Chapitre Vingt-Et-Un

21.

Point de vue d'Amelia

L'université était une toute nouvelle expérience maintenant. Et, à mon plus grand bonheur, je m'en sortais très bien.

Le jour de la rentrée, je devais avouer que ça avait été assez bizarre. Tout le monde me dévisageait à chaque tournant avec des expressions surprises. Il était vrai après réflexion que ça devait être étrange de se dire qu'on étudiait avec la reine de notre pays. C'était peut-être aussi parce que j'avais deux agents qui me suivaient pour assurer ma protection. Ils restaient à cinq mètres de moi, mais c'était loin de passer inaperçu.

Au bout d'une semaine, lors de mon premier travail à faire en équipe, je m'étais placée avec une fille prénommée Marie. On s'entendait très bien l'une avec l'autre et j'étais devenue amie avec elle assez vite. Ma première amie! Ce n'était pas rien! Elle m'avait présenté à ses copines par la suite, et ça avait immédiatement cliqué. Elles me traitaient comme une personne normale, ne prenaient aucunement en compte le fait que j'étais la reine de leur pays. Il m'était arrivé de sortir en ville avec elles quelques fois et elles payaient absolument tous leurs propres achats. 

En ce moment, j'étais dans ma chambre en compagnie de Marie, on étudiait pour un examen que nous allions avoir dans trois jours. Je sentais mon ventre gargouiller.

-Est-ce que tu as faim? Demandais-je à Marie. 

-Ouais, un peu. Avouait-elle.

-Je vais aller demander à Hubert qu'on nous apporte des biscuits, ça te va?

-Est-ce que je pourrais aussi avoir du lait?

-Bien sûr! 

Je me levais du sol et marchais jusqu'à la porte. Comme prévu, Hubert était près, assis sur une chaise.

-Hubert, pouvez-vous nous apporter quelques biscuits et deux verres de lait? Nous avons un peu faim.

-Aucun problème, Amelia. Je reviens dans quelques minutes. Dit-il en se levant.

Je retournais dans ma chambre pour rejoindre Marie.

-Ça te dit, qu'on prenne une pause? Me demandait-elle.

-Ça ne serait pas de refus! En plus, ça nous permettra d'éviter de mettre des miettes sur nos notes de cours. 

-Ouais, tout à fait! 

Je gloussais. Hubert entrait dans ma chambre et déposais un plateau de biscuits ainsi que deux verres de lait devant nous.

-Merci, Hubert! Vous passerez le mot à Joséphine aussi! Lui dis-je.

-Ça nous fait plaisir, ma reine.

Il quittait la chambre en refermant la porte derrière lui. 

-Je ne sais tellement pas comment tu fais, sérieusement. Dit-elle en prenant un biscuit.

-De quoi tu parles? 

-Ton mode de vie. Je ne pose aucun jugement de valeur, rassure toi, mais je ne sais pas si j'aurais été capable de vivre avec des domestiques qui s'occupent de moi. 

-Bah, quand c'est la seule chose que tu connais, ça ne te fait rien. J'y avais jamais pensé, à cette question. Disons que j'ai jamais été exposé à un autre mode de vie avant cette année. 

-Mais, tu savais bien que tu étais différente, pas vrai?

-Évidemment, j'en ai pris conscience assez tôt. Déjà, je vis dans un château. Aussi, il suffisait de voir comment les gens se comportaient avec moi. Pour finir, le fait que je n'étais pas autorisée à jouer avec des enfants autre que mon cousin me montrait que j'étais loin d'être comme les autres. 

-Chiant. 

-Ouais, ça tu peux le dire. 

On terminait de manger nos biscuits avant de se remettre au travail. Quand il était dix heures, elle m'annonçait qu'elle allait rentrer.

-Si tu veux, je peux demander à un chauffeur que tu sois reconduite chez toi. 

-T'en fais pas, je connais le chemin. Me dit-elle en réunissant ses affaires.

-T'es sûre? Ça ne te coûtera rien.

-Je sais, Amé. Mais vraiment, c'est bon. Je sais que tu proposes ça parce que tu te soucies de moi, mais comme je te l'ai dit, je peux me débrouiller seule. 

-Laisse moi au moins te raccompagner jusqu'à la grille. Lui dis-je.

-Ça, ça me va.

Une fois que tout avait été mis dans son sac à dos (à l'exception d'un manuel qu'elle tenait dans ses bras), on quittait ma chambre. 

-Au fait, ce week-end, tu vas bien venir chez Sara pour sa soirée? Me demandait-elle pendant qu'on descendait les escaliers. 

-Il y a 99% que je vienne, le un pourcent qui n'est pas là c'est au cas où surviendrait une urgence de niveau nationale. Donc, tu peux considérer ça comme un oui! 

-Super! Tu iras lui dire, à Sara, en fait c'est elle qui voulait s'en assurer tu sais, puisque c'est elle qui organise le tout. 

-C'est la première chose que je vais aller faire dès que tu seras partie. Lui dis-je.

Je marchais avec elle jusqu'à la grille. Un garde l'ouvrait pour laisser sortir mon amie et je la saluais pendant qu'elle s'éloignait du palais. La grille se refermait et je retournais dans le château. Je montais les marches. 

-Bonne nuit, Hubert. On se voit demain! Dis-je en passant devant lui.

-Bonne nuit à vous aussi, Amelia.

J'entrais dans ma chambre et accédais directement à mes toilettes. J'étais consciente du fait que j'avais dit que j'allais contacter Sara en premier, mais j'allais le faire tout de suite après m'être préparée pour la nuit. Je me démaquillais (parce que, quoi qu'il en soit, je devais donner une bonne impression en public même si je n'étais qu'à l'université toute la journée) et me brossais les dents. Je détachais aussi mes cheveux qui étaient, jusqu'à présent, réunis en une queue-de-cheval haute. Je passais ma main à l'intérieur pour qu'ils ne gardent pas la forme qu'il avaient quand je les avais détachés. Je me fixais un instant dans le miroir avant de sortir de ma salle de bain. 

Je fermais mes rideaux et commençais à me débarrasser de mes vêtements pour enfiler mon pyjama. Les vêtements que j'avais portés, je les pliais avant d'ouvrir la porte de ma chambre et de déposer les morceaux de mon ancienne tenue à côté de la porte. Une domestique allait passer pour les prendre et les laver. Je refermais la porte et allais m'asseoir sur mon lit. J'allumais la télévision et sélectionnais une chaîne où j'étais certaine d'avoir une émission intéressante. Je prenais par la suite mon téléphone posé sur ma table de chevet. 

J'étais surprise en l'ouvrant. Je constatais que j'avais un appel manqué ainsi qu'un message vocal qui venaient tous les deux d'un numéro inconnu. Je n'oubliais pas pourquoi j'avais pris mon téléphone et me dépêchais à aller dans ma conversation avec Sara.

"Salut! C'est juste pour te dire qu'il est très très probable que je me pointe chez toi pour ta soirée (je laisse 1% de doute au cas d'une urgence), compte sur moi ;)"

"Parfait, je note! Je te donne l'adresse! :)"

Une fois que je recevais son adresse, je décidais d'aller voir, ou plutôt entendre, ce fameux message vocal. J'appuyais sur la notification et mettais l'appel en mode haut parleur.

"Vous avez... Un nouveau message. Pour l'entendre, faites le-"

J'appuyais sur le 1 en soupirant. Je voulais juste savoir ce que c'était, pourquoi fallait-il passer par ce robot à chaque fois? Un silence se faisait avant que je n'écarquille les yeux en reconnaissant la voix.

"Mi-Mia..."

À coup sûr, c'était Benjamin. Il était clairement en train de pleurer, je l'entendais à sa voix. Sa voix que je n'avais pas entendue depuis près de deux mois... Je ressentais un pincement à cette pensée. 

"Je... Tu me manques. Putain, tu me manques! Décroche, merde! Je veux t'entendre pour de vrai! Pas juste dans ma tête!"

Avait-il par hasard bu? Nous n'étions que mercredi soir, pourtant... 

"Je... Je sais que j'ai tout gâché. OK? Je suis au courant et je sais que si tu ne décroches pas, c'est parce que tu me détestes. Je... Je ne veux pas, que tu me détestes! Pas toi! Tu peux pas!"

Je sentais ma lèvre trembloter à ses mots. Il semblait si faible. À moi aussi, il me manquait. Même si je m'efforçais de le cacher au grand public, je ressentais son manque. Il pensait vraiment que je le détestais? C'était loin d'être le cas... 

"Je sais que je t'ai menti sur qui j'étais... Tu peux pas savoir à quel point je m'en veux... Mais... Je veux que tu saches que pour tout le reste, je ne t'ai pas menti! Quand je disais que tu étais sympa, je ne mentais pas. Quand je disais que j'étais amoureux de toi... Je ne mentais pas, Mia..."

Je poussais un sanglot. Je sentais une larme dévaler ma joue.

"Je... Je t'aime Mia. Tellement que j'en peux plus, de tout ça! J'en peux plus, de la distance! C'est pas pour rien que je t'appelle pas Amelia ou avec une marque de respect puisque tu es une reine! Pour moi... Tu es plus qu'une simple mission... Plus qu'une simple reine d'un pays... Je suis amoureux de toi, je le pense vraiment..."

J'apportais ma main à ma bouche pour qu'on ne m'entende sangloter aux paroles de Benjamin. 

"Je sais que j'aurais plus jamais l'occasion de te revoir de face ou de t'entendre t'adresser à moi comme tu le faisais... Tu sais, j'adorais vraiment t'entendre parler, rire et même chanter dans la voiture... J'appréciais beaucoup ta compagnie. Au point qu'après la mission... Je me suis senti tellement horrible au point que j'ai démissionné. Je ne pouvais plus continuer..."

Cette fois, j'étais surprise. Je ne savais plus ce qu'il était devenu ces deux derniers mois, mais je ne pensais pas qu'il allait démissionner d'un poste d'agent. Je savais que ça payait très bien. 

"Je ne sais pas pourquoi je te raconte tout ça, en fait, je suis sûr que tu ne vas même pas écouter... Je suis complètement stupide, de m'accrocher à toi alors que je vois que tu t'en sors très bien... Comme s'il n'y avait jamais rien eu. Comme si cet été n'avait pas eu lieu. Je ne t'en veux pas, au fond..."

Les larmes continuaient de dévaler mes joues. Je ne prenais pas la peine de les essuyer. Ce qu'il me disait me faisait mal. Moi aussi, je vivais mal notre séparation, sauf que je n'avais pas le choix de me montrer forte aux yeux du public. Une reine pleurnicharde, quoi qu'on en dise, ça donne une très mauvaise image du pays qu'on est sensé diriger. Je devais me montrer souriante et sérieuse, en dépit du fait que la simple pensée de Benjamin me donnait envie de crier ma peine. 

"Tu n'es vraiment pas là, pas vrai? Pourquoi je prends encore la peine de te le demander, c'est clair que tu n'es pas là si tu n'as toujours pas répondu..."

Je l'entendais renifler à l'autre bout du fil. De la façon qu'il avait à parler avec interruptions, je devinais que lui aussi devait se trouver dans le même état que moi. Je l'avais entendu sangloter pendant qu'il me parlait. 

"Je vais raccrocher, alors... Je n'ai aucune idée de si tu écouteras ce message un jour... Mais si tu le fais, tout ce que je viens de dire était entièrement vrai. Je suis conscient qu'on ne se reparlera sans doute jamais, mais j'avais besoin de le dire. Alors, bon... Au revoir, Mia. Ou Reine. Ou Amelia. Ou comme tu veux."

Je n'entendais plus rien pendant quelques secondes. Ma gorge était sèche.

"Pour réécouter ce message, faites le-"

J'appuyais sur l'icone rouge et fermais mon téléphone avant de le déposer sur mon matelas. Je respirais lourdement et essuyais mes yeux et mes joues humides. Je restais un moment à fixer ma couverture et en repensant à l'appel de Benjamin. 

Après ce temps, je me levais et allais m'asseoir sur la chaise devant mon bureau, là où était déposé mon ordinateur. J'entrais mon mot de passe et me rendais sur Escape. J'avais besoin de me vider, et c'était l'endroit idéal pour le faire.

B,

Toi aussi, tu me manques. 

Je m'efforce de ne rien laisser paraître parce que je n'ai pas le choix de faire autrement, mais je ressens la même chose que toi, actuellement. Je m'ennuie de ton odeur, de tes bras, de ta voiture minable, de ton humour étrange, de tes jurons, de tes yeux, de tes cheveux... Je m'ennuie de toi, et je pense qu'aucune liste, même après en avoir fait l'essai à l'instant, ne pourra l'exprimer. Tu es plus que ce que je viens de nommer, je le sais, mais ça va au-delà des mots.

Je repense à nous deux, à tout ce que nous avons fait ensemble... Bordel, je souffre. J'aimerais vraiment pouvoir te détester pour m'avoir menti sur presque tout. Pourtant, je n'y arrive pas. C'est au-dessus de mes forces. 

Tu m'as apporté plusieurs notions qui m'étaient encore inconnues, et pour ça, je te remercie. J'apprécie vraiment que tu aies fait une chose pareille pour moi, malgré ce qui s'est passé. Je t'en serais reconnaissante pour toujours.

Moi aussi, je t'aime, B. 

-Mia.

Je relisais cette "lettre" pour vérifier si j'avais fait une quelconque erreur et voir si je devais, ou non, rajouter des morceaux. Quand je jugeais que c'était bon, je rajoutais un titre à l'article et cliquais sur "Publier". C'était le premier texte de ce genre que je publiais. Je me disais automatiquement que ça allait être la dernière fois, ne voyant pas comment je pourrais refaire une chose pareille sans inspiration. Et puis, le sujet "Benjamin" était sensible, pour moi. J'essuyais mes yeux avec une main et refermais la page avant de fermer mon ordinateur. Je me levais, allais brancher mon téléphone avant de me diriger vers la porte de ma chambre. J'en sortais et me dirigeais directement vers les sous-sols du châteaux, j'avais quelqu'un à qui parler. 

Je cognais à la porte d'un bureau et quand j'avais obtenu le droit d'entrer, je tournais la poignée avant de pousser la porte. 

-Oh! Majesté! Bonsoir! Ne devriez-vous pas...

-Je n'ai pas le temps pour ces façons, M.Jacques. J'ai une requête. Ou plutôt, un ordre. Lui dis-je en croisant mes bras.

-Tout va bien?

-Je veux que vous fassiez venir Benjamin Garnier ici demain. 

-Quoi?

-Vous m'avez entendue, je crois. Je le veux au château demain soir. 

-Mais, ma reine...

-Je ne veux rien entendre, si Benjamin Garnier n'est pas ici demain pour quatre heures, vous pouvez dire adieu à votre poste.

-Majesté, enfin! Ne soyez pas ridicule! Vous seriez prête à renoncer à moi en tant que directeur des-

-S'il le faut, oui. C'est urgent que je puisse le voir. Et puis, après ce que vous avez osez me faire cet été, je vous interdis de poursuivre votre phrase. 

-Mais... Comment voulez-vous que j'y arrive? Je n'ai pas les moyens de le faire venir ici en moins de vingt-quatre heures! Protestait-il. 

-Vous avez bien l'avion privé royal, non? Démerdez-vous. 

Sur ces mots, je quittais le bureau en fermant la porte derrière moi et je retournais à ma chambre au pas de course. Une fois que j'y étais, je fermais la porte derrière moi et glissais jusqu'au sol avant de m'asseoir au sol. Je respirais fort, mais ce n'était pas à cause de ma course. Demain, j'allais voir Benjamin. 


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Hey! 

Elle peut se montrer autoritaire, la petite Amelia! 

Sinon, juste pour vous avertir, le prochain chapitre, c'est le dernier avant l'épilogue. Et oui! Nous y sommes déjà! 

Il y aura tout de même deux parties bonus après, par contre.

J'espère que ce chapitre vous a plu! 

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