- Chapitre 17 -
Ma chambre sentait la mort. Littéralement. Je n'y pouvais rien, moi, si je transpirais dès que je stressais. À vrai dire, si ma mémoire était toujours aussi efficace - pour les bons, comme pour les plus détestables souvenirs -, j'avais ce problème depuis ma plus « tendre » et « joyeuse » enfance.
Rien que de dire « tendre » et « joyeuse » avec « enfance » me foutait la gerbe. C'était tellement... Tellement... Merde, je n'avais pas les mots pour décrire cette « merveilleuse » époque. Mais c'était du passé.
Donc, la pièce où je dormais puait la sueur. Ma sueur. Et comme je le disais, si ça puait, c'était que je stressais. À propos de quoi ? Facile : ça commençait par « Ma » et se terminait par « non ».
Ma-non.
Elle ne m'avait toujours pas répondu et je me demandais bien pourquoi ! Normalement, elle m'envoyait un message avec une rapidité déconcertante ! Un peu comme celle de Lucky Luke. Mais, là, c'était à peine si elle se souvenait de moi.
Moi, exagérer ?
Quatre heures, vingt-neuf minutes et trois secondes sans aucune nouvelle de sa part.
Donc, non, je n'exagérais pas. Et, oui, j'avais chronométré avec mon téléphone.
J'appelais ça une disparition ! D'ailleurs, je devrais peut-être appeler la police, juste pour vérifier si elle allait bien. Bon, je pourrais aussi l'appeler elle, mais... Comment dire ?
Je n'avais jamais appelé une fille de ma vie.
Rah... J'étais vraiment une brelle pour ce genre de trucs. Même ça, j'en étais incapable. Pourtant, j'avais souvent essayé de franchir le cap des SMS pour atterrir dans celui des appels, mais, à chaque fois, mon index restait figé en l'air et, tel un crétin, j'observais bêtement mon téléphone d'un regard vide, tandis que mon débile de cerveau imaginait des millions, voire des milliards, de conversations avec Manon. Et, dans chacune d'elle, je disais que des ânneries.
Rectification : je n'étais pas une brelle, mais un éternel raté en la matière. On croyait souvent que j'étais très à l'aise avec n'importe quelle fille, mais la réalité était bien triste : je ne les comprenais pas. Elles rêvaient toutes de voir le garçon de leur rêve les plaquer contre un mur et leur susurrer à l'oreille : « Fais gaffe, parce que je ne suis pas forcément que gentil... », mais qui serait assez con pour répliquer ça ?
Peut-être Jérémie. Quoiqu'avec sa force de mouche, ça m'étonnerait qu'il y arrive.
Heureusement que Manon ne fantasmait pas sur ces délires américains niaiseux. Ou pire... Sur le Prince Charmant.
Ha ha ! Tellement improbable !
En attendant, même si je savais que Manon n'était pas comme ça, songer à l'idée de l'avoir à l'autre bout du fil me ferait paniquer et je transpirerais de plus belle. En plus, est-ce qu'elle pourrait sentir ma transpiration ? Si c'était possible, raison de plus pour ne pas le faire !
Dans tous les cas, je me faisais des films pour rien, puisqu'elle ne répondait pas à mes messages. Mais en y réfléchissant, ce n'était peut-être pas plus mal. Parce que, oui, je devais me souvenir de ce défi con. Et savoir que c'était mon idée de base m'exaspérait encore plus. Bien sûr, c'était Jérémie qui l'avait modifié en un truc encore plus stupide.
Lorsque nous étions rentrés, il s'était dépêché d'écrire un contrat pour que « je ne revienne pas sur ma parole », comme il disait. Et pendant que je le signais, ce foutu papier, je m'étais senti semblable à un idiot soulagé. Idiot, car c'était idiot - super bien résumé -, et soulagé, puisque que j'allais enfin prouver à mon frère que je n'aimais pas Manon.
De toute façon, je n'étais amoureux de personne.
« Adrien, c'est l'heure de manger ! Mais... C'est quoi cette odeur d'œuf pourri ?! », éructa mon frère, après avoir ouvert la porte de ma chambre brusquement, d'une voix essoufflée.
Jérémie PEMLER dans toute sa splendeur.
Mes parents accoururent quelques minutes plus tard, car cet abruti criait : « Ah, je meurs ! » en mimant un éventuel manque d'oxygène, autant paniqués qu'époumonés.
Et ce fut ainsi que j'eus l'honneur d'écouter un superbe concert de respirations haletantes.
« Mon Dieu, cette odeur !
- Vite, ouvrez la fenêtre ! », ordonna mon pauvre frère, écroulé au sol.
En trainant des pieds, j'ouvris la fenêtre de ma chambre et celle-ci devint fraîche et « respirable » de nouveau.
Et ce fut ainsi que j'eus une seconde fois l'honneur d'écouter un autre concert, aussi bon que le premier, d'inspirations bruyantes. Qu'est-ce que j'étais chanceux, dis donc.
« Bon, entama ma mère en inspirant une énième fois, à table...
- J'espère qu'on ne mange pas d'œufs, sinon je vomis ! », déclara Jérémie.
En s'installant à table, je me remis à penser à ce pari idiot :
« De toute façon, Jérémie ne tiendra pas une seule journée sans sa Léa d'amûr, alors c'est gagné d'avance ! Et puis, je n'ai qu'à esquiver Manon, rien de plus simple. »
•••
Le Destin se foutait de moi, ou c'était la Chance qui m'avait abandonné, telle une lâche ?!
Son car était arrivé en même temps que le mien.
AAAAAAAAH ! Si je la croisais et qu'elle me regardait, je ne pourrais tout simplement pas l'ignorer ! Ça pourrait ruiner notre amitié ! J'y avais travaillé tellement dur !
Enfin, est-ce que c'était Manon qui avait fait le premier pas ? Je ne savais plus.
Bref, y avait plus important.
Dès que notre car se gara, je me mis en tête : « Si je cours, elle ne me verra pas ! ». Résultat : j'avais pris exactement six minutes pour me rendre dans la cour de mon lycée, alors qu'habituellement j'y étais en dix.
Quatre minutes, c'était mieux que rien.
Puisque j'étais mort de fatigue - parce que courir à huit heures quinze du matin, ce n'était pas très reposant -, je m'assis péniblement sur un des bancs de la cour, sous les regards perplexes de quelques élèves.
Quoi ? Ils voulaient ma photo ?
Il fallait mieux que je ne pose pas cette question à voix haute, si je ne voulais pas mourir sous une tonne de selfies de la part des pétasses paparazzis.
Ouah ! Cette idée me donnait des frissons, tellement elle était terrifiante !
« Mec, c'est quoi cette tête de zombie ? Tu vas faire fuir toutes les filles ! », me blâma un mec, dont je m'en fichais éperdument, qui faisait partie de ma « bande », en venant vers moi, suivit par d'autres garçons.
Je voulais pleurer de douleur. Ce lundi commençait trop mal. « Mais qu'est-ce que je m'en fous, des filles, moi... », pensai-je tout en regardant ces têtes de « populaires » parfaitement parfaites, qui me dévisageaient de la tête aux pieds.
Heureusement, la sonnerie retentit, pendant que tout ce petit monde me posait des questions pour savoir pourquoi j'étais dans cet état. Le truc hyper important dans leurs minables vies, c'était de comprendre pourquoi j'étais essoufflé. N'importe quoi.
Ma classe et une de Première rentrâmes en salle d'étude. Comme à mon habitude, je m'assis à une des places qui longeaient les murs. Quelqu'un se mit à ma gauche, mais personne n'occupa la chaise de droite. Tant mieux pour moi.
Maintenant, ça allait être du gâteau d'esquiver Manon, puisque nous n'avions jamais de cours communs !
« Qu'est-ce que vous faîtes ici, les Secondes 1 ? », s'exclama le surveillant.
Pardon ?
« Madame LEBLANC est absente, rétorqua une voix de fille pimpante, donc on vient en étude.
- Très bien, asseyez-vous. »
Putain, ce n'était pas possible ! Il y avait combien de chances qu'elle soit dans la même salle que moi ?
Bon du moment qu'elle ne s'installait pas à côté de moi, ça...
J'entendis la chaise à côté de moi bouger et vis, du coin de l'œil, que c'était Manon ma voisine.
... allait.
À partir d'aujourd'hui, j'emmerdais officiellement le Destin et la Chance, ces deux gros salauds.
Tandis que je faisais mon maximum pour me concentrer sur mon exercice d'espagnol, une partie du fameux contrat me revint en mémoire : Il est interdit de parler à sa partenaire, que ce soit verbalement, physiquement (langage des signes, grimaces, etc.), ou par écrit. Le candidat transgressant cette règle aura perdu et sera considéré comme « amoureux » de sa partenaire.
Donc, je pouvais au moins l'observer.
Je la regardais discrètement, un peu curieux. Manon était en plein exercice de mathématiques sur la fonction inverse et se tenait le visage avec sa main gauche. Elle était très concentrée.
Sauf que, d'un coup, Manon se précipita vers sa gauche - du coup, à ma droite - pour prendre un objet dans son sac et, lorsqu'elle releva la tête, après avoir saisi sa calculatrice, je vis deux choses : une bosse du côté droit de son front et de terribles cernes.
Là, je ne pouvais pas rester les bras croisés sans lui demander ce qu'il s'était passé. Sérieux, c'étaient quoi, cette bosse et ces cernes ?
« Hé. », chuchotai-je, le plus bas possible.
Aucune réponse.
« Hé. », recommençai-je.
Zéro réaction. Merci Manon...
Je me souvins alors du premier jour à St Pierre. Je pris une petite feuille à carreaux et écrivis : Hé, tu comptes m'ignorer encore longtemps ?
J'étais tellement subtil. Et j'étais bien placé pour lui reprocher ça.
Je lui glissai la feuille jusqu'à elle et je l'entendis râler, en marmonnant des choses incompréhensibles. Puis, elle me la rendit. Elle avait marqué : Je travaille, ça se voit, non ?
Je lui répondis : Si, ça se voit, mais pourquoi t'as une bosse et de telles cernes ?
Cette fois-ci, Manon prit un peu plus de temps pour me rendre le papier. Je lus : Je suis juste tombée dans les escaliers et je n'ai pas réussis à dormir. C'est bon, t'es content ? Tu peux me laisser faire mes maths, maintenant ? Ou t'as encore la force d'écrire, après avoir couru comme un détraqué, ce matin ?
Alors elle m'avait vu... La honte.
Pouvant sentir son agacement, je préférais ne pas relancer le sujet, même si je voulais encore savoir pourquoi elle ne m'avait pas envoyé de message depuis samedi.
Dans tous les cas, il n'était que neuf heures et j'avais déjà perdu mon pari.
•••
« HA HA HA ! »
Ça faisait une dizaine de minutes que Jérémie rigolait devant moi.
Oui, je lui avais parlé de ma cuisante défaite et, oui, il n'arrivait pas à s'en remettre.
« Tu vois, quand je te disais que t'étais amoureux de cette fille, j'étais sérieux ! Tu n'as même pas tenu trente minutes auprès d'elle ! Hi hi ! »
J'étais absolument certain que cette histoire allait me poursuivre longtemps.
« Et toi, avec Léa MENIER ? T'as réussi à tenir une journée ? soupirai-je en espérant qu'il arrête de rire à propos de moi.
- Je ne l'ai pas fait, moi..., articula-t-il entre deux rires. C'était juste pour que tu prennes enfin conscience de tes sentiments, c'est tout... Ha ha ! »
Nous restâmes une bonne minute à nous fixer, en repensant aux dernières paroles de Jérémie, avant que celui souffle :
« Oups... »
Et il prit la poudre d'escampette.
« Tu peux toujours courir, Jérémie, mais une tête va tomber ce soir ! ET ÇA VA ÊTRE LA TIENNE ! »
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Je voulais vous remercier pour ça, une nouvelle fois :
On a aussi dépassé la barre des 300 votes et des 3K de vues. C'est juste énorme. Encore merci ! :3
Aussi, je compte modifier un peu le prologue, réécrire le résumé et rajouter des mots-clés sur l'histoire. C'est à ce moment que j'ai besoin de VOUS !
En gros, si vous voulez m'aider, proposez-moi des mots-clés et des idées pour le nouveau résumé (qui fait un peu cliché).
À bientôt, et je compte sur vous ! :D
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