Jour 3
Déjà le troisième jour et le centre est passé d'enfer à paradis. C'est incroyable la vitesse à laquelle ça a changé. Je me réveille le sourire aux lèvres. Léon le remarque presque aussitôt et ne peux s'empêcher de commenter :" Oh ! Notre Léonie préférée est de bonne humeur aujourd'hui ! " Je lève les yeux au ciel, amusée.
" Il faut croire que tu déteins sur moi ! " je réplique. Il semble faire un blocage.
" Ben quoi ? je demande, inquiète.
- Rien, tout va bien ! Je me disais juste qu'avant toi, je n'avais jamais été aussi heureux. On s'est influencé mutuellement. " Je souris à sa remarque.
" Aujourd'hui on commence par randonnée ! Prépare-toi à te faire écraser ! Je lance.
- Jamais ! Il n'y a pas plus rapide que moi !
- Tu as perdu d'avance ! " On se regarde un moment puis on éclate de rire. N'empêche, je vais le battre à plate couture. Anna se réveille à son tour et grogne depuis son lit :" Z'avez pas fini non ? Y en a qui essayent de dormir....
- Il est 8h00, je réplique sèchement, et le départ est à 8h20 ! Alors fiche-nous un peu la paix ! " Elle se tait.
Quelques minutes plus tard, nous sommes habillés et prêts à partir. Nous rejoignons la salle commune. Le directeur se trouve sur l'estrade au fond de la pièce, il distribue des bouteilles d'eau. Nous récupérons seulement deux bouteilles...Je n'aurais malheureusement pas d'eau pour cette randonnée. Léon me regarde tristement. Je le rassure :" Ne t'inquiètes pas, je ne bois pas souvent...." Il hoche la tête. Le directeur prend la parole, nous nous concentrons sur lui.
" Bon, tout le monde est prêt ? Parfait ! Alors on y va ! " Nous sortons tous dehors, en rang par deux. Je frissonne lorsque Léon prend doucement ma main. Il n'y a pas plus beau moment que celui-là. Nous prenons un petit sentier de terre, qui grimpe doucement dans les montagnes. Je regarde partout autour de moi, le paysage splendide. Mes yeux ne savent plus où donner de la tête. C'est si beau. Léon se trouve en tête du troupeau d'adolescents. Bon, je crois que je vais me faire défoncer, c'est vrai qu'il marche vachement vite. J'abandonne. Jamais je ne pourrais le rattraper. Il le remarque et revient sur ses pas.
" On avoue sa défaite ? Me demande-t-il, narquois.
- Oui, dis-je en regardant mes mains, tu es vraiment un expert.
- Bon, puisque la course est finie, je vais pouvoir profiter de la balade à tes côtés. " Il reste près de moi, un sourire satisfait sur le visage.
" Espèce de coquin ! " Il me sourit, moi aussi. J'aime bien la tournure que prennent les évènements. Nous marchons encore pendant une demi-heure, parlant de tout et n'importe quoi. Je me sens si bien. Mon souhait le plus cher serait que le temps s'arrête, et que je reste avec lui pour toujours. Le directeur se tourne vers nous et frappe dans ses mains.
" Allez, les mioches, c'est l'heure de la pause pique-nique ! " Léon s'éloigne pour parler avec des garçons de son âge. Je soupire et m'assois dans l'herbe encore humide de rosée. Je sors mon sandwich et croque dedans. Alors que je m'apprête à prendre une deuxième bouchée, une fille me l'arrache des mains.
" Eh !? " Je proteste. Devant moi se trouvent deux filles de mon âge. On dirait des sœurs jumelles, seule la couleur de leurs cheveux les différencie. L'une est rousse, l'autre a des cheveux aussi noirs que ceux de Léon. Elles ont toutes les deux un sourire mauvais aux lèvres.
" Pouvez-vous me donner mon sandwich ? Vous serez bien aimables ! " Je lance sèchement. Elles éclatent d'un rire mauvais.
" T'entends ça ? dit l'une en se tournant vers l'autre.
- Oh oui, c'est une petite marrante celle-là ! répond celle-ci.
- Bon, déjà, je m'appelle Éloïse, commence celle aux cheveux noirs, vers moi. Ensuite, tu peux dire " bye, bye " à ton sandwich, ma vieille ! " Et elle enfourne le casse-croûte dans sa bouche. Elle avale puis reprend :" Au fait, elle c'est Tiphanie " en désignant sa copine aux cheveux roux. Je les regarde haineusement. Elles ricanent, puis me lancent :" Et toi, t'es qui ? Qu'on mette un nom sur ta tronche de cake ! " J'ouvre la bouche, mais Anna surgit derrière moi et me devance :" Elle s'appelle Léonie, et vous avez plutôt intérêt à lui ficher la paix !
- Ah ah, très drôle. Qui a appelé Zorro, ici ? Je me rappelle pas l'avoir fait..., ricane Tiphanie.
- Moi non plus. Au fait, c'est quoi ton nom à toi ? Cendrillon ? Non parce qu'avec tes cheveux, je me demanderai presque..., renchérit Éloïse.
- Non, je m'appelle Anna. Et c'est pas comme si on était à la même table en Maths..., réplique ma pseudo amie.
- Oh... Anna Gohier ? Ben, maintenant on sait pourquoi ça sent le poisson pourri en Maths...., dit Éloïse.
- Hilarant. Votre âge mental frôle le - 10. Sur ce, AU REVOIR ! Et si vous vous approchez de plus d'un mètre de mon amie, je vous explose la tête avec mon index ! " Elle prend ma main et part d'un pas furibond. Je suis obligée de trottiner pour rester à côté d'elle tellement elle marche vite. Nous nous arrêtons derrière un arbre, près d'un groupe de garçons. Elle me donne un bout de son sandwich.
" Merci, Anna, pour m'avoir défendue, dis-je.
- C'était normal, et puis ce sont de vraies pestes. Mais ne te fais pas d'illusions, je t'en veux toujours. " Sur ce, elle me plante là, comme un poireau. Je soupire. Le directeur frappe une nouvelle fois dans ses mains, et nous reprenons la randonnée. Léon revient à côté de moi. Je lui raconte toute mon aventure avec Éloïse et Tiphanie. Il me regarde avec des yeux de chien battu.
" Quoi ? je demande.
- Je n'arrive pas à croire que je n'étais pas là pour te protéger..., dit-il, désespéré.
- On ne se connait que depuis trois jours, voyons ! Ne te sens pas obligé de veiller sur moi, on ne sait presque rien l'un de l'autre. " Il soupire. Je crois que j'ai dis quelque chose de mal. Le reste de la balade se passe dans un silence pesant. Je n'ose pas lui parler, ni lui prendre la main. Pourtant, cette idée me tente assez.
Une demi-heure plus tard, nous sommes de retour au centre, les pieds douloureux et le visage fatigué. Heureusement, la suite du programme est parfaite pour se reposer : une séance de cinéma ! Moi, j'aime bien l'obscurité de ces salles, c'est chaud et accueillant. Donc, après s'être changés, nous nous hâtons vers le premier étage du centre, là où se trouve la salle de cinéma. Le directeur nous attend, droit comme un pique devant la porte d'entrée.
" Bon, les mioches, aujourd'hui il y a le choix entre trois films, alors on va faire un vote à main levée.
- Que ceux qui veulent voir Miss Peregrine et les enfants particuliers lèvent la main !
- Ensuite, que ceux qui veulent voir le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates lèvent la main !
- Enfin, lèvent la main ceux qui veulent voir Percy Jackson ! " Ça va, j'adore les trois. Bon, c'est vrai, Miss Peregrine et les enfants particuliers est un peu glauque avec les yeux et tout... Mais c'est quand même un super film ! J'avoue, j'ai un faible pour le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates, et j'ai lu le roman, en plus !
" Bon, dix pour Miss Peregrine, quinze pour le cercle littéraire, et donc cinq pour Percy. Eh bien le cercle littéraire l'emporte ! Allez, entrez ! Ça va commencer... " YES ! On a gagné ! Je me précipite à l'intérieur de la salle. Je m'assois dans les derniers rangs, entre Léon et Anna. Mon ami me glisse à l'oreille :" Tu es contente de voir ça ?
- Bien sûr ! C'est une superbe histoire de livres et d'amour... Et ça se passe à la fin de la deuxième guerre Mondiale.
- Je sais bien, c'est mon film préféré !
- Moi aussi !!!! " Il me sourit. Les lumières s'éteignent et l'écran géant s'allume. Le film commence, à mon plus grand bonheur.
Le film se passe bien. A la fin, lorsque les deux personnages principaux s'embrassent, j'attrape doucement la main de Léon. Heureusement, l'obscurité cache la rougeur de mes joues. Mais quelques minutes plus tard, les spots se rallument et découvrent nos deux mains liées. Anna éclate de rire en constatant cela. Mon ami devient écarlate. Moi aussi. J'hésite à le lâcher, parce que ce moment est très agréable, bien que gênant. Finalement, je me défais de son étreinte, et sors rapidement de la salle. Ils n'ont même pas encore réalisé, et je me retrouve sur mon lit, dans le dortoir. Mon cœur bat à toute allure et ça n'a rien à voir avec la course que je viens de faire. Mais aussi, qu'est-ce qui m'a pris ? On se connait à peine ! Je soupire, décidément, je suis une cruche. Léon pousse alors la porte de la chambre, vite suivit par Anna. Je cache mon visage dans mes mains. Idiote, idiote, idiote. Léonie, tu es une idiote. Voilà ce que je me dis. Une grosse idiote. Je sursaute, lorsque je me rend compte que Léon s'est assis sur mon lit. Je me recroqueville un peu plus sur moi. Je marmonne :" Je suis désolée, d'accord ? " Ma voix s'est brisée sur la fin. Il ne va quand même pas m'en vouloir pour... UNE MAIN ?!? C'est le silence total. La seule chose que j'entends, ce sont les battements de mon cœur et la respiration de mon ami. Finalement, il se lève et nous lance :" Je vais prendre l'air. " Je le laisse partir. Au fond de moi tout se brise. Donc, il m'en veut bien pour une main. Génial, je suis de retour en enfers.
∥ Tard dans la nuit ∥
Je ne trouve pas le sommeil. Je vois les visages de Éloïse, Tiphanie, Anna et Léon tourner dans ma tête à une vitesse folle. Surtout celui de Léon, d'ailleurs. Ce garçon est spécial, je le sens jusqu'au plus profond de moi. Il me faut juste trouver pourquoi. Anna se lève alors de son lit et vient s'assoir à côté de moi. Elle me regarde dans les yeux, et semble très sérieuse.
" Léonie.... Il se passe quelque chose avec Léon ?
- Je ne sais pas, réponds-je.
- En tout cas, fais tout pour lui, si tu l'aimes. Ah, et....
- Oui ?
- Il vient juste de sortir de la chambre.
- QUOI ??? " Je me lève d'un bond. En effet, son lit est vide. Je me rue en dehors de la chambre, dévale les escaliers vitesse grand V et me précipite dans le jardin. Il se trouve sur un banc, la tête dans les genoux.
" Écoute, si tu m'en veux parce que j'ai pris ta main, je suis désolée, dis-je en m'asseyant à côté de lui.
- Non, je ne t'en veux pas du tout !
- OK..... Alors qu'est-ce qu'il t'arrive, au juste ? " Il soupire. Il garde toujours sa tête dans ses mains, résultat je ne vois pas l'expression de son visage. Je le prends soudainement dans mes bras. Il sursaute violemment, mais me rend mon étreinte. Il me lâche finalement, et je lui souris doucement. Je me lève et lance en partant :" Tu ferais mieux de venir te coucher, ou tu risques d'attraper froid ! " Il m'agrippe le poignet pour m'empêcher de m'en aller.
" Léonie je.... Je voudrais qu'on parle un peu. Qu'on apprenne à se connaître, comme tu le dis si bien.
- Très bien. " Je retourne m'asseoir à côté de lui.
" Parlons un peu de la famille. Vas-y, je t'écoute, me dit-il.
- Oh... Ben, mes parents sont divorcés, du coup je suis une semaine chez mon père, une semaine chez ma mère. En fait, je n'aime pas beaucoup ma vie. J'alterne entre un appartement froid et vide, et une immense maison où règne le pire chaos du monde.
- Comment ça ?
- Eh bien, mon père s'est remarié. Avec une vraie diablesse. Je la déteste. Elle me prend pour un bébé sans importance et me fait vivre un enfer. En plus, elle a un fils. Un démon, celui-là. Il invente toujours un tas de pièges qu'il pose partout dans la maison, dans le seul but de me rendre la vie impossible. Bref, lorsque je suis chez mon père, je prie pour aller chez ma mère, et quand je suis chez elle, je regrette la maison de mon père. Un calvaire quoi !
- Mais c'est horrible ! Et sinon, ta vie en dehors de chez toi ? Tu dois bien avoir des amis ? Ou... un petit ami ? reprend-t-il avec une voix un peu plus désespérée.
- Non. Je passe mon temps à lire et à écrire. Je n'ai aucun ami, et encore moins de petit ami ! Les seuls moments cools de ma vie, où je me sens moi-même, c'est lorsque je suis au club chorale du collège, où à mon cours de flûte le mardi soir...
- Ma pauvre. " Il passe un bras autour de mes épaules. Mon moral remonte d'un seul coup. Il me réchauffe de l'intérieur.
" Et toi ? dis-je pour changer de sujet, raconte-moi tout !
- Oh bah.... Il y a deux ans ma mère est partie à New York pour son travail...on ne l'a jamais revue. Du coup je vis seul avec mon père.
- Et tu as une petite amie ? Ou des amis ? Des gens que tu aimes bien ?
- Non, rien de tout ça. Enfin... j'avais une meilleure amie, m-mais... Elle a d-déménagé en A-Angleterre....
- Ah. " Nous continuons de parler pendant des heures et des heures, si bien qu'à la fin, nous connaissons chaque détail de la vie de l'autre. Comme l'histoire hallucinante de son anniversaire des neuf ans...
" Maintenant, on devrait vraiment aller dormir, ou on va être épuisés demain ! je m'exclame.
- Oui, tu as raison. " Il me suit jusqu'au dortoir. Je m'allonge dans mon lit et m'endors, en repensant à notre conversation.
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