Chapitre 21




Ses joues se mirent à fourmiller sous la chaleur des doigts du mafieux. Bella tendit son bras vers la droite pour poser le verre de champagne sur la petite table. Au premier essaie celle-ci faillit tomber mais elle la rattrapa vivement en la poussant plus loin sur la petite table.

Elle ignorait si c'était la coupe de champagne qui la rendait plus confiante mais elle voulut saisir cet élan et ne surtout pas reculer.

Le cœur battant à la chamade elle prit sa main qui s'attardait sur sa joue et l'abaissa pour la toucher.

La première sensation en touchant le revers de sa main lui envoya des frissons indescriptible.

  - Vos mains ont l'air très abîmées, lui dit-elle en touchant l'intérieur de sa paume.

  - Je suis manuelle.

Elle lâcha sa main, les doigts brûlants.

  - Vous avez des tatouages, que représentent-ils pour vous ?

  - La date où j'ai repris le flambeau laissé par mon père, répondit-il d'une voix qui avait perdue une peu de gaité comme si ce souvenir était important pour lui. Une date tatouée en chiffres romains et sur l'autre, l'année où notre mafia a émergée de l'ombre et s'est créée.

  - Rien d'autre ?

  - Rien d'autre ma belle, pourquoi ? À quoi vous attendiez-vous ? À un homme bardé de tatouages avec des bagues en or à tous les doigts et un cigare à la bouche ?

  - Ça m'a l'air d'être très cliché, répondit Bella en esquissant un léger...voire imperceptible sourire.

  - En effet, mais c'est souvent l'idée que les étrangers ont de nous. Ce n'est pas le cas.

  - Vous êtes sanguinaires en revanche.

  - Qu'est-ce qui vous fait dire ça ? Parce que j'ai tué les hommes qui voulaient vous vendre ? Vous pensez qu'ils méritaient d'être en vie ?

  - Je n'ai pas dit ça, seulement vous avez l'air de faire ça avec une telle facilité, sans même vous poser des questions.

  - Je suis rapide lorsqu'il s'agit de peser le pour et le contre. Ce soir-là, le choix a été rapide et une évidence pour moi.

  - Est-ce que...est-ce que vous auriez été différent avec moi si je pouvais voir ?

  - Oui, répondit-il si vite qu'elle cilla légèrement. J'accorde beaucoup d'importance à ma discrétion. Beaucoup en Italie ignorent même le visage que je porte, d'autres me connaissent sous le nom de ma mère et n'ont aucune idée à qui ils s'adressent lorsqu'ils me confient leur plus sombres secrets.

  - Mais l'homme du restaurant...

  - Ils font partie des personnes qui ont obtenu mon respect et ma confiance.

  - C'est comme un jeu...sadique...

Il poussa un sombre sourire.

  - En effet, dit-il gravement.

Il échangea en italien avec ce qui semblait être un serveur.

  - Tenez, une autre coupe, mais cette fois-ci ne la gâchait pas inutilement.

  - Je peux vous poser une autre question ? Demanda-t-elle après avoir saisi la coupe de champagne.

  - Je vous en prie tesoro.

Elle déglutit péniblement parce qu'elle redoutait la réponse.

  - Qu'avez-vous fait de la bonne sœur ?

  - Vous voulez une réponse rapide ou la version longue qui pourrait ternir votre soirée ?

Elle prit une longue et difficile inspiration.

  - Je prends risque d'écouter la version longue.

  - Ce n'était pas une bonne sœur, commença-t-il alors et sérieusement. Elle s'est infiltré dans cette église en prenant cette apparence. Le guide prends des photos des touristes féminines, il les envoie à un homme chargé de les choisir ensuite il leur propose le gîte en flattant l'accueil de l'église et les emmène là-bas. Une fois sur place cette femme achève la livraison. Elle s'assure que les jeunes femmes soient suffisamment en confiance pour que le lendemain elle monte dans une voiture accompagné d'un autre guide qui n'en est pas un. La suite, vous la connaissez malheureusement.

Un tremblement perceptible l'empêcha de respirer.

  - Alors...il y en a eu d'autres...

  - Oui malheureusement.

Elle exhala un soupir tremblant en levant une main tremblante jusqu'à son oreille pour balayer une mèche inexistante.

  - Votre cécité a joué un rôle vous concernant, reprit-il sans une once d'aménité dans la voix. Vous étiez à leur yeux la plus grosse vente jamais réalisé à ce jour. Parce que votre handicap représentait un atout pour eux. Maintenant j'ai les noms qui m'intéressent pour terminer mon travail et quant à la femme, je l'ai étranglé à mains nues jusqu'à ce qu'elle pousse son dernier soupir.

Le silence qui s'ensuivit lui glaça le sang et elle entendit au son de ses respirations agacées qu'il aurait préféré ne jamais lui dire.

  - Est-ce que ça va ?

  - Ou...oui, bredouilla-t-elle en cherchant son regard malgré qu'elle ne pouvait pas le voir. Merci de me l'avoir dit.

  - Je regrette pourtant de vous l'avoir dit.

  - Pourquoi ? Je suis capable d'entendre la vérité, et vous n'avez pas manqué de le faire récemment pour me faire peur.

  - Seulement maintenant, je n'ai plus envie de vous faire peur sauf en cas de nécessité urgente.

  - C'est bon à savoir.

Sa grande main se posa aussitôt sur son bras qu'il encercla avec ses doigts virils.

  - Le courant passe mieux entre nous, c'est indéniable cara, seulement essayez de ne pas oublier quel genre d'homme je suis pour éviter les surprises fâcheuses jusqu'à ce que je vous rendre votre liberté.

  - C'est inutile de me le préciser, chaque jour qui passe votre aura sombre prend le soin de me le rappeler.

Bella ne voulait pas lui montrer à quel point il l'intimidait et elle ne voulait surtout pas montrer des faiblesses autres que celles qu'elle avait ressenties jusqu'à maintenant.

   - Parfait mon ange, lui dit-il d'une voix rauque.

Sans desserrer sa prise sur son bras, il l'invita à se lever.

   - Où allons-nous ?

   - Nous allons dîner dans le restaurant situé à l'étage supérieur, expliqua-t-il en la guidant. Vous avez bu, mais rien mangé pour contrer un peu les effets de l'alcool.

    - Je vais bien, assura-t-elle en terminant sa coupe de champagne.

Il lui arracha la coupe de la main et elle l'entendit la poser sur un plateau.

    - Comme je le disais, vous avez trop bu, il est temps de ralentir.

    - Vous savez dans le fond que c'est faux, il s'agit seulement d'une demie coupe de champagne, vous êtes en train de surprotéger votre captive Signore Di Marzio.

Sans avoir le temps de comprendre ce qu'il se passait, Bella se retrouva plaquée contre un mur tapissé. Bien qu'il s'était montré doux dans son action, l'endroit où ils se trouvaient paraissait aussi sombre que l'était l'écran projeté devant ses yeux. La musique étouffée, le silence et l'absence de personnes lui indiquèrent qu'ils se trouvaient dans un couloir.

    - Principessa, ma théorie selon laquelle vous êtes légèrement pompette vient de se confirmer, car votre audace va de paire avec l'élan enjoué qui vous tient depuis plus de dix minutes maintenant.

La respiration très proche d'être saccadée, Bella secoua de la tête imperceptiblement en humant à contrecœur son parfum qui la troublait.

  - Quand je suis effrayée ça ne va pas, lorsque je suis un peu trop enjoué c'est mal et quand je tente de m'enfuir c'est pire, énuméra-t-elle en rejetant la tête en arrière tout espérant capter son regard. Que dois-je faire monsieur Di Marzio pour vous satisfaire ?

  - Ne pas changer ce que vous êtes en essayant d'annihiler ce qui fait de vous une jeune femme sans égal.

Cette réponse dépassait ses propres pensées et elle se sentit mal, perdue et un peu idiote. Elle se raidit légèrement lorsque ses doigts si chauds se mirent à descendre sur ses épaules.

  - Votre silence est très intéressant mia cara, commença-t-il d'une voix amusée. Aurais-je touché un point sensible ?

  - J'ai faim, où se trouve le restaurant ? dit-elle rapidement en s'empressant d'éluder sa question par une autre.

Les yeux baissés, le cœur battant au rythme étouffé de la musique, Bella éprouva un immense trouble doublé par un sentiment indescriptible qui ne voulait plus la quitter.

  - Venez...

Il lui prit la main et un profond soulagement s'empara d'elle lorsqu'il l'entraîna dans une salle à l'étage supérieur et qu'un vent assez doux se posa sur ses épaules nues.

  - Sur la terrasse ?

  - Vous préférez à l'intérieur ? Vous avez froid ?

  - Non, murmura-t-elle avec un léger sourire. C'est parfait.

Il la guida avec une précaution presque exagérée jusqu'à une banquette sur laquelle elle se laissa glisser. Tout semblait hors de la réalité, mais aussi hors de contrôle. Une voix continuait de lui hurler qu'elle devait rester prudente et qu'il ne fallait pas qu'elle oublie qui était cet homme et ce qu'elle représentait pour lui.

Une autre voix plus présente lui murmurait simplement de se laisser conduire hors de sa zone de confort et d'explorer les profondeurs de cette vie différente de la sienne.

Elle tenta de réfréner ces deux voix qui essayaient de la perdre.

  - Est-ce que tout va bien cara ? L'effet de l'alcool est-il en train de se dissiper ?

  - Oui, je crois que oui, répondit Bella en quittant de force sa torpeur.

  - Est-ce qu'il y a quelque chose que je devrais savoir princepessa ? S'enquit le mafieux en se glissant à côté d'elle.

  - Je m'égare, je crois que c'est mal, dit-elle honnêtement.

  - C'est mal de se sentir de plus en plus à l'aise avec son geôlier c'est ça ? Un geôlier séduisant et hors du commun.

Elle aurait pu s'offusquer par son arrogance, mais elle préféra en rire tout en tournant la tête vers lui.

  - Comment faites-vous pour être à la fois détestable et séduisant ?

  - C'est tout un art tesoro, chuchota-t-il d'une voix énigmatique. Et encore vous ne pouvez pas me voir, ajouta-t-il d'une voix gutturale. Vous avez dit que j'étais séduisant cara, je note.

  - C'est l'impression que vous donnez et Mirella m'a dit que vous étiez un homme séduisant donc je suppose que c'est vrai. Cependant ça n'enlève pas le fait que je vous crains et je dois continuer à le faire. Je ne veux pas de mauvaise surprise.

Ses dires firent naître un silence désagréable.

  - Les mauvaises surprises sont engendrées par de mauvaises décisions, finit-il par dire sur un ton plus sérieux. C'est ce que vous avez fait au départ, mais plus maintenant n'est-ce pas cara hum ?

  - Je devrais vous détester...vous haïr de toutes mes forces...

  - Il est difficile de me détester tesoro, très difficile...

Massimo brûlait d'écraser ses lèvres contre les siennes et se retenir devenait de plus en plus pénible et frustrant. Ça aurait été n'importe quelle autre femme, il ne se serait pas retenu, mais avec elle c'était différent. D'abord parce qu'elle était jeune, mais aussi parce que vouloir l'embrasser lui donner l'impression désagréable d'abuser de sa condition.

Il eut un rire amer en se passant une main dans la barbe. Depuis quand le grand Massimo Di Marzio se préoccupait de ce genre de détails après avoir passé une grande partie de sa vie à s'emparer de pouvoir et de ce qu'il voulait sans se soucier des sentiments d'autrui ?

  - J'ai dit...quelque chose qui...

  - No cara, dit-il vivement en essayant de se reprendre avant de franchir la limite des interdits. J'étais seulement en train de réfléchir.

Ses lèvres irrésistibles se fermèrent et elle remit sa tête droite en regardant devant elle, l'air perdu.

La limite...elle était déjà franchie et Massimo le savait, cependant il y en avait une autre bien plus agréable et dangereuse à franchir.

  - Vous réfléchissez à quoi ? Si ce n'est pas trop indiscret.

Lui dire la vérité ou mentir ?

Lui qui d'ordinaire ne mentait jamais.

  - Je réfléchis à un moyen de vous résister, dit-il d'une voix rauque. Parce que c'est mal.

La jeune femme se pinça les lèvres en posant sa main sur la table, l'expression étrangement calme et presque indéchiffrable.

  - Oui...ça l'est, murmura-t-elle d'une voix qui souffrait d'être convaincante.

Une ébauche de sourire se dessina sur la bouche de Massimo mais se dissipa très vite car maintenant il savait que sa jeune captive n'était pas insensible à son charme, mais cependant consciente que c'était mal.

Et ce fait aiguisa un peu plus son désir presque vorace de la posséder.

Plus tard dans la nuit, c'est dans ses bras qu'elle reposait après s'être endormie dans la voiture.

Massimo la déposa sur le lit et lui ôta ses chaussures avant de rabattre les draps sur elle.

  - S'il vous plaît, dit-elle d'une voix endormie. Est-ce...est-ce que vous voulez bien fermer la fenêtre...je ne suis pas en sécurité...

Massimo fléchit sur ses genoux pour se mettre à hauteur du matelas.

  - Vous êtes en sécurité.

  - No...non, je ne le suis pas, dit-elle les yeux fermés. Hier, je suis presque sûre que quelqu'un m'observait et ce n'était pas vous. Je vous en prie...

  - Qui ? Qui était là ? S'enquit Massimo sur un ton qui exigeait une réponse immédiate.

Seulement la jeune femme tomba dans un profond sommeil en le laissant sans réponse et envahi de doutes.

Est-ce qu'elle rêvait ou était-ce la réalité ?


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