*Esméralda part 1*
NDA : Non, je ne fais pas revivre les morts ! Cependant, je peux faire vivre leur passé ;) Clothy a émit l'idée de raconter plus en détails le passé de cette chère prêtresse ! Donc, voilà ! Ce sera bien entendu une nouvelle de trois/quatre parties, qui ne change rien du tout à l'histoire ! J'insérerai ces parties entre le reste, sauf si ça vous dérange et que vous préfèreriez que je fasse un autre livre, dites le moi. :)
-------------------------------
Lorsque cet homme l'avait examiné dans ses moindres recoins, et avait donné quelques pièces d'or au vendeur, Esméralda savait déjà quel serait son sort. Voilà longtemps qu'elle le sait, et qu'elle attend le jour fatidique. Elle patientait depuis des mois, dans une cage, au fond de la cave d'un détraqué. Elle avait vu des pauvres gens passer et repasser. Certains partaient définitivement, d'autres revenaient de l'extérieur, d'autres encore arrivaient tout juste. Esméralda n'éprouvait pas de la peine pour eux, ni de la colère. Elle ne se souciait pas d'eux, seulement de son cas. Et elle était certaine que les autres esclaves présents dans cette cave faisaient de même.
Aujourd'hui, pourtant, son infecte vendeur avait eu l'amabilité de lui faire voir la lumière du soleil. Esméralda avait été éblouie par tant de lumière d'un seul coup, habituée à l'obscurité. Elle n'avait pas eu le temps de reprendre ses esprits, le vendeur la poussait déjà sur l'estrade. À ce moment-là, Esméralda avait l'impression de n'avoir plus d'âme. Elle ressentait de la haine envers ces gens, certes, mais rien d'autre. Elle avait oublié la sensation des autres sentiments. Elle n'était plus qu'un objet haineux, elle était devenue exactement ce qu'on attendait d'elle.
Esméralda se laissa traîner, sans même voir où elle allait. L'agitation à côté d'elle la rendait un brin nerveuse, mais sans plus. Elle se fichait du regard qu'on pouvait lui porter, elle savait déjà comment on la considérait. Elle n'était rien pour les autres. Elle l'avait appris dès l'instant où on l'avait capturée et entraînée chez ce vendeur.
Son acheteur s'appelait Hypérion, un homme riche, bien vêtit, bien peigné, bien nourri. Sa peau paraissait douce et soignée, alors que celle d'Esméralda sentait la crasse et le renfermement. Un seul coup d'éponge de la part du vendeur ne lui avait pas tout enlevé. Hypérion était sur son chameau, confortablement installé. Esméralda marchait à côté de lui, enchaînée. Elle était tenue en laisse. De temps en temps, Hypérion tirait un peu sur la chaîne pour la faire avancer plus vite. Esméralda accélérait le pas quelques minutes, puis reprenait une allure relativement lente.
Esméralda avait mal aux pieds. Ça lui brûlait. Elle avait l'impression qu'elle marchait sur des pics à chaque pas qu'elle faisait. Elle essayait de ne pas s'en préoccuper, mais la douleur prenait le dessus sans cesse. La souffrance qu'elle éprouvait, sous cette chaleur, enchaînée comme du bétail, trainée dans la rue, les pieds en feu, elle n'en pouvait plus. Elle avait tenu des mois, et c'était largement suffisant. Elle s'était montré forte devant ses misérables qui l'avaient enfermé, mais son quota de bravoure était épuisé. Esméralda ne voulait plus se montrer forte.
Malgré le fait qu'elle savait ce qu'on faisait aux esclaves rebelles, elle tomba au sol sur les genoux et souffla. Sa poitrine gonflait et semblait se serrer à chaque respiration.
Hypérion descendit de sa monture et s'approcha d'Esméralda.
"C'est la fin", pensa Esméralda, prête à recevoir un châtiment.
Rien ne vient.
- Ils vendent vraiment de la pacotille, ceux-là, commenta t-il.
Esméralda ne savait que dire. Hypérion l'examinait avec un air hautain, mais il ne semblait pas vouloir la frapper.
- Tu ne peux plus marcher, je suppose ?
Esméralda baissa la tête. Elle s'attendit une nouvelle fois à une sentence. Mais rien ne vint, encore.
- Je n'ai pas le choix, alors.
La jeune femme tressaillit à ces mots. Pourquoi la fin prenait-elle tant de temps à arriver ?
- Monte, déclara Hypérion.
- Que ... ?
Esméralda avait tellement peu parlé depuis des mois, et avait la bouche tellement sèche à cause de la chaleur et du manque d'eau, qu'elle n'arrivait plus à prononcer une phrase.
- Ma femme ne sera pas à la maison, tu es une surprise, et je ne veux pas que tu meures sur le chemin. Je t'ai payé cher, tu sais. Pourtant, de la vermine comme toi, on en trouve à tous les coins de rue, finit Hypérion.
Le maître prit le bras d'Esméralda et la releva. Il l'installa sur le chameau, et se mit devant elle. Il reprit les rênes et la monture se remit en marche.
Esméralda s'accrochait à ce qu'elle pouvait, mais elle avait l'impression qu'elle allait tomber à chaque fois que le chameau tournait dans une autre ruelle. Ils traversèrent comme cela des tas de ruelles, et arrivèrent à une autre avenue marchande. Ils passèrent devant un stand d'esclaves. Le vendeur les glorifiait, et la foule devant lui semblait être convaincue.
- J'aurais dû venir ici, c'est beaucoup moins cher, grommela Hypérion.
Esméralda ne dit rien. Elle ne devait rien dire, de toute manière. Elle savait comment les esclaves fonctionnaient. La jeune femme aurait préféré que son tout premier "maître" la tué lorsqu'il l'avait pu. Mais que pouvait-elle faire ? Rien. Elle était impuissante. Sa société lui avait donné une place, et elle devait maintenant l'occuper. Elle était l'objet, non plus un humain, elle l'avait bien compris.
Sa fierté mise de côté, ses sentiments d'un autre, c'était une coquille vide qui bougeait derrière Hypérion. Esméralda n'attendait plus rien de la vie.
Après une dizaine de minutes à traverser la moitié de la ville, ils arrivèrent devant une villa prestigieuse, qui montrait une nouvelle fois la fortune de ce cher Hypérion. Les murs étaient blancs et propres, les fleurs du désert ravissaient l'extérieur. Esméralda ne connaissait aucun nom de fleurs, mais cela ne la dérangeait pas. Elle ne les apprécia pas de toute façon. Ces fleurs étaient comme elle, enchaînées au sol, les esclaves de la nature humaine.
Hypérion la poussa à l'intérieur. Ils se rendirent directement à la cuisine. Une pièce spacieuse, qui possédait bien plus d'instruments de cuisine que la plupart des maisons.
- Rends-toi présentable, ordonna Hypérion.
Il ne sortit pas de la pièce, et attendit qu'Esméralda comprenne. La jeune femme se pencha alors vers un sceau d'eau, en prit dans sa paumé et l'applatit sur son visage. La sensation de l'eau sur sa peau la soulagea un peu. Elle frotta sa figure, peignant rapidement ses cheveux noirs avec ses doigts et revient devant Hypérion, qui n'avait cessé de la regarder.
- Ça devrait suffire, dit-il. Tu sais parler ?
- Oui, articula difficilement Esméralda.
- Bien. Tais-toi, dans ce cas.
La jeune femme hocha la tête.
Du bruit se fit entendre à l'extérieur. Hypérion lui dit de rester là, et de l'attendre.
Esméralda aurait pu s'enfuir, elle aurait pu passer par la porte de derrière et courir aussi vite qu'elle aurait pu. Mais elle ne le fit pas. Elle s'était résolue à sa condition. En plus, elle n'aurait pas su où aller. Elle n'avait pas d'autres choix. Elle était devenue une esclave, elle l'avait enregistré. Elle ne l'acceptait pas, mais elle l'avait compris. Esméralda ne pouvait plus rien faire.
Hypérion revint avec deux femmes. L'une était à peine plus jeune que lui, des cheveux courts noirs qui entouraient son visage avec pudeur. Du khôl soulignait son regard méprisant. L'autre devait avoir une dizaine d'années, leur fille, qui avait des cheveux tout aussi noirs attachés en une longue tresse.
Esméralda ne savait pas quoi faire en cet instant. Elle resta devant eux, plantée comme une perche.
- C'est pour toi ! dit Hypérion en désignant Esméralda du doigt.
La femme examina Esméralda du regard.
- Satisfaisant, répondit-elle simplement.
Esméralda sentit son sang bouillir, mais elle n'en montra rien. La haine qu'elle avait en elle ne demandait qu'à sortir, les occasions ne manquaient pas, cependant la jeune femme la gardait à tout prix enfermée.
- Elle sait faire quoi ? demanda la femme.
- Tout ce que tu lui demanderas, sourit Hypérion.
- Très bien. Tu vas commencer tout de suite, Chose. Gornela a besoin de quelqu'un pour jouer.
Gornela était la petite fille qui triturait depuis le début un morceau de bois, censé représenter une poupée. Elle regarda Esméralda avec mépris, et lui sourit fièrement.
- Suis-moi, Chose.
Esméralda lança un regard désespéré à Hypérion qui n'en eut cure.
Elle dut suivre Gornela dans la jardin, où l'attendait un minuscule tabouret en bois.
La petite assit Esméralda sur le tabouret. Celle-ci se demandait ce qui allait se passer pour elle. Cette enfant ne semblait pas lui vouloir du bien, vu son comportement. Néanmoins, ce n'était qu'une petite fille. Esméralda eut l'espoir qu'elle ne soit pas comme ses parents.
Elle se trompait lourdement.
La jeune femme sentit Gornela lui tirer les cheveux, puis couper au niveau du cou. Elle vit avec horreur une longue mèche de cheveux tomber par terre, sur le sable. Et Gornela qui riait et sautait dans tous les sens.
- Tu seras ma nouvelle poupée ! se réjouit Gornela.
Esméralda tourna son regard vers un tas de poupées déformées qui trainaient au fond du jardin. Toutes découpées, démembrées, les yeux vides. Aussi vides que ceux d'Esméralda.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top