Chapitre 14 : Le dîner

Dans la pièce au fond du couloir, Alma et Luke s'efforçaient de tenir debout, face au président qui les fixait, assis sur la chaise. Ils sentaient leurs jambes trembler, leurs muscles incapables de tenir sans les faire souffrir. Depuis son arrivée dans la cellule, de nombreux jours étaient passés, un supplice interminable pour la mexicaine qui avait déjà maigri. Peu à peu, elle ressemblait à Luke. Mais elle n'avait pas cédé. Pourtant, une nouvelle fois, ses jambes se dérobèrent, Alma tomba à genoux et reçut presqu'aussitôt un coup de matraque électrique de la part du président qui la força ensuite à se relever.

-Je ne peux pas... marmonna-t-elle, en larmes.

-Bien sûr que tu peux. Lève-toi, Alma.

Secouée par un sanglot, elle essaya de lui obéir, mais elle n'avait plus la force de se relever. Elle s'écroula à nouveau. Trevor soupira. Il donna un puissant coup de pied à la mexicaine qui hurla sous la douleur. Elle se tint aussitôt le nez dont coulait déjà une grande quantité de sang.

-Ramenez-la. J'en ai assez de perdre mon temps avec eux.

Les deux gardes traînèrent alors la mexicaine jusqu'à sa cellule puis retournèrent dans la pièce au fond du couloir. Alma resta étendue sur le sol, les mains sur son nez ensanglanté, en larmes. Elle-même ne savait pas comment elle endurait cette torture, depuis tout ce temps. Elle se demandait si parler ne serait pas la meilleure chose à faire, pour que cela cesse, pour qu'elle revoie son fils. Elle n'en pouvait plus de tous ces supplices à endurer, encore et encore, sans jamais voir son fils.

Finalement, le président remonta, quitta les sous-sols. Cependant, Luke ne revenait pas dans sa cellule, les gardes restèrent dans la pièce avec lui. Ils avaient des ordres. Alma entendit plusieurs fois un cri lointain. Elle n'en pouvait plus de toute cette souffrance. Cela devait prendre fin. Elle devait parler. Elle devait passer un accord avec le président pour que la torture cesse. Ainsi, la mexicaine essayait de réfléchir afin de trouver un accord qui serait bénéfique pour elle et Luke. Elle devait se montrer en position de force pour réussir à passer un accord positif pour eux. Elle ne pouvait pas continuer à endurer toute cette souffrance. De plus, elle avait peur pour Luke qui semblait toujours au bord de la mort, avec son corps squelettique et son teint livide. Tous deux ne tiendraient pas beaucoup plus longtemps.

Soudain, des pas légers résonnèrent, dans les escaliers. Des pas furtifs, discrets, prudents. Alma ne les reconnaissait pas et tendit l'oreille, interpellée. Les pas se rapprochaient, rapidement. Finalement, une grande femme s'arrêta devant sa cellule. Elle lui était inconnue, jeune, belle et d'origine arabe.

-Alma Sanchez ?

-Oui, répondit cette dernière, surprise.

-Je connais des gens qui vont vous sortir d'ici, annonça la jeune femme à voix basse.

Alma puisa dans ses forces afin de se hisser jusqu'aux barreaux, pour être proche de la jeune femme qui se baissa pour être à sa hauteur. Elle avait l'air si gentille et si déterminée.

-Je n'ai pas beaucoup de temps, alors nous devons faire vite. Alma, dites-moi tout ce que vous savez sur votre mari, pour que nous le retrouvions et l'aidions à terminer ses recherches. Il doit faire tomber le président.

-Comment je peux savoir si ce n'est pas un piège ? demanda la mexicaine, méfiante.

-Vous ne pouvez que me faire confiance. Je connais des gens, qui savent aussi pour Luke. Ils veulent vous faire sortir tous les deux. Et pour ça, nous avons besoin d'aider Victor à réunir toutes les preuves dont il a besoin.

Salima sortit un enregistreur audio. Elle surveilla le couloir avant de l'approcher d'Alma en l'actionnant. Bien que faible et méfiante, la mexicaine n'avait pas d'autre choix. Après tout, cela n'aiderait peut-être même pas à trouver Victor. Et cette jeune femme lui semblait de confiance. Ainsi, Alma donna toutes les informations dont elle se souvenait à Salima. Cela faisait plusieurs jours qu'elle se les remémorait afin d'être certaine ne pas les oublier, au cas où elle voudrait passer un marché avec le président. Elle n'avait pas lu tout le travail de son mari mais disait tout ce dont elle se souvenait, que cela lui semble important ou non. Au bout du couloir, les cris de Luke se faisaient parfois entendre. Il se faisait toujours torturer.

-Merci, dit enfin Salima en rangeant son enregistreur.

Elle prit chaleureusement la main d'Alma afin de la réconforter, de lui apporter un peu de soutien.

-Vous n'avez pas parlé au président ?

-Non, répondit la mexicaine, les larmes aux yeux. Qu'est-ce que je dois faire en attendant ? Je n'en peux plus... je ne peux plus tenir...

-Essayez de ne pas tout lui dire. Il doit en savoir moins que nous, nous allons utiliser cet avantage. Il faut qu'il soit obligé d'utiliser les voies légales, en rendant votre mari fugitif. S'il en sait trop, il ira lui-même trouver votre mari. Donc, si vous pouvez l'utiliser à votre avantage, vous pouvez lui parler, mais un peu. Tenez bon, Alma, nous allons vous sortir d'ici.

Salima lâcha la main d'Alma, qui ne pouvait quitter cette jeune femme des yeux, puis se releva, regardant une nouvelle fois autour d'elle, méfiante.

-Si vous le pouvez, dites à Luke que sa sœur le cherche, il doit tenir bon lui aussi, elle ne le laissera pas tomber, lança-t-elle avant de s'en aller, remontant les escaliers avec prudence et hâte.

Alma se laissa glisser contre les barreaux. Elle n'en revenait pas et ne réalisait pas encore ce qui venait de se passer. Il y avait donc bien un espoir. Des personnes essayaient de les faire sortir de ces cellules, Luke et elle. Et Victor était leur seul espoir. Ainsi, Alma se sentit emplie de courage, cet espoir ayant un effet bénéfique sur elle. Pour sortir, la jeune mexicaine devrait être forte, ne pas tout révéler sur son mari, Victor devait terminer ses recherches. Tout n'était pas perdu. Luke avait besoin de le savoir, Alma espérait trouver un moyen de lui dire. Ils avaient des alliés à l'extérieur, ils n'avaient pas été abandonnés.

Finalement, le président revint avant que Luke ne soit ramené dans sa cellule. Alma n'entendait plus de cris au bout du couloir et lorsque sa porte s'ouvrit, elle sursauta. En voyant Trevor entrer, elle sentit des larmes remplir ses yeux. Elle ne pouvait donc pas avoir quelques minutes de répit. Toujours par terre, elle leva les yeux pour le regarder, un instant, avant de fixer le sol, terrifiée.

-Alma, bon sang, tu es encore par terre ? Relève-toi.

-Je ne peux pas...

-J'ai un accord à te proposer, reprit-il sans prêter attention à ce qu'elle venait de dire.

Trevor la fixa d'un regard insistant. Bien qu'elle avait les yeux rivés sur le sol, Alma le savait. Elle tenta de se relever et sentit le président la saisir brusquement, agacé. Il l'emmena rapidement jusqu'au lit de béton où il la força à s'asseoir avec violence.

-Regarde-moi maintenant, dit-il calmement en lui faisant face.

Elle obéit, retenant ses larmes.

-Bien que tu ne le mérites pas, je vais t'offrir un dîner, avec moi. Si tu es sage, tu auras le droit de voir ton fils. Si tu ne me satisfais pas... eh bien, tu ne le verras pas. Jamais. Je ne me montrerai plus jamais amical envers toi. C'est ta dernière chance, Alma, tu comprends ?

Elle hocha légèrement la tête, une larme coulant sur sa joue.

-Je serai sage, marmonna la mexicaine.

-C'est à moi d'en juger.

Il se retourna pour faire les cent pas.

-En tout cas, tu devras être présentable. Tu prendras donc une douche, puis les gardes te donneront une tenue adéquate. Tu seras parfaite pour cette soirée en ma compagnie. Alors, à tout à l'heure, Alma.

Sur ses mots, le président quitta la cellule, dont la porte se referma après son départ.

Alma devrait parler, elle n'avait pas le choix. Mais, comme lui avait dit la jeune femme, elle ne devait pas tout lui dire. Alors, en se remémorant ce qu'elle avait vu dans le bureau de Victor, la mexicaine essaya de faire le tri des informations qu'elle pourrait donner au président sans condamner son mari. Elle eut plusieurs heures pour réfléchir à ce qu'elle allait pouvoir faire ou dire, puis les gardes revinrent, jetant Luke dans sa cellule comme un vulgaire objet. Il était très mal en point, couvert de sang et de nouvelles blessures. Ensuite, les gardes emmenèrent la mexicaine jusqu'à la douche et la surveillèrent pendant qu'elle se nettoyait. Lorsqu'elle eut terminé, ils lui donnèrent une longue robe de soirée rouge, de type orientale. Elle l'enfila. Et Jane entra dans la pièce, le visage toujours aussi fermé. Sans un mot, elle sortit du maquillage qu'elle commença à mettre à Alma.

-Pourquoi vous... commença cette dernière.

-Ne bouge pas, grogna Jane. Mr Templeton veut que tu sois présentable, il a demandé une robe précise et du maquillage.

Ainsi, une fois prête, Alma fut conduite par les deux gardes hors du sous-sol, un sac ample sur la tête. Jane était restée s'occuper des plaies de Luke. Pieds nus, la mexicaine sentit du carrelage frais. Elle fut guidée pendant un instant et les gardes s'arrêtèrent. Ils retirèrent le sac puis quittèrent la grande salle que découvrait Alma. Une pièce luxueuse éclairée par un lustre, avec une grande table en verre entourée de nombreuses chaises qui semblaient si confortables, comparées à son lit de béton. Sur la table attendaient déjà des plats et des boissons, plus qu'Alma n'en avait vu depuis son enlèvement. L'endroit semblait vide, il devait être très tard. Au bout de la table, Trevor attendait, debout. Lui aussi s'était changé, il avait soigné son apparence, plus qu'habituellement. Voyant la mexicaine et son apparence élégante, il sourit.

-Tu es ravissante, Alma, dit-il en s'approchant. Même avec les cheveux courts.

Elle resta immobile, son cœur battant rapidement dans sa poitrine. Elle ne savait pas ce qu'il allait lui faire, quels pièges il pouvait lui tendre. En le regardant approcher, Alma remarqua qu'il tenait quelque chose dans sa main. Trevor s'arrêta face à elle, proche, et leva les mains. Il attacha un collier autour du cou d'Alma, une pierre rouge entourée par des fils métalliques noirs. Son visage était très proche de celui de la mexicaine. Puis il recula un peu pour l'admirer.

-Magnifique.

Le président la contempla pendant quelques secondes silencieuses qui parurent longues et embarrassantes pour Alma, dont le cœur continuait son rythme rapide. Puis il lui caressa délicatement la joue, elle sentit alors ses muscles se raidir. Semblant retenir un instinct, Trevor recula lentement, avant de désigner le bout de la table.

-Je t'en prie, assieds-toi.

Alma se dirigea vers la place qui lui était préparée. Elle s'assit et Trevor s'assit face à elle. Il lui proposa poliment un verre d'eau, elle accepta. Étrangement, il paraissait si gentil, courtois, attentionné. Il ne la quittait cependant pas des yeux, ce qui la rendait mal à l'aise. Ensuite, Trevor l'autorisa à se servir en nourriture, il lui donna même certains plats. Lui ne mangeait pas vraiment, pas autant qu'elle. N'ayant pas reçu de repas depuis de longues heures, Alma avait déjà commencé à manger, en essayant d'éviter son regard insistant.

-J'aimerais que tout soit plus simple, dit-il alors. Je veux que tu te sentes bien. Mais j'ai des obligations, Alma, tu le sais bien. Je dois trouver ton mari pour lui faire comprendre qu'il s'est trompé sur moi. Alors, je m'excuse de l'amener si rapidement mais... dis-moi ce que tu sais. J'aimerais éviter la violence, je n'aime pas te voir pleurer. Et tu abîmes ton beau visage, ton corps, avec ta résistance inutile.

Pour le moment, Trevor était calme. Alma ne voulait pas le voir perdre son sang-froid et s'en prendre à elle. De plus, désormais, elle savait qu'il y avait de l'espoir. Elle avait déjà donné toutes les informations en sa connaissance à la jeune femme, elle devait en donner un nombre précis et réduit au président afin de le satisfaire tout en le laissant dans le flou. Et elle avait réfléchi. Elle savait quoi dire.

-Si je vous dis ce que je sais, vous me laisserez voir mon fils ? demanda Alma timidement.

-Oui, répondit-il.

-Et vous arrêterez de me faire du mal ?

-Oui. Nous pourrions dîner ensemble tous les soirs.

-Mais le reste de la journée ? Je serai dans ma cellule ?

Face à la douce voix d'Alma qui le suppliait du regard, il soupira.

-Nous trouverons un arrangement, répliqua-t-il alors.

-Je pourrais travailler pour vous.

Surpris, il entrouvrit la bouche.

-Victor se rendra facilement si vous lui prouvez que je vais bien, ajouta la mexicaine. Vous pourrez éviter la violence. Tout rentrera dans l'ordre. Vous me laisserez rentrer chez moi avec mon fils et mon mari ?

-Si ton mari accepte de se rendre et écoute ce que j'ai à dire, oui, je te laisserai reprendre ta vie normale.

-Donc, si je vous dis ce que je sais, vous me traiterez mieux ?

-Oui.

-Vous pourrez libérer Luke ?

Il échappa un rire.

-Luke n'a rien à voir avec Victor, dit le président.

-Mais il vous obéit. Vous pouvez le relâcher, il ne dira rien.

-Je ne peux pas tant que Victor n'a pas compris la vérité.

-Alors, en attendant, promettez-moi que vous nous traiterez mieux tous les deux.

Une nouvelle fois, il rit, comprenant ce qu'elle essayait de faire.

-Si c'est ce qu'il faut pour que tu parles, ainsi soit-il. Je te le promets, Alma. Je vous traiterai mieux si tes informations sont utiles et me permettent de retrouver Victor.

Sentant le stress monter en elle, Alma prit une grande inspiration, réunissant ses pensées. Il était temps de parler. Elle donna quelques informations qu'elle avait lues au président, tâchant de rester assez imprécise sur certains points, feignant de ne pas s'en souvenir clairement.

-Je n'ai pas tout lu, je ne pensais pas que j'aurais besoin de m'en souvenir, acheva-t-elle calmement. Je suis désolée, c'est tout ce dont je me souviens. Je ne sais pas si ça vous sera utile.

Face à elle, le président avait pris des notes précises.

-Je le saurai bien assez tôt, déclara-t-il.

Puis le repas se poursuivit calmement. Alma espérait ne pas avoir été trop révélatrice, elle ne voulait pas compromettre la sécurité de son mari et sa libération. Le président semblait avoir cru ses paroles, il semblait même satisfait de l'avoir enfin fait parler. Ainsi, il paraissait bien plus amical, bien moins monstrueux.

-Tu es vraiment une femme particulière, dit Trevor pendant le dîner en la regardant fixement. Tu occupes mes pensées, constamment, et je ne comprends pas pourquoi. Certes, tu es une belle femme, mais qu'as-tu de spécial pour que je pense à toi toute la journée ?

Face à lui, Alma déglutit, gênée. Elle ne savait pas comment elle devait prendre ses paroles.

-J'ai une femme, reprit-il d'une voix calme. Mais elle n'est pas aussi belle que toi. Elle n'est pas spéciale. Je ne vais pas te mentir, je l'ai épousée pour mon image. Elle ne peut même pas avoir d'enfants.

Alma était confuse. Jamais Trevor n'avait paru aussi humain. Bien que ce qu'il disait ne plaisait pas vraiment à la mexicaine, elle pensa qu'après tout, il n'était pas si monstrueux.

-Tu me fais bien plus d'effet qu'elle, ajouta le président sans détourner le regard.

Elle n'arrivait pas à le regarder dans les yeux, trop embarrassée par ses propos. Après tout, Alma ne pouvait pas s'en réjouir, elle savait ce qu'il pouvait lui faire, elle en gardait déjà des séquelles.

-Tu n'as plus à t'inquiéter. Si ce que tu m'as dit est assez utile pour que je retrouve Victor, tout sera bientôt terminé. Tu as été sage. Je n'aurai plus besoin de te punir.

Elle releva les yeux.

-Je pense que tu as donc droit à une récompense, déclara Trevor en se levant.

Il alla près d'une porte qui se trouvait derrière lui et frappa trois fois. Puis il se retourna pour faire face à Alma avec un grand sourire. Très vite, la porte s'ouvrit et une femme entra, tenant la petite main de Rafael. Son fils se trouvait à quelques mètres de la mexicaine depuis le début du dîner. Ils entrèrent dans la grande pièce. Aussitôt, Alma échappa un rire, elle pouvait enfin voir son fils. Elle se releva d'un bond pour se précipiter vers lui, sous les yeux du président qui souriait. Sans hésiter, elle se baissa pour serrer son fils contre elle. Des larmes lui remplirent les yeux. Elle était si heureuse de voir que son petit allait bien. Et lui aussi semblait heureux de revoir sa mère.

-Maman ! s'écria le jeune Rafael de sa douce voix enfantine.

-Oh Rafael, tu m'as tellement manqué.

Trop heureuse à l'idée de le retrouver, Alma ne voulait plus le lâcher, elle le gardait contre elle, comme le plus précieux des humains.

-Maman, pourquoi tu as coupé tes cheveux ?

-Elle avait besoin de le faire, répliqua aussitôt Trevor.

Sa présence ne comptait plus pour Alma, elle ne se sentait plus oppressée, elle pensait simplement à son fils, actuellement dans ses bras, contre elle. Rien ne pouvait lui faire plus plaisir.

-Je t'aime tellement, Rafael, lui dit-elle.

-Moi aussi, maman.

Elle rit une nouvelle fois. Puis, Alma se décolla de son fils pour le regarder. Elle affichait un grand sourire face au doux visage de son enfant qui allait très bien.

-Tu as fait des bêtises ? demanda-t-il. Les dames ont dit que tu es punie. Et papa aussi.

-Oui... Mais tout va bientôt rentrer dans l'ordre. Nous allons bientôt retourner à la maison, retrouver papa.

-Ta punition est bientôt finie ?

-Oui, mon cœur.

Curieux, Rafael approcha sa petite main du visage de sa mère, afin de poser un doigt sur sa blessure à la joue dont les points de suture avaient été enlevés.

-Tu t'es fait mal ? demanda-t-il.

-Oui, mais je vais bien, mon cœur.

Elle le serra une nouvelle fois dans ses bras, les larmes aux yeux.

-Tu vas bien ? Tu es bien traité ? questionna la mexicaine.

-Oui, les dames sont très gentilles.

-Bien, c'est bien.

-Et je suis sage, maman.

Ce mot qu'elle avait trop entendu l'atteignit. Alma repensa aux moments de torture infligés par le président, qu'elle regarda brièvement. Il semblait satisfait, fier de lui, les yeux rivés sur ces retrouvailles. Mais Alma ne voulait pas lui prêter attention, elle ne pouvait pas quitter son petit garçon et le serrait aussi fort que possible.

-Maman, pourquoi tu as plein de bobos ? demanda Rafael de sa douce voix enfantine.

-Parce que maman s'est blessée, répondit aussitôt le président. Mais ce n'est pas grave.

En réalité, Alma pensait à ses blessures. Elles n'avaient rien de triviales. Au contraire, certaines n'étaient même pas visibles. Elle essaya de pas y penser et embrassa tendrement son fils sur la joue avant de le serrer une nouvelle fois contre elle. Ce moment aurait dû durer plus longtemps, la mexicaine le souhaitait, mais le président en avait voulu autrement. Après quelques minutes trop courtes en compagnie de son fils chéri, Alma dut se séparer de lui, elle le couvrit de baisers et ne voulait plus le lâcher, mais la femme l'emmena hors de la pièce et referma la porte, coupant une nouvelle fois Alma de Rafael. Puis elle se releva, les larmes yeux, son sourire disparu. Il était parti. Encore.

-Ne pleure pas, Alma, tu ferais couler le maquillage, dit Trevor en la regardant.

Elle avait les yeux rivés sur la porte, comme si celle-ci allait à nouveau s'ouvrir pour la laisser voir son petit garçon. Mais ce ne fut pas le cas. Trevor l'invita à reprendre sa place à la table. Il la suivit pour à nouveau s'asseoir en face d'elle. Un dessert fut servi, mais Alma n'avait plus envie de manger. Elle avait le regard vide, voyant le visage souriant de Rafael, ancré dans son esprit. Elle retenait ses larmes mais souffrait tellement de cette nouvelle séparation. Au moins, elle avait pu passer un peu de temps avec son fils.

-Je te laisserai le revoir, déclara le président en reposant sa cuillère, si tes informations me sont utiles. Souris, tu es magnifique lorsque tu souris.

Cependant, bien qu'elle venait de voir son fils après de nombreux jours, Alma n'avait pas envie de sourire, elle n'en ressentait ni l'envie, ni la capacité. Elle croisa tout de même le regard insistant de Trevor qui paraissait sérieux.

-J'aimerais que tu danses pour moi, Alma.

Face à cette demande, elle fronça légèrement les sourcils.

-Je suis certain que tu sais le faire à la perfection.

Il se leva lentement, sous le regard méfiant de la mexicaine, pour se diriger vers un petit meuble sur lequel se trouvait une chaîne hi-fi. Il appuya sur un bouton, une musique orientale se lança. Puis Trevor se retourna, face à elle, affichant un large sourire. Sentant son cœur accélérer, Alma se demanda s'il connaissait seulement ses origines.

-Je t'en prie, lève-toi, dit-il en reprenant sa place à la table sans la quitter des yeux. Et danse pour moi, Alma.

À nouveau, cette dernière sentit des larmes remplir ses yeux. Afin d'éviter une remarque de Trevor, elle se leva en tournant la tête. Ses membres tremblaient, elle avait peur, il était capable de faire d'horribles choses à cause d'une danse. Et la mexicaine le ressentait déjà comme une humiliation, face à son regard trop insistant et malsain. Pourtant, Alma déglutit, retint ses larmes, et commença à danser. Elle suivait le rythme de la musique et évitait le regard du président, essayait de penser à autre chose que la réalité. Lui la contemplait avec son habituel sourire dérangeant, elle le savait. Malgré tout, Alma ne pouvait se déchaîner, elle restait en réserve, incapable de danser en éprouvant du plaisir. Elle n'en avait pas envie. Ses membres arrêtèrent cependant de trembler, elle essayait de paraître confiante, sûre d'elle, mais Trevor n'était pas stupide et pouvait voir qu'elle fuyait son regard et la réalité. En effet, Alma s'imagina en compagnie de Victor pour danser avec plus d'assurance. Elle se sentait écœurée à l'idée de satisfaire le président, de lui procurer du plaisir, et préféra penser qu'il s'agissait plutôt de son mari. Elle ferma les yeux pour mieux s'évader.

Malheureusement, ce moment fut de courte durée. Bientôt, Trevor lui demanda d'arrêter avec une voix douce qui inquiétait Alma. Il vint vers elle, lui caressa la joue avec un sourire.

-Tu danses bien. Tu ne cesses de m'impressionner.

Elle ne pouvait pas le prendre comme un compliment, voyant son regard. Puis, il lui demanda de remettre le tissu sur sa tête et la raccompagna à sa cellule en lui tenant le bras. Une fois de retour dans sa prison, Trevor lui retira le tissu et le jeta par terre avant de retourner la mexicaine face à lui. Son visage était à quelques centimètres de celui d'Alma, qui sentait son cœur accélérer. Elle avait peur. Elle redoutait ce qui allait se produire, espérant se tromper. Elle fixait le sol, incapable de soutenir son regard malsain.

-Regarde-moi, Alma. Que je puisse voir tes beaux yeux.

La gorge serrée, elle obéit et croisa brièvement son regard. Il sourit et approcha son visage pour embrasser la mexicaine. Non consentante, elle sentit ses muscles se crisper, elle voulait le repousser mais n'en eut pas le courage. Lui comprit qu'elle était réticente et recula. Son sourire avait disparu.

-Déshabille-toi.

Aussitôt, Alma sentit ses yeux se remplir de larmes, sa gorge se nouer davantage et son cœur marteler dans sa poitrine. Elle secoua légèrement la tête. Lui insista en hochant la tête. Mais elle ne bougeait pas, elle ne voulait pas endurer un nouveau viol. Une larme coula sur sa joue, emportant un peu de maquillage sombre. Trevor perdit patience et la retourna brusquement pour venir la plaquer avec violence contre le mur, avant d'arracher le dos de la robe. Elle se mit à sangloter, gémissant avant même qu'il ne commence. Mais le président n'y prêta pas attention et ne fit preuve d'aucune retenue. Le maquillage coula avec les nombreuses larmes, s'étalant sur ses joues. Elle ne pouvait rien faire, seulement endurer. 

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