Chapitre 20
Avant même que la voiture s'arrête Bella percevait déjà les bruits très intenses hors de l'habitacle. Traversée par une écrasante angoisse, Bella se tourna en direction du parfum très prononcé et secrètement agréable que portait le mafieux.
- Je crois sincèrement que c'est une très mauvaise idée, lui dit-elle en tirant sur les coutures de la robe.
Massimo détacha sa ceinture en prenant le soin de ne pas effleurer son corps par crainte qu'elle se braque et veuille partir avant même d'être entrée.
Il connaissait Mirella depuis tant d'années qu'il restait encore surpris par son attitude depuis qu'il retenait cette jeune femme captive. Il ignorait précisément ses intentions et bien qu'elles ne semblaient pas malveillantes, Massimo jura en italien quand il ne put résister à la tentation de baisser les yeux sur la robe qu'elle portait.
Mirella avait-elle voulu la rendre désirable pour le faire réagir ou pour qu'elle soit l'objet d'une attention toute particulière ce soir ? Il l'ignorait, mais cette robe avait littéralement transformé la jeune femme en une créature autre que celle qu'il connaissait déjà.
Fléché par un désir logé en plein cœur, il lui fallut plusieurs et interminables secondes pour le dissiper.
- C'est une excellente idée, répondit-il sur un ton guttural qui le força à reculer. De toute façon je n'ai pas l'intention de vous abandonner. Je ne vous lâche pas de la soirée.
Il lui prit la main par la force et le regretta aussitôt parce qu'elle ne dégageait aucune intention qui laissait supposer qu'elle voulait s'enfuir.
Sa bouche couverte d'un rouge à lèvres de couleur vermeil acheva d'exacerber ce désir constant et presque douloureux.
Pour s'en échapper, il quitta la voiture en l'emportant avec lui et prit soin de ne pas jeter un autre regard sur sa robe rouge violacé et sombre. Une robe au col bateau en dentelle qui épousait ses fines épaules pâles et presque cireuses.
- Deux marches à monter tesoro, la prévint-il en l'invitant à s'appuyer sur sa main.
- J'aurai dû prendre ma canne pour me déplacer.
- Au risque d'attirer les curieux ?
- Vous l'ignorez sans doute mais je n'ai jamais été en boite de nuit de ma vie et encore moins dans un bar.
- Vous m'auriez fait savoir du contraire je vous aurais traité de menteuse, répliqua Massimo en faisant signe à l'agent de sécurité de les laisser passer par la porte dérobée. Vous êtes là pour vous détendre et même si ma demande paraît compliquée si on prend en compte que vous ne voyez rien, je vous demande de faire un effort.
- Vous demandez, vous ordonnez, énuméra la jeune femme un peu agacée. Est-ce qu'il y a une chose que vous ne contrôlez pas Signore Di Marzio ?
Il s'arrêta brutalement en souriant.
- Oui princepessa, je ne contrôle pas mon humeur.
Des picotement sur le visage, Bella mesurait seulement maintenant l'ampleur et les conséquence de son acceptation à venir dans ce club. La mafieux lui tenait la main fermement et la chaleur de sa paume n'était pas seulement une immense source de stress, elle provoquait aussi en elle ce même trouble répété qui lui donnait l'impression de dévier du bon chemin.
- Je ne vous lâche pas de la soirée, ajouta-t-il d'une voix qui provoqua en elle une vague de frissons.
Elle hocha de la tête en se passant la langue sur ses lèvres sèches.
Sa main comprima la sienne et elle se laissa guider au rythme très intense de la musique. À chaque obstacle il ne la prévenait pas, mais agissait en la hissant légèrement par la taille ou en la guidant tout simplement.
Un brouhaha très différent de ce qu'elle connaissait commença à envahir son ouïe à tel point qu'elle craignait de ne plus pouvoir l'entendre s'il lui parlait. C'était de la folie...de la pure folie et le pire c'est qu'elle en était pleinement conscience. Elle se laissait tenir la main par cet homme qui tuait de sang froid, qui l'avait enlevé et terrifiée à de nombreuses reprises. Pourtant elle ne pouvait pas nier l'existence de cet acte qu'il avait commis pour la sauver. Perdue dans les affres de l'angoisse Bella leva sa main libre pour trouver son bras et posa sa paume de main dessus.
Elle n'avait que lui, il était son seul repère.
- Alors là, jamais je n'aurai pensé que tu l'amènerais ici, lança une voix qu'elle reconnut alors que la musique semblait s'estomper.
- Pourquoi ? Il est déconseillé aux aveugles de sortir se détendre un peu ? Répliqua le mafieux. Venez vous asseoir Bella.
Elle buta contre une table et sentit une autre main qui n'appartenait pas au mafieux se placer dans son dos.
- Non, elle peut se détendre, en revanche tu débarques avec en la tenant par la main et on peut dire que cette arrivée après une semaine d'absence n'est pas passée inaperçue.
- Je suis son nouveau guide, répondit Massimo en s'installant à côté de la jeune femme. On ne se quitte plus elle et moi.
Bella tira sur sa robe puis tourna la tête vers l'odeur de parfum sucrée.
- Soyez sincère, comment est la robe ? Ai-je l'air d'une...
- Elle est parfaite et très séduisante, la coupa Nikki sincèrement. Un peu trop séduisante même, mais d'une élégance parfaite.
Massimo fit signe au serveur de s'approcher pour passer commande mais surtout pour éviter de regarder sa nuque gracile exposée là où quelques mèches de son chignon s'échappaient.
- Qui a choisie cette robe ?
- Mirella.
Nikki lui lança une regard d'avertissement et il n'en fallut pas plus pour le mafieux pour sortir de ses gonds.
Il se leva doucement pour ne pas alerter la jeune femme et fit signe à Nikki de le suivre.
- Restez ici mia cara, je reviens immédiatement.
Elle exhala un petit soupir tremblant d'inquiétude à l'idée d'être seule, mais acquiesça.
- Arrête ça immédiatement Nikki ! Gronda-t-il une fois certain d'être assez éloigné.
- Pourquoi tu l'as amené ici Massimo ?
- Parce qu'il n'est pas question que je la laisse seule à la villa, dit-il entre ses dents. Pourquoi cela t'inquiète tant ?
- Peut-être parce que ton ex est dans les parages et qu'elle pourrait s'en prendre à elle.
- Alors c'est seulement ça ? S'étonna Massimo en lâchant un rire bref et tranchant. Moi qui pensais que c'était moi le problème et que tu craignais que je pervertisse sa belle âme.
- Il y a un peu de ça aussi, avoua-t-elle en croisant les bras. Elle est différente Massimo et suffisamment terrifiée pour t'avertir que...
- Cette jeune femme est suffisaient grande pour savoir ce qu'elle veut ! La coupa-t-il avec véhémence. Tu l'as considère de la même façon qu'elle est considéré au centre dans lequel elle vit depuis l'âge de huit ans. Une gamine incapable de prendre ses propres décisions et c'est avec ce genre de raisonnement tel que le tien qu'elle s'est jetée dans un voyage périlleux et qu'elle a voulu se prouver des choses qu'elle n'était pas encore prête à accomplir seule.
Il dévisagea Nikki froidement puis dévia son regard sur elle.
- Je ne veux pas la laisser seule, et tant que je n'aurai pas mis la main sur Domizio Danti et ses hommes elle me suivra où que j'aille.
- Et ensuite ? Une fois que tout sera terminé ?
- Alors je tiendrai parole en la ramenant là où est sa place.
Nikki affaissa les épaules en décroisant les bras.
- Elle a le droit d'apprendre à vivre et à dépasser ses peurs avec quelqu'un qui est là pour la guider. Elle est handicapé, pas morte Nikki.
- Ce n'est pas ça qui m'inquiète, mais plutôt toi, lâcha Nikki en le regardant droit dans les yeux. Il est évident que tu ne restes pas insensible à son charme, sauf que là et je le répète, c'est différent. Un tueur sadique et une aveugle, d'après toi quel mélange ça va donner ?
Massimo fit mine de réfléchir.
- Je ne sais pas, mais ça serait intéressant de savoir quel sera son goût.
- C'est ta captive Massimo...
- Et je suis son geôlier, acheva le mafieux d'une voix menaçante, le regard percé d'une lueur d'avertissement. Je ne laisse personne se mêler de ma vie, ne l'oublie pas.
- Il a raison, intervint Allegra en se plaçant à côté de Nikki. Le patron sait ce qu'il fait avec la fille. Tu ne devrais pas t'inquiéter autant.
- Je ne veux que cette fille souffre.
- Elle souffre déjà, répliqua Massimo sombrement. Bien avant de s'envoler pour l'Italie, elle souffrait déjà. Parce qu'elle est piégée dans cette obscurité et n'a aucun moyen d'en sortir.
Sur ces mots, Massimo s'éloigna pour rejoindre la jeune femme qui n'avait pas bougé de position depuis son départ. Droite, les mains sur les cuisses, elle dévisageait devant elle, sensible au moindre bruit inhabituel.
- Je suis de retour.
- Est-ce que tout va bien ? J'ai l'impression que ma présence n'est pas souhaitée.
- Non, ce n'est pas ça, s'empressa-t-il de lui dire sans la regarder. Nikki joue seulement la maman poule. Elle veut vous protéger.
- De vous ? Elle veut que je reste sur mes gardes.
Il tira une cigarette de son paquet et l'alluma.
- Essentiellement, mais je suppose que vous n'avez pas besoin d'elle pour vous l'être déjà dit en pensée ?
Il fixa ses beaux yeux azur se perdre sur lui où plutôt sur son épaule.
- J'ai...j'ai fait un choix, et j'espère ne pas le regretter.
- Perfecto, conclut-il en saisissant la coupe de champagne pour la lui donner.
Elle trempa ses lèvres dedans puis commença à boire le liquide ambré sans s'arrêter.
- Doucement cara, prévint-il en appuyant son index sur le pied du verre pour la stopper. Quelque chose me dit que vous n'avez pas l'habitude de boire.
- Je n'ai l'habitude de rien jusqu'a présent, confia-t-elle en inspirant profondément.
- Que faisiez-vous au centre ? Vous lisez le braille ?
- Des activités, des exercice pour apprendre à me débrouiller seule et oui je lis le braille. J'ai mis assez longtemps pour apprendre à lire de cette façon.
- Des sorties ? Un petit-ami ?
- Quelques sorties en groupe, mais sans plus, et non je n'ai pas de petit-ami et oui je ne suis plus vierge.
Massimo leva un sourcil à la fois étonné et ravi par cette révélation très surprenante.
- Ah oui ? Et puis-je savoir pourquoi me le dire ?
- Parce que j'ai comme l'impression que c'est ce genre de questions que l'on se pose en me voyant. Je suis certaine que vous, vous l'êtes posée. Une pauvre jeune fille aveugle qui n'a jamais quitté son centre pour malvoyants et qui n'a sans doute jamais embrassée un homme de sa vie.
Massimo s'était effectivement posé la question, et mentirait en disant qu'il n'était pas surpris et curieux de savoir maintenant que ce n'était pas la cas.
- Maintenant vous ne pouvez plus reculer mia cara, lui dit-il en se carrant confortablement au fond de la banquette en allongeant son bras sur le haut de celle-ci. Je veux connaître les détails de cette...intéressante confidence.
- Il n'y a rien à dire, dit-elle en haussant des épaules l'air maussade. Cette...expérience était fortement désagréable et je ne veux plus jamais recommencer.
Bella regrettait amèrement de lui avoir dit et ne comprenait pas pourquoi elle l'avait fait. Le champagne lui était monté à la tête un peu trop vite, songea-t-elle en serrant la coupe entre ses doigts avec honte et regret mêlés. Bien d'autres avant lui avait établi cette conclusion trop hâtive en découvrant sa cécité. Pour certains, avec leur esprit fermé, voyaient en elle et les autres malvoyants une vie déjà arrêtée et dont les possibilités infinies pour les voyants n'étaient pas accessibles pour eux.
Trop longtemps elle s'était persuadée que c'était le cas et en se plaçant ces interdits, Bella avait fini par vouloir les contourner ou bien même les dépasser. Et chaque fois, cela avait tourné au fiasco.
- Vous en avez trop dit ma belle, je suis trop curieux maintenant, dit-il en la sortant brutalement de sa torpeur. Je suis un homme ouvert d'esprit, n'ayez pas peur de vous exprimer.
- C'était avec un jeune homme du centre, je n'ai pas aimé et je comprends pas ce que les humains trouve de si bien dans le sexe. C'est douloureux et...mon dieu ça suffit, j'ai bu trop de champagne et je...ne devrais pas parler de ça avec...vous.
- Pourquoi tout de suite une femme se sent mal à l'aise de parler de ça ? Il s'agit de la nature ni plus ni moins.
- C'est très personnelle...
- Mais c'est vous qui avez ouvert la boîte de pandore princepessa, je ne fais que fouiller à l'intérieur maintenant.
Sa voix très suave la fit frémir.
- Vous avez eu une très mauvaise expérience tout simplement, reprit-il tout proche de son visage...si proche qu'elle pouvait sentir son haleine alcoolisée. Le sexe est le plus divin des aphrodisiaques et si vous voulez je veux bien me porter volontaire pour vous faire ressentir ces plaisirs interdis.
Empourprée violemment, le cœur battant à tout rompre, Bella émit un petit rire nerveux.
- Vous n'êtes pas sérieux ?
- Je ne peux pas vous laissez mourir sans avoir eu un orgasme au moins une fois dans votre vie mia cara...ça serait un crime...dit-il en prenant une voix faussement sérieuse.
Sans les voir, elle devinait ses yeux noirs enflammés par des lueurs amusées et diaboliques.
- Oubliez cette conversation que j'ai moi-même provoqué monsieur...Di Marzio, bredouilla-t-elle en essayant péniblement de masquer son embarras. Je suis peut-être de sortie, mais je n'oublie pas pour autant ce que je représente à vos yeux et ce que vous êtes pour les miens.
- À la bonne heure ! Je suis si heureux de vous l'entendre dire.
Il se moquait gentiment d'elle, et cela eut bon de l'irriter.
- Alors tesoro, de quoi voulez-vous parler en dehors de votre vie sexuelle palpitante.
Bella leva sa main pour atteindre son visage si proche du sien et traça une ligne jusqu'à ses lèvres pour lui ôter la cigarette de la bouche.
Elle la jeta dans sa coupe de champagne pour l'éteindre et releva la tête dans sa direction.
- De votre santé par exemple, répondit-elle avec bravade.
Il eut un rire de gorge qui la fit frissonner.
- Ma tendre et douce captive, chuchota-t-il en traçant à son tour une ligne sur son visage, plus précisément le long de sa mâchoire. Vous êtes décidément pleine de surprises qui promettent d'être agréable...
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