Chapitre Seize

16.

Point de vue de Benjamin

Ma première pensée au réveil avait été de me dire: merde.

Je venais de me réveiller, et je constatais que je maintenais la princesse contre moi tandis qu'elle était pratiquement pendue à mon cou. 

Je prenais conscience de ce qu'elle et moi nous étions dit la veille. Je n'avais pas menti, mais je n'avais pas le droit de lui dire ça. Mon travail me l'interdisait: je devais la protéger et la ramener à Paris seulement. Je ne devais pas dépasser les limites de l'amitié avec elle. Ça ne faisait pas partie de ma mission. 

Je pense qu'il était mieux d'arrêter de perdre du temps et de reprendre la route pour arriver le plus rapidement possible à destination. Je devais arrêter tout ce cirque avant que ça ne nuise à ma carrière. Ça pouvait paraître égoïste comme vision, mais je ne pouvais pas tirer un trait sur quelque chose sur lequel j'avais travaillé tellement fort pour y arriver. Certainement pas pour la future reine de Fiorélie. De toute façon, c'était foutu d'avance. 

Je chassais ces pensées de mon esprit et refermais les yeux en resserrant ma prise autour de sa taille. Je constatais que nous avions tous les deux bougés durant la nuit. Sa tête était tournée vers le plafond, elle avait une jambe glissée entre les miennes et l'autre repliée de l'autre côté. Ses cheveux étaient dans tous les sens. Je voulais profiter de ces quelques moments de proximité avant de devoir repartir. 

Après un certain moment, je sentais du mouvement de son côté et je souriais en ouvrant les yeux. Je la voyais bailler doucement en clignant des yeux pour les ouvrir complètement. Je relevais une des mes mains pour glisser une des mèches de ses cheveux derrière son oreille.

-Bonjour. Lui dis-je doucement.

-Bonjour... Il est quel heure? 

-J'en sais rien. Mais si tu veux mon avis, il faudrait se lever pour partir le plus vite possible. 

-On peut pas rester encore un peu? Demandait-elle en faisant une petite moue. 

Elle était adorable, et il était vrai que j'avais envie de passer quelques minutes de plus dans ce lit avec elle. Mais, il fallait vraiment que nous reprenions la route. Nous devions être à Paris dans quelques jours. D'ailleurs, hier soir, j'avais reçu un message de M.Jacques. Il me donnait rendez-vous au pied de la tour Eiffel à quatre heures de l'après-midi.

Je n'arrivais pas à croire que la mission allait toucher à sa fin dans quelques jours. Au début de l'été, j'avais pensé que je serais coincé dans ce petit village de rien à m'emmerder profondément. Et finalement, c'était exactement le contraire qui s'était produit. Ça avait été deux mois simplement géniaux. J'espérais simplement qu'Amelia réagisse bien quand je lui dirais qu'en fait, je travaille pour les Services Secrets Fioréliens. Ça ne devrait pas être si horrible, pas vrai? Elle devrait comprendre qu'il était essentiel qu'elle soit protégée. 

-Il ne faut pas non plus abuser de l'hospitalité que nous avons reçue. Il serait mieux de repartir le plus vite possible. 

Elle poussait un soupir avant de hocher la tête.

-Tu veux prendre une douche avant de partir? Lui demandais-je. 

-Non, c'est bon. Tu en as plus besoin que moi, de toute façon.

-Qu'est-ce que tu veux insinuer par ça, dis moi? 

-Je pense que tu m'as très bien comprise, Ben. Répliquait-elle, un sourire au bout des lèvres.

-Dites donc, ce que vous êtes impolie, votre altesse.

-Roh, s'il-te-plaît, pas de ça avec moi. Si tu savais à quel point j'ai insisté pour que les gens aux château me tutoient et m'appellent par mon prénom, sans succès. 

-C'est bon, je blaguais. Je vais à la douche. Je te laisse te préparer ici. Je reviens vite. 

Je me levais du lit et attrapais mes vêtements pour la journée avant de me diriger vers la salle de bain. Je m'occupais d'abord de soulager ma vessie avant de sauter sous le jet d'eau et de me laver rapidement la tête et le corps. Je me séchais vite, m'habillais et me brossais les dents avant de quitter la salle de bain. Je n'avais pas pris trop de temps, mais je remarquais qu'Amelia n'était plus là. Les valises étaient toutes bouclées. Je fronçais les sourcils et commençais un peu à paniquer. Où était-elle passé?

Je sortais de la chambre et descendais à l'entrée. J'entendais un bruit venant de la cuisine, alors je m'y dirigeais et je découvrais Amelia en train de discuter avec l'une des filles que j'avais emmené ici la veille. 

-Oh, bonjour Ben! Tu as faim? Me demandait celle-ci en me souriant. 

-On t'a réveillée? 

-Non, t'en fais pas. Mais réponds. Tu as faim? 

-Qu'est-ce que tu as?

-Et bien, nous avons des croissants, des pains au chocolat, de la confiture aux fraises et du jus d'orange. Comme tu le vois, tout est posé sur la table alors, sers toi et fais comme chez toi. 

-Tu en fais beaucoup trop, tout ce que nous avons fait, c'est vous ramener ici... 

-Ça ne me dérange pas le moins du monde. Maintenant viens t'asseoir avec nous!

Je m'installais sur la chaise à la droite d'Amelia. Devant moi, il y avait une assiette. Je décidais de faire le plein de pains au chocolat, laissant les filles discuter entre elles. Je devais avouer que c'était bon et que ça faisait du bien de manger un réel déjeuner, pour une fois. Quand nous avions terminé, j'allais mettre nos affaires dans le coffre pendant qu'Amelia disait au revoir aux filles. En cinq minutes, nous nous retrouvions déjà sur l'autoroute, en direction de Paris.

-Ça peut sembler tout bête, mais elles vont me manquer, quand même. Dit-elle au bout d'un moment. 

-C'est loin d'être bête. Et puis, tu pourras toujours y retourner une autre fois.

-Oh, ça j'en doute fort...

-Et pourquoi? 

-Bah, avec les gardes qui ne me laissaient quitter le palais que pour des événements importants...

-Mia, crois-moi, à ton retour, tu pourras quand tu voudras. 

-Comment tu peux en être aussi sûr? Me demandait-elle.

-Parce que tu deviendras la reine. C'est toi qui sera aux commandes. Si tu veux aller quelque part, tes gardes vont devoir se plier à ta volonté. Ils ne pourront plus rien t'interdire. S'ils essaient quelque chose, tu es en pouvoir de les mettre à la porte. Dès ton retour, à partir du jour de ton anniversaire, quand tu prendras officiellement le titre de reine de Fiorélie... Tu seras libre, Mia. 

Elle restait silencieuse. Je l'entendais renifler.

-Qu'est-ce qui ne va pas? 

-C'est juste que... Je trouve ça... Tellement injuste. 

-Comment ça?

-Peux-tu arrêter la voiture, s'il-te-plaît?

Une fois mon clignotant mis, j'allais dans la voie de service. Je mettais mes feux d'urgence et enclenchais le frein à main avant de couper le contact.

-Je trouve ça injuste, Ben. Toute ma vie, j'ai été éduquée à l'idée de devenir la prochaine reine. Mais, pour ça, j'étais sans cesse contrôlée. Toutes mes journées ont... toujours été planifiées à l'avance. Je n'ai jamais eu d'imprévu. 

-Je ne vois pas en quoi c'est mal, d'avoir tout organisé parfaitement.

-Ce n'est pas moi, qui gérait mon temps! Je n'avais pas la liberté de le faire! Je devais seulement m'y conformer, un point c'est tout. Est-ce que tu as idée de ce que c'est de regarder la télé et de voir aux nouvelles locales des personnes marcher dans la rue librement, simplement parce qu'elles le voulaient? Je... Je vis dans une véritable prison dorée, Ben! Tout ce que j'ai toujours voulu, c'est juste pouvoir parler avec des gens, vivre une vie à peu près normale! Pas qu'on me sorte qu'à certaines soirées mondaines où je m'ennuie à mourir que parce que je suis une princesse. C'est injuste, tout ça! Je n'ai jamais demandé à être qui je suis! Je... Je veux juste savoir ce que c'est, d'être une fille de 17 ans ordinaire, pour une fois. 

-Tu n'as pas envie, d'être reine?

-Ce n'est pas ce que je dis... Mais, je ne vois pas comment je pourrais diriger tout un pays dont je ne connais pas les habitants. 

Je comprenais ce qu'elle voulait dire.

-Je vois souvent des gens se plaindre de leurs dirigeants. Je n'ai pas envie qu'on me déteste parce que je ne satisfais pas les besoins de mon peuple. D'un autre côté, comment pourrais-je savoir ce qu'ils veulent si je ne suis pas en contact avec eux? J'ai l'impression qu'on a trop d'attentes envers moi, et j'ai peur de décevoir tout le monde. De ne pas être à la hauteur. 

Ce n'était donc pas qu'une question de liberté, son problème. Elle se mettait trop de pression.

-C'est pour ça que tu as fugué? Lui demandais-je.

-Je n'aime pas trop ce terme, mais oui. Je voulais un peu décompresser, mais aussi expérimenter quelque chose de nouveau. 

-Mia...

Je prenais son visage en coupe d'une main.

-Tu t'en fais beaucoup trop. 

-Ben...

-Laisse moi terminer. Tu es une des personnes les plus merveilleuses que j'ai pu un jour rencontrer. Tu es gentille, tu es prête à aider les gens, tu es humble, tu es curieuse et tu n'as aucun problème pour ce qui en est de communiquer avec des personnes. Je suis certain que tu feras une excellente reine. Le fait que tu te soucies autant de satisfaire les gens le prouvent. Je sais déjà que tu ne vas pas te contenter de t'asseoir sur ta fortune. Tu veux savoir? Je ne crois pas trop à ces conneries de vie après la mort, mais je suis sûr que si tes parents pouvaient te voir, ils seraient extrêmement fiers de la personne que tu es devenue. 

-Tu le penses vraiment?

-Bien sûr que si. 

Je lui souriais doucement et elle me le retournait. 

-Merci beaucoup, Ben. J'apprécie vraiment. 

-C'est normal. Allez, approche. 

Je lui ouvrais les bras pour l'inviter vers moi. Elle se collait à moi automatiquement, mais pas qu'avec son corps. Avec sa bouche aussi, qui était contre la mienne. J'avais les yeux grands ouverts, je ne réagissais pas. Je ne m'y étais pas attendu. Elle se décollait rapidement.

-Oh, pardon! Je ne voulais pas, je-

Je la coupais en la tirant vers moi pour sceller nos lèvres ensemble. C'était vachement bon, d'enfin pouvoir goûter sa bouche. Je commençais à mouver mes lèvres lentement, lui laissant le temps de comprendre ce qu'elle devait faire. Je savais que c'était son premier baiser, alors je lui apprenais ce qu'il fallait faire. Elle apprenait plutôt vite. Après quelques temps à s'embrasser lentement, j'entreprenais d'accélérer la cadence, la rapprochant encore plus de moi en entourant sa taille d'un bras. Elle s'asseyait sur mon bassin, un bras autour de ma nuque et l'une de ses mains se perdait dans mes cheveux. Je commençais à taquiner sa lèvre de ma langue pour lui faire comprendre qu'il fallait maintenant qu'elle ouvre la bouche. Elle comprenait enfin et je m'empressais de découvrir sa bouche. C'était purement divin. J'avais mal aux lèvres, tellement nos bouches étaient pressées fort l'une contre l'autre, mais je ne voulais en aucun cas m'éloigner. Je posais ma main contre sa joue pour la tenir contre moi. 

Et puis, la réalité me rattrapait. Je ne pouvais pas faire ça. J'étais en mission. Amelia était ma mission. Ce n'était pas une fille ordinaire avec qui je pouvais avoir une telle proximité. M.Jacques me l'avait complètement interdit. 

Je ralentissais le baiser pour, qu'au moins, ce ne soit pas trop brusque. Je terminais par retirer ma bouche de la sienne et éloignais mon visage. Elle avait la bouche entrouverte, les lèvres rouges, les yeux toujours fermés. Elle les ouvrait doucement. Je pouvais voir une lueur à l'intérieur. Je sais qu'à cet instant, j'aurais dû la repousser et remettre les points sur les i, regretter ce qui venait juste de se passer. Pourtant, c'était exactement le contraire. 

-Je t'aime, Benjamin. Me dit-elle en ouvrant les yeux pour me regarder. 

-Je t'aime aussi, Amelia. 

Après tout, je le pensais réellement. Je n'allais pas le lui cacher alors qu'elle me le disait elle-même. 

-Et, je veux que peu importe ce qu'il se passe, tu ne l'oublies pas. 

-Comment est-ce que je pourrais? J'ai passé le meilleur été de toute ma vie. Et, je sais que ça n'aurait pas été la même chose si je ne t'avais pas rencontré, dans ce stand. 

-Tu aurais sûrement trouvé quelqu'un d'autre...

-En fait, je dois t'avouer que je n'avais pas vraiment prévu d'engager quelqu'un pour me conduire jusqu'à Paris, à la base.

-Vraiment? Mais c'était quoi, ton plan? 

-J'en avais aucun. C'est juste que j'ai fini par me rappeler que je n'avais pas la moindre idée de l'endroit où je me trouvais et que je ne savais pas par quel moyen je pouvais me rendre à Paris à pied. Du coup, quand tu m'as aidée, je me suis dit que tu pouvais peut-être encore le faire. Et à ce que je vois, je ne me suis pas trompée, tu as vraiment été serviable.

Je ressentais un léger pincement. J'étais hypocrite. Si j'avais accepté de l'aider au départ, c'était parce que j'avais pris conscience qu'elle était la princesse de Fiorélie. Autrement, je ne l'aurais jamais fait. Notre relation actuelle était basée sur un mensonge. 

-Attends, Mia. Il faudrait que je te dise quelque chose. 

-Ouais?

-Je-

Mes mots restaient coincés au travers de ma gorge. Je n'y arrivais simplement pas.

-Je... Je suis ravi de t'avoir rencontrée.

-Ne me fais plus jamais un coup pareil! Pendant un instant, j'ai pensé que tu allais m'avouer quelque chose de grave! Riait-elle. 

Je riais aussi, tentant de cacher mon malaise. 

-Oh! Attends, avant que j'oublie!

Elle prit son sac qu'elle avait déposé au sol devant son siège, et fouillait à l'intérieur avant de ressortir ce que je comprenais être un chéquier.

-Attends, attends, mais qu'est-ce que tu fais?

-Le voyage se termine bientôt, alors il serait bien que je te paie, maintenant...

-Mia, non, range tout ça.

-Mais, Ben...

-Je ne veux pas de ton argent, d'accord? Ça va. Lui dis-je doucement.

-Mais non, il faut que je te paie, c'est ce qui était convenu! 

-Mia, ça va. Tu n'as pas besoin de le faire.

-Mais, tu as dépensé énormément d'argent pour moi! Je ne peux pas te laisser sans te le rendre!

-Écoute, j'apprécie ton intégrité et tu pourras essayer de me filer tout l'argent du monde que je ne l'accepterais pas. J'insiste, garde le.

Je ne peux pas profiter de toi encore plus que ce que je fais déjà... 

-D'accord, comme tu veux... Dit-elle en rangeant son chéquier. 

-Alors, on reprend le chemin? Lui demandais-je.

-Oui, attends que je me replace et on peut repartir. 

J'attendais qu'elle se réinstalle sur son siège avant de redémarrer la voiture et de retourner sur la route. 


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Hey!

Je sais, ça fait un moment, j'ai vraiment été occupée ces derniers temps

Mais bon, quoi qu'il en soit, j'espère que ce chapitre vous a plu! 


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