Chapitre 33 (suite)

Finalement, c'est elle qui a réussi à me rassurer. Nous échangeons nos numéros de téléphone et repartons chacun de notre côté. La bienséance voudrait que je la raccompagne chez elle, mais elle insiste pour que je rentre directement. Elle compte passer un coup de fil à son copain et je comprends qu'elle préfère être seule pour lui parler de notre plan. C'est donc le cœur plus léger que je franchis le pas de la porte, jusqu'à ce que je tombe sur mon cher géniteur qui m'attend dans l'entrée. Sans me laisser le temps de me déchausser, il me saute à la gorge.

"Alors ? Ce rendez-vous ? J'espère pour toi que tu n'as pas tout fait capoter."

Je me renfrogne et l'allégresse que je ressentais depuis ma conversation avec Su-Jin disparaît. Il n'y a que mon père qui soit capable de m'ôter si vite la moindre once de bien-être.

"Tout s'est merveilleusement bien passé, je réponds d'une voix lasse. Tu peux téléphoner au père de Su-Jin si tu ne me crois pas. Quoi qu'il en soit, nous devons nous revoir ce week-end. Et seulement tous les deux."

L'idée ne semble pas l'enchanter puisqu'il ne pourra pas surveiller mes moindres faits et gestes. Et surtout mes dires.

"Dommage que tu ne puisses pas me coller des caméras et des micros partout où je vais n'est-ce pas ? je lui dis, acerbe.
- Dommage que je ne puisse pas te faire suffisamment confiance.
- Tout ce qui t'intéresse de tout façon c'est ce foutu mariage. Et moi que tu laisses mes amis tranquille. Nous avons un accord, je respecterais ma part du marché tant que tu respecteras la tienne."

Je passe devant lui après avoir retiré mes chaussures et me rends dans ma chambre. En chemin, je croise Yoong-Jae qui m'envoie un sourire compatissant, mais ne dit rien sachant que mon père n'est pas loin. Lorsque je m'allonge enfin dans mon lit, mon téléphone vibre. Je n'ai aucun doute sur l'identité de son expéditeur, étant donné que je n'ai qu'un seul contact pour le moment.

Kim Su-Jin :
Encore milles merci
Yoongi. Tu n'imagines pas
à quel point je te suis
reconnaissante pour tout.
Je te tiens au courant pour
ce week-end. Et ne t'inquiète
pas, j'ai dis à mon père que
j'avais passé une merveilleuse
après-midi. Mes parents sont
ravis et ça devrait rapidement
remonter aux oreilles des
tiens.
SMS 18:12

Moi :
Merci à toi. Je ne savais pas
à quoi m'attendre en venant
et je suis plutôt content que
les choses se soient passées
ainsi. On pourra au moins se
soutenir l'un l'autre pendant
ces interminables repas.
SMS 18:13

Kim Su-Jin :
Ne m'en parle pas 😣 je n'ai
pas hâte d'arriver au prochain
mais au moins, comme tu le
dis, on pourra se soutenir !
Bonne soirée Yoongi et à
bientôt ! ☺️
SMS 18:13

Moi :
Bonne soirée à toi aussi 😊
SMS 18:14

Je pose mon téléphone sur ma table de chevet et me tourne sur le côté. A vrai dire, je ne sais pas trop quoi penser de tout ça. Est-ce vraiment une solution d'aller au bout de ce mariage, pour ensuite faire notre vie chacun de notre côté ? Je n'ai pas de meilleure idée pour le moment, mais mes pensées ne cessent de tourner autour de Jimin, et je me demande ce qu'il penserait de tout ça. J'ai l'impression de le trahir. Non, je suis en train de le trahir. J'ai beau espérer qu'il ait fait une croix définitive sur moi, en transformant son amour en colère ou en haine, je le connais suffisamment pour savoir que ce n'est pas le cas.

Il doit simplement être dans le même état que moi, à tenter de survivre dans ce monde qui ne tourne soudain plus aussi rond. A la seule différence qu'il doit sûrement essayer de faire bonne figure devant sa mère pour ne pas l'inquiéter, alors que de mon côté, je peux renvoyer à la figure de mes parents toute l'animosité qu'ils m'inspirent. On toque à la porte et avant que j'ai eu le temps de répondre, Yoong-Jae entre, armé de deux chocolats chauds, avant de refermer la porte en vitesse.

"T'es au courant que le principe, quand une porte est fermée, c'est d'attendre que la personne à l'intérieur réponde pour que tu puisses entrer ? J'aurais pu être occupé.
- Mais tu ne l'es pas."

Mon frère s'avance avec un petit sourire faussement désolé, avant de me tendre la tasse qu'il tient dans la main. Je suis tenté de le renvoyer dans sa propre chambre mais je sais qu'il cherche simplement à me réconforter. Il doit penser que mon après-midi a été désastreuse et que j'ai besoin d'un peu de soutien.

"Merci, je lui dis en prenant la tasse. Mais il va quand même falloir que tu perdes cette mauvaise habitude de rentrer dans ma chambre comme si c'était la tienne.
- C'était un peu la mienne pendant que tu n'étais pas là."

Devant mon air interrogateur, il ajoute.

"Je venais souvent ici quand ça n'allait pas, que père mettait trop de pression sur moi ou que j'avais simplement besoin de parler à quelqu'un.
- Tu n'as pas d'amis à qui te confier ? je demande, un peu mal à l'aise de savoir que le seul endroit où il trouvait refuge était ma grande chambre vide.
- Ils ne comprennent pas... et si je leur en dis trop et que ça remonte aux oreilles de la mauvaise personne, ça risque de me retomber dessus... Et puis, ce n'est pas pareil que de discuter avec toi..."

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