Chapitre 20
Hermione avait toujours eu une certaine facilité à élucider le vrai du faux et à dissocier les cauchemars du présent. Mais là, tout de suite, elle n'était pas certaine d'avoir le cran nécessaire pour affronter la réalité. Pourtant, elle ouvrit ses yeux, le corps tressaillant de douleur. Elle ne pouvait faire la morte éternellement. Pas dans cette position. Et certainement pas lorsque McGonagall poussait des râles d'agonies.
Si la jeune femme se retrouvait dans une situation plus idyllique, elle prendrait sûrement le temps d'observer les lieux, d'allumer quelques bougies et d'époussetait un bouquin pour s'installer confortablement. Mais elle était captive. Plongée dans un cachot avec une odeur de puanteur hantant les quatre murs qui la maintenant prisonnière, elle ne pouvait que frissonner d'effroi.
La pièce qui l'accueillait était sombre et seules les étincelles de lumières rouges clignotant par à-coup venait ajouter un semblant de lumière dans la salle. Hermione prit un certain temps avant de comprendre que les jets rouges étaient des maléfices jetés à l'encontre de la directrice de Poudlard. Les gémissements et clapissements faisaient écho dans une terrible symphonie. Elle fut tentée de se boucher les oreilles, le cœur battant dans sa cage thoracique avec frénésie.
Les pupilles dilatées, Hermione contempla les barreaux qui lui faisait office de palace. Elle se retrouvait dans une cage en fer rouillé et où les gouttelettes de sang jonchaient le sol comme s'il s'agissait d'une décoration enfantine. Elle déglutit avec difficulté. Son crâne hurlait de douleur et posant sa petite menotte contre sa tignasse emmêlée, elle gémit. Sa main était ensanglantée.
Bordel, grogna-t-elle en prenant conscience de l'épouvantable situation dans laquelle elle se retrouvait.
En plus de se d'être enfermée, des chaînes lui entravaient les pieds, la maintenant contre la surface dure en béton. Lorsqu'un nouveau glapissement se fit entendre, Hermione sortit de sa torpeur. Minerva était allongée sur une table de pierre, les membres liés.
Elle tenta de réfléchir, la panique déferlant dans chacune des cellules de son corps. Que pouvait-elle faire ? Sa vision jusque-là floutée réussit à capter les traits de son ancienne professeure. Les yeux clos, elle endurait un supplice, les lèvres pincées. Il n'y avait pas d'âme qui vive en dehors de leurs présences. Les jets électriques venaient frapper avec violence les poignets de la quadragénaire dans des salves de cris horripilants.
L'individu qui les avait capturés avait déserté les lieux, comme si elles n'étaient que de simples moustiques écrasables.
« Miss Granger », chuchota McGonagall d'une voix éteinte.
« Qu'est-ce que je peux faire ? » croassa-t-elle, complètement démunie. Elle agrippa les barreaux de sa prison, une douleur irradiant dans son crâne. « Je suis désolée, chuchota-t-elle. Je suis désolée. Tout est ma faute. Tout est ma faute. »
Minerva restait silencieuse, la respiration sifflante, les yeux rivés vers le plafond.
« Tout va bien aller », promit la directrice.
Hermione ne put avaler le mensonge, tant sa gorge se serrait sous la culpabilité. Elle aurait dû écouter McGonagall lorsqu'il en était encore temps. Peut-être aurait-elle pu envoyer un signal au professeur Slughorn. Peut-être qu'elles n'en seraient pas là, le désespoir faisant tressauter leurs corps maintenant faibles. Elle hoqueta sous la frayeur.
Reprends-toi, Hermione, reprends-toi, se maudit-elle à voix basse, le cerveau en ébullition. Il devait bien y avoir une solution.
Lorsque le claquement de bottines fit écho dans les escaliers de la taverne secrète, la jeune Gryffondor retint sa respiration.
« Hermione, ne faites pas le moindre mouvement qui pourrait vous mettre en danger. Est-ce bien clair ? »
La voix de Minerva fit écho dans son esprit, mais elle n'était pas réceptive. Elle n'entendait plus la douleur dans l'intonation de McGonagall. Elle ne voyait que la forme angulaire d'une personne vêtue d'une cape noire se rapprochant à pas feutrés. Le visage de l'individu était recouvert et la silhouette lui semblait presque familière.
« La belle aux bois dormants s'est enfin réveillée », susurra la voix doucereuse et acide.
Hermione frissonna. Minerva tenta de se relever, mais les entraves se resserrèrent, la faisant gémir de douleur.
« Chut, chut, tout doux, Mme la directrice. Vous allez vous faire mal en gigotant ainsi. »
L'individu se rapprocha de la cellule de Hermione. L'éclat de ses dents blanches lui coupa le souffle. Il s'agissait d'un homme, elle en était certaine. La voix était déformée par un sort, mais sa carrure ne pouvait le tromper. Il eut un affreux sourire, le corps tendu vers elle. Avec violence, il aplatit sa main contre les barreaux, faisant tilter le fer dans un bruit assourdissant.
« Je dois dire que je suis surpris que vous ayez réussi à trouver ma cachette et de vos accoutrements respectifs. Minerva et Granger. »
Hermione se pinça les lèvres pour retenir le venin de sortir de sa gorge. Le Polynectar ne faisait plus effet, ce qui devait expliquer que plusieurs heures s'étaient écoulées. Elle irradiait de colère. Mais McGonagall avait raison. Il ne fallait pas qu'elle s'emporte. La sécurité de la directrice en dépendait. Avec raideur, elle s'approcha de sa cage, tentant de capter l'éclat des yeux de son bourreau. Il se recula dans un ricanement austère.
« Hermione, Hermione... J'aurai dû me douter que McGonagall ferait appel à toi. La fameuse héroïne et intrépide sorcière de notre génération. »
Il pencha sa tête, faisant glisser ses longs doigts le long des barreaux dans une lenteur à lui glacer le sang.
« C'est dommage. Je n'avais pas prévu faire couler du sang frais avant quelques jours. Mais... aider l'ennemi est une traîtrise qui mérite un châtiment. »
Il s'éloigna dans un mouvement circulaire, portant son attention sur le corps de McGonagall, toujours allongée contre la table de pierre.
« Je préfère lorsque les victimes sont plus jeunes. »
Le bras de leur agresseur se releva, tout proche du visage de Minerva, puis dans un mouvement sec, il empoigna la chevelure de la quadragénaire, la faisant clapir.
« Je vous admirais par le passé. Maintenant, vous ne m'inspirais que du dégoût. »
Il relâcha sa prise avec célérité, comme si le simple fait de rentrer en contact avec McGonagall le répugnait.
« Si c'est moi que vous voulez, venez me chercher », grogna Hermione, les gencives relevées sous la haine.
Peut-être qu'en détournant son attention, il laisserait tranquille la directrice de Poudlard. La jeune femme l'espérait du moins. Le cœur battant contre ses tempes, elle attendit son heure. D'un mouvement agile de sa baguette, l'homme à la cape noire ouvrit sa prison.
« Si courageuse », grogna avec convoitise l'individu.
Hermione sentit son corps se relever sans qu'elle ne le veuille, la poussant à se diriger vers le psychopathe qui les maintenaient prisonnières. En cambrant ses jambes pour s'empêcher de bouger, elle n'eut qu'une onde de choc. L'imbécile venait de lui jeter le maléfice de la torture. Elle hurla, ses membres faiblissant au point où elle n'avait qu'une envie, se laisser choir par terre, mais il la maintenait debout, un sourire fou se reflétant sous sa capuche.
« Si faible. »
Il la transporta à l'aide de sa magie jusqu'à un petit tabouret. Ses chaînes cliquetaient contre le sol, s'étant allongées, dans une chanson grotesque. Elle eut envie de vomir lorsqu'il lui lança pour la deuxième fois Endoloris. Ses yeux se révulsèrent et des points blancs accompagnèrent sa vision, la plongeant dans un état presque comateux. Elle ne sentait plus les fibres de son corps. Il n'y avait que la tourmente. McGonagall avait été mise sous silence à l'air d'un sortilège. Les larmes lui montèrent aux yeux.
Dans un mouvement inconscient sous la rage qui prenait forme dans son corps, Hermione s'élança vers son agresseur, renversant au passage de nombreux outils, rasoirs et couteaux. Elle catapulta son poing dans son visage, lui fracassant la mâchoire et sa capuche s'abaissa sous le mouvement. Hermione ne prit pas une seule seconde pour réfléchir et plongea vers la baguette de son agresseur, la pointant en l'air, les yeux brillant d'un éclat hargneux.
Hermione pensait exceller dans le fait de dissocier la réalité du cauchemar. Elle n'en était plus certaine. Pas lorsque ses pupilles dilatées se plongèrent dans celles de George Weasley. Les bras relevés en l'air, un sourire carnassier défigurant les traits de son visage, Hermione hoqueta sous l'image que lui renvoyait son ancien ami : un feu sombre brillait dans le fond de ses prunelles. Du sang bariolant ses lèvres, il semblait ne plus être maître de son propre esprit.
« George », sanglota-t-elle avec horreur.
« Hermione. C'est un plaisir. »
Il se redressa, s'essuyant le visage dans un geste anodin. Son rire rauque perça l'antre, la foudroyant comme si elle était plongée dans une douche glacée.
« Comment... ? Pourquoi ? »
« Vraiment, tu me demandes, Granger ? Je pensais que tu étais intelligente. Réfléchis. »
Hermione gardait sa baguette tendue, les membres tremblants. C'était impensable. Pourquoi George commettrait-il de tels actes ? Il avait énormément souffert de la mort de son jumeau. Son père s'était retrouvé paralysé après la guerre et Molly n'osait plus sortir de chez elle, ayant développé une anxiété folle du monde en dehors des quatre murs de sa maison. Mais était-ce assez pour assassiner ? Elle ne pouvait le croire, pas George. Pas ce jeune homme qui brillait de bonheur et qui passait son temps à courir dans les couloirs de Poudlard, des blagues sordides au bout des lèvres.
« Je n'y crois pas », s'étouffa-t-elle.
« Tu devrais pourtant. Parce que maintenant que tu connais mon identité, je vais être obligé de t'éliminer, Hermione. »
La jeune femme eut envie de vomir. Il lui avait lancé deux fois le sortilège de la torture. Il avait ligoté McGonagall et qui sait ce qu'il avait pu faire aux autres victimes. Les mains agitées sous l'émotion, elle resserra sa poigne sur la baguette volée, de la sueur s'écoulant de son front.
« Bien, bien. Tu devrais te méfier. Parce que je ne serais pas doux. »
Dans un cri presque animal, George Weasley se propulsa vers elle, un couteau aiguisé dans sa paume droite. Avant que le coup fatal ne l'atteigne, Hermione hurla et un faisceau de lumière noir fouetta le grand rouquin. Puis, il y eut le silence, la tempête et le noir.
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Ça faisait deux jours que Malfoy tournait en rond dans le dortoir des préfets. Ses pensées ricochaient avec cacophonie dans son cerveau et il n'y avait qu'une voix qui pouvait apaiser la douleur lancinante qui prenait forme dans sa poitrine : Hermione Granger. Mais elle avait disparu depuis deux jours. Non, pas disparue. Elle allait rendre visite à ce putain de Ron Weasley. Ce vieux roux moche et imbu de lui-même. Peut-être était-il mal placé pour affirmer de tels faits, mais s'il avait eu la moindre chance d'avoir la Gryffondor comme copine, il ne l'aurait certainement pas laissé filer entre ses doigts.
Pourtant, elle s'était éclipsée. Pour le voir lui.
Malfoy avait encore le goût amer de la trahison au fond de la gorge. Granger avait tenté de lui chuchoter des paroles rassurantes et il s'était emballé, la croyant en danger. Mais il s'était ravisé. Elle ne risquait rien à l'extérieur de Poudlard, elle n'était pas une cible et ne connaissait pas l'étendu des méfaits en dehors des quatre coins du château.
Alors, pourquoi continuait-il d'arpenter chaque pièce, comme s'il craignait de ne plus avoir la possibilité de la serrer dans ses bras, comme si en un claquement de doigt, elle pouvait se dissoudre et ne devenir qu'une illusion flageolante de bonheur de courte durée.
Les doigts emprisonnés dans sa chevelure platine, il soupira. Ses amis s'étaient fait silencieux depuis la nouvelle, comme si Draco risquait de sortir les griffes à tout moment. Il n'était pas si impulsif. Merlin, peut-être, mais Hermione avait déguerpi pour rejoindre une tête de moufette desséché et ça le foutait en rogne. N'était-il donc pas une meilleure option pour la jeune femme ? Il n'était probablement pas le partenaire idéal, mais il s'était senti apaisé aux côtés de Granger. Plus qu'il ne l'avait jamais été. Et il s'apprêtait à le lui avouer. Mais c'était avant que Nott lui tende la putain de Gazette des sorciers, les yeux rivés vers ses godasses, presque piteux pour sa personne.
Bordel, ragea-t-il.
Dans un geste de colère, il enserra la poignée de la porte de Hermione et l'ouvrit d'un coup sec. En un instant, Malfoy se retrouva avec un crâne lisse et une moustache de cowboy. Il en fut si traumatisé que ses joues prirent une teinte fuchsia. Oh satané Granger, maugréa-t-il avec un éclat sombre. Il allait lui payer ce petit tour de passe-passe.
Se passant une main contre son cuir chevelu inexistant, il se surprit à éclater de rire. Lui qui enrageait se retrouvait maintenant à sourire comme un imbécile. Mais quel sortilège lui avait-elle lancé, bon sang ? Il suffisait d'un rien pour que son cœur s'emballe pour la Gryffondor et qu'il ne veuille que la caller dans ses bras et l'embrasser à en perdre haleine. Débile, il était débile.
Rouspétant dans sa moustache avec force, parce qu'il venait de retrouver sa bonne humeur, il observa la chambre de Hermione. Son lit était fait et des touches de verts embaumaient l'atmosphère, passant de rideaux à des plantes grimpantes. Il n'y avait pas la moindre trace de rouge et d'or, il en fut presque scandalisé. C'était une vraie cachotière. Il se frotta le nez pour cacher son hilarité, soudain heureux. Une vraie Serpentard, discrète et mesquine. Un renard futé. Il sourit, un doigt contre ses lèvres.
Sur son bureau en bois massif se trouvait un parchemin. L'imbécile de poils de carotte ne fouillerait définitivement pas dans les affaires de Hermione. Mais Draco avait une tendance... à justifier ses actes puérils, alors, relevant ses sourcils sous le défi, il écarta la chaise de son pupitre pour s'assoir. Elle l'avait rendu chauve pour quelques minutes avec une moustache à faire fuir un gobelin, il pouvait bien se permettre de fureter un peu dans sa chambre.
Encrés dans le papier se retrouvaient une tête de serpent entrelacé d'un renard. Malfoy y découvrit son nom, finement écrit avec de l'ancre noire. Une odeur de caramel et de vanille s'en dégageait. Il se força à ne pas renifler comme un chien en chaleur et attrapa la petite trouvaille, le cœur battant à cent à l'heure. En retournant la lettre, Draco sentit une barbe se former contre son visage et il roula des yeux, presque irrité.
« Très drôle, Granger », ronchonna-t-il.
Il n'arrivait pas à se déprendre de son sourire niais. C'était vraiment une catastrophe de s'épancher d'une jeune femme aussi sournoise. Il ricana dans sa barbe qui continuait de s'allonger. Dans le parchemin, une petite note lui était destiné.
« Cher petit fouineur, alias Draco Malfoy qui fouille dans mes affaires sans vergogne,
J'espère que tu as apprécié mes magnifiques sortilèges, j'ai pris un grand soin à les mettre en place à notre première rencontre. Je me demandais quand est-ce que tu finirais par craquer et t'approcher de ma chambre. Tu as résisté plus longtemps que je ne le pensais : Félicitations !
Si tu lis ces mots, c'est que je ne suis pas encore revenue. Ou alors que tu es vraiment impatient ! Sache que je suis probablement en train de m'ennuyer mortellement à regarder mon ami qui se fait retoucher les côtes et le bras. Pas d'inquiétude, à part une envie grandissante de revenir te jouer de mauvais tours, je ne fais rien de très glorifiant. J'espère que tu profites et que tu bois ton whiskey avec douceur et pas comme un gros porcelet. »
Malfoy dût s'arracher aux mots entrecroisés pour éclater de rire. Il n'arrivait pas à y croire. Elle avait prévu qu'il se faufile dans son antre comme un voleur. Elle était futée. Il replongea dans ses phrases comme s'il s'agissait de son oxygène.
« Dans nos dernières rencontres, on s'était promis de s'ouvrir l'un à l'autre. Et je suis impatiente de le faire. Même si en dehors de ton apparence d'ogre, je ne pense pas découvrir autre chose. Je pense fort à toi,
Hermione Granger.
(N'oublie pas de sourire pour la photo) »
Sans qu'il ne puisse analyser le reste de son message, un jet de lumière lui foudroya les yeux et il se retrouva aveugle pendant de longues secondes.
« Mais c'est quoi cette merde, bordel ? » s'écria-t-il en se frottant les paupières.
En abaissant son regard, il remarqua avec horreur son visage apparaître contre le parchemin. Lui, chauve, avec une moustache, une barbe et un sourire de gamin. Il allait tuer Granger. A bien y réfléchir, il lui donnerait la fessée avant. Juste pour son plaisir personnel.
Elle ne perdait rien pour attendre.
« Reviens vite, petit renard, que je puisse me venger », susurra-t-il avec conspiration, la lettre toujours accrochée entre ses longs doigts.
Les yeux ailleurs, il joua avec sa bague, ne se doutant nullement que Hermione Granger venait d'affronter le plus grand des dangers : Elle devait survivre aux redoutables attaques d'un ami qui voulait sa mort et sa destruction.
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