Chapitre 28

Bhohort releva la tête quand il vit Hamza de retour. Ce dernier apportait dans ses mains ce qui semblait être des pêches. Tarenn, lui, continua à étendre au maximum la grande couverture afin de disposer le plus de nourriture possible fait par Tong. Il releva sa tête et l'interpella :

- Te voilà !

Il alla à l'encontre de son mari qui était tout souriant. Bhohort eut un pincement au cœur sur le moment en les voyant ainsi si heureux. Puis il sentit poindre une pointe de jalousie.

- Ils sont ensembles et rayonnants, marmonna Bhohort.

Soudain il prit conscience qu'il manquait Idill, mais aussi sa goule. Il s'approcha du couple amoureux et s'intercala presque entre eux deux.

- Où est Idill ?

- Il... N'est pas revenu ? demanda Hamza circonspect

- Tu vois bien que non, sinon il se serait encore jeté dans tes bras, cracha Bhohort.

Tarenn l'attrapa par le bras pour lui signaler sa mauvaise façon de parler au prêtre. Le chevalier s'échappa de son emprise et redemanda :

- Où est il alors ?

- Il... S'est éloigné un peu plus loin dans le verger, pour suivre votre goule. Je pensais qu'ils auraient fini avant moi. Ça fait un petit moment que j'étais dans le verger... Ne pouvez vous pas rappeler Léonore ?

Bhohort tiqua au nom de sa mère.

- Comment connais tu son vrai nom ? gronda t-il

Hamza recula d'un pas. Il balança des coups d'œil furtifs, mal à l'aise, puis avoua :

- Il me l'a dit...

Bhohort grogna, et alors qu'il allait lui crier dessus, Hamza demanda :

- Votre goule, n'aviez vous pas dit que vous étiez constamment en contact avec elle ? Peut être que...

Bhohort se concentra de suite sans attendre la fin de la phrase. Son esprit chercha, l'appela, mais rien... Elle ne répondait plus. Cela ne voulait dire qu'une seule chose, il lui était arrivée un pépin. Sans rien dire, il s'éloigna du couple pour se diriger lentement vers le verger, puis ses pieds se mirent à accélérer. Il entendit qu'on l'appelait au loin, mais il ne répondit point. Tout son corps se mit à chauffer, puis la malédiction prit le dessus et il se transforma brutalement. Ses vêtements se déchirèrent sous la contrainte de ses muscles volumineux et il se mit à courir.

- Idill !!!!!!!!! Hurla t-il

Il entra dans la foret d'arbres fruitiers.

- IDILL !! Léonore !!

Seuls les oiseaux lui répondirent dans un envol fracassant. Il s'enfonça un peu plus dans le verger et leva sa truffe pour inspirer fortement l'air ambiant. Il n'aimait pas se comporter comme un chien, mais là il n'avait pas le choix. Il sentit d'abords une désagréable effluve pourrissante qui ne pouvait être que Léonore. Plus subtile, l'odeur d'Idill se distinguait à peine, mais elle est présente au coté de celle de sa mère. Il suivit cette trace olfactive. Le nez constamment en l'air, il découvrit alors qu'il n'y avait beaucoup, beaucoup d'insectes. Il fronça ses gros sourcils poilus et pesta. Il avait appris lors d'une des escapades du prince Anduin, qu'Idill n'était pas un froussard, mais il avait avoué à demi mot et honteux qu'il avait du mal à faire face aux insectes, et plus particulièrement...

La pensée de Bhohort s'arrêta, devant une telle évidence.

- Merde ! IDILL ! LÉONORE ! Faites pas les cons où êtes vous ?

Seul le croassement d'un corbeau lui répondit.

- C'est plus au fond !

Bhohort se retourna et découvrit ses canines en signe de défense. Il se trouva nez à nez avec un cerf et un jeune blond le montant.

- J'étais ici quand Idill et votre goule sont partis dans cette direction, dit Hamza

Il montra du doigt le verger qui semblait s'assombrir.

- Je sens son odeur, mais... Il ne me répond pas, ni Piletombe.

- Alors ne trainons pas, dit le majestueux cerf.

Bhohort ouvrit la marche, comme un chien de piste, il reniflait les odeurs. Sans un mot, le couple le suivit et ils s'enfoncèrent un peu plus. Les branches des arbres étaient plus nombreuses, plus intrusives sur leur chemin. Les arbres fruitiers laissèrent la place à des végétaux et des buissons plus épais et piquants. Bientôt ils eurent des difficultés à avancer.

- Bon sang, qu'as tu fait Idill ? Murmura Bhohort.

Une troisième odeur semblait se fondre avec celle d'Idill et de Léonore. Une odeur qui ne plut pas au worgen. Il accéléra le pas, se glissant sans trop de mal parmi les bois. Ce qui n'était pas le cas du druide et du prêtre. Ils ne faisaient que le ralentir.

- Attendez !! Hurla Hamza

- Non, je sens que ... gronda Bhohort.

Sans les prévenir, il se mit à galoper. Sa fourrure se prit plusieurs fois dans les ronces, arrachant en passage quelques touffes de poils, mais il n'en teint guerre compte. Son corps était à l'affut, car il le savait maintenant. Il était arrivé quelque chose à Idill.

Alors qu'il avançait les odeurs se firent plus fortes, et bizarrement surtout celle d'Idill. Elle suintait de transpiration maintenant. Les branches se firent plus disparses et soudain une petite clairière apparut, en même temps qu'un monstre volant au dessus d'un corps allongé. Le sang de Bhohort ne fit qu'un tour, et il bondit d'un coup dans la clairière.

L'énorme guêpe qui était concentré sur sa proie, s'immobilisa et se tourna vers la bête. Le worgen grogna un long moment avant de se jeter dessus. D'un bond, il arracha une première aile, qu'il emporta dans sa gueule. Il fit un volte face pour attaquer de nouveau. La bestiole s'en vola du mieux qu'elle pouvait pour ensuite replonger avec son dard en avant. Bhohort l'évita de justesse, puis se plaça devant le corps inerte d'Idill.

- Tu ne le touchera pas ! cria t'il

A peine les mots sortis, qu'il se rua de nouveau sur le monstrueux insecte. Celui ci prit une fois de plus son envol, et tourna comme un vautour. Dans ce moment de répit, Bhohort se précipita vers Idill.

- Idill! Je t'en prie, répond moi ! Dis quelque chose !

Il prit le jeune roux dans ses bras, le secouant au passage. Sa tête dodelinait comme pouvait faire sa goule. Sans muscle pour la retenir. Les paupières ne s'ouvrirent point aux murmures affolés du worgen.

- Idill, je t'en prie, réveille toi...

L'énorme patte caressa le visage blême du guerrier sans réaction.

- Attention !!! Hurla une voix

Bhohort n'eut pas le temps de se retourner vers la guêpe. Le dard se planta dans son dos. Une douleur diffuse se propagea dans tout son corps. Mais elle s'effaça rapidement. Il posa délicatement Idill à terre, se releva et d'un coup, enlevant l'aiguillon planté pour le lancer en direction du volant.

- Tu vas me le payer, sale monstre... grogna le worgen.

Des ombres parcoururent alors le sol, puis brusquement des tentacules percèrent à proximité de la bête volante. Les appendices attrapèrent l'abdomen pour le plaquer au sol.

- Allez y ! Cria Hamza

Le worgen sourit et sortit ses griffes. Ses yeux brulèrent d'une flamme incandescente, et il se jeta sur l 'hyménoptère avec une furie qui pouvait être palpable. Il arracha d'abords la tête du reste du corps, puis il déchira d'un coup de mâchoire une partie de l'abdomen qu'il envoya valser très loin, avant de reprendre son acharnement. La guêpe était morte depuis qu'il avait séparé la tête, mais cela ne faisait rien. Toute sa rage et toute sa colère se déversaient sur l'insecte . Dans cette férocité, ni Hamza, ni Tarenn n'eurent envie de l'intercepter. Bien au contraire, ils le laissèrent faire, se vautrant dans cette frénésie incontrôlable.

Il ne vit pas que Tarenn s'était approché d'Idill. Ni qu'il avait imposé ses mains, murmurant des mots dans la langue des elfes de la nuit, ni qu'il avait effleuré la poitrine du jeune homme pour extraire le poison qui s'était diffusé dans ses organes. Non rien de cela, mais Bhohort fut soudain fatigué par toute cette violence, et il laissa enfin l'insecte pour se concentrer sur Idill.

- Il va bien ? Demanda t'il

- Il va mieux, répondit Tarenn tout en reposant la tête du guerrier.

Bhohort prit alors conscience de la violence du combat. Il se redressa et sans regarder ses deux comparses, il sortit :

- Elle, la guêpe, j'ai cru... qu'elle l'avait tué.

Il posa un regard sur Idill toujours inconscient.

- Je...

- Nous vous ne jugerons pas sur cet acte, répondit Hamza avec empressement. De plus je vous ai aidé à cela...

Il faisait allusion à ses tentacules. Bhohort resta silencieux. Ils avaient vu le déferlement de haine qu'il pouvait avoir, ce manque de contrôle qu'il lui avait fait perdre la confiance d'Idill. Il balaya d'une patte le reste de l'insecte accroché dans ses babines, et avança vers le guerrier. Il jeta un coup d'œil dans les alentours, pour enfin apercevoir le corps de Piletombe un peu plus bas. Il pesta, puis regarda Idill. Sa goule avait surement essayer de protéger le jeune roux, mais à quel prix...

Le worgen se baissa, glissa ses pattes sous le corps de son aimé inconscient et l'attrapa. Il se leva, jeta un coup d'œil à l'Archidruide puis à Hamza, attendant une quelconque objection. Objection qui ne vint point. Tarenn se transforma en cerf, puis s'abaissa afin qu'Hamza puisse monter sur son dos. Une telle complicité rendit jaloux encore une fois Bhohort, avant qu'il ne se reprenne. Ils avancèrent sans un mot vers le verger, puis la clairière, là où attendait leur pique nique, laissant derrière eux, les cadavres de Léonore et de la guêpe.

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