Chapitre 12, part 1

Comme il l'avait annoncé maître Chastain refusa la moindre des visites de l'alpha le lendemain et le surlendemain. Pourtant il ne cessa pas de surveiller la progression de son élève. Malgré l'absence d'entrevus il avait corrigé chacune de ses idées, lui rappelant tantôt vers qui adressé l'argument pour qu'il soit plus percutant, parfois corrigeant un abus de langage quelconque ou un propos trop provocateur qui n'aurais pas donner une bonne image des clients. Il était capital que le discours soit plus dans le pathos que dans l'accusation afin d'insister sur le l'état de victime des omégas représenté. La ligne de conduite qu'avait choisi Jérôme pour ce procès changeait un peu des transcrits qu'Alceo avait pu lire où il avait lu beaucoup de verve et des injonction digne de Zola. Devant ses interrogation l'oméga s'était montré beaucoup plus aimable et pédagogue sur le papier, lui expliquant longuement la façon dont il comptait emmener les personnes présentes dans son récit en les faisant d'abord éprouver de l'empathie puis en les révoltants vers la fin du procès. Il était important que le sentiment d'injustice soit frai et intense dans la mémoire au moment de rendre le verdict. Un avocat était comme un romancier ou un scénariste, du moins dans la théorie. Il devait chercher dans son discours les grandes lignes d'un dénouement que le publique devait être conduit à juger « heureux » s'il débouchait en leur faveur. Pareil à un roman Chastain expliquait que la mise en place devait être neutre mais pas froide et poser le ton, ici en ajoutant une pointe de sympathie et en marquant un soutient presque amicale aux cinq clients afin de faire passer de manière verbale et non verbale leur fragilité, leur sensibilité et leur proximité du grand publique. C'est pour ne pas les rendre misérables et horripilant qu'il était capitale de donner un profil neutre car les omégas soulevaient souvent des clichés et leur prêter une trop grande fragilité ne leur rendrait pas service. Dans un deuxième temps, après la présentation des faits il fallait incliner la base solide nouvellement créée. Pour cela un discours tonique était nécessaire selon Chastain. Il fallait répondre coup sur coup, ne pas laisser la défense marquée de point mais sans tenter d'en prendre pour autant. Juste démonter le discours avec énergie pour convaincre sans ennuyer que l'adversaire avait tout faux, que son résonnement était erroné et de mauvaise foi. C'était à la fois discréditant mais pas agressif et renforçait chez l'auditoire un sentiment d'agressivité de la part de la défense, appuyant la victimisation du parti civil mais aussi sa droiture. Peu avant la fin il fallait porter un méchant coup. Jérôme par expérience savait que bien souvent la défense finissait par se répéter, son discours épuisé le moment était venu de contre attaquer férocement. Il fallait enchaîner les arguments, essoufflé l'avocat adverse en multipliant les faits à son désavantage. Cette stratégie était souvent payante grâce à cette partie précise du discours, en effet il arrivait que la défense se noie sous les accusations et perde en efficacité et en crédibilité rapidement. Qui plus est cette phase de la plaidoirie qui se devait d'être particulièrement convainquant fixait définitivement la tendance du résultat. L'ultime coup final n'était là que pour s'assurer de la sévérité du jugement rendus qui avait tendance à être trop laxiste au gout de Jérôme, surtout dans des cas comme ça. Sur la fin il fallait jouer à fond la carte du sentimental, montrer que l'accusé avait détruit des vies, le rendre abhorré par le juré et écœurant pour le juge. Désormais détesté et vu comme coupable de par les faits la justice pouvait s'abattre comme la hache implacable d'un bourreau et ce sans avoir raconter le moindre mensonge ni arrangé la vérité à sa sauce.

Devant ce procédé implacable Alceo était pris de frissons. Il était effrayé de la redoutable efficacité que devait avoir cette façon de faire avec quelqu'un d'expérimenté comme Chastain qui était sans doute capable de garder la main sur le rythme du procès. Dans le cas contraire le plan perdait un peu de sa superbe mais gardait l'assurance d'un résultat plutôt positif. C'était loin d'être le cas de tout le plaidoyer dont certains perdait leur virulence pour une totale innocuité bien fade dès que l'adversaire prenait le pas. Là était tout le génie de son mentor, personne ne pouvait nier qu'une telle façon de faire avec une fin en apothéose sans être immorale donnait des élans euphoriques à n'importe quel passionné. Alceo l'admirait véritablement et attendait avec impatience le procès, galvanisé par les derniers retours encourageant sur son discours. Par correspondance épistolaire son maître de stage était resté le même et cela le soulageait un peu car dès qu'ils se croisaient Jérôme faisait la gueule en se cachait dans le col de sa veste Gαutier hmme, une gamme de la marque taillée spécialement pour les hanches larges et les épaules fines des omégas qui lui allait à ravir. Oui, récemment il était repris des mêmes élans de passion pour son professeur qui s'était pourtant calmé pendant un temps.

La veille le jeune homme peina à s'endormir : pour la première fois il allait être un véritable acteur d'un procès et se avant même son diplôme, bien que dans son cas ses performances de stage ne viennent que renforcé la certitude qu'il était tout acquis. Montemini trépigna toute la soirée et se prépara le matin venu à une vitesse affolante. Il vérifia encore une fois qu'il avait tout, s'interdisant la moindre erreur et surtout le moindre oubli. Ayant pris son café et refait quatre fois sa mallette il se sentit prêt à quitter son somptueux domicile. Il avait mis son plus beau costume et soigné les détails à l'aide de sa pince de cravate en argent. Il voulait avoir l'air le plus professionnel possible car il serait le seul à ne pas porter l'honorable uniforme noir. Il arriva relativement tôt au palais de justice afin d'éviter les bien connu bouchons parisiens. Presque seul dans les locaux il déambula jusqu'à la machine à café pour reprendre une boisson qui l'empêcherais de somnoler. Il sentait le stress à plein nez et les autres alphas plus âgées le dévisageaient tous d'un drôle d'air. Maudis soit la dominance propre à leur genre qui exacerbait encore son état de nervosité. L'un en particulier vint se planter à côté de lui pour siroter son déca. Un grand brun, à peu près de sa taille, les yeux vert-de-gris très intenses et une assurance qui suait de tous les pores de sa peau. Cet homme le mettait très mal à l'aise avec son visage carré et sa carrure encore plus sèche que la sienne. C'était clairement le genre d'alpha à pavaner et à venir jauger et provoquer des adversaires potentiel, le genre de type qu'il détestait et dont il avait envie de rentrer dans le lard. Il n'avait pas le loisir de jouer les gros bras un jour aussi important et laissa couler, exceptionnellement. L'outsider qu'il était finit donc son gobelet qu'il jeta en affichant un air de défis irrépressible avant de s'éloigné plus ou moins nonchalamment. Il se sentit suivre du regard pendant quelques minutes puis l'autre fût appelé ailleurs car la tension dans l'air retomba d'un coup et on se désintéressa de lui.

Soudain, alors que seul quelques dizaines de minutes s'étaient écoulé sans heurt, l'agitation revint dans la salle de manière sourde. Ce n'était plus l'agressivité territoriale qu'il avait subi dans le hall mais au contraire une ambiance de chasse et de ragot. On jugeait, jaugeait, se léchant les babines et humait dans l'air un parfum qu'Alceo ne décelait pas. La voix familière de Jérôme l'interpella :

« - Montemini ! Tu es très en avance, remarqua l'aîné avec un coup d'œil à sa montre étant lui-même plus qu'à l'heure. »

Cela sauta soudain au visage d'Alceo tel un diable bondissant hors de sa boite : celui que tous les regards affamés scrutait était maître Chastain noyé dans sa robe lâche. L'oméga émettait un parfum familier et appétant qu'Alceo ne put résister à aller humer de plus prêt. Il se pencha pour mettre son nez plus proche de son cou et pût voir malgré le col noir et le rabat une goutte de sueur doucement perlé le long de la nuque de l'oméga. Son corps frissonna de désir lorsqu'un fin filet de phéromones arrivèrent à ses narines et il en fut certain :

« - Vous êtes en chaleur ... haleta-t-il. »

Jérôme le repoussa avec force et énergie, le foudroyant du regards.

« - Depuis quand ton éducation t'autorise elle à renifler les gens comme ça ? siffla-t-il en époussetant sa tenue comme s'il se sentait salis.

- Je ...

- Ne t'avise pas de recommencer où je te mets à la porte et tu ne participe pas au procès. J'attendais mieux de toi vis-à-vis de tes manières. Je ne suis pas un spectacle ! hurla-t-il venimeux à l'assemblée qui le sculptait comme des bâfré devant une boulangerie. Bande de charognards. Grogna-t-il pour lui-même, visiblement d'une humeur de chien. »

L'alpha ne savait soudain plus sur quel pied danser. D'un côté son expérience et son instinct lui disais de tenter sa chance et de séduire le partenaire plus que séduisant et demandeur qui se trouvait en face de lui avant qu'un concurrent ne se l'approprie. De l'autre il savait par pratique du personnage que le moindre geste ou la moindre parole déplacé lui vaudrait au mieux une gifle aller-retours sec propre et maîtrisé. Autant que son parfum de chaleurs cassé par il ne savait quoi c'était l'humeur massacrante de Jérôme que tous pouvaient sentir. C'était sans doute ce qui maintenait à distance la foule du moins pour l'instant. Nul doute que l'oméga drôlement énergique pour cette période de son cycle n'hésiterais pas à leur arracher les couilles à mains nu s'ils se montraient trop entreprenant. Lui emboîtant le pas Alceo demanda, incapable de s'en empêcher, pourquoi il n'avait pas été prévenue.

« - Est-ce que ça te regarde ? Je ne crois pas non ! Tu ne demandes pas à une femme de te mettre au courant si elle a ses règles alors ai la délicatesse de ne pas t'attendre ou exiger qu'un oméga te dise quand il est en chaleur.

- Mais j'aurais pu vous aider ... essaya-t-il sans doute stupide ou suicidaire. »

Le regard que lui rendit Jérôme en se retournant fut pire qu'une balle de fusil. L'oméga choqué et furieux par la réplique macho saisit l'immense alpha par le col et l'écrasa à auteur de regards.

« - Ecoute moi bien, Montemini, menaça-t-il avec un calme glaçant. Est-ce que j'ai l'air d'avoir besoin d'aide ?

- Euh ... »

Etait-ce une question piège ? L'oméga n'était de toute évidence pas dans son état normal et au vu de son parfum devait avoir des besoins impétueux dans le bas des reins mais son regard meurtrier ne brûlait pas de désir mais seulement de rage.

« - Est-ce que j'ai l'air de me trémousser comme une fille de joie ou une actrice porno le cul à moitié à l'air à la recherche d'un crétin d'alpha dans ton genre ?! Est-ce que j'ai l'air de coller à l'image que toi et les autres omégaphobe crétin aliénée pervers macho bon-à-rien débile misérablement enfermer dans votre infâme connerie merdique et obscurantiste imaginez quand on vous parle de chaleurs ? cracha-il avec mépris. Maintenant Montemini je vais te dire, tu ferais bien de fermer ta putain de gueule avant de déblatérer d'autre conneries qui me donnent envie de t'arracher la bite qui te sert de cervelle. Compris ? demanda-t-il en relâchant sa cravate un peu froissée. »

Alceo la gorge nouée hocha imperceptiblement la tête. Il déglutit, Jérôme n'avait décidément rien à voir avec les standards de toutes les étiquettes qu'on pouvait essayer de lui coller. Jamais un oméga avec la sueur au front, une fièvre de cheval, et un nuage de phéromone attractives ne lui avait répondu de la sorte à sa remarque pourtant galante. Chastain sortit un flacon de gel hydroalcoolique et se désinfecta les mains avec un dégoût non dissimuler pour ce qu'il avait touché puis effaçant sa grimace il prit une pastille à la menthe, redressa son col par-dessus son Collar électronique noir et reprit sa marche vers la salle d'audience sans un regards en arrière. Il ne fallait pas être idiot pour comprendre que le stagiaire l'avait déçu sinon vexé, les mots étaient faibles. Alceo ne comprenait sincèrement pas ce qu'il avait fait de mal, ne s'étant montré ni insultant ni méprisant à son égard bien au contraire. Ceci dit la colère et le mauvais caractère de Jérôme depuis quelques jours étaient indubitablement lié à son état donc il ne faisait pas trop cas de sa réaction extrême.

Maître Chastain se fraya un chemin jusqu'à la salle avec une démarche vive et fière, visiblement plein d'énergie. A moins qu'il ne soit déterminé au point de ne rien laisser paraître de la fatigue intense et de l'état déplorable qu'induisait cette période. Il fit Fi des murmures, des remarques, des messes basses et autres regards torves et entra sans attendre le plus jeune qui manqua de voir les lourdes portes en bois lui claquer au nez. Des journalistes déjà présents se levèrent interroger l'avocat, hésitant ostensiblement à ajouter une ou deux remarques sur la relation entre lui et le jeune alpha qu'il amenait avec lui :

« - Maitre Chastain comment sentez-vous ce procès ?

- Vous me demandez de prendre la température alors que rien n'a commencer.

- Mais on dit que l'accusation n'a pas de preuves. Vous êtes-vous encore engager sur une cause perdue ?

- Il n'y a pas de causes perdues ou de personnes qui ne méritent pas d'être défendus convenablement. J'espère qu'au bout de ce procès que je ferais tout pour rendre équitable autant que faire se peut mes clients qui sont avant tout des victimes aurons un verdict juste à la mesure de ce qu'ils ont vécu. C'est ce qu'on attend de tout procès.

- Vous pensez pouvoir tenir la séance malgré votre ... santé ? demanda l'un d'eux déclenchant des brouhaha.

- Douteriez-vous qu'un alpha en rut puisse faire correctement son travail ? Pourtant ça s'est déjà vu. Je ne vois aucune différence entre son cas et le miens et si un problème survient durant la séance je peux promettre qu'il ne viendra pas d'un manque de retenu de ma part.

- Vous allez encore revendiquez les chiffres du traitement des omégas durant cette séance ?

- Ce n'est pas inconcevable, comme chaque fois que je travaille avec des ONG.

- Pourquoi avoir fait la demande d'un huis-clos ?

- Pour la tranquillité de mes clients qui ne souhaites pas subir vos questionnaires parfois intrusifs et blessants. Sur ce messieurs dame je vous conseille de sortir avant de vous voir chasser plus brusquement par le juge.

- Une dernière question, qui est le jeune homme qui vous accompagne !? Votre amant ?

- On n'amène pas son amant à une séance bon dieu, soupira Jérôme en levant les yeux au ciel comme exaspéré par tant de bêtise. C'est mon stagiaire et associer sur ce procès, il vient se faire la main et je ne doute pas de ses capacités.

- Comment vous appelez vous ? Qu'est-ce que cela fait d'être un disciple d'une telle sommité ? Vous ne vous sentez pas écrasé ou humilié de recevoir des ordres de la part de maître Chastain ?

- Il s'appelle Montemini, il est très prometteur c'est pour ça qu'il est ici et vos hypothèses n'ont rien à voir avec le procès donc maintenant dehors ! Oust ! les chassa-t-il comme on effarouche un vol de corneille. »

Il fit signe à un agent de venir durcir son ordre donné sur un ton plutôt affectueux. Il avait cette réputation non usurpée d'avoir avec la presse des relations particulières. De ce qu'Alceo en voyait cela ressemblait une maîtresse de maternelle couvant de jeunes enfants : à la fois dur et amicale, sympathique, compatissant et présent mais aussi ferme. Sous l'apparente proximité et le sourire de Jérôme on sentait qu'il gardait une distance respectable, ne se dévoilant jamais vraiment, s'assurant d'anticiper les questions. S'il acceptait si ouvertement de leur répondre c'était sans doute pour éviter une frustration dû à l'inaccessibilité qui, il est vrai, avait tendance à rendre les tabloïds complètement dingues. Ainsi les informations et ses interviews ne valait pas si cher que ça malgré le fait qu'il soit si connu. Sans être bavard Jérôme donnait ce qu'il voulait à la ménagère curieuse de potin, et c'était être de mauvaise fois que ne pas reconnaître là-dedans une certaine aptitude acquise et peaufinée par l'expérience. L'alpha réalisa qu'il voyait de moins en moins d'articles à scandales où maître Chastain au début décrit comme agressif, antipathique et vulgaire voir parfois violent. Nul doute qu'avec ces commères de journaliste il avait dû l'être. L'agent de sécurité ayant mis tout ce petit monde dehors les cinq omégas ainsi que le reste de l'audience arrière peut à peut plus ou moins escorté et soustraits au flash des appareils photos. Sans être l'affaire du siècle plusieurs journaux cherchaient quelque chose à se mettre sous la dent pour vendre du papier.

Alceo saluât poliment les cinq omégas qu'il avait suivi durant tout le processus. Ces derniers montrèrent à Jérôme une sincère sympathie, lui montrant un soutient aussi fort qu'il leur témoignait. L'avocat et les victimes se comprenait. Il éprouvait de l'empathie pour celui qui les défendait malgré les mauvais souvenir qui devait re-surgir aujourd'hui, malgré ce qu'ils avaient vécu, comme si face aux chaleurs qui touchent tout le monde avec une dureté commune les crimes de Morgan Hamilton n'étaient pas grand-chose. Cela poussa le jeune alpha à se questionner sur ce que vivait actuellement son mentor, ce qu'avait vécu nombre de ses conquêtes. Il se doutait que l'image donnée était biaisée mais à présent il aurait aimé savoir à quel point et comprendre ce que vivait ces gens. Il en savait si peut sur 700 millions d'êtres humains.

La séance s'ouvrit sur une lecture vérification rapide de l'identité de chacun des membres des deux parties, puis une lecture des faits reprochés. Durant toute la longue introduction soporifique du procès Alceo eu le loisir d'observer les personnes présentes, recevant de manière inattendus quelques commentaires de son mentor qui suivait le déroulement des choses d'une oreille et le surveillait lui de l'autre. 

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