Chapitre 27 : Poulet brûlé à la moutarde et aux herbes de Provence

Elle fit défiler les clichés sur son téléphone :

Iker qui poussait le caddie contenant les cornets de glace au chocolat et à la vanille; la splendide Mosquée de Cordoue sous tous ses angles ; Mélodie et Carmen se tenant la main dans le quartier fleuri de la Juderia ; un selfie du groupe dans le bar dansant place de la Corredera ; une photo de Guillaume en mode "BG" - euh rectification - dix photos de Guillaume qui avait dû subtiliser le téléphone de Cali ; un selfie d'Iker et de l'écrivaine au réveil tout sourires dans le lit - sans doute après leur première fois - ; une photo de la ferme d'Eli et Lorenzo ; de Grenade, de l'Alhambra; encore des selfies du couple - beaucoup de selfies - avec Iker qui grimaçait sur la plupart des clichés ; la somptueuse villa des Von Cortenbach...

       Cali soupira. Bientôt le mois de juin, et déjà trois semaines que leur road trip mémorable en Andalousie avait pris fin : un voyage dont elle se souviendrait probablement toute sa vie. Depuis leur retour, les choses avaient évolué. Certaines dans le bon sens, et puis d'autres...

Iker et Cali se voyaient au quotidien. Les tourtereaux s'entendaient toujours à merveille, voire mieux qu'avant. Chaque jour, ils se découvraient, se redécouvraient, discutaient des heures, s'enfermaient au paradis, s'enivraient de Séville. Leur relation semblait se renforcer au fil du temps, ce qui la réjouissait et l'effrayait en même temps.

        Toutefois, les appels suspects d'Iker se multipliaient - bien qu'il s'efforçât de ne pas décrocher lorsqu'ils étaient ensemble -, et il arrivait de plus en plus souvent qu'il la quitte à la hâte. Le beau brun paraissait détendu dès qu'ils se retrouvaient, mais à l'instant où il repartait, Cali remarquait sa mine s'assombrir.

Ce contraste la rongeait intérieurement. Leur amour formait certes une bulle de bonheur, qui éclaterait peut-être un jour...

L'écrivaine savait qu'elle marchait sur un fil, avec en sus une épée de Damoclès qui s'intitulait "Procès d'Iker" au-dessus de la tête. D'après ce qu'elle avait compris, la dernière séance se déroulerait très bientôt, probablement à la mi-juin, car il devait revenir à Paris à cette date.

La cerise sur le gâteau de cet imbroglio de sentiments fut le message que le guide lui avait envoyé la veille. Elle le relut pour la centième fois.


[Iker] : Cali, ça fait quelques jours que je voulais te poser une question... Carmen m'a dit que Mélo rend son appartement le 3 juillet. Après cette date, elle logera chez nous. De mon côté, ça fait plusieurs mois que je cherche un chez moi sans jamais vraiment me décider. Martha m'a informé avant-hier que le deux pièces qui appartient à sa sœur vient de se libérer. Le logement est vraiment sympa. Du coup, je pense le prendre. Et si ça te dit de rester à Séville après juillet, on pourrait être colocs...? Tu en penses quoi ? On peut en rediscuter plus tard bien sûr.

P.S : Mon père revient demain de voyage, on fait un dîner à la maison et j'aimerais te le présenter :)


      Perdue, très heureuse, apeurée, elle lui avait répondu qu'elle y réfléchirait. Et que, bien évidemment, elle se rendrait au dîner pour faire la connaissance de Rafael Llorente.

En vérité, elle brûlait d'envie de tenter l'aventure d'emménager avec Dark Phoenix. Son travail chez Secreto de Mujer la passionnait, d'autant que Catalina lui avait indirectement fait comprendre qu'elle souhaiterait la garder pour une durée indéterminée. Son roman Magdalena était quasiment achevé , et son éditeur avait beaucoup apprécié son premier jet, malgré les tonnes de recorrections qu'il avait annotées par mail - ah, ces éditeurs ! -.

       Il arrivait au jeune couple de dormir ensemble plusieurs nuits d'affilée, et leurs brosses à dents occupaient une place de choix dans leurs salles de bains respectives. Qu'est-ce qu'elle aimait cette petite routine qui s'installait ! Cependant, une pensée tournait sans cesse dans sa tête. Et si le verdict se déclarait en sa défaveur ?

— Chiquita, tu es bien pensive aujourd'hui. Allez, rentre, va ! De toute façon, que tu termines maintenant ou dans dix minutes ça ne change rien, il n'y a pas un client cet après-midi, l'interrompit la douce voix de Catalina.

Cali se redressa, rangea furtivement son téléphone dans sa poche et nettoya machinalement le comptoir de la boutique avec un chiffon.

— D..Désolée patronne ! C'est le dîner avec le père d'Iker ce soir qui me turlupine un peu... J'espère qu'il m'appréciera !

Le sosie de Barbara la couva de ses beaux yeux clairs en croisant les bras.

— Voyons, cariño, comment pourrait-on ne pas t'apprécier ? Je suis sûre que ça va bien se passer. Allez, ouste, file te préparer !

— Merci beaucoup cheffe ! À demain à 9h !

— À demain chiquita !

Elle défit son tablier orné d'une théière brodée à la poitrine, ramassa son sac à main, et se dirigea vers le trottoir d'en face en adressant un dernier au revoir à Catalina.

*

       Lorsqu'elles arrivèrent au pied de l'immeuble en briques rouges, Mélodie et Cali procédèrent à leur rituel pré-rendez-vous : chacune vérifiait que la tenue de l'autre était impeccable, sans oublier un check de la dentition au cas où un morceau de salade s'y retrouvait coincé, ainsi qu'à une inspection de la fraîcheur de l'haleine.

Mélodie confirma par un hochement de tête que la robe longue imprimée de jolies feuilles de Cali lui taillait parfaitement, que son chignon et ses quelques mèches ondulées lui conféraient une allure sage tout en dégageant son minois, et qu'elle sentait bon le printemps.

       À son tour, la romancière complimenta son amie sur sa combinaison noire qui lui saillait comme un gant, lui donnant un air sophistiqué.

L'étudiante, ayant déjà rencontré Rafael Llorente, stressait beaucoup moins que l'écrivaine.

— Merde Mélo ! pesta d'un coup Cali, alors qu'elle s'apprêtait à sonner à la porte du duplex.

— Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ? Qui est mort ?

— Dans mon stress j'ai oublié d'amener le vin de Châteauneuf-du-Pape dont Rafael raffole ! Je l'ai laissé sur la table de la cuisine, quelle quiche ! paniqua-t-elle en se tapant le front.

— Mais nooon, t'inquiète ma Calinou, ce n'est pas grave ! Tu verras, Rafael est adorable !

      La grande brune appuya sans attendre sur la sonnette alors que la petite châtain se rongeait les ongles. Un élégant jeune homme leur ouvrit la porte quelques secondes après. Vêtu d'une chemise blanche et d'un pantalon chino beige, Iker dégageait toujours ce sex appeal sublimé par ce parfum d'agrumes fraîches qui la faisait fondre comme neige au soleil. Il fit la bise à Mélodie, embrassa sa petite amie comme s'ils ne s'étaient pas vus depuis des mois, et les entraîna au salon.

Elle y vit alors Carmen habillée d'une robe patineuse fleurie, assise dans le canapé en cuir, face à un homme imposant d'une cinquantaine d'années aux cheveux poivre et sel, installé dans l'immense fauteuil près de la fausse cheminée. Il portait une chemise noire, un pantalon de costume beige et des derbies cognac vernies. Ses yeux sombres s'illuminèrent à la vue de Mélodie, qu'il enlaça vivement dans ses grands bras musclés.

Son regard glissa ensuite vers Cali, et ses traits semblèrent se durcir. Il lui tendit une main ferme.

Hola señorita, presumo que eres Cali. Soy Rafael, el padre de Iki. (*Bonsoir mademoiselle, je présume que vous êtes Cali. Je suis Rafael, le père d'Iki.*)

Iki, c'est mignon.

— Hem, hola señor, encantada de conocerte ! répondit-elle en secouant - un peu trop - énergiquement sa main.

Elle la lâcha ensuite rapidement, se rendant compte que la sienne tremblait de moiteur, puis l'essuya sur sa robe.

— Papa ! Cali t'a ramené un rouge de Châteauneuf-du-Pape, tu te souviens que lors de nos vacances en Provence tu ne jurais que par ce vin ? déclara Iker pour détendre l'atmosphère, tout en passant son bras autour de l'épaule de la jeune femme.

Cette dernière se maudit intérieurement. Elle se racla la gorge.

Lo... lo siento Rafael, estúpidamente lo dejé en la mesa de la cocina ! Pero la traeré de vuelta para la próxima ! (*Je... je suis désolée Rafael, je l'ai bêtement oubliée sur la table de notre cuisine ! Mais je la ramènerai pour la prochaine fois !*), s'excusa-t-elle, tentant de lui adresser un sourire charmeur pour faire passer la pilule.

     Le paternel la toisa - encore une fois d'un air bizarre - avant de hausser les épaules.

— Voyons, instalar vous, instalar vous, faites comme chez vous, intervint Carmen en leur désignant le canapé.

       La romancière se retrouva juste en face du fauteuil de Rafael, entourée par ses deux enfants, et Mélodie prit place sur le pouf près de sa copine. Après quelques banalités, Iker leur annonça qu'il avait concocté sa spécialité : le poulet rôti à la moutarde et aux herbes de Provence. Lorsqu'il se leva pour vérifier que la cuisson se déroulait bien, Mélodie le suivit en se proposant de ravitailler l'apéritif et entraîna Cali à sa suite.

Lorsqu'elles atteignirent le couloir, l'écrivaine pressa le bras de son amie.

— Mélo, je me sens mal à l'aise, on dirait que le géniteur ne m'apprécie pas du tout ! C'est horrible ! Je n'aurais jamais dû oublier cette foutue bouteille ! chuchota-t-elle, la mine dépitée.

— J'avoue, c'est vraiment bizarre. C'est pour ça que je voulais te parler seule à seule. Rafael n'est pas du tout comme ça d'habitude. D'abord il s'exprime très bien en français, il a vécu là-bas une douzaine d'années. Et là, il te répond toujours en espagnol. Ensuite, je ne comprends pas cette attitude pincée, c'est louche...

— Mon dieu, Mélo, mais qu'ai-je fait ?

— Rien du tout ma Calinou, tu n'as rien à te reprocher. C'est plutôt à lui de changer de comportement ! Ne t'inquiète pas, tout va bien se passer, j'assure tes arrières !

— Ça va les filles ? Pour info, le poulet est en train de dorer. On va se ré-ga-ler ! les interrompit soudain Iker qui sortait de la cuisine, tout fier de son plat.

— Oui, oui, petit Iki ! le taquina Cali pour masquer son stress.

      Ils attaquèrent l'entrée quelques minutes plus tard, autour d'une magnifique table dressée avec goût par Carmen. Plusieurs couverts - en argent ? - distinguant le hors-d'œuvre, le plat de résistance et le dessert, accompagnaient la vaisselle en porcelaine et en cristal. Des bougies éclairaient le tout, juchées sur une nappe blanche ornée de fleurs tropicales brodées à la main.

— Papa, savais-tu que Cali écrivait sur le flamenco ? C'est comme ça qu'on a fait connaissance ! lança Iker en lui passant l'assiette de melon au jambon espagnol.

— Hm, Cali, eres escritora, no ? (*Hm, Cali, vous êtes écrivaine c'est ça ?*)

Si, Rafael. Solía ​​escribir fantasía, ahora drama, y ​​también trabajo en una tienda de té. (*Oui, Rafael. J'écrivais de la fantasy, maintenant du drame, et je travaille également dans une boutique de thés*), répondit-elle, tentant toujours de lui sourire avec amabilité.

Ya veo... A Iker siempre le gustaron las chica ... especiales (*Je vois... Iker a toujours aimé les filles... spéciales*), souffla-t-il d'une voix blanche.

— Papa ! s'insurgea Iker. Arrête, tu nous mets mal à l'aise là.

Qué ? Es verdad hijo ! (*Quoi ? C'est vrai mon fils !*).

— Papa, s'il to plait ! intervint à son tour Carmen.

— Rafael, je vous ai dit que votre chemise vous allait comme un gant aujourd'hui ? Très bon style ! le flatta Mélodie, essayant de détendre l'atmosphère à sa manière - tout en passant pour la belle-fille lèche-bottes.

      Cali ne chercha plus qu'à s'enfuir et se terrer dans un trou. C'est un vrai désastre, qu'est-ce qu'il a contre moi à la fin ? Soudain, une sonnerie tonitruante suspendit la conversation. Elle provenait de la poche du beau brun.

— Je suis désolé, je le mets tout de suite sur silence, s'excusa ce dernier.

Cependant, lorsqu'il jeta un regard sur l'écran, ses yeux s'ouvrirent comme des soucoupes. Il resta quelques secondes immobile, avant de se lever.

— Je crois que c'est une urgence, je suis vraiment désolé, je vais devoir décrocher. Je reviens rapidement.

     Il adressa un regard contrit à sa Dragona, puis pivota pour se diriger précipitamment vers le jardin, de l'autre côté de l'immeuble. Un frisson désagréable parcourut l'échine de la jeune femme. Cette soirée était en train de tourner au vinaigre.

*****

       Ce n'était pas son avocat. Maître Dufour n'appelait pas à ces heures-là. Il le savait. Iker reconnut ce numéro provenant d'un opérateur français. Même s'il l'avait supprimé, même s'il l'avait bloqué de son ancien portable. Ces chiffres restaient englués à sa mémoire, rattachés à ses souvenirs les plus sombres, prêts à lui faire revivre ses pires cauchemars.

Non. Cette fois, il ferait face. Elle revenait à la charge en plein procès ? Cela la désavantagerait. Il activa son application d'enregistrement téléphonique, puis décrocha.

— Allô... Magali ?

— Iker, si tu ne reviens pas tout de suite, je te jure que cette fois je ne me raterai pas ! Je veux que tu reviennes ! TOUT DE SUITE ! JE T'AIME ! MERDE, pourquoi tu m'as abandonnée ? T'es qu'un gros connard ! Je te jure que cette fois, je me tue vraiment si tu ne reviens pas !

— Magali, tu n'es pas dans ton état normal, tu n'as pas pris tes médicaments ? Calme-toi, tu sais bien que ça fait presque deux ans qu'on n'est plus ensemble.

— MAGALI ! Repose ce téléphone ! intervint une voix masculine à l'autre bout du fil.

Sans doute son père...

— Nooon ! Iker ! Je te hais ! Je te hais ! Je te jure que je n'hésiterai pas à la première occasion ! Tu auras mon sang sur les mains !

      Des cris, des pleurs. Un bruit de frottement. Puis, le bip traînant qui signalait qu'on avait raccroché.

Le jeune homme soupira, sentit son coeur battre à tout rompre. Il inspira une grande bouffée d'oxygène pour se calmer, frictionna son visage.

Putain, qu'est-ce qu'elle a encore foutu...

       Il appuya sur l'icône de l'enregistreur. Bingo. Cette fois, on en a la preuve. Elle a craqué. Sans tarder, il composa le numéro de Maître Dufour en faisant les cent pas.

La porte de la cuisine s'ouvrit alors brusquement.

— IKEEER ! La poulet brûle ! cria Carmen, affolée, venant à sa rencontre.

— Fais chier, j'avais complètement zappé !

*****

      Il était de dos, éventait du mieux qu'il put la fumée noire qui s'échappait du four. Carmen et Mélodie s'affairaient à éteindre l'alarme à incendie qui retentissait dans le couloir de l'entrée.

Cali s'approcha, décidée à éclaircir cette histoire de beau-père antipathique.

— Iker, il se passe quoi avec ton père ? Il ne me connait même pas qu'il a déjà l'air de me détester ! Je ne lui ai rien fait, quand même !

Il se retourna, lui adressant un sourire affectueux, malgré ses traits tendus.

— Non Cali, ce n'est pas du tout ta faute. Disons que mon père a une expérience assez désastreuse de mes ex, enfin, surtout la dernière. Je lui en toucherai un mot...

Il lâcha son regard pour ouvrir la fenêtre en grand. Elle poursuivit.

— Tu entends quoi par là ? Est-ce que cette ex a un lien avec tes problèmes actuels ? Iker, je sais que j'ai promis de rester patiente, mais si ton père commence à projeter ses rancoeurs sur moi, ça va devenir difficile...

     Il daigna enfin lui prêter son attention. Il la dévisagea, regarda dans le vague, puis reposa ses prunelles sur elle.

— Mes parents étaient contre le fait que je vous rejoigne au road trip. Ils auraient préféré que je reste à Paris jusqu'à la délibération. Mon père se montre méfiant, car dans mes relations passées, j'avais tendance à plonger la tête la première et à donner sans compter. Mais Cali, ma Dragona, ma petite chérie... Tu es différente de cette fille, de toutes les autres filles. Je le sais, je le sens au fond de moi.

Il enveloppa ses mains dans les siennes.

— Tu as réfléchi à ma question ? lui susurra-t-il. J'ai envie de vivre avec toi...

Elle se plongea dans ces yeux noisette irrésistibles.

— Iker, j'ai besoin d'en avoir le cœur net. Promets-moi que tu n'as rien fait de mal.

Il caressa ses cheveux, déposa un baiser sur sa joue.

— Je te promets, bébé. D'ailleurs, je crois qu'on tient enfin la preuve qui mettra définitivement fin à cette affaire.

Sur ces entrefaites, Rafael pénétra en trombe dans la cuisine.

— Iki, quelle était cette urgence ?

— Ah, mais vous parlez français Monsieur Llorente ? le questionna l'écrivaine de sa voix faussement naïve, que son amoureux connaissait désormais si bien.

     Iker s'approcha de son père, lui chuchotant à voix basse. Cali détestait ces messes basses. Elle en avait plus qu'assez d'être mise à l'écart. Les traits de Rafael se décrispèrent, il soupira de soulagement. La jeune femme tendit l'oreille.

— Tu as rappelé Maître Dufour ? demanda-t-il à son fils.

— Non, pas encore. J'ai dû arrêter le poulet qui cramait. Je crains qu'il ne soit pas mangeable.

— Rappelle-le de suite, il faut le mettre immédiatement au courant. Je m'occupe du reste, ne t'inquiète pas.

— OK.

      Il disparut instantanément, monta à l'étage. Elle mourait d'envie de le suivre. Mais pour l'instant, elle se retrouva seule avec le paternel dans la cuisine, au milieu des effluves de poulet brûlé à la moutarde et aux herbes de Provence. Elle prit son courage à deux mains, et s'avança vers lui.

— Monsieur Llorente, je ne vais pas passer par quatre chemins. Pourquoi êtes-vous aussi cinglant avec moi depuis le début de la soirée ?

      L'homme charismatique passa une main dans ses cheveux poivre et sel, puis la fixa de son regard sombre.

— Écoutez Cali, ce n'est pas que je ne vous apprécie pas, vous m'avez tout l'air d'une charmante jeune femme. Mais ne pensez-vous pas que votre relation avec mon fils va trop vite ? Il est dans une période compliquée en ce moment, et tout est encore très instable dans sa vie. Sa mère et moi estimons qu'il a besoin de tranquillité et que ce n'est pas forcément une bonne chose de s'engager tout de suite dans une relation sérieuse avec une fille qu'il a rencontrée il y a quelques semaines à peine.

      Cette déclaration la prit de court. Quelques semaines ? Et puis d'abord de quoi se mêlaient-ils ? Iker était majeur et décidait lui-même de ses fréquentations !

— Mon... Monsieur Llorente, d'abord cela fait trois mois que nous nous sommes rencontrés. Ensuite, vous n'avez pas votre mot à dire dans les relations de votre fils. Il est adulte et indépendant.

— Je sais, je sais, Cali. Même si cette affaire ne concerne que lui, elle touche quand même notre famille. Et risque de vous faire du mal, à vous aussi. Comprenez, les désillusions seront amères si ce procès tourne en sa défaveur. Pour le bien de tous, je pense que vous devriez au moins faire une pause, le temps que nous arrivions à régler ce qui lui arrive. Sincèrement, Cali. Habiter ensemble après quelques mois seulement. Surtout que vous avez encore un pied à Paris. Ne pensez-vous pas que cela va trop vite ?

       Sa tête se mit à tourner. Elle posa une main sur sa poitrine. Trop... vite ? Elle ne voulait pas l'admettre, mais Rafael avait sans doute raison. Leur relation fusionnelle leur faisait brûler les étapes. Cette bulle. Cette bulle d'amour trop vite gonflée... Finirait-elle par exploser ? Elle ressentit soudainement un besoin de respirer. Elle étouffait. De l'air. Vite. Il fallait qu'elle réfléchisse à tout ça. Rester à Séville ? Rentrer ? Laisser Iker régler ses problèmes ? Et elle ? Que voulait-elle au fond d'elle-même ?

Elle se dirigea vers le salon sans un regard vers Rafael, ramassa son sac. Au même moment, Iker redescendit de l'étage.

— Cali, je vais devoir prendre le prochain vol pour Paris. On doit rapidement mettre des choses en place avec mon avocat. Mais on voit la lumière au bout du tunnel ! lança-t-il, déboutonnant sa chemise trempée, son portable à la main.

Elle se retourna, les yeux humides.

— Iker, il faut qu'on fasse une pause.

— Pardon ?

— Ton père a raison, une chose à la fois. Il faut que tu te concentres pour régler cette affaire en bonne et due forme. Tout est allé trop vite entre nous. J'ai besoin de me poser quelque temps. De faire un point.

— Que... quoi ? Mais, qu'est-ce que mon père t'a raconté ? Tu... Cali !

Elle s'éloigna vers l'entrée.

— Iker. On brûle les étapes, et ça me fait peur. J'ai peur qu'on finisse par se brûler les ailes. Surtout que je suis constamment à l'écart de tout un pan de ta vie.

— Cali...

— Règle tes problèmes, Iki... De mon côté, j'ai besoin de souffler. Bonne chance.

     Elle lui envoya un baiser, lui sourit tristement, puis referma la porte sous le regard interdit de Mélodie et Carmen.



Et voilà... des révélations sur le procès d'Iker... Que pensez-vous qu'il se soit passé avec cette étrange Magali ? Comprenez-vous la position de Rafael ? Et la réaction de Cali ? Que va-t-il arriver à nos loulous ?

J'espère que vous avez aimé ce chapitre de révélations... Et le reste arrive. Ça sent un peu la fin non ? :(

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top