*Esméralda part 2*


Esméralda supporta cette famille complètement abusive pendant plus d'un an. La haine s'accumulait chaque jour un peu plus. Elle savait se taire, heureusement pour elle. À chaque fois, elle retenait ses poings, ses larmes, son idée de meurtre. À chaque "Chose", " Vermine", ou bien "Putain", elle serrait les dents au point d'avoir les gencives en sang. 

Puis, un soir, elle n'en pût plus. Elle éclata. 

Gornela lui avait ordonné de se mettre à nue, pour qu'elle puisse dessinée sur son corps. Esméralda l'avait fait, comme elle l'avait si souvent fait devant Madame ou Monsieur, qui souhaitait l'observer de plus près. Le Maître, lorsque sa femme était de sortie, lui demandait de s'approcher, jusqu'à ce qu'il la prenne dans ses bras et la caresse doucement. Esméralda s'était vidée de toute pudeur et de tous sentiments, si bien qu'elle ne sentait pas la douleur lorsque Hypérion décidait de passer à l'action. 

Cependant, aujourd'hui, devant Gornela, elle sentit qu'elle ne réussirait pas à garder sa rage. Gornela commença à dessiner sur son ventre, avec de la peinture faite à partir de pigments.  Gornela coloria ses hanches en rouge, puis elle fit des ronds autour de ses seins. Elle s'arrêta. 

- Je ne veux plus faire ça. Je m'ennuie. Chose, fais quelque chose, lui dit-elle. 

- Que voulez-vous que je fasse ? 

Esméralda se pinça le bras pour rester calme. 

- J'en sais rien, c'est pas moi la Putain ! Fais un truc. 

La jeune femme ne comprenait pas où Gornela voulait en venir. 

- Inutile ! se mit à hurler Gornela. 

Elle lui lança la palette à la figure. Le visage d'Esméralda était couvert de couleurs. 

- Tu n'es qu'une Putain, tu entends ça ? Tu as de la chance de nous avoir, sinon tu aurais fini au fond d'un caniveau ! Mes parents sont trop cléments avec toi, je te tuerais, moi ! 

Esméralda se sentit lourde, d'un coup. Le poids de cette année pesait trop sur sa personne. Elle n'était pas faite pour garder tout ça enfoui. Avant, personne ne s'approchait jamais en raison de son caractère. Elle avait découvert qu'ici, ce n'était pas elle qu'on devait craindre. La hiérarchie était différente. Pourtant, elle ne réfléchit plus à ça. 

- Essaie, saloperie de gamine, essaie juste, lança Esméralda en grinçant des dents. 

Gornela ne retint pas sa surprise devant cette affront. La petite se ressaisit vite et attrapa un petit vase en terre cuite en guise d'arme. Elle fonça maladroitement sur Esméralda, qui vit passer dans le regard de cette enfant un mépris si grand qu'il égalerait celui qu'elle ressentait pour eux. 

Esméralda n'eût aucun mal à dévier l'attaque de Gornela, qui tomba sur les fesses par terre. Rouge de honte, elle se mit à hurler. 

Esméralda voulut la faire taire avant qu'il ne soit trop tard, mais elle ne réussit pas. Hypérion et sa femme débarquèrent dans la chambre avec la vitesse de la lumière. Esméralda cacha sa nudité en prenant le drap blanc du lit de la petite. Sa maîtresse la regarda avec mépris et se précipita vers Gornela, qui s'était mise à pleurer misérablement. Hypérion, quant à lui, fixait Esméralda avec intensité. Pour la première fois depuis longtemps, Esméralda soutint ce regard. Ce n'était pas un défi, c'était pour montrer qu'elle était encore humaine. 

Sa maîtresse se mit alors au milieu d'eux et donna une violente gifle à Esméralda, qui tomba au sol tant cette claque était puissante. 

- Espèce de pétasse, cracha sa maîtresse. 

- Ce n'est pas moi, la pétasse, murmura Esméralda. 

- Qu'est-ce que t'as dit ? 

Esméralda fusilla sa maîtresse du regard. Cette dernière semblait réaliser qu'elle n'était plus la dirigeante ici, et qu'elle ne ferait plus faire n'importe quoi à son esclave. Elle semblait se rendre compte qu'en face d'elle se trouvait un autre Homme possédant un caractère. 

- Demain, je veux qu'elle soit exécutée ! Je ne supporterais pas de la revoir, c'est compris ? dit-elle à Hypérion.

Hypérion hocha la tête et sortit de la pièce. Sa femme prit Gornela par le bras et l'entraîna ailleurs. Esméralda ne savait plus quoi faire. Elle reprit ses vêtements, les enfila et sortit à son tour. La jeune femme entendit les cris de sa maîtresse suivi des approbations de son mari. L'enfant ne parlait pas, mais Esméralda savait qu'elle était avec eux. 

Ne sachant toujours pas quoi faire, Esméralda se dirigea vers son lit, composé uniquement de paille fine qui recouvrait un petit bout sous l'escalier. Elle s'allongea et ferma les yeux, en essayant d'oublier. Elle n'y parvint pas. Et si elle tuait cette famille ? Ça serait beaucoup plus facile que de s'enfuir, et elle en était capable. Dans son ancien village, elle avait appris des techniques de défenses et d'attaques de la part de son voisin. Ce dernier avait, un jour, décidé de prendre cette gamine sous son aile, et il en avait fait une guerrière. Cependant, depuis un an, cette femme là avait disparu. Elle avait été détruite. 

Le lendemain, Esméralda se réveilla avec une douleur lancinante dans le crâne. Finalement, elle s'était endormie. Aucun bruit ne se faisait entendre. Elle se demanda alors si la famille dormait. Puis, elle entendit un pot se casser à l'extérieur de la maison. Sans réfléchir, elle s'y précipita. 

La scène qui se jouait devant elle la réjouit et l'effraya en même temps. Des hommes armés étaient dans la cour et menaçait la famille de leurs épées. Hypérion semblait étonné, sa femme terrorisée, et leur fille pleurait déjà. Esméralda resta à l'écart. 

Le plus important des hommes s'avança vers Hypérion. Il était vieux, mais il paraissait bien se porter. Ses cheveux étaient blancs, tout comme ses sourcils. Il portait une cicatrice sur l'arcade droite. 

- Alors, où est mon argent ? demanda l'homme à la cicatrice, d'un ton menaçant. 

- Je te l'ai déjà dit, Gregor, je ne te dois plus rien ! Je suis venu, et tu as pris ton argent, alors laisse moi tranquille.

Gregor s'avança un peu plus, jusqu'à ce que la lame frôle le cou d'Hypérion. Celui-ci gloussa. 

- Oui, je sais. Mais, tu vois, quand on m'emprunte de l'argent, on en paye le double. Tu ne m'as rendu que le compte, je veux plus. 

- Ce n'était pas le marché, paniqua Hypérion. 

- Voyons, tu sais bien que les marchés honnêtes ne font pas les bons commerçants, sourit Gregor. 

- Je n'ai pas ton argent.

Gregor grinça des dents, visiblement embêté. Il leva un peu sa lame, puis il aperçut Esméralda cachée derrière un mur. 

- Mais que vois-je ? M'aurais-tu caché une merveille ? 

Esméralda sentit son cœur accélérer. Elle était tétanisée, elle ne pouvait plus bouger. Alors, quelqu'un l'attrapa par le bras et la jeta entre les deux camps. La jeune femme était à genoux, le visage baissé pour que personne ne voit sa terreur. 

- Intéressant, vraiment, chuchota Gregor. Ça rembourserait ta dette. 

- Parfait, cria sa femme. Nous vous la donnons. 

- Quoi ? s'enquit Hypérion. Tu plaisantes ?

Sa femme le fusilla du regard, tandis que Gregor examinait Esméralda, toujours au sol. 

- Nous lui la donnons, c'est clair ? De toute façon, elle serait morte. Autant qu'elle serve à quelque chose, celle-là. 

Hypérion se tordit la mâchoire. 

- J'accepte, dit-il avec hésitation. 

Sa femme sourit, tout comme Gregor, qui fit un geste à ses hommes pour la soulever. Esméralda se sentir incroyablement impuissante, incroyablement honteuse de se faire traîner ainsi. La position d'objet était revenu. Sa guerrière intérieure avait de nouveau fichu le camp. Elle n'était plus rien, une nouvelle fois. Le regard vide, elle se laissa embarquer par les hommes de ce Gregor. 

Bien plus tard, lorsqu'elle était arrivée à la base de Gregor, on l'avait tout de suite enfermé dans la cave. C'était donc sa nouvelle demeure. Encore une fois, elle vivait dans une cave, sinistre, humide, noire. Esméralda voulait en finir. Elle voulait que tout ça s'arrête. Comme chaque être humain, elle n'était pas faite pour être enchaînée. Cependant, comparé à d'autres, n'avait pas le mental assez solide pour y supporter. L'espoir, elle ne connaissait plus. 

Une lueur lui vint un soir. Son nom était Dumban, un des fidèles de Gregor. 



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