Chapitre 19

« Il y a des promesses qu'on ne peut tenir. »

Draco avait disparu encore une fois. Hermione était certaine qu'il avait déserté Poudlard pour accomplir une tâche ou elle-ne-savait quoi. Ses absences devenaient de plus en plus fréquentes. Et alors que la jeune femme se convainquit qu'il était en sécurité, elle se demanda si elle aurait la chance de pouvoir apercevoir ses yeux argentés avant son départ vers l'inconnu. Vers une mission qui risquait de mettre en péril ses barrières intérieures. Peut-être même sa vie. Elle était réticente à prendre son envol avec McGonagall pour suivre la mission qui lui avait été confié, mais le temps pressait et l'aurore commençait à pointer le bout de son nez. Bientôt, elle devrait prendre les voiles et déguerpir. Traquer un meurtrier.

Sa respiration devint erratique. Pas sous le stress du danger qui rôdait, mais de laisser derrière une partie d'elle. Draco méritait des réponses qu'elle ne pouvait lui donner. L'impérativité de garder un tel secret lui nouait la gorge. Peut-être qu'il était mieux que Hermione ne soit pas amené à croiser le Serpentard. Lui mentir dans le blanc des yeux lui semblait insoutenable. Son sac en bandoulière contre elle, la jeune Gryffondor agrippa les pans de sa chemise d'un blanc crémeux, les doigts tremblants.

Après une inspiration laborieuse sous la tension dans son corps, elle redressa ses épaules. Le menton en l'air, elle contempla les grandes affiches et drapeaux verts aux ornements de serpents, un petit sourire figé aux coins des lèvres.

Hermione se força à fermer ses yeux, le cœur tambourinant dans sa poitrine. Elle avait un goût de bile dans la gorge. Elle n'arrivait pas à décrire les émotions qui saturaient son cerveau jusqu'à lui picoter la peau. Elle était terrifiée de trouver des réponses face aux massacres, et anxieuse de ne pas démystifier de pistes potentiel pour faire avancer sa mission.

Perdue dans un trou abyssal d'inquiétude, elle n'entendit pas la porte de son dortoir s'ouvrir et se refermer. Les bourdonnements dans ses oreilles vinrent couvrir les bruissements de pas contre le plancher. Ce ne fut que sous la respiration chaude d'un souffle contre ses cheveux qu'elle osa rouvrir ses paupières.

Malfoy se tenait face à elle, les traits hostiles. Les sourcils froncés, la bouche pincée, ses yeux lui renvoyaient des éclairs de colère brute. Elle hoqueta de surprise quand il esquissa un sourire froid.

« J'aurai dû m'en douter. »

Il empoigna une de ses mèches de cheveux, puis comme s'il s'était brûlé au fer chaud, s'éloigna de plusieurs pas. Il sentait le whiskey. Hermione déglutit, la gorge nouée.

« Draco », commença-t-elle soudain peinée.

Il claqua sa langue contre son palais avec une moue de dégoût. Puis, passant son regard de haut en bas sur sa personne, il sembla étudier son accoutrement.

« Dis-moi, Granger,» son ton était cinglant et elle sursauta. « Tu comptes séduire Ron Weasley avec une chemise miteuse ? Je m'attendais à mieux de ta part quand même. Tu n'avais plus de jupe trop courte pour te faire sauter par poils de carotte ?»

Les poings de la Gryffondor formèrent des lignes blanches tellement elle les serrait. Elle se força à se détendre, lasse de cette situation.

« Je ne vois pas de quoi tu parles », se contenta-t-elle de répliquer.

Elle n'était pas franche. Elle savait pertinemment ce qu'il devait penser. La Gazette du sorcier venait de faire mouche dans les couloirs de Poudlard, annonçant la blessure de Ron et il n'était pas surprenant que Malfoy pense qu'elle accourt pour son ami. Elle espérait que ce ne serait pas le cas, qu'il y ait un semblant de confiance entre eux. Elle avait eu tort. Son cœur se pinça sous la déception, mais elle tint bon.

Draco venait de rire, sans joie.

« Tu me prends pour un imbécile, c'est ça ? Ne le fait pas avec moi, Miss-je-sais-tout. Il ne faut pas être un génie pour comprendre ce que tu t'apprêtes à faire. »

« Et qu'est-ce que je compte faire, Draco ? »

Hermione se refusait à l'appeler par son nom de famille. Pas après tout ce qu'ils s'étaient dit et pas lorsqu'une sérénité incommensurable s'emparait de sa personne quand elle posait son regard sur lui. Il restait Draco pour elle. Même s'il était furieux contre elle.

Il lui empoigna le menton avec rudesse pour la forcer à l'observer. Ses membres tremblaient de rage. Les narines dilatées, il semblait prêt à exploser de douleur et de frustration.

« Si tu n'as pas prévu revenir dans ses bras, qu'est-ce que tu vas foutre en Irlande ? »

Il avait un ton hargneux et Hermione mourrait d'envie de dénouer le nœud qui devait faire rage dans son estomac. Elle voulait le rassurer, lui dire la vérité, mais McGonagall lui avait fait promettre de garder leur mission secrète.

« Je ne vais voir qu'un ami de longue date. Ce n'est pas comme tu le penses. »

« Vraiment ? Et je devrais te croire ? »

La pression de ses doigts se fit plus forte contre son menton et Hermione se retint de gémir de douleur. Leurs lèvres se frôlaient dans une danse qui pourrait sembler sensuelle à distance, mais qui débordait de rage mal contenue. Elle s'accrocha à ses épaules, le souffle tremblant et l'éclat sombre dans les pupilles de Malfoy s'atténua.

« Je ne te demande pas de me croire », murmura-t-elle.

Il ne lui suffisait que de redresser la tête pour qu'elle écrase ses lèvres contre celles de Draco.

« Mais je peux te montrer ce qui m'importe réellement. »

Malfoy avait la respiration sifflante. Son touché se faisait plus doux, presque incertain. Elle tentait de faire apercevoir le fond de ses pensées à travers ses iris caramel. Peut-être que la Serpentard comprit ce qu'elle essayait de lui insuffler, car il pencha sa tête avec précipitation pour écraser ses lèvres avec force contre les siennes. Hermione bu tout l'oxygène qu'il pouvait lui donner, ne faisant qu'un avec son torse. Elle était prise d'une frénésie accablante. Elle avait peur. Peur de ne pas revenir. Peur de ne pas pouvoir lui exprimer tout ce qu'elle ressentait pour lui.

Elle craignait que leur dernier échange ne soit souillé qu'avec des mensonges. Elle ne pouvait l'accepter. Elle sentit les larmes perler aux coins de ses cils. La main de Malfoy agrippait avec force sa hanche, la callant contre lui comme s'il espérait l'empêcher de partir. Elle le voulait tellement. Rester.

Entre deux respirations laborieuses, il lui pinça une fesse, lui arrachant un gémissement.

« Si je ne peux pas m'assurer d'être à tes côtés dans ton départ, je peux au moins faire à ce qu'il ne s'approprie pas ce qui m'appartient. »

Hermione n'arrivait pas à réfléchir alors que les lèvres de Draco venaient mordiller le lobe de son oreille jusqu'à laisser une traînée de feu dans son cou. Elle le sentit aspirer, sa poigne contre sa hanche ne faiblissant jamais. Après une dernière lapée qui la fit frémir de la tête aux pieds, Malfoy se força à se détacher d'elle, l'observant avec une satisfaction à peine dissimulée.

« Bien », grogna-t-il avec possessivité.

« Draco... »

« Tu peux aller voir poils de carotte, Granger. »

Il avait repris son intonation sifflante de froideur, mais Hermione arrivait à déceler une certaine détresse dans ses traits.

« Attends », elle hoquetait tant elle craignait qu'il ne lui tourne le dos.

Malfoy resta silencieux, figé, alors qu'elle n'arrivait pas à prononcer la moindre parole. Elle avait envie de pleurer, de crier à la lune l'injustice de cette situation. Inspirant avec maladresse sous l'anxiété, elle se força à croiser ses iris argentées. Ses yeux caramélisés faisant face à de l'acier. De miel et de cendre. Un combo peu commun, radical, mais intarissable.

« Il y a des choses que j'aimerais te dire... Peut-être qu'un jour je pourrais tout t'expliquer. »

Puis brisant leur échange, Hermione se baissa pour ramasser son sac qu'elle avait fait tomber sous l'assaut de ses lèvres. Malfoy ne sembla pas apprécier ses dernières paroles, car il la plaqua contre son torse, les yeux écarquillés de stupeur. Il cherchait des réponses sur son visage, des secrets qu'elle ne pouvait confesser. Secouant sa tête, elle tenta de se déprendre, mais il raffermit sa poigne, glissant une de ses mains contre son cou.

« Hermione », souffla-t-il.

Elle avait la sensation de se briser de l'intérieur, comme un miroir qu'on venait de fracasser à coup de marteaux. Elle n'avait pas la force de lutter contre la pression qui prenait forme dans sa poitrine. La tempête de ses sentiments pour le Serpentard faisait rage avec une telle effervescence, qu'elle n'était pas certaine de pouvoir y survivre si elle se laissait balayer par la vérité qui l'asseyait. Elle était amoureuse de Draco Malfoy.

Il souffla pour la deuxième fois son prénom, soudain prit de panique.

« Je ne peux pas, Draco... »

Il n'osait se détacher d'elle, comme si elle était faite de poudre d'étoiles venant du ciel, comme si elle n'était qu'un simple flocon de neige, prêt à disparaître sous la chaleur de leurs peaux.

« Je dois partir. »

Elle tentait d'éviter son regard, pétrifiée.

« Promets-moi de me revenir. »

Hermione hocha la tête fébrilement, soudain le cœur lourd et la gorge serrée.

« Je veux t'entendre le dire », répéta-t-il avec plus de précipitation, plaquant son front contre celui de la Gryffondor.

« Je le jure », souffla-t-elle, les lèvres tremblantes.

Elle s'était promis de ne pas mentir. Elle avait échoué. Elle ne savait de quoi serait fait le lendemain ou les prochaines heures. Mais elle espérait tenir sa promesse. Pour lui.

« Si tu... » il déglutit, semblant se reprendre. « Parfait. Bon séjour avec Weasley, Granger. »

Sa voix se voulait tranchante, mais Hermione avait entraperçu l'éclat d'inquiétude irradiant le fond de ses iris. Malfoy n'était pas dupe et Hermione se demandait si elle avait fait le bon choix en prononçant de telles paroles.

Il ne lui posa aucune question, ni sur la durée de son expédition ni sur l'intention derrière son départ. Ils auraient pu en profiter pour s'étancher sur la profondeur de leur inquiétude pour l'autre. Sur leurs sentiments. Malfoy était en colère et inquiet. Il en valait de soi, mais Hermione, c'était tout autre.

L'esprit en ébullition, elle franchit la porte de son dortoir pour rejoindre le lieu de reconnaissance de McGonagall, dans la tour d'astronomie de Poudlard. La quadragénaire l'attendait avec une patience à réveiller un ogre. Ses ongles frappaient contre la grande poutre du balcon, le regard porté vers l'ailleurs et le corps rigide d'appréhension.

Elle ne se retourna même pas à l'intonation de ses chaussures contre le sol.

« Miss Granger. Êtes-vous prête à en apprendre un peu plus sur l'état de notre mission ? »

Elle répliqua avec affirmation à sa question.

« Bien. » McGonagall lui fit enfin face. « Il est interdit de se déplacer en dehors de Poudlard avec un Portoloin. Ou d'une quelconque façon qui pourrait alerter les protections du château. Mais je suis la directrice. »

Hermione vit un sourire taquin et enfantin naître sur le visage de Minerva.

« Le seul aspect que j'ai imposé pour contourner les règles - et il en va de soit que vous devez les respecter en tout temps sans ma présence Miss Granger - c'est qu'il faut revêtir une apparence qui n'est pas reconnue par le château et ses portraits. »

« Du Polynectar, madame la directrice ? »

« Absolument ! Si je n'étais pas sur le point de vous amener à transgresser de nombreuses règles de Poudlard, je vous accorderais des points pour votre maison.»

Hermione avait les joues chaudes d'embarras et d'impatience. L'excitation rampait sur sa peau, lui procurant un élan de vie qui la fit frémir. McGonagall sortit de sa cape deux petites fioles où un liquide âpre et brun s'y trouvait. La jeune femme se força à garder contenance, elle ne devait pas montrer à la directrice qu'elle en avait déjà goûté et que l'odeur à elle seule pouvait effrayer une horde de gobelins sales.

« Là où nous nous rendons, il est impératif de passer inaperçu. Un pub se trouve à côté des lieux du crime, si nous sommes trop jeunes, nous attirerons les regards. »

Hermione observa les mains de McGonagall dévisser les petites bouteilles, maîtresse de son corps. Elles ne tremblaient pas.

« Nous serons deux Moldus complètement inconnues de la région, visitant Londres. »

Lorsque la potion se retrouva entre les doigts de Hermione, Minerva l'observa avec attention.

« Horace Slughorn a ajouté un puissant tonic dans le polynectar, ce qui a prolongé sa durée de quelques heures. Mais le temps presse. » Elle prit une pause, un doigt relevé en l'air, faisant claquer sa petite bouteille contre celle de la Gryffondor. « Je ne crois pas nécessaire de vous prévenir que le tout a un horrible goût, comme il ne s'agit pas de votre première fois. »

Hermione rougit. Elle avait été démasquée. Au lieu de répliquer, elle dévisagea la directrice de Poudlard et calla l'affreuse potion en se retenant de grimacer. McGonagall suivit son mouvement, ses sourcils tressautant de dégoût.

Les cheveux bouclés de Hermione devinrent raide et la tonalité caramel se transforma en un noir corbeau. Des yeux d'amandes prirent place sur son visage, rehaussé par un nez retroussé et de petites lèvres rosées. D'un coup de baguette appliqué, elle changea d'apparence, revêtant une petite jupe noire et un haut bleu nuit court. Ses yeux étaient peints avec un trait d'eyeliner qui faisait allonger ses paupières, lui donnant un air de chat.

McGonagall avait une apparence assez surprenante. Elle avait dorénavant des cheveux châtains lui arrivant en dessous des oreilles, une petite frange s'arrêtant au milieu de son front et des yeux rieurs d'un doux brun. Son visage ovale rayonnait. McGonagall suivit son mouvement et revêtit une petite robe fleurie avec des bottines noires suivi d'un gilet en cuir.

Hermione avait envie de rire sous l'incrédulité de la situation, mais se força à se pincer le nez pour contenir son hilarité. Minerva la foudroya du regard en retour, une mine faussement agacée. La jeune Gryffondor arrivait à reconnaître le tempérament de la directrice à travers ses iris et reprenant sa concentration, tendit sa main vers son bras. En un mouvement souple, McGonagall les fit disparaître, les plongeant dans une noirceur tourbillonnante de couleurs rougeâtres et de verts forêt. Se stabilisant avec maladresse à leur atterrissage, elle observa les lieux avec intérêt.

Le quartier ressemblait au Chaudron baveur, avant sa destruction. Les nombreux magasins et les individus s'agglutinaient entre chaque devanture pour y acheter des livres, du pain ou prendre un café. En traversant les allées, Hermione feignit de sourire, sa baguette bien logée dans une pochette cachée de sa jupe. Un groupe de jeunes adolescents passa à côté d'eux en roucoulant sur les dernières nouvelles quant à un match de foot ayant lieu dans la région. Un grand homme aux cheveux ébènes les salua au croisement d'une petite rue, alors qu'une petite fille de six ans s'extasiait sur ses épaules face aux nombreux magasins. Hermione surprit le regard attendrit de McGonagall sur l'enfant et elle se demanda si la directrice de Poudlard avait déjà voulu en avoir.

Prit d'une once de courage, la jeune Gryffondor lui posa la question : « Pourquoi n'avoir jamais eu d'enfant ? »

Le sourire contrit qu'affichait Minerva s'effaça sous son questionnement. Elle revêtit une façade de glace.

« Ce n'est pas un bon moment pour discuter de telles trivialités. »

Hermione concéda que son ancienne professeure avait probablement raison et resta silencieuse pendant de longues minutes.

« Ce n'est pas l'envie qui me manquait », finit par souffler Minerva d'une petite voix en observant les alentours pour éviter de croiser les prunelles de Hermione.

La jeune femme s'apprêtait à répliquer, mais McGonagall la coupa dans son élan.

« Il y a des gens qu'on aime tellement que même la mort ne peut nous séparer. Il était tout pour moi... Et j'ai choisi de rester seule après son décès. »

Hermione eut un hoquet de surprise et la voix chevrotante, elle murmura des condoléances.

« Je ne me plains pas, je voulais un enfant et j'en ai eu plus qu'assez avec Poudlard », rigola-t-elle.

La jeune Gryffondor sourit en retour, les yeux brillants.

« Vous avez été une mère pour plusieurs. »

Dont moi, voulut-elle ajouter, mais elle était trop gênée pour le formuler à voix haute.

McGonagall soupira d'un air théâtral en balayant l'air d'un coup de la main comme pour effacer ses paroles.

« Si j'ai pu être un modèle pour certains, j'en suis fière, mais une mère, j'en doute fort. »

Hermione resta silencieuse, la gorge nouée. Minerva avait été plus qu'un modèle pour la jeune fille. Sa présence avait su apporter une certaine sérénité dans les cœurs et la directrice de Poudlard s'était battue avec un acharnement féroce pour protéger les étudiants. Elle avait passé plus de temps à ses côtés que ses propres parents. Et puis, elle était habituée à l'écriture fine et entrelacée de McGonagall. Elle avait toujours pris le temps de lui envoyer des hiboux au réveillon de Noël et en été. Sa présence s'était toujours faite discrète, comme une ombre.

Se raclant la gorge sous l'émotion, Hermione releva le menton pour contempler le ciel d'un bleu tirant sur le gris. Il allait sûrement pleuvoir.

Lorsque Minerva fit une halte, relevant son bras pour lui couper tout mouvement, Hermione resta aux aguets, le souffle au bord des lèvres. Il commençait à y avoir une odeur de pourriture dans les environs et elle n'arrivait pas à en détecter la source, ni la provenance. Le souffre empestait l'atmosphère, suivit d'une impression de corps en décomposition. Elle plissa le nez, les yeux lui picotant sous les effluves.

« C'est tout proche, n'est-ce pas ? » chuchota-t-elle.

McGonagall dans son apparence plutôt amusante hocha la tête avec rigueur, la stature figée.

« Le dernier message de mon espion a été délivré ici. »

Hermione zieuta les environs, les sourcils froncés. Elles se retrouvaient, les pieds enfoncés dans du goudron, dans un parking désaffecté immense où d'énormes colonnes faites en béton agrémenté les lieux. Le tout était vide et les lampadaires crachotaient leur lumière par à-coup, comme s'ils n'avaient pas la force d'illuminer l'environnement qui les entourait. D'un signe de la main, McGonagall lui fit comprendre de se mettre en position. Postée derrière elle, Hermione prononça quelques paroles magiques pour les rendre invisible le temps que la directrice puisse accomplir sa tâche.

La baguette relevé, Minerva prononça d'une voix irradiante de pouvoir : Salveo maleficia, protego totalum, repello moldum, cave inimicum. En un instant, une barrière magique translucide vint recouvrir tout le périmètre, encerclant le parking et quelques bâtisses. Hermione connaissant ce sortilège pour l'avoir prononcé à de nombreuses reprises lorsqu'elle protégeait Harry et Ron dans leur recherche des Horcruxes.

« Bien, » déclara McGonagall en rabaissant ses longs bras. En se retournant pour lui faire face, un vent violent percutant son visage, faisant virevolter sa frange. « Le sortilège de protection repoussera quiconque souhaite s'aventurer sur les lieux du crime. »

En plus de dissuader n'importe quel individu de s'approcher, le maléfice renfermait une forte manipulation mentale qui poussait les gens à oublier l'idée initiale quant à leur venue. Brillant, pensa-t-elle.

Sa baguette en main, Hermione inspira, déclarant à voix basse : visio maleficia. En un instant, la jeune femme sentit ses pupilles se dilater jusqu'à arborer une couleur d'un noir corbeau. Sa respiration ralentit et l'air qui traverser les remparts de ses lèvres devint froid. Une buée s'échappa de sa bouche, mais elle n'y fit pas attention. Il s'agissait d'un sort qu'elle avait appris il y a quelques mois, permettant de tracer les maléfices obscurs, qui était invisible à l'œil nu.

Hermione sentit le regard de Minerva porté sur sa personne. Elle n'était pas très fière, mais avant de partir en mission avec ses meilleurs amis, elle avait peut-être dérobé quelques livres dans la bibliothèque interdites de Poudlard. La directrice dût le comprendre, car elle se pinça les lèvres, impressionnée qu'elle connaisse un tel sortilège.

En penchant sa tête, la jeune Gryffondor s'accroupit pour observer le sol qui jonchait leurs souliers. Il y avait des résidus sombres qui se mouvaient sur la surface du goudron. Tendant ses longs doigts vers la source, elle hoqueta de surprise en sentant les filets noirs s'étirer puis s'enrouler autour de son poignet. En soufflant dessus, les tentacules ténébreux se figèrent, puis s'allongèrent jusqu'à la guider vers un couloir sombre, au fond du parking.

« Là-bas, » Hermione pointa du doigt un chemin qui était invisible aux yeux de la directrice.

Le maléfice Revelio franchit la barrière de ses lèvres et Minerva laissa échapper une exclamation de surprise.

« Mais qu'est-ce ? » s'étouffa-t-elle, les doigts plaqués contre sa bouche sous l'horreur.

« Il s'agit de filaments nocturnes, expliqua Hermione, le cœur serré. « Ils prennent forme lorsqu'un sortilège de torture a été lancé.

Elle n'osa expliquer que la première fois qu'elle avait fait face à ses traces miroitantes de noirceur c'était lorsqu'elle avait reçu le maléfice Endoloris par Bellatrix Lestrange.

« Ils développent une certaine autonomie, comme s'ils avaient une conscience », continua-t-elle d'une voix tremblante. Elle se frotta les tempes, soudain épuisée. Son sort lui coûtait plus d'énergie qu'elle pensait. « Ils ne sont pas nécessairement mauvais, mais ils prennent forme dans des situations... »

« Sombres », conclut McGonagall dans un chuchotement.

Hermione se releva, ses iris onyx contemplant toujours les filaments avec curiosité.

« Ils peuvent nous aider à trouver le corps de la victime et en découvrir un peu plus sur l'attaque qu'à subit votre espion. »

Hermione se retourna pour observer Minerva qui était en pleine réflexion.

« Est-ce qu'il a pu découvrir la moindre information ? »

« Je n'en ai pas la moindre idée, je n'ai reçu qu'une alerte avant-hier, en soirée. Il est dans un coma en ce moment même, à St-Mangouste. Je ne sais pas quand il pourra se réveiller. Il était... dans un sal état. »

La jeune femme se frotta les yeux, ses cheveux d'un noir corbeau lui fouettant le visage sous le vent qui faisait rage.

« Bien, c'est à nous de trouver des réponses alors. »

D'un pas déterminé, Hermione s'approcha des résidus, le cœur tambourinant dans sa poitrine. McGonagall l'arrêta dans ses mouvements, une main plaquée contre son épaule. Elle sursauta sous sa peau froide.

« C'est les effets du sortilège », se justifia-t-elle, les joues rouges d'embarras.

Comme il s'agissait d'un maléfice sombre, il y avait un échange qui se faisait. Sa chaleur et son énergie. Voilà le sacrifice qu'elle devait endurer jusqu'à ce qu'elle coupe le lien avec sa magie.

« Hermione », Minerva prit une intonation douce. « Lorsqu'on trouvera l'entrée, je vous demanderai d'attendre à l'extérieur. Pour votre sécurité. »

Elle se pinça les lèvres, mais ne prononça pas le moindre son. Elle ne commettrait pas l'erreur d'obtempérer et de lui faire une promesse qu'elle ne pourrait tenir.

Les filaments noirs continuaient leur descente jusqu'à se retrouver dans le sous-sol du parking. Ils prirent fin contre un muret en béton. En posant la main dessus, elle jeta un regard vers McGonagall qui relevait un sourcil, confuse. Elle ne voyait pas les traces.

« Les filaments disparaissent ici. »

« Apparete Trace », souffla Minerva avec un coup de baguette gracieux.

Il n'y eut pas le moindre changement. Hermione réfléchit, alors que l'enchantement Revelio s'ensuivit. Le béton restait intact, comme s'il ne répondait aucunement aux incantations prodiguées.

Ses yeux s'illuminèrent sous l'idée qui jaillit dans son esprit. Elle avait pensé à prononcer le sortilège d'explosion Bombarda, mais elle réfléchit au bouquin qu'elle avait lu à maintes reprises sur les incantations nocturnes. Elle se rappellait en avoir lu un particulièrement complexe, mais féroce. Qu'était-ce déjà ?

« Demystifio repello noctus viator », prononça-t-elle avec force en appuyant sa baguette contre le mur qui leur faisait face.

Une vague de magie lui souffla le visage, mélangeant le froid de son corps et la sensation brûlante d'un feu dans ses mains. Des filaments rouges s'enroulèrent autour du béton jusqu'à les faire trembler. Un signe de croix et un W s'incrusta dans la paroi, la léchant avec des crépitements de lave. Hermione s'écarta avec précipitation, ses yeux de nouveau bruns. Le muret se mouva sous leur stupéfaction jusqu'à prendre la forme d'une entrée.

D'un mouvement de la main, Minerva se rapprocha, une lumière fulgurante s'échappant de sa baguette, laissant entrevoir des escaliers sombres. Les filaments noirs reprirent leur chemin, mais Hermione se figea, la gorge enserrée dans un étau sous l'horreur. Il y avait des traces de sang. Beaucoup. Et elles semblaient récentes.

« McGonagall », demanda-t-elle, soudain anxieuse.

Elle avait un mauvais pressentiment. Et Hermione n'était pas la seule. Minerva, les membres figés, contemplait les tâches rougeâtres contre le sol, les mains tremblantes.

« Miss Granger », chuchota-t-elle. « Je vous demanderais de rentrer à Poudlard sur le champ et d'envoyer un hibou au professeur Slughorn. Je vous remercie de votre aide et d'avoir découvert l'entrée, mais vous n'irez pas plus loin. »

« Il est hors de question que je vous laisse ici toute seule », grogna-t-elle.

« Miss Granger. »

Sa voix était tranchante et incandescente de colère. Mais Hermione tint bon, continuant de la fixer de ses prunelles. Sa conscience lui susurrait de fuir, de revenir plus tard. Mais des picotements remontèrent jusqu'à ses bras, lui remontant l'échine et la faisant frissonner. Il était trop tard, réalisa-t-elle.

« Tu aurais dû l'écouter, jeune fille », susurra une voix dans leur dos.

Avant de pouvoir amorcer le moindre mouvement, un jet rouge de lumière la propulsa contre le sol et elle se fracassa le crâne contre le mur en béton. Hermione entendit vaguement Minerva crier son nom avant que les ténèbres ne l'avalent.

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