Chapitre 1 - Bienvenue
✨✨Bianca, 20 ans✨✨
Parfois, je me demande comment est née la haine que je ressens aujourd'hui pour des personnes que j'ai aimées hier.
Parfois, l'amour et l'affection se transforment en un sentiment si destructeur que nos cœurs basculent du côté de la haine aussi facilement qu'un battement de cils.
Alors, on apprend à laisser partir. On apprend à oublier.
On réalise que certaines personnes sont faites pour demeurer dans notre vie tandis que d'autres ne doivent qu'y passer et nous donner une leçon. Oh, ils laissent d'abord une trace. Sur notre cœur. Sur notre âme. Et puis, on finit par les oublier à leur tour. L'amour que l'on avait pour eux, la haine qui est ensuite apparue.
Tout finira par devenir poussière et être remplacé par un nouvel amour. Et une nouvelle haine. Non ? Peut-être que je me trompe. Peut-être que certaines personnes sont destinées à rester dans notre vie alors qu'on ne le pensait pas.
Après tout, la vie joue avec nous comme si nous étions de faibles pantins désarticulés. Le destin est parfois une salope et nous surprend de jour en jour.
Assise contre la tête de mon lit, j'observe les premiers rayons de soleil qui apparaissent par-delà les grandes vitres aux quatre coins de ma chambre. Je tire sur un minuscule fil qui s'échappe de mon oreiller tout en me perdant encore dans mes propres pensées.
On pense parfois que les plus dangereux, ce sont les autres. Mais quand on se perd dans sa propre tête, on réalise que le plus risqué pour nous même, c'est nous, putain. Nous pouvons parfois être si imprévisible et si cruel envers nous-même.
Et vous savez ce qui est encore plus ravageur ? Les secrets. Les secrets peuvent parfois sauver. Mais bien souvent, ils tuent. Et les secrets, j'en garde pas mal.
J'inspire profondément tout en me reconnectant avec ma réalité. Il fait beau, dehors. Une parfaite météo pour un neuf septembre, pas vrai ? Ça va être une bonne journée à Savannah. Pas que ça me motive pour ce premier jour de deuxième année universitaire.
Un léger coup est porté contre ma porte et je sens automatiquement mes lèvres s'étirer. Il n'y a qu'une seule personne qui prenne le temps de venir voir si je suis réveillée. Je tourne mon visage vers la porte de ma chambre qui s'ouvre dans un grincement. Une chevelure blonde se démarque dans le cadre de l'entrée tandis que Jackson passe le seuil.
— Debout, marmotte ! s'exclame mon petit frère.
Sa voix est encore plus grave qu'il y a quelques semaines. Il a 13 ans et demi et il grandit beaucoup trop vite. Je ne suis absolument pas préparée pour ça.
Il s'avance rapidement vers mon lit, encore vêtu d'un jogging et d'un tee shirt blanc. Heureusement que nos parents ne vont jamais de notre côté du manoir. Ma mère aurait sans doute une crise en voyant sa tenue.
Mes yeux s'égarent sur sa silhouette qui ne cesse elle aussi de s'allonger.
— Je suis déjà levée, je l'accueille avec un grand sourire qu'il me renvoie.
Je me lève de mon matelas et embrasse son front dès qu'il est à portée de mains.
— Argh, me fou pas de salive sur le front, il grimace en échappant à mon emprise.
Je rigole doucement mais remarque ses yeux briller d'amour. Un amour sincère, que je lui renvoie.
— Va te laver, je lui ordonne en prenant un air sévère. Tu pue, mec.
Il secoue sa tête et s'éloigne déjà vers ma porte. Il hausse les épaules et ses dents se dévoilent quand il contrattaque :
— Tu devrai te dépêcher de te préparer, Bianca. Ju' a fait des gaufres pour qu'on affronte cette putain de journée de rentrée et je vais tout bouffer.
— Ton langage ! je le reprends en lui jetant un oreiller dessus.
Il l'évite de justesse et s'échappe par la porte avant de me dire tout en déguerpissant :
— Oui, maman.
Ses épaules disparaissent dans le couloir et j'inspire profondément après avoir étiré longuement les muscules de mes bras. J'ai mal dormi. Je crois que mon corps ne veut pas non plus reprendre le chemin de la fac.
Mais, ce n'est pas comme si j'avais le choix.
J'observe ma chambre, puis fixe les moulures au plafond. La pièce est grande, mais la vie qui y vit ? Presque inexistante. Tout comme le reste du manoir familial.
Je pince mes lèvres tout en traversant la pièce pour rejoindre ma salle de bain. Mes yeux s'égarent sur les lourdes bibliothèques accrochées sur l'un des murs. J'aperçois l'exemplaire jaunit par le temps de Percy Jackson.
Une nuit de novembre, environ 6 ans plus tôt, me revient en mémoire. Mais je repousse immédiatement mes souvenirs. Il s'est passé tant de choses, depuis. Alors je détourne le regard de ce livre, du passé, et rejoins ma douche en tentant de maitriser le gout amer qui se loge à l'arrière de ma langue.
Je descends 30 minutes plus tard, préparée physiquement mais absolument pas mentalement pour cette journée. Mes pieds empruntent l'immense escalier qui mène au hall d'entrée du manoir Darell. Il est fait d'un étrange mélange de bois et d'acier et se mêle parfaitement à l'ambiance assez lugubre des lieux.
Il y a beau avoir du soleil dehors, les pièces du bas restent plutôt sombre. Mes fines chaussures à bride noire rencontrent ensuite le sol de marbre tandis que je traverse l'entrée pour emprunter un large couloir sur la droite. Des tableaux, et encore des tableaux de notre famille recouvrent les murs. Je ne tourne même pas la tête vers eux, les connaissant par cœur.
Les Darell sont arrivés dans la ville de Savannah, dans l'Etat de Géorgie, vers les années 1900. Mes ancêtres ont fait fortune avec les jeux puis avec le boom ferroviaire lors de la Révolution industrielle et des décennies plus tard, se sont installés au sud-est des Etats-Unis avant de venir ici et d'investir dans l'immobilier, activité qui prédomine leurs affaires aujourd'hui.
Ils ont beaucoup investi dans les pierres et édifices de la ville et une autre famille est arrivée vers les années 1910 avant d'investir à son tour. Les Fitzroy. Les liens de tous genres se sont créés, l'animosité a suivie.
Je suis interrompue par la délicieuse odeur de gaufres tandis que j'arrive dans l'immense cuisine au bout du couloir. Mon ventre se met automatiquement à gronder et je me rappelle que je n'ai rien avalé hier soir.
— Salut Ju', je débute en m'avançant.
L'homme qui est au service de mes parents et qui nous a pratiquement élevés se tourne vers moi tout en pressant des oranges au-dessus de plusieurs verres. Il est 8 heures du matin et il porte déjà un costume sur mesure. Son éternel tablier est attaché à son torse.
Mes yeux s'égarent sur ses tempes grisonnantes tandis que je continue d'approcher.
— Attends, j'vais t'aider.
Je récupère une orange, en gobe un quartier et presse le reste au-dessus d'un verre.
— C'est adorable de ta part, me répond Ju' avec un sourire.
Mes lèvres s'étirent en réponse mais je ne réponds rien. Il se trompe. Je ne suis pas adorable. Je ne suis pas une mauvaise personne, mais je suis loin d'en être une bonne. J'ai aussi mes vices. Beaucoup de vices.
Et parfois, je ne peux m'empêcher de me demander s'il existe de bonnes personnes sur cette terre. Je veux dire, des personnes qui n'auraient jamais commis aucun impair ?
— Où est maman ? je demande en pressant une autre orange.
Je m'attends à ce qu'il me dise qu'elle soit avec papa dans leur bureau du centre-ville, où dans celui à l'arrière du manoir. Mais non. Jules secoue sa tête tout en pinçant les lèvres.
— Elle dort encore.
Je repose l'épluchure de l'orange tout en me tendant. Je crois même avoir mal entendu.
— Comment ça, elle dort encore ?
Maman ne dort jamais aussi tard. Même un dimanche matin. Surtout les dimanches matin, d'ailleurs. Elle serait trop occupée à organiser une garden party sur notre propriété.
Mon rapport avec ma mère a beau être compliqué, l'inquiétude me traverse instantanément. J'aime ma mère. Elle est loin d'être parfaite. Mais...je l'aime. Et je sais qu'elle nous aime, à sa façon, du moins...
— Elle était fatiguée, continue Ju'.
Mon ventre se tord un peu plus et je m'éloigne du comptoir mais il continue :
— Elle a demandé à ne pas être dérangée.
— Vraiment ? je murmure avec peine.
La déception et le chagrin se mêlent en moi. Elle me tient à l'écart, comme d'habitude. Et c'est une douleur que je ne peux jamais oublier tant elle est vive à chaque fois que je la ressens.
Comme s'il voulait me changer les idées, notre majordome contemple ma tenue bordeaux et sombre. Sa peau claire s'illumine presque.
— Uniforme obligatoire aujourd'hui ?
— Ouais, je marmonne rageusement.
Je m'adosse au comptoir tout en l'observant servir les gaufres sur un large plat en argent. J'en ai presque l'eau à la bouche tant elles ont l'air savoureuses.
— Heureusement que c'est juste pour la rentrée, continué-je dans un soupire.
Les uniformes aux couleurs et à l'emblème de Savannah Institute ne sont obligatoires que pour les journées officielles organisées par l'université comme c'est le cas pour cette rentrée. Pitié, que cette maudite journée passe rapidement.
Je baisse les yeux vers la jupe plissée bordeaux, et les grandes chaussettes blanches à mes jambes. Tant mieux qu'il fasse beau aujourd'hui ! Aucune envie de me peler le cul.
Ma chemise blanche taillée sur mesure est accompagnée d'une veste bordeaux et d'une cravate de la même couleur.
Ju' n'a pas le temps de me répondre que Jackson déboule dans la cuisine. A moitié débraillé, il se jette sur le comptoir et récupère une gaufre qu'il engouffre presque instantanément. J'échange un regard taquin avec notre majordome qui quitte la pièce les secondes plus tard.
— Tu manges pas ? articule difficile Jack tout en s'essuyant la bouche avec sa manche de chemise.
Est-ce que j'ai déjà dit à quel point je l'aime ?
Vous pouvez être triste, déprimé, en colère. Il vous suffit de voir la tête blonde de Jackson pour que votre cœur soit apaisé. Enfin, parfois, la douleur est si forte que...
Stop.
— Seulement si tu as la délicatesse de m'en laisser une, blagué-je en le rejoignant.
Je mastique la pâtisserie sucrée pendant que Jackson entame sa troisième gaufre. Il est en pleine croissance et dévore tout ce qui tombe sous sa main à n'importe quelle heure de la nuit ou de la journée.
Je termine mes bouchées et m'avance vers lui tout en tendant mes doigts.
— Est-ce que tu t'es regardé dans le miroir ? On dirait que tu t'es habillé dans le noir.
Mon frère rigole face à ma remarque. J'ai tellement eu l'impression de l'élever que je suis assez maternelle avec lui. J'y peux rien. Je veux lui donner tant d'amour, pour qu'il ne ressente jamais le manque imposé par mes parents.
Je ne veux pas qu'il vive la même chose que moi.
Je repense à ma mère, couchée là-haut, et mon inquiétude demeure. J'ai l'impression que quelque chose ne va vraiment pas. Et putain, je n'aime pas qu'elle ne veuille pas nous voir. Même pour la rentrée.
Je défais le nœud de cravate de Jackson et le refais correctement tandis qu'il fixe attentivement mes gestes.
— Prêt pour ta rentrée ? demandé-je gentiment.
Il hausse ses épaules, mais je vois bien qu'il est stressé. Il est en pleine construction physique et mentale et les doutes l'animent. Tout comme moi.
— Je sais pas trop comment ça va se passer, en fait. J'espère juste que les profs ne seront pas trop sévères.
J'ébouriffe ses cheveux et le laisse à son petit déjeuner tout en m'adossant au comptoir d'en face. Jackson va à l'institut privé pour garçon, au nord de Savannah. Je sais qu'il n'apprécie pas forcément l'endroit. Sauf qu'il n'a pas vraiment le choix.
Comme je ne l'ai pas eu. Notre destin était déjà tout tracé. Nous sommes destinés à reproduire le même que nos parents, et leurs parents avant eux.
Je vais devoir suivre la malédiction des Darell, et avec le sourire. Parce qu'il ne faut rien montrer, pas vrai ?
Peut-être qu'à force de faire semblant, j'arriverai un jour par me convaincre moi-même.
Mon portable émet un bip sonore et je le récupère après avoir agrippé mon sac.
— Eleanor est là ! J'y vais. Bonne rentrée, Jack ! Je t'aime !
Je m'éloigne déjà pendant qu'il me répond difficilement – toujours en train de terminer sa nouvelle gaufre.
Je ne croise personne – Ni Ju' – ni ma mère, tandis que je rejoins l'entrée du manoir et en pousse la lourde porte faite d'un mélange de bois massif et d'acier.
Le soleil frappe ma peau dès que je mets un pied dehors et je le savoure quelques secondes tout en fermant les yeux. J'ai passé l'été loin d'ici. Déjà parce que je n'avais aucune envie de rester dans cette foutue ville après...Après...
Bref, j'ai voyagé dans tout l'Etat avec Eleanor et son grand frère, Anon. Il nous a fait faire le tour des lieux insolites et c'était les meilleures vacances de ma vie. Je me suis coupée de tout et de cette réalité merdique pendant deux mois.
Un klaxon me ramène sur terre et j'ouvre mes paupières pour découvrir la Buick super riviera de ma meilleure amie qui stationne le long du trottoir au loin. Une voiture aussi singulière qu'est Eleanor. La carrosserie vert menthe détonne complètement avoir la morosité des lieux.
— Bouge ton cul ! hurle mon amie en baissant la fenêtre passagère.
Je lève les yeux au ciel tout en traversant l'allée de la demeure de ville de ma famille. Mes cheveux blonds cascadent dans mon dos quand je porte une dernière fois mon attention sur l'édifice.
Le manoir des Darell, à l'architecture gothique, est fait de pierres rouges et est recouvert d'innombrables fenêtres arquées à bord blanc. Il possède une tourelle faite de briques noires, juste au niveau de l'aile de mes parents. Tout l'endroit est entouré d'arbustes parfaitement taillés.
Rien ne dépasse. Rien ne détonne. Tout est mort.
— Je t'ai manquée ? débuté-je en tirant ma portière.
Je m'installe sur mon siège tandis que ma meilleure amie fait éclater une bulle de chewing gum. Une odeur de menthe me vient directement aux narines.
— Je t'ai vu la semaine dernière, me rappelle-t-elle.
Je hausse mes épaules tout en faisant claquer sa prochaine bulle du bout de mon index.
— Et alors, continué-je avec un rictus moqueur, je suis une personne exceptionnelle et inoubliable.
— Le seul truc que je ne veux pas oublier, c'est le mec que j'ai chopé à Atlanta en juillet.
Ma meilleure amie me rafraichit la mémoire tandis qu'on s'éloigne des lieux. La propriété se tient juste en face du parc Forsyth, à l'angle de Drayton Street. De ma fenêtre, j'ai un léger aperçu sur la fontaine mythique du parc et la végétation luxuriante aux alentours. J'y allais souvent tôt le matin pour me promener et éviter la foule.
Parfois, l'insouciance de mon adolescence me manque. Certaines choses étaient compliquées, mais tout me semblait simple en comparaison avec aujourd'hui.
— Mon frère est parti pour New York, continue Eleanor.
Ses mots font pivoter mon visage vers elle. Aussitôt, je ressens un sentiment de jalousie. Moi aussi, je veux partir d'ici. Mais je ne laisserai jamais Jackson. Ni l'argent que je dois récupérer à mes 21 ans – le 23 novembre prochain.
Et puis...j'ai fini par comprendre que mon héritage me suivrait quoi qu'il arrive. Peu importe le prix que je devrai verser.
Et putain, j'essaye aussi de ne pas me morfondre sur moi-même. J'aime toujours mes parents, malgré tout. Et j'ai conscience d'avoir accès à certains privilèges.
— Il va y rester longtemps ? demandé-je en rabattant une boucle derrière mon oreille.
— Assez pour qu'on aille lui rendre visite aux prochaines vacances.
Ses yeux noisette s'écarquillent de malice et je peux voir tout un tas de plans bourbiers passer à travers. Mais ça tombe bien, les plans bourbiers c'est notre piqure d'adrénaline.
Et malheureusement, tout le monde sait que je ne peux pas dire non à ça. Ça m'a d'ailleurs porté préjudice dans le passé.
— Je suis ta femme, j'acquiesce avec un sourire. Je te suivrai jusqu'au bout du monde.
Son rire cristallin éclate entre nous puis elle augmente le volume de la radio tandis que je fixe l'extérieur. Mes doigts passent la fenêtre et tandis qu'Eleanor accélère sa conduite, le vent frappe ma paume.
— Plus vite, lui demandé-je.
La route que l'on emprunte est déserte. J'inspire vivement l'air de cette fin d'été, gonflant mes poumons d'autant de vie que je le puisse.
On va devant Jones Street qui est considérée par certains comme la plus belle rue des Etats-Unis. Savannah est une ville portuaire important de 150 000 habitants, très chargée historiquement. C'est d'ailleurs la plus ancienne ville de l'Etat de Géorgie. Certaines horreurs historiques ont eu lieu ici et beaucoup d'âmes innocentes ont perdu la vie au 18ème siècle.
La ville est aujourd'hui hyper importante avec son centre industriel, ses édifices historiques à l'architecture gothique et son port maritime. Et les Darell et les Fitzroy en contrôlent la quasi-totalité, à parts égales.
Dommage que je déteste Bellamy Fitzroy autant que lui, me hait.
— J'ai vu des fantômes l'autre nuit dans mon jardin, continue Eleanor.
Je fronce les sourcils tout en me demandant depuis quand je le l'écoutais pas. On quitte le centre-ville pour continuer notre route vers la petite université derrière le centre historique.
— Qu'est-ce que tu racontes ?
— Quoi ? rétorque mon amie. La ville a la réputation d'être l'une des villes les plus hantées des Etats Unis. Je te jure que j'ai vu quelque chose !
C'est vrai que certains considèrent qu'elle est hantée et c'est un côté renforcé par tous les marais d'eau douce et les chênes immenses dans la ville.
— Au moins, reprend Eleanor, ils ont tourné mon film préféré, ici.
Forest Gump. Je ne compte pas le nombre de fois où on l'a regardé. J'en fais encore des cauchemars, pour tout dire.
Passons. La ville possède plusieurs universités. Et on arrive bien vite sur le campus de l'Olympia University of Savannah. Si ça, ne n'est pas présomptueux comme nom, putain. Je déteste ce nom.
Les Darell et les Fitzroy ont créé l'université en 1920. Depuis, chacun de leur héritier est passé par là avant d'entrer dans la vie active. Une autre partie de notre héritage, j'imagine.
L'université ne regroupe que 3000 étudiants non boursiers et boursiers de la ville. Les meilleurs élèves du coin se voient offrir des sommes folles pour intégrer l'établissement élitiste.
— Et voilà ! Retour à la maison ! couine mon amie sans entrain.
Elle comme moi avons envie de revenir. Mais son père, qui travaille pour le mien, la trainerait ici par les cheveux s'il fallait.
— Ça va bien se passer, je la rassure autant que je me rassure moi.
Je vois ses traits grimacer mais elle ne répond rien. On traverse l'entrée du campus en voiture et Eleanor gare sa voiture devant une longue étendue de pelouse verte, tondue au millimètre près. Les bâtiments à l'architecture gothique nous accueillent. Il y a 4 bâtiments principaux qui sont clairement inspirés des vieilles universités anglaises.
Au centre du campus, entouré lui aussi de gazon, le premier bâtiment. Le plus grand, avec le hall d'entrée et un amphithéâtre pouvant accueillir les élèves le jour de la rentrée. Plusieurs tourelles accompagnent son sommet.
A gauche de l'édifice principal, la bibliothèque qui ressemble plus à un musée historique qu'autre chose. A droite de l'édifice principal, deux bâtiments – quasiment aussi énormes l'un que l'autre – avec le réfectoire et les amphithéâtres et salles de cours.
Je connais l'endroit comme ma poche vu que c'est ma deuxième année ici, mais je ne peux m'empêcher de remarquer à quel point l'endroit est beau. Les 4 bâtiments de pierres anciennes sont reliés par des chemins parfaitement entretenus qui prennent place entre les étendues d'herbes et les immenses chênes.
Les arbres sont recouverts de mousse, donnant un côté assez mystique aux lieux.
Derrière les quatre bâtiments, un autre chemin mène à la piscine et au terrain de football avec les vestiaires et encore derrière, les quelques bâtiments pour les logements étudiants. S'il y a bien une chose que la famille Fitzroy a en commun avec la mienne, c'est leur amour du football.
Elles n'ont que le football en commun. Pour le reste, il n'y a que la haine.
Et mon père saoule déjà Jackson pour qu'il rejoigne l'équipe quand il viendra étudier ici.
Je replace mon sac sur mon épaule tout en remettant en place ma cravate bordeaux. On croise un blason inscrit dans plusieurs pierres sur les édifices. Le même écusson qui est brodé sur notre uniforme. Une alliance parfaite entre les deux familles qui ont fondé l'université. Les armoiries sont bordeaux, jaune et blanche. On peut y voir les contours du bâtiment principal qui y sont dessinés. On y voit aussi une hermine – symbole d'agilité et d'intelligence – et une balance – symbole de la justice, le tout entouré de feuilles de chênes supposément recouvertes d'or.
On pénètre bien vite dans le bâtiment principal. Les lieux ne sont évidemment pas aussi grands que dans les autres universités américaines, mais tout de même. Les hauteurs sont plafonds sont immenses. Eleanor salue quelques connaissances et je me contente de hocher la tête à chaque fois.
Je n'ai pas envie de parler. Ça y est, je suis putain de stressée.
Déjà, parce que ça va être une dure année. Je vais devoir maintenir des notes exemplaires pour que les Darell ne me tombent pas dessus. Et ensuite, parce que... Et bien...
Je suis interrompue dans mes pensées quand Eleanor claque ses doigts devant mon visage.
— Et oh, ça va ?
L'inquiétude barre son visage et je m'en veux. Je force mes muscules à se détendre et mes lèvres à s'étirer.
— Ouais. Impec'.
Elle ne semble pas vraiment me croire et en même temps ma voix sonne faux. Mais je place un masque infranchissable sur mon visage. Je redeviens Bianca Ariana Darell.
L'héritière au caractère parfois de peste. Je carre les épaules et pénètre dans l'amphithéâtre du bâtiment principal. Je salue quelques personnes au passage et m'installe au milieu d'une rangée au milieu de l'amphi. L'endroit est si vieux que même s'il fait bon dehors, la grande pièce est glacée.
Étant donné que l'entrée est en bas au niveau de l'estrade, je monte de longues marches pour rejoindre les places.
— Putain, on se gèle le cul, grommèle Eleanor en s'installant près de moi.
Mes fesses se pressent contre un banc en bois et je ne peux la contredire. Je vois d'ici les courbatures arrivées. Je sens que le discours du directeur Viellicht va durer des heures. Non seulement je déteste cet enfoiré, mais ça va être difficile de pas s'endormir.
Il n'y a pas que des deuxièmes années, aujourd'hui. Tout le monde doit venir pour son pompeux discours.
— Nathaniel est là, me souffle Eleanor en penchant sa tête brune vers la mienne.
Je me braque instantanément, parce que si Nathaniel est là...Effectivement, son jumeau, Andrew, passe la porte en contrebas une seconde plus tard.
— Peut-être qu'il ne va pas te remarquer, suggère mon amie.
Oh, elle se trompe. Mais je n'ai pas peur de voir Andrew, avec qui j'ai difficilement coupé tous liens avant l'été. Ce n'est pas de mon ex plan cul complètement taré dont j'ai peur.
J'ai peur de voir celui qui m'a brisé le cœur. L'homme que j'ai brisé en retour. Bellamy Theodore Fitzroy.
Et tandis que tous les étudiants - eux aussi vêtus de leur uniforme - finissent par s'installer, je ne peux m'empêcher de chercher cet homme du regard. Mon cœur au bout des lèvres, mon regard se tourne dans tous les coins aussi discrètement que possible.
Et puis, finalement, après tout le monde...Il entre.
Ma respiration se coupe et je me redresse sur le banc, le dos droit. Je l'observe une seconde. Et c'est suffisant pour mettre le bordel dans ma tête.
Bellamy passe le seuil. Il est encore plus large d'épaules que dans mon souvenir. Et plus grand. Plus dangereux, putain.
La plupart des membres de l'équipe de football portent aujourd'hui leur blouson de l'équipe. Mais pas lui. Il porte un pantalon et une chemise, ainsi qu'une cravate qui, elle, est bordeaux. Sa veste sombre est déboutonnée et il place ses mains dans ses poches en pénètrant dans les lieux. Je sais que sa montre préférée est attachée à son poignet.
Ses lèvres sont étirées dans un petit rictus moqueur tandis qu'il observe le monde comme si c'était son terrain de jeu préféré. Le reste de son visage est fermé, comme d'habitude.
Il transpire le pouvoir. L'héritage. L'inaccessibilité.
Mais ses yeux sombres, eux...Ils s'égarent une seconde dans les gradins. Et bien vite, ils me trouvent. Alors, tout me percute. Je lui renvoie mes propres émotions en plein dedans.
Haine. Histoire commune. Trahisons. Mais surtout...Secrets. Ses traits laissent échapper quelques brides d'informations et je vois qu'il ressent la même chose.
Et je suis la première à détourner le regard tandis qu'il monte les marches vers nous.
Merde.
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J'espère que ce premier chapitre vous a plu ?? ✨ ainsi que son ambiance !
Il est très long, les suites seront beaucoup plus courtes. Mais je voulais vous plonger dans le décor immédiatement hehe !
Laissez moi vous présenter Bianca ✨ ( semaine prochaine je vous présenterai Bellamy)
A mercredi 💛
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