avec lui, donc il m'arrivait de le côtoyer. Et puis de fil en aiguille, il est devenu un ami très cher, avec qui je passais les trois quarts de mes journées. Ce qui rendait d'ailleurs mon meilleur ami très jaloux, et le faisait devenir agressif envers Pierre. Et alors j'ai fait ma première erreur, même si je ne pouvais pas le savoir sur l'instant. Nous étions en permanence, l'un à côté de l'autre, et je n'avais rien à faire. Alors j'ai pris une feuille et j'ai commencé une histoire. J'y parlais de lui et moi et que je voulais qu'il y ai plus que de l'amitié entre nous... A la fin de l'heure, il m'a demandé s'il pouvait lire ce que j'avais écrit. Je n'ai pas réussi à lui dire non. Et même si j'avais changé les prénoms, il a facilement comprit que je parlais de nous deux. Alors il m'a donné rendez-vous dans la cour. Là-bas il m'a expliqué avoir comprit ce que voulais dire l'histoire. Les jours suivants, nous avons passé tout notre temps ensemble. A tel point que j'en délaissais mes amis. Un jour, Pierre m'a avoué être amoureux de moi. Nous nous sommes mis en couple, et à partir de là, ce fut le paradis. Jusqu'à ce lundi après-midi, où j'ai fais ma deuxième et dernière erreur. Mon meilleur ami s'est disputé une fois de plus avec Pierre. Mais cette fois, c'était beaucoup plus violent. J'ai passé toute la récréation a essayer de les calmer, d'autant que ma meilleure amie s'était mêlée de la dispute et y prenait partie. Lorsque la sonnerie a retentit, j'avais réussi à faire régner un semblant de paix, ou du moins, une trêve seulement pour les cours, puisque mon meilleur ami était dans notre classe. J'étais de très mauvaise humeur après cette grosse dispute. Une fois rangés dans la queue pour aller en musique, Pierre m'a expliqué vouloir parler à la CPE pour que mon meilleur ami arrête de nous embêter. Je lui ai répondu que ça n'était pas une bonne idée. Mathias ( mon meilleur ami ) n'avait rien fait de mal, et je ne pouvait pas détruire notre amitié aussi facilement, alors que je le connaissais depuis le CP. Puis nous sommes allés en musique. En sortant, Pierre m'a dit quelque chose et je suis partie au quart de tour. Je ne sais même plus comment cette dispute a commencé, ce que je sais, en revanche, c'est que je suis passée du paradis à l'enfer. Et plus les jours passaient plus la dispute empirait. D'autant que ma professeure de Maths avait compris que nous étions en couple, et a cru bon de nous mettre l'un à côté de l'autre, sans savoir que nous avions rompu. Je ne supportais plus ni l'anglais, ni les maths. ( oui, la professeure d'anglais a voulu copier la prof de maths... ). L'année s'est terminée ainsi. Je recollais les morceaux de mon cœur brisé. Et j'ai fini par l'oublier. Voilà, mon chou, tu as toute l'histoire.
- Je suis désolée d'avoir insisté alors que c'est un sujet douloureux pour toi... Ahoouuu...", me dit-il avec une mine tout triste. Je pose une main sur son épaule et lui fait un sourire rassurant.
" Mais non, mon chou ! C'est du passé, et même si ça a été dur au début, maintenant j'ai définitivement tourné la page. Sauf que cette dispute a réussi à me faire perdre mes deux meilleurs amis par la même occasion. Mais je ne regrette pas, car à présent, je vous ai vous, et vous êtes adorables. " Nous nous faisons un gros câlin.
" À mon tour ! dit alors Anna. Léon, action ou vérité ?
- Action. Ahoouuu !!!
- Embrasse Léonie. " Il sursaute violemment et hurle :
" QUOI ??? Mais... Enfin... Je... Que.... Je peux pas....
- Eh, calme-toi ! rassure mon amie blonde. Je n'ai pas dit où tu devais l'embrasser !
- Tu veux dire que...
- Tu peux choisir. Qui suis-je pour vous forcer ? " Elle nous fait un clin d'œil. Mon cœur fait de véritables loopings dans ma poitrine. Si j'arrive à survivre à cette soirée, ce sera un miracle...
" Tu es d'accord, Léonie ? me demande Anna.
- Euh... Bah... Normalement, on doit faire les actions qui nous sont données... Mais si mon chou ne veut pas... " Il sourit.
" Bien sûr, que je veux. Ahoouuu !!! " Je rougis. Il s'approche lentement de moi et dépose un tendre baiser dans mon cou. Ses cheveux me chatouillent la mâchoire. Ça y est, je vais faire un arrêt cardiaque. Il retire lentement son visage. Ses joues sont complètement rouges, mais ses yeux brillent d'un éclat différent d'il y a quelques minutes...
" Vous êtes vraiment trop mignons...", fait Anna d'une toute petite voix. Je souris, puis regarde ma montre. Il est 21H57.
" Je pense qu'on ferait mieux d'arrêter le action ou vérité, non ? " Mes deux amis hochent la tête.
" J'ai une idée amusante pour le prochain jeu ! s'exclame Anna. On pourrait faire le jeu du mensonge ou vérité ?!
- Ça consiste en quoi ?
- On écrit chacun deux phrases sur un papier, une fausse et l'autre vraie, puis chacun lit ses phrases à voix haute. Les autres doivent deviner laquelle est fausse, laquelle est vraie.
- Oui, pourquoi pas. Mon chou... Oh, pardon, Léon, ça te va ? " Il sursaute et secoue la tête.
" Euh oui ! D'accord pour le mensonge-vérité. Euh, juste... Léonie ? Ça te dérangerait de...Hum... De continuer à m'appeler Mon chou ? dit-il en regardant le sol, les joues rouges.
- Non, ça ne me dérange pas ! réponds-je en rigolant. Bon, allez, je ramène les feuilles et les stylos ! " Je me lève et vais chercher les affaires dans ma valise.
" Voilà !
- Alors c'est partit ! " Je prends mon stylo et écrit :
Je sais imiter la poule à la perfection depuis que j'ai passé une heure dans le jardin de ma tante, à essayer de communiquer avec elles.
Je suis capable de jouer de la flûte avec mes pieds, tout en lisant un livre.
" Vous avez finit ? " je demande. Ils acquiescent.
" Vas-y, Léonie, commence ! " me dit Anna. Je hoche la tête et lis mes phrases. Léon me regarde avec un sourire illuminé.
" Pour moi, c'est la phrase avec les poules ! Ça te ressemble tellement ! dit-il.
- Je ne sais pas... Je vais faire confiance à Léon, sur ce coup-là...", ajoute Anna. Je ne peux m'empêcher de sourire.
" Bravo, c'était bien celle-là. Et pour vous confirmer, oui, je suis assez folle pour essayer de parler à des poules... " Léon me sourit tendrement.
" A ton tour de lire tes phrases, mon chou ! " Il hoche la tête, et me sourit.
" J'ai un chien avec la langue bleue qui sait ronronner comme un chat.
J'ai un chat sans poils qui sait aboyer comme un chien.
- Le chien, dis-je sans hésiter.
- Je lui fais confiance", acquiesce Anna. Léon semble époustouflé.
" O...Oui, c'est exact... Mais, comment tu as fait... Pour trouver comme ça !?
- Facile. J'ai pris en compte le fait que ton animal préféré est le loup, et que tu aimes quand les gens prennent soin de toi et te protègent, la nature même du chien, qui est toujours fidèle à son maître. Ensuite, il me semblait plus logique qu'un chien ronronne, plutôt qu'un chat aboie. " Léon reste muet de surprise et me regarde avec deux yeux ronds.
" Waouh. Personne ne me connaît aussi bien, à part peut-être mon père...", murmure-t-il. Je rougis.
" Je... Je peux refaire un test ? demande-t-il.
- D'accord. Anna, ça ne te dérange pas ?
- Non, pas du tout ! De toute façon, je n'avais aucune idée pour mes phrases, et je commence à être fatiguée. Vas-y, qu'on voit si elle te connaît vraiment par cœur au bout de seulement cinq jours..., sourit-elle, en haussant les sourcils comme une vraie perverse. Je vais la tuer si elle continue à faire des sous-entendus aussi explicites... Léon rougit.
" Est-ce que j'ai appris à marcher avant de parler ou l'inverse ? demande-t-il.
- Ça c'est plus compliqué. Personnellement, j'ai d'abord appris à parler. Mais toi, c'est plus complexe... Allez, je vais dire marcher.
- Oui ! Mais comment tu fais ? Je suis sûr que tu me caches quelque chose ! Tu as une façon de lire en moi, ou un autre truc magique ?
- Non. Je me suis appuyée sur le fait que le jour de la randonnée, tu nous as tous battus à plate couture, et que tu as dit adorer la course. J'en ai conclu que tu devais avoir appris à marcher très tôt. C'est tout. " Je souris. Pour une fois, je ne lui mens pas. Mes pouvoirs ne me permettent pas de lire les pensées des gens, ni d'explorer leur passé, je me suis contentée de rassembler les choses que je sais sur lui.
" Voilà, au moins, maintenant on est sûrs que vous êtes faits l'un pour l'autre, dit Anna en souriant innocemment.
- Je vais faire comme si je n'avais rien entendu. Bon, il est 22H32. Vous n'avez pas sommeil ? demandai-je.
- Si ! baille Anna. Même si j'avais dit que j'attendais minuit... Je crois que je vais aller me coucher.
- Moi aussi ! " Mes deux amis se dirigent vers leurs lits respectifs en baillant. Je fais de même, mais je n'arrive pas à m'endormir. Une heure passe. Impossible, je ne vais pas réussir à fermer l'oeil. Je sors mon portable.
" Allô, Maman ?
- Ma chérie ! Il est très tard, pourquoi tu ne dors pas ?
- On a fait une soirée pyjama et je n'arrivais pas à m'endormir. Trop de choses dans la tête.
- Trop de choses... Comme un garçon, par exemple ?
- Comment as-tu deviné ?
- Ma chérie, tu oublie que je suis une femme, moi aussi. Je sais ce que c'est ! Bon allez, raconte. C'est... Euh... Comment s'appelle-t-il, déjà ?
- Léon !
- Ah oui, c'est vrai. Alors ? Il est comment ? Décris-le moi !
- OK, OK, tu as gagné. Il est... Bon sang, je n'ai même pas de mots pour le décrire ! Il est merveilleux. Il a des yeux bleu clair et des cheveux noirs. Je sens qu'il est spécial, que quelque chose nous unit, mais je ne me rappelle pas quoi. C'est comme si je l'avais déjà côtoyé, il y a très longtemps. Je ne sais pas comment expliquer cela.
- Je vois. Tu es amoureuse de lui, n'est-ce pas ?
- C'est plus que ça. Comme une connexion mystique. Maman, tu peux me prendre pour une folle, mais je suis sûre que ça a un rapport avec mes pouvoirs. Comme si, nous avions une sorte de... Liaison magique. Je me souviens, le deuxième jour au centre, nous étions à côté l'un de l'autre, et nous avons ressenti comme une décharge électrique. Je suis certaine que c'est un indice.
- Je comprends. Alors fais tout pour découvrir la vérité, ma puce, je compte sur toi. Bonne nuit ! Je t'aime.
- Bonne nuit, maman. Moi aussi je t'aime. " Je raccroche. Ma mère a raison, il faut que je mène l'enquête. Je vais m'accouder au balcon et regarde la lune. Un petit air frais me passe sur le visage. Je ferme les volets, pour éviter que le soleil nous réveille demain matin. Je retourne à mon lit, et jette un regard au visage paisible de Léon, endormi.
" Bonne nuit, Mon chou. J'espère que tu fais de beaux rêves... " Je souris, puis ferme les yeux. Peu à peu, je glisse dans le monde des songes.
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