Chapitre Un

1.

Point de vue d'Amelia

Je suis un véritable cliché vivant. 

Je suis loin de le faire exprès, mais je n'ai jamais réussi à ne pas être autre chose qu'une image déjà préconçue. Je m'explique.

Déjà, je suis une princesse. Bon, d'accord. En soi, être de sang royal n'est pas quelque chose de cliché. Après tout, pour faire partie d'une royauté quelconque, il faut un peuple qui vient avec. Sinon, bah ça vaut rien. 

Bien sûr, la première image qui nous vient en tête quand on entend le terme "princesse" c'est une fille avec une robe imposante avec un diadème incrusté de pierres précieuses qui vient à l'esprit. Ça, c'est la princesse que tout le monde voit. Et bien, moi, je suis loin d'être ce genre de princesse.

Je déteste les robes. Je préfère nettement porter une paire de pantalons confortables, rester pieds nus, complètement démaquillée. Les seules fois où il m'arrive de porter ma couronne (qui est, 99% de temps, placée sous une vitrine en verre avec deux gardes à côté pour la surveiller), c'est lorsque je participe à des événements officiels: du type d'œuvres de charité ou de soirées importantes. 

Bien sûr, en voyant ceci, on se dit "mais c'est loin d'être cliché!". Par contre, ce n'est pas vrai. Parce que maintenant, je rentre dans la catégorie des princesses "rebelles". Malgré mes efforts, il fallait quand même me caser quelque part. 

On cogne à la porte de ma chambre, ce qui me ramène à la réalité.

-Entrez. Dis-je.

J'entends la porte s'ouvrir et je me tourne pour voir de qui il s'agit. C'est simplement Hubert, mon domestique.

-Bonjour, Majesté. Me salue-t'il.

Je me retiens sérieusement de ne pas souffler d'agacement. Même après les plusieurs tentatives pour qu'il m'appelle par mon prénom ou qu'il me tutoie, il continue tout de même à s'adresser à moi de cette façon. Je suis loin de détester Hubert. C'est un homme très gentil, très serviable. Mais parfois, il pourrait laisser tomber cette distance cachée sous une politesse inutile. Je ne suis qu'une princesse, ce n'est pas pour autant que je dois être traitée comme si j'étais le soleil: c'est à dire qu'on l'admire, mais qu'on n'ose pas le regarder. 

-Bonjour, Hubert. Lui dis-je de la même façon. 

-Vous avez bien dormi? 

-Oui, merci. Et vous?

-Très bien, merci de me le demander. Votre déjeuner vous convient?

-Oui, il était très bon. Vous passerez le mot à Joséphine de ma part! 

Joséphine était la cuisinière qui m'était assignée. Tous ses plats étaient tout simplement divins. J'étais vraiment contente que ce soit elle qui me prépare mes dîners. 

-Quel est mon programme de la journée? Demandais-je à Hubert. 

-Aujourd'hui, vous avez quartier libre jusqu'à treize heures. Heure à laquelle votre cousin Olivier doit arriver pour que vous passiez l'après-midi ensemble. D'autres questions, votre altesse?

-Non, merci, ce sera tout. 

Il hochait la tête avant de quitter la pièce en refermant la porte. Je soufflais. Dire que j'allais devoir passer mon après-midi avec mon cousin... Disons que ce n'était pas le type de personne que j'appréciais. Je le trouvais un peu trop imbu de lui-même, il prenait tout pour acquis. En bref: c'était une personne très superficielle. 

Je me levais de mon lit avant de prendre ma robe de chambre sur mon crochet et de me glisser dans ma salle de bain personnelle. Je programmais le haut-parleur pour que je puisse entendre de la musique pendant que je me lave. Je retirais mon pyjama avant de me glisser dans la cabine de ma douche et d'allumer l'eau. Une fois la température ajustée, je m'assurais que mes cheveux soient mouillés avant de les faire mousser à l'aide de mon shampoing. Une fois mes cheveux entièrement nettoyés, je passais au corps. Je m'occupais aussi de rendre ma peau plus douce à l'aide d'une crème. 

Je me brossais les cheveux avant de me vêtir de ma robe de chambre et de quitter la salle de bain. Je vais m'asseoir sur ma chaise à côté de mon bureau et ouvre mon ordinateur. J'ouvre une fenêtre pour me connecter à mon blogue.

Ce blogue, c'était le seul moyen que j'avais trouvé de m'inclure parmi le reste de la civilisation. Je sortais rarement du territoire du palais, c'était trop dangereux. Du moins, c'est ce que disait M. Jacques, le directeur des services secrets. Je pouvais sortir du palais, mais je ne pouvais pas passer les grilles. Je ne connaissais pas le monde extérieur. Je n'avais aucun ami (à moins de compter, peut-être, le personnel du château). Ironiquement, on m'avait acheté un téléphone portable. C'était plutôt inutile puisque je n'avais personne à contacter. Ainsi donc, j'avais créé un blogue que j'avais nommé: Escape. J'y écrivais de nombreux textes, de tous genres. Bien entendu, on ne pouvait pas savoir que c'était moi qui le tenait. Alors, je m'étais donné un pseudonyme: Mia. Je l'avais choisi à partir de mon prénom, qui est Amelia. J'avais simplement gardé les lettres "M", "I" et "A". 

Mon blogue était suivi par quelques centaines de personnes, qui disaient adorer ce que j'y écrivais. Je les remerciais toujours. On pouvait dire ce qu'on voulait, mais le net était vraiment un endroit génial. Il me permettait de parler à des gens, même s'ils n'étaient pas devant moi. 

Je commençais à écrire.

J'en ai un peu marre. Il faut dire que j'ai envie de nouveauté. Je veux pouvoir vivre mes propres expériences, je veux pouvoir sortir simplement, pour me promener, observer les gens et la nature... Je veux. J'ai beaucoup de volontés, mais aucun pouvoir de les accomplir. Je ne suis pas dans une position qui me permet de faire ce genre de chose. Je suis prisonnière d'un monde dans lequel j'aimerais ne pas faire partie. Tout est si difficile, et je sais que j'ai l'air d'une pourrie gâtée qui ne sait pas ce qu'elle veut, mais j'aimerais tout de même pouvoir connaître autre chose. Je ne pense pas être prête à vivre réellement tant que je n'ai pas eu la possibilité d'explorer autre chose. 

Je suis la Raiponce des temps modernes. À l'exception que ma Gothel n'est pas une personne, mais un statut qui m'oblige à ne suivre qu'une seule voie. Mon rêve, ce serait de trouver une carte et de la suivre jusqu'à l'emplacement du X rouge. 

-Mia.

Je me relisais rapidement avant de vérifier si j'avais fait une quelconque faute avant de cliquer sur le bouton de publication. Je refermais mon ordinateur avant de me lever pour me préparer à la venue de mon cousin. Bien sûr, je devais bien paraître devant lui parce qu'il insisterait sans doute à prendre une photo pour la poster sur internet et que je ne devais pas salir l'image de la royauté du pays. J'appuyais sur le bouton pour ouvrir ma penderie et sélectionnais le type de vêtements que je voulais. Bientôt, une robe noire arrivait. Je la décrochais du cintre et la déposais sur mon lit que je n'avais pas encore fait. J'attrapais des sous-vêtements avant de laisser tomber ma robe de chambre et les enfiler. J'enfilais par la suite ma robe et me plaçais devant mon miroir pour me coiffer et me maquiller. Une fois que j'avais terminé, je prenais la première paire de ballerines que je trouvais avant de les chausser. Même si je devais m'habiller "bien", je restais chez moi. Je n'allais pas mettre des talons. 

Je quittais ma chambre et commençais à marcher dans le palais. Je m'arrêtais, comme à mon habitude, dans le corridor où se trouvait tous les portraits de tous les dirigeants de la Fiorélie. Je m'arrêtais devant le tableau du roi Gabriel IV et de la reine Amelia, la première. 

Moi, j'étais Amelia la troisième. Pourtant, je ne ressemblais en rien aux deux premières Amelia avant moi. Du côté psychologique, je n'avais aucun moyen de le savoir à moins de consulter les archives. Et même là, je n'étais pas sûre d'y trouver ce point d'elles. Les deux premières Amelia paraissaient si fières, si sûres d'elles. Elle étaient imposantes, tout simplement. Moi, comparé à elles, je n'étais même pas près de les égaler. 

En plus, le fait que mon nom comporte le chiffre III prouvait que je ne serai jamais unique. Et ça, je trouvais que c'était injuste. Je n'avais même pas encore une personnalité définie qu'on m'interdisait déjà d'être spéciale. On me condamnait d'avance à rester qu'une pâle copie de mes deux ancêtres. 

Je me promenais encore dans ce corridor que je connaissais par cœur. Je regardais tout de même chacun des tableaux, espérant y voir quelque chose que je n'avais pas encore remarqué. Je m'arrêtais enfin devant le tableau de mes parents. Le roi Philippe VI et la reine Diana. 

Je ressemblais beaucoup à ma mère. J'avais hérité de sa belle chevelure blonde, de sa peau blanche, et même de sa taille, étant assez petite. D'un autre côté, j'avais hérité des yeux verts de mon père, de son sourire, et de sa prestance, à ce qu'on m'avait dit. Je disais ça parce que, voici une autre des raisons pour laquelle je suis un cliché, mes parents étaient morts et que je n'avais pas eu l'occasion de le constater de mes propres yeux.

Ma mère est décédée quelques temps après m'avoir mise au monde, suite à plusieurs complications. Je ne l'aurai donc connue que quelques jours, mais je ne m'en souviens pas. 

Mon père, quant à lui, est mort il y a six ans. Il était atteint d'un cancer. J'adorais mon père, il arrivait toujours à trouver du temps pour moi, même malgré le fait qu'étant roi, il avait énormément de responsabilités. Il m'a enseigné plusieurs choses que je m'efforce encore de mettre en pratique aujourd'hui. Quand j'ai appris pour sa mort, dire que j'étais triste ne représentait pas la réalité. Pour moi, il était plus que mon père et le roi, c'était un ami. Le seul que j'avais.

Je soufflais en regardant le tableau. Un jour, ce serait à mon tour de me retrouver peinturée dans ce couloir, juste en face de mes parents. Je ne savais même pas si je serais capable d'être digne d'eux. Je ne connaissais pas suffisamment le monde extérieur. Comment serais-je capable de diriger un peuple dont je ne connais rien? Comment pourrais-je changer leur monde en dirigeant quelque chose que je ne savais pas? 

-Majesté? Votre cousin est arrivé. Entendais-je du fond du couloir.

-Merci, Hubert. Dites-lui que j'arrive dans deux minutes. 

-Bien.

Les pas s'éloignaient et je continuais à fixer le tableau de mes parents. Je quittais par la suite le corridor et me dirigeait vers le jardin, en direction de la table où serait assis Olivier. Je le repérais rapidement. Il avait les yeux plongés dans l'écran de son portable. Je prenais une inspiration et forçait un sourire avant de me poster devant la table et de m'asseoir.

-Salut, Oli. Dis-je.

-Bonjour, Amelia. Combien de fois t'ai-je demandé de m'appeler par mon prénom complet?

Je me forçais vraiment à ne pas lever les yeux au ciel. 

-Pardonne-moi. Lui dis-je.

-Ce n'est pas grave. Tu as passé une bonne semaine? 

On nous apportait du thé et des pâtisseries de tous genres.

-Merci beaucoup, Hubert! Dis-je à mon domestique.

Il me souriait et ignorait Olivier avant de repartir vers l'intérieur du château. Il n'allait jamais me l'avouer, mais je savais pertinemment qu'il n'appréciait pas mon cousin tout comme moi. C'était un secret que nous partagions tous les deux. 

-Tu devrais réellement songer à mettre ton domestique à la porte. Me dit Olivier d'un coup.

-Quoi? Mais pourquoi ça? Hubert est très bien! 

-Il ne sait pas ce qu'est la politesse, il ne m'a pas salué. 

-Hubert a un emploi du temps très chargé... Des oublis, ça arrive... 

-C'est une erreur inacceptable. Je suis le fils du compte de...

J'arrêtais de l'écouter à cet instant précis. Il fallait dire que mon cousin m'ennuyait vraiment par moments. Par contre, je m'efforçais de ne pas lui dire en face. Malgré tout, il restait un membre de ma famille. Et je restais une princesse. Je devais rester polie en toutes circonstances. C'est pour cette raison que je souriais en hochant la tête à tout ce qu'il pouvait bien dire. Je prenais également de temps à autre une bouchée des pâtisseries posées sur le plateau ainsi que des gorgées de ma tasse de thé. J'avais simplement hâte que l'après-midi se termine pour qu'il puisse partir. 

Au bout d'un moment, le plateau et ma tasse s'étaient vidés. Je devais trouver un moyen de faire taire Olivier qui parlait à présent de son projet de vacances sur son île privée.

-Bon! Voudrais-tu que nous fassions une activité? L'interrompais-je.

-Comme quoi? J'aime bien discuter avec toi, moi.

Discuter n'est pas un synonyme de parler que de soi, pourtant...

-Oui, mais ce n'est pas bien de rester inactif, tu sais?

-Tu as raison, je dois maintenir ma ligne. 

Je ne prêtais pas attention à ce qu'il venait juste de dire et je me levais avant de le mener à l'écurie. Par chance, je retrouvais du personnel. Je leur demandais gentillement de préparer deux chevaux et j'allais attraper mon casque avant d'en tendre un à mon cousin. Il décidait d'enfiler ses bottes qu'il avait laissé ici. Une fois que les chevaux étaient prêts, on m'aidait à monter sur le mien (même si j'étais parfaitement capable de le faire seule). 

-Merci, Jérôme. Dis-je tout de même.

-De rien, princesse. 

Je m'assurais qu'Olivier était prêt pour qu'on puisse partir. On passait donc le reste de l'après-midi à nous balader à cheval. Ce qui était bien, c'est que mon cousin avait tellement peur de tomber qu'il était pleinement concentré à bien tenir les reines de son cheval. Quant à moi, je profitais du bon temps et de ma balade avec Hévéa, ma jument. 

Au bout de quelques heures, Olivier inventait qu'il devait partir. On retournait alors à l'écurie pour rapporter nos chevaux et je raccompagnais mon cousin devant la grille.

-J'espère que tu as passé un bon moment. Lui dis-je.

-Oui, merci beaucoup Amelia. 

Il montait dans la voiture et, rapidement, la grille s'ouvrait laissant sortir le véhicule. Je restais debout à regarder la voiture quitter le palais pendant que la grille se refermait.

-Au moins, il a le droit de partir, lui... Soufflais-je. 

Je me retournais pour entrer dans le palais.

-Majesté, le repas est prêt et vous attend dans la salle à manger. M'avertit Hubert. 

-Parfait, j'arrive tout de suite. 

Je me dirigeais d'abord à la salle de bain pour répondre à mes besoins naturels et me laver les mains. Je me dirigeais ensuite à la salle à manger. Je m'installais à table et commençais à manger mon entrée. 

-Vous allez bien, votre altesse? Me demandait un serveur qui m'apportait le plat principal.

-Oui, ne vous en faites pas. Merci de le demander, Normand. 

Je lui souriais et il faisait de même avant de quitter la salle à manger, me laissant complètement seule.

Je regardais autour de moi et soufflais. Ma salle à manger était immense. À quoi ça pouvait bien servir si j'étais la seule à y manger? Je me sentais complètement seule. 

Je terminais mon assiette et on m'apportait un dessert. Je déclinais en disant que je n'avais plus faim et me levais de table en indiquant de remercier Joséphine pour ce repas. Je commençais à me promener dans le château et entrais dans la chambre de mes parents. J'allais me coucher sur le lit. Pour une fois, je ne me sentais pas seule.


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Hey!

Voici donc le premier chapitre de cette histoire! Vous venez de faire la connaissance d'Amelia, la princesse :) 

J'espère que le chapitre vous a plu! 



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