20.
— Plus fort.
— Comme ça ?
— Encore plus fort. Donne tout ce que tu as.
Le front en sueur, je m'applique à frapper le sac de toutes mes forces. Seulement, je suis bien consciente qu'à côté d'Arès, je ne vaux rien du tout en boxe.
C'est lui qui a insisté. Besoin d'évacuer, de penser à autre chose. Je suis assez d'accord. Finalement, je dois bien avouer que cette séance m'aide à sortir de la routine mortelle qui s'est installée chez moi.
D'autant plus que le corps à moitié nu d'Arès mérite sans aucun doute le détour. Dans son short brillant noir, les abdos contractés, les muscles de ses bras tendus et les perles de sueur qui prennent naissance à la racine de ses cheveux bruns, le spectacle est exquis.
Je suis de plus en plus attirée par Arès et il est impossible pour moi de ne pas en avoir conscience. Cependant, c'est assez spécial. Nous passons le plus clair de notre temps ensemble, mais à part quelques baisers échangés quelques fois, il n'y a rien de plus. Pas l'ombre d'une relation exclusive ou tout autre chose qui pourrait s'y apparenter.
Nous ne sommes jamais revenus sur la possibilité d'un nous. Pas une seule fois, et j'ignore si c'est parce que c'est clair pour lui ou simplement parce qu'il ne le sait pas lui-même.
— Tu es avec moi ?
Je relève les yeux vers son visage qui me fixe, étonné.
— Oui, pardon.
— Il y a un problème ?
Il relâche le sac de frappes et vient se placer devant moi, les mains sur les hanches.
— Non, affirmé-je en secouant la tête. On peut reprendre.
Il incline la sienne puis sourit de cette façon que j'adore. Celle qui fait ressortir ses fossettes et lui donne cet air innocent.
— Je crois qu'on va s'arrêter là pour aujourd'hui, lâche-t-il en attrapant deux bouteilles d'eau.
Il m'en tend une avant de boire une longue gorgée de la sienne.
— Et puis, je ne voudrais pas que tu deviennes plus forte que moi. En tout cas, pas immédiatement.
Je ris avec lui quand une voix grave nous interrompt :
— Salut, mec.
Arès se tend instantanément et me jette un regard sombre avant de faire face au grand type devant nous.
— Salut, Ben.
— Ce ne serait pas ta nouvelle copine, par hasard ?
Le phénomène aux cheveux blonds mi-longs avance de quelques pas et me dévisage complètement, sans scrupule.
— Aussi jolie que celle de la dernière fois, ajoute-t-il. Comment elle s'appelait déjà ?
Arès pose un regard soucieux vers moi, je détourne les yeux pour répondre à sa place, d'une voix neutre et blasée :
— Amélia.
Ben hausse les épaules, Arès se renfrogne.
— Peut-être bien. Vous allez à la fête ce soir ?
Je fronce les sourcils et au moment où je m'apprête à demander de quelle fête il parle, Arès intervient en annonçant, sûr de lui :
— Non.
— Dommage, assure le grand type. Il paraît que c'est la soirée à ne pas louper.
Évidemment, c'est ce qu'elles sont toutes, d'après eux.
Après nous avoir salués, non sans me jeter un dernier regard satisfait, il fait demi-tour en balançant une serviette sur son dos ultra musclé.
Là, Arès attrape nos sacs et me fait signe de le suivre, ce que je fais en silence. Je ne dis pas un mot, pas même lorsque nous montons en voiture. Il ne cherche pas à faire la conversation non plus, comme si nous savions tous les deux qu'il y avait eu une faute de commise.
Mais laquelle ?
Ce qui me travaille, sans parler de l'évocation d'Amélia, c'est qu'il avait connaissance de cette fête et qui ne m'en a pas parlé. Et Amélia, l'a-t-il revu depuis la dernière fois et si oui, de quelle façon ?
— Tu veux y aller ?
Je tourne mon visage pour retrouver ses yeux bleus s'étant éclaircis légèrement.
— Où ça ?
— À cette fête, répond-il en regardant à nouveau la route. Si tu veux, on peut y aller.
Je souris nerveusement.
— Tu parles...
— Si je ne te l'ai pas dit, c'est parce que j'étais sûr que tu ne viendrais pas.
Je sens ses yeux pesés sur moi au moment où le moteur s'arrête, mais je ne me retourne pas. Parce que je sais qu'à la minute où je vais croiser son regard, tout ce que je m'apprête à lui dire va comme s'effacer. Alors, je commence, en regardant droit devant moi, étant certaine ou presque que ce soit la meilleure chose à faire.
— Quand je suis arrivée au lycée il y a quelques mois, j'étais sûre que ce serait la pire année de ma vie...
Après avoir inspiré longuement, je poursuis :
— Je savais que je serais considérée comme la coupable pour beaucoup d'entre eux, et si, au final, ça a fini par arrêter de me déranger... Je ne parviens pas à accepter que ce soit aussi le cas pour toi.
Après une seconde, il se tourne vers moi. Je ne vois pas ses yeux, mais je ressens cette aura malaisante tout autour de nous.
— Qu'est-ce que tu racontes ? lâche-t-il soudain, sa main agrippant mon menton pour me forcer à le regarder.
— Ce que je dis, c'est que tu as le droit d'avoir honte qu'on nous voie ensemble. Comme quand on a été manger un hamburger et qu'on s'est fait surprendre, ou comme là, à la salle de sport, avec Ben. Je ressens le malaise qui te gagne à chaque fois que quelqu'un pose ses yeux sur nous et le pire, c'est que je ressens la même chose lorsque je vois mon propre reflet dans le miroir. Je sais exactement ce que ça fait d'avoir honte, parce que je vis avec, chaque jour.
Je baisse le visage pour retirer sa main de mon menton
— Je ne suis juste pas prête à l'apercevoir... à travers tes yeux, à toi. C'est trop difficile.
L'air manquant dans l'habitacle m'étouffe et me force à ouvrir la portière pour m'échapper. Je fais quelques pas, mais suis vite rattrapé par Arès, une fois de plus.
Sauf que cette fois, il me laisse l'espace dont j'ai besoin et sans me toucher, me balance :
— Je n'ai pas honte, Noa. Tu te trompes. Je passe tout mon temps avec toi, je fais ce que je n'ai jamais fait avec personne d'autre.
— Et qu'est-ce que tu fais, au juste ? lâché-je en me retournant, éreintée.
— Je prends mon temps. J'essaye de te démontrer jour après jour que tu peux avoir confiance en moi.
Il fronce les sourcils et s'approche de moi en vitesse.
— Je fais preuve de patience parce que je sais combien c'est difficile pour toi, mais crois-moi, ça demande aussi de faire appel à ma plus grande force intérieur pour m'éviter de faire une bêtise que je pourrais regretter. Qu'on pourrait regretter, tous les deux...
— Comme quoi ? demandé-je, la bouche sèche.
— Comme te claquer sur le mur de cette maison, t'embrasser comme jamais personne ne l'a fait et te déshabiller pour te montrer à quel point je n'ai pas honte de ce que tu es.
Il s'approche encore un peu, un regard félin et prédateur qui m'oblige à rester concentrée pour tenir debout.
— Qu'est-ce que je peux faire de plus, maintenant ? lâche-t-il d'une voix rauque en soutenant fermement mon regard.
Après une seconde à me poser la question intérieurement, la réponse me vient comme une évidence.
— Ce que je veux, c'est ne plus avoir à me cacher. Avec toi, ou pour moi-même. Je ne veux plus avoir honte.
Il pose une main sur ma joue et fronce les sourcils.
— Alors, accompagne-moi à cette fête. Montre-leur qui tu es vraiment et surtout, n'ai plus honte. Plus jamais.
Et je me mords la lèvre doucement.
— Je n'ai même pas été invitée... soufflé-je en retenant un sourire.
— Tu l'es, maintenant.
Il approche son visage du mien et dépose un baiser sur mon front. Un seul et unique baiser, qui suffit à embraser tout mon épiderme et à me faire comprendre à quel point il est sincère et à quel point je veux être celle qu'il mérite d'avoir à ses côtés.
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