30.
Est-ce que j'ai sécher les cours, encore une fois après ça ? Oui.
Est-ce que j'ai reçu une convocation du proviseur ? Bien-sûr.
Est-ce que j'ai été collée jusqu'à la fin de l'année ? Evidemment.
C'est comme ça que ça marche, ici.
Après avoir confronté ma mère à mon comportement –je cite- compromettant, le proviseur m'a gentiment recommandé de calmer mes ardeurs.
Parce qu'attaquer physiquement quelqu'un est intolérable, bien plus que moralement. Et parce que mon passé tumultueux inquiète.
Je me suis retenue de rire et de pleurer, les deux en même temps.
Alors, comme promis, me voilà dans la salle B4 afin de payer les pots cassés de mon présent, qui lui, n'intéresse personne.
— Bonjour, lancé-je à la surveillante en rejoignant ma place.
Elle secoue la tête doucement, le visage enfoui dans son bouquin en guise de réponse. C'est le deuxième samedi matin que je passe ici et cette fois, il n'y a personne. Juste moi, celle dont l'esprit est absent, et le vide de la classe.
Et vraiment, je dois avouer que ça fait un bien fou.
Le calme dans les couloirs, les rires que je n'entends plus, les insultes qui ne m'assaillent pas. C'est satisfaisant.
Tandis que je sors mon cahier de brouillon pour passer le temps, mes devoirs étant tous à jour, quelqu'un toque à la porte pourtant restée ouverte. Mes yeux se lèvent en même temps que ceux de la surveillante qui souffle de frustration, dérangée dans son œuvre.
Et Arès s'excuse avant d'entrer.
Oui, mon Arès.
Il se stoppe d'ailleurs en m'apercevant tout au fond de la classe et ses yeux plongent dans les miens, juste avant que la pionne ne l'oblige à s'asseoir d'un long soupir.
Je n'arrive pas à rester concentrée.
Bien que je n'aie pas vraiment le besoin de l'être, savoir qu'Arès est juste là, seul et à ma portée, m'empêche même de griffonner. Je passe donc les deux heures qui suivent, le nez en l'air, à rêvasser et à compter les minutes qui mènent à la délivrance. Et quand celle-ci arrive enfin, je range mes affaires pour rejoindre la vie pourrie qui m'attend dehors.
Dans les couloirs, Arès me suit de près. J'ai même l'impression de l'entendre trottiner avant que sa main ne touche mon épaule pour me retourner avec délicatesse.
— Attends.
Je pivote, mâchoire serrée de nervosité et cœur battant, attendant la suite. Il incline doucement son visage, l'air préoccupé.
— Est-ce que tu vas bien ?
Sa question me déroute un instant. A-t-il réellement le droit de s'en préoccuper ?
— Je...
Un silence abattu sort de mes tripes et je baisse les yeux.
— Non, pas vraiment, avoué-je alors. Je suis désolée, pour l'autre jour...
C'est vrai, je le suis. Je n'aurais jamais dû hurler ma peine à travers les coups. Alors que je relève les yeux, Arès sourit à peine.
— Oublie ça. Et puis, c'est un peu de ma faute, aussi.
Je fronce les sourcils. Bien sûr, flirter avec Maddy n'est pas la meilleure idée qu'il ait eue. Mais à la place, il nie cette erreur et lâche simplement :
— Je t'ai entrainé à la boxe sans t'informer que les combats en dehors du ring étaient interdits.
Il arbore un air suffisant, presque moqueur. Vexée, je réponds la première chose qui me passe à l'esprit :
— Effectivement. Mais ça, c'était avant que tu n'apprennes à Maddy comment manier sa langue.
Il paraît surpris lorsque je tourne les talons, déterminée à le laisser là.
Mais Arès ne serait pas vraiment Arès s'il ne cherchait pas toujours à avoir le dernier mot en me rattrapant. Et là encore, sa voix grave s'élève derrière moi alors que son bras tranchant me retourne.
— Tu viens vraiment de dire ça ?
Je hoche la tête, sûre de moi. Il ricane en se léchant la lèvre inférieure dans un geste rageur.
— Comme si tu avais le droit après tout ça ! me reproche-t-il.
— Après tout, quoi ? grincé-je.
— Après tout ça ! répète-t-il, le regard obscurci par les sentiments. Tu m'as tourné le dos pile au moment où on se devait d'être solide, ensemble !
— Ensemble... répété-je, les mots me brûlant les lèvres.
Il se redresse pour lâcher :
— Je t'ai dit que je ne reviendrais pas.
— Et tu as aussi dit que tu m'aimais ! craché-je.
— C'est toujours le cas, affirme-t-il en fronçant les sourcils.
Je marque une pause, mes poumons se remplissant de ce qu'il avance.
— Je me fous de Maddy et de toutes les autres, reprend-il alors. Mais ça ne change rien. Tu as raison, ce merdier, ce n'est pas pour moi. Je mérite mieux que ce que tu as décidé pour nous, Noa.
Son regard bleu foncé me détaille avec certitude. Il est à la fois sombre et déchirant. Déchiré, peut-être aussi.
— Tu couches avec elle ? parviens-je à demander en tremblant.
Il déglutit, et je sais que je ne me remettrai jamais de la réponse qu'il va oser me donner. Alors qu'il ouvre la bouche, mon cœur simule un arrêt.
Mais étonnement, il répond :
— Non. Je savais que mon cœur t'appartenait, mais j'ignorais que ma queue ne se dresserait plus que pour toi, après ça.
Et il tourne les talons, d'un coup, mettant fin à cet échange qui, je le devine, est aussi difficile pour l'un que pour l'autre. Je l'observe disparaitre au fond du couloir, le vide reprenant sa place devant moi, mais pourtant, le cœur rempli de quelque chose de nouveau.
Un fin sourire vient même naître au coin de mes lèvres lorsque je tourne les talons pour regagner la sortie.
Et puis merde.
Je m'arrête, soupire et me retourne brusquement. Et d'un pas rapide et décidé, je retraverse le couloir pour rejoindre l'endroit où Arès a disparu.
Pour le retrouver, lui.
En espérant qu'il veuille bien me trouver en retour.
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