Chapitre 11

Le salon baigne dans un calme presque irréel, un silence ponctué seulement par le bruit doux de la tisane que Mitsuki verse dans nos tasses. Entre mes mains, la chaleur de la céramique semble vouloir s'infiltrer dans ma peau, mais elle n'arrive pas à réchauffer le froid qui pèse sur ma poitrine.

J'accroche mon regard sur la surface fumante de ma tasse, m'accrochant aux volutes ondulantes comme à un refuge. Cette danse fragile est tout ce qui me retient de croiser les regards qui pèsent sur moi : celui de Katsuki, brûlant d'une impatience contenue, et celui de sa mère, scrutateur et lourd d'attente.

Les mots tournent en boucle dans mon esprit, sans jamais se formuler. Le chaos qu'a laissé Shigaraki encombre tout l'espace. Tout ce que je ressens, c'est ce vide glaçant, et la sensation persistante de ses yeux rouges plantés dans les miens.

Inari.

La voix douce mais ferme de Mitsuki me tire de mes pensées. Je sursaute légèrement, raffermissant ma prise sur la tasse.

Qu'est-ce qui s'est passé exactement ?

Je garde les yeux fixés sur la tisane, comme si elle seule pouvait m'apporter une réponse. La vapeur danse devant moi, m'offrant un répit éphémère à l'agitation qui tourbillonne dans ma tête.

Il... s'est volatilisé, murmuré-je enfin, ma voix presque inaudible. Juste au moment où Katsuki est arrivé.

La tension dans la pièce s'intensifie aussitôt. Katsuki bouge légèrement, son ombre devient plus imposante, mais je n'ose toujours pas relever la tête.

Putain... lâche-t-il, son ton chargé de colère.

La fumée s'évanouit peu à peu au-dessus du thé, comme si elle emportait avec elle une part de ma lucidité.

Inari, reprend Mitsuki, plus posée. S'il t'a trouvée, ce n'est pas un hasard. Tu dois nous dire ce qu'il veut vraiment.

Ses mots brisent mon mur fragile. Lentement, je relève les yeux vers elle.

Mes doigts s'accrochent à la tasse brûlante, la serrant si fort que mes jointures en pâlissent. Ce n'est pas la chaleur qui me dérange, mais la manière dont leurs regards me traversent.

Katsuki est là, face à moi, presque menaçant, à moitié assis sur le bord du canapé. Ses sourcils froncés projettent une rage contenue, tandis que son pied martèle le sol à intervalles réguliers, comme une mèche prête à exploser. Mitsuki, elle, garde une posture plus maîtrisée. Pourtant, ses doigts jouent nerveusement avec la porcelaine de sa propre tasse.

Inari, reprend-t-elle d'une voix posée, bien qu'un soupçon d'acier la traverse. Pourquoi Shigaraki serait-il venu ici ?

Je ne réponds pas.

Le silence s'étire, et le battement régulier du satané pied de Katsuki devient insupportable. Je voudrais qu'il se taise, qu'ils me laissent tous les deux tranquille. J'ai besoin de réfléchir.

Tu vas nous répondre ? crache Katsuki en brisant le silence, sa voix grondant comme un avertissement. Parce que là, ça commence à me gonfler. Ce type attaque l'académie et maintenant il vient te voir ? Pourquoi toi ?

Ça ne vous concerne pas, crié-je presque, ma voix plus dure que je ne le voulais.

Les mots jaillissent avant que je ne puisse les retenir. Katsuki s'étrangle presque, se redressant brusquement.

Pas notre problème ? Tu te fous de moi ?!

Mitsuki pose une main sur son avant-bras pour le calmer, mais elle me fixe toujours. Ce regard... son calme est pire que la fureur de Katsuki.

Tu sais que c'est faux, dit-elle simplement. On est là pour toi. Ce type est dangereux. Mais on ne peut pas t'aider si tu nous caches des choses.

Je détourne les yeux, les plantant dans la surface trouble de la tisane, s'estompant peu à peu, mais elle reste mon seul bouclier. Je prends une profonde inspiration. Je sais que si je ne dis rien, ils ne me lâcheront pas la grappe.

Shigaraki... avait quelques questions, murmuré-je finalement, presque trop bas pour qu'ils entendent.

Le silence qui suit est comme une lame suspendue. Katsuki cesse de bouger, mais je sais qu'il est à deux doigts d'exploser.

Comment ça, « quelques questions » ? tonne-t-il finalement.

Je déglutis. Donner une part de vérité, ce n'est pas mentir après tout. Je m'entends répondre avec une indifférence feinte, tentant de dissimuler le tumulte dans ma tête.

Il voulait juste en savoir plus sur... mes capacités.

Katsuki se tait un instant, fixant le fond de ma tasse comme si la réponse s'y trouvait.

Ton alter ? comprend-t-il. Sérieusement ?

Sa voix trahit un agacement contenu, comme si tout se mettait soudainement en place dans sa tête. Je me contente d'un simple hochement de tête.

Mitsuki semble attendre que je précise ; je sais qu'elle n'est pas dupe. Un soupir s'échappe d'elle, mais elle garde son calme :
Il faut qu'on sache exactement ce qui se passe. Tu ne peux pas nous laisser dans le flou.

Katsuki se lève soudainement et s'avance vers moi, son regard plus perçant.
Maintenant tu vas nous dire c'est quoi ton putain d'alter pour qu'il s'y intéresse autant.

Je détourne un instant les yeux, comme pour m'échapper, repensant inévitablement à ce fameux « défi ». Il m'avait lancé exactement le même commentaire, le jour des tests physiques, avec un mélange d'arrogance et de provocation qui le collait à la peau. Je lui avais narquoisement rétorqué qu'il n'avait qu'à deviner lui-même, savourant d'avance à l'idée de le voir échouer.

Mon alter n'a jamais été un secret. Enfin, pas vraiment. Mais pour une raison que je ne saurais expliquer, je n'avais pas envie de le lui dire tout de suite. Peut-être parce qu'il semblait si sûr de lui, si convaincu qu'il finirait par trouver la réponse tout seul. Je dois avouer que me poser des questions détournées, me sortir des suppositions absurdes ou même analyser mes moindres gestes étaient plutôt amusant et risible. Jusqu'à ce qu'il finisse par abandonner après des jours d'essais infructueux.

Je sens un léger sourire me venir, un sourire que je chasse presque aussitôt. Mais ce souvenir, si insignifiant soit-il, me fait réaliser à quel point ces jours-là paraissent tellement lointains, presque irréels.

Je relève les yeux et brise enfin le silence.

C'est la manipulation sanguine.

Le poids de mes mots tombe dans la pièce. Je crois que même Katsuki, dans son obstination, ne s'attendait pas à cette réponse. Je vois ses yeux se plisser, cherchant une explication dans mes mots.

Il se redresse, son regard planté sur moi avec une lueur étrange. Ses yeux s'écarquillent comme si tout à coup, quelque chose venait de se débloquer dans son esprit, que chaque élément avait pris sens, formant un tableau cohérent. Je peux presque entendre le déclic dans sa tête.

Putain...

Il grimace, clairement agacé de ne pas avoir fait le lien plus tôt. Un éclat d'intérêt traverse son regard, semblant à la fois en colère et... curieux ? Je le vois repasser en revue des scénarios, des possibilités. Il plisse les yeux, et je devine qu'il fait le lien avec des fragments du passé. Je me prépare à un commentaire – peut-être une question sur mes compétences – mais il reste silencieux, les sourcils froncés, la mâchoire crispée.

Bordel... évidemment... lâche-t-il finalement en passant une main nerveuse dans ses cheveux déjà en bataille.

Il incline la tête, comme si la révélation avait ouvert une porte qu'il ne savait même pas verrouillée. Un silence lourd s'installe de nouveau, mais cette fois, il est chargé de réflexion. Bakugo fixe le sol et je devine qu'il revisite encore tous les indices, toutes les fois où mon alter aurait pu lui sauter aux yeux.

Il laisse échapper un petit souffle, presque un rire désabusé, mais ça ne dure pas. Très vite, la frustration sourde se lit dans ses traits. Je m'appuie légèrement contre le dossier du fauteuil, un sourire à peine dissimulé sur les lèvres.

Tu vois, ce n'était pas compliqué.

Ma remarque est presque douce, mais l'intention sarcastique est claire. Je vois sa mâchoire se contracter, et son regard se relever pour se planter dans le mien, mélange de surprise et d'agacement.

Je pensais que t'étais plus subtile que ça, rétorque-t-il d'un ton hargneux.

Je hausse un sourcil, un sourire narquois s'étirant sur mon visage.

Ou peut-être que tu n'es juste pas aussi malin que tu ne le crois.

Mitsuki, qui jusqu'ici observait en silence, prend la parole à son tour avant que Katsuki ne puisse répondre quoi que ce soit. Sa voix, bien qu'apaisée, ramène soudain toute la tension dans l'air.

Pourquoi Shigaraki s'intéresserait-il à ton alter ?

En levant doucement mon regard vers elle, je vois une ombre d'inquiétude se dessiner dans ses yeux. La question, bien qu'attendue, frappe comme un coup de massue. Je m'immobilise, mon regard fixé sur un point vague devant moi. Pendant un instant, je n'entends rien d'autre que les battements de mon cœur, lourds et désordonnés, me souvenant brutalement de la raison de sa venue.

La chaleur qui s'était brièvement installée pendant mon échange avec Katsuki, ce sentiment presque familier de normalité, s'effondre comme un château de cartes. Je sens à nouveau ce poids dans ma poitrine, ce vide glacial qui semble m'engloutir dès que je pense à ça.

Je ne sais pas, menti-je, ma voix plus tranchante pour masquer mon hésitation. Il est parti avant d'en dire plus.

Katsuki ricane, un son bref et plein de frustration.

Ça, c'est des conneries.

Katsuki, le reprend Mitsuki.

Elle penche légèrement la tête, son regard plus perçant.

Inari, je comprends que tu sois réticente. Mais si c'est ton alter qui l'intéresse, on doit savoir pourquoi. Tu as une idée, n'est-ce pas ?

Je serre la mâchoire. Il m'est impossible de leur avouer qu'il m'a proposé de le rejoindre, qu'il pourrait potentiellement m'aider à maîtriser mon alter. Que l'idée de peut-être envisager d'accepter m'a traversé l'esprit. Non, je refuse de l'admettre.

Je vous l'ai dit, je n'en sais rien. Il n'a pas parlé de mon alter... Du moins, il n'a rien ajouté à ce sujet. Katsuki est arrivé avant.

Je sens une vague de frustration monter en moi. Plus je tente de trouver mes mots, plus le silence devient insoutenable.

Écoutez... Il ne m'a rien fait. Il... Il était juste curieux de connaître mon alter après notre dernier combat. Il n'a pas pu développer ou en dire plus. Katsuki est arrivé à ce moment. Ce n'était rien.

Mitsuki observe ma réaction, l'expression de son visage indéchiffrable. Elle semble chercher quelque chose dans mes yeux, mais je ne lui en laisse pas l'occasion.

Et ça, ce n'est rien pour toi ? reprend Katsuki, d'un ton acerbe. Tu te fous de ma gueule ?!

Juste au moment où je m'apprête à libérer ma frustration dans une rage presque incontrôlable, Mitsuki m'interrompt avec un soupir qui s'échappe de ses lèvres. Elle repose sa tasse sur la table basse, ses gestes trahissant une maîtrise de soi presque désarmante.

Ça suffit, Katsuki, dit-elle d'un ton ferme et avec une autorité qui ne laisse aucune place à la contestation.

Katsuki se tourne vers sa mère, les sourcils froncés.

Tu plaisantes, là ? Tu veux que je lâche l'affaire après ce qu'on sait ?!

Oui, je veux que tu lâches l'affaire, rétorque Mitsuki en croisant les bras et en soutenant son regard. Regarde-la, Katsuki. Tu crois vraiment que tes questions vont l'aider ?

Il ouvre la bouche pour répliquer, mais se ravise, en me regardant de nouveau. Mes doigts tremblent encore autour de la tasse, malgré tous mes efforts pour rester impassible. Merde.

Je ne dis pas que ce n'est pas grave, reprend Mitsuki, son ton se faisant un peu plus doux. Mais elle a besoin de temps. De reprendre ses forces. Pas qu'on la harcèle.

Katsuki détourne les yeux, serrant les poings sur ses genoux. La frustration est évidente sur son visage, mais il ne dit rien. Mitsuki semble satisfaite. Je la remercie intérieurement pour son intervention plus que bienvenue tandis que je garde les yeux rivés sur ma tasse, l'esprit en ébullition. Ce n'est pas la menace de Shigaraki qui me hante, mais l'idée qu'il en sache plus que nécessaire.

Je vais devoir en informer ton oncle dès qu'il rentrera, ajoute Mitsuki.

Mon cœur rate un battement. Je relève la tête brusquement, perdant tout à coup l'intérêt pour la surface du thé qui m'avait tant captivée, pour croiser le regard calme et tranchant de Mitsuki.

Ce n'est pas nécessaire, je déclare presque désespérée.

Mon ton trahit une nervosité croissante. Chaque syllabe prononcée est chargée d'une tension palpable, comme si je tentais non seulement de la convaincre, mais aussi moi-même, de l'inutilité évidente de ma demande.

Ce n'est pas à toi d'en décider, réplique-t-elle, son regard se durcissant. S'il y a le moindre danger, il doit le savoir.

Je vous assure que... ce n'est rien.

Katsuki ricane, un son amer qui me fait lever les yeux vers lui.

Rien ?! T'as vu ta gueule ?! T'as la même tronche qu'un putain de Brainless et tu dis que ce n'est rien ?!

Katsuki ! Assez ! intervient sa mère d'un ton mordant.

Son ton fait fléchir l'obstination de Katsuki. Il détourne les yeux, croise les bras et se renfonce dans le canapé, bouillonnant en silence.

Je serre les dents, fuyant leurs regards à tous les deux. Il a raison, mes mains tremblent encore, malgré mes efforts... Tss. Je n'ai pas besoin d'aide. Ce que je veux pour l'instant, c'est des réponses. Qu'est-ce que ce fumier de Shigaraki sait exactement ?! Ça ne doit pas recommencer. Je refuse que ça arrive. Et si oncle Kai l'apprend... Non, il n'a aucune raison de douter que Shigaraki ait pu faire le lien entre mon alter et notre clan.

Je repose la tasse sur la table, m'efforçant de masquer mes pensées.

Inari, je sais que tu ne veux pas inquiéter ton oncle, mais tu es sa nièce et sous sa responsabilité. Il doit être au courant.

J'hoche la tête sans un mot, acceptant la décision sans protester. Après tout, elle ne sait que ce que je lui ai raconté. Et puis, je n'ai franchement pas l'énergie de me lancer dans une énième dispute. Ce que dit Mitsuki est raisonnable. Je le sais. Mais une part de moi s'y oppose, plus par principe que par véritable conviction. Je ne veux pas que tout ça prenne une ampleur plus grande, pas tant que ce n'est pas nécessaire.

Je sens un frisson m'envahir à l'idée de ce que mon oncle pourrait ressentir ; à l'idée de la conversation qu'il faudrait avoir. Mais je ne dis rien. Au fond, je sais qu'elle a raison.

Katsuki, toujours aussi tendu, croise les bras et secoue la tête, mais sans insister davantage. Il semble fatigué de cette situation, et peut-être, je suppose, fatigué de moi.

Je ferme les yeux un instant, tentant de calmer la cacophonie dans ma tête. Mais c'est peine perdue. Mon cœur tambourine dans ma poitrine, et une douleur sourde commence à s'installer derrière mes tempes. La pression dans mon crâne devient insupportable, et avant même de réaliser, un filet de sang s'échappe de mon nez.

Merde, je souffle, un son presque inaudible, levant une main tremblante sur ma lèvre supérieure avant que mes doigts ne se teintent de rouge.

Putain, tu saignes, lance Katsuki, sa voix brusque mais teintée d'un éclat d'inquiétude. Encore...

Je secoue la tête, déjà agacée. Ce n'est pas la première fois que ça arrive... et qu'il y assiste. Fait chier.

Ce n'est... —commencé-je avant de me faire brusquement interrompre par Katsuki.

T'as pas intérêt à me sortir que ce n'est rien. C'est ton alter qui fait ça, pas vrai ?

Il le dit avec une assurance qui me fait relever la tête, bien malgré moi, hésitant entre ignorer la question et avouer ce qu'il a probablement déjà compris. Je détourne le regard, me concentrant sur le mouchoir que Mitsuki me tend avec une douceur qui tranche avec le ton mordant de son fils.

Ça ne t'arrive pas pour rien, continue-t-il, comme s'il mettait les pièces du puzzle en place à voix haute. Tu contrôles mal ton propre sang, donc à chaque fois que tu perds pied...

Je reste figée, incapable de répondre immédiatement. Il a raison, bien sûr, mais l'admettre maintenant me donne l'impression de lui offrir une victoire de plus.

C'était évident, continue-t-il, croisant les bras.

Je baisse les yeux sur le mouchoir taché de rouge.

Tellement évident, oui. Et ça t'a pris combien de temps pour piger ça ? je lâche, feignant l'indifférence avec sarcasme.

Il fronce les sourcils, et je vois la tension qui passe dans sa mâchoire.

T'es fière de toi, c'est ça ? Sérieusement, ce n'est pas un jeu ton truc.

Je soupire à sa remarque. Sans blague. Je sais mieux que quiconque que ça n'a rien d'amusant. Je fouille dans mon sac, cherchant ma plaquette que je garde toujours sur moi. Mes doigts tremblent encore.

C'est quoi ça ? demande Katsuki brusquement.

Mes pilules. Pour mon alter.

Je réponds sans le regarder, avalant une pilule d'un geste mécanique.

C'est cette pilule qui te permet de stopper les saignements de nez ? me demande Mitsuki.

Elle, qui était silencieuse jusque-là, s'approche avec un autre mouchoir qu'elle tend dans ma direction.

Je hoche la tête, serrant la serviette dans mes mains.
En quelque sorte, oui. Mais depuis que je suis sortie de l'hôpital, je suis censée... le prendre tous les jours.

Et c'est maintenant que tu les prends ? Pourquoi t'as pas pris ça avant ? demande Katsuki d'un ton accusatrice.

Je soupire à sa question. Avec tout ce qu'il s'est passé, ça m'est complètement sorti de l'esprit.

J'ai oublié, je réponds aussitôt, irritée.

Tu te rends compte que t'es pas juste une emmerdeuse, hein ? Tu joues avec ton propre corps, ton propre sang !

Je relève les yeux, les sourcils froncés, outrée par la gravité de ses mots.

Katsuki... — intervient Mitsuki, avant que je ne la coupe, la colère me heurtant.

Tu crois que je le fais exprès ? Que ça m'amuse de me retrouver dans cet état ?

Ma voix tremble, pas de peur, mais d'un mélange d'épuisement et de colère. Il ne répond pas tout de suite, mais son regard ne lâche pas le mien.

Bien sûr que non, mais t'as franchement pas le luxe de te permettre un tel oubli.

Ça suffit, vous deux, intervient Mitsuki, sa voix coupant net notre échange.

Je prends une inspiration tremblante, essayant de calmer l'agitation dans ma poitrine. Katsuki se détourne brusquement, passant une main dans ses cheveux.

Fais ce que tu veux, lâche-t-il en tournant les talons.

Je reste là, le goût métallique du sang encore présent dans ma bouche, regardant avec désarroi sa silhouette disparaître dans le couloir.

Il peut être con quand il s'y met, mais il s'inquiète pour toi, murmure Mitsuki en passant une main réconfortante sur mon dos.

Je ne réponds pas. À cet instant, je ne suis même pas sûre de comprendre ce que je ressens, entre la fatigue, la douleur lancinante dans ma tête, l'écho des mots de Shigaraki qui résonnent encore, et cette conversation acariâtre.

Tu devrais aller te reposer, ajoute Mitsuki. Tu as traversé une journée difficile.

J'hoche la tête et la remercie doucement avant de me lever, malgré mes jambes qui tremblent encore. La maison est calme maintenant, presque trop calme. Katsuki a disparu quelque part, je ne sais où, et le silence semble peser plus lourd que sa colère.

Je monte les escaliers, me laissant porter par un automatisme plus qu'un véritable désir de repos. Pourtant, alors que je pose le pied sur la première marche, une sensation étrange me traverse. Une lumière vacillante m'interpelle en haut des escaliers. Ma porte est entrouverte. Je fronce les sourcils. Je suis certaine de l'avoir fermée avant de descendre.

Je monte lentement, chaque marche semblant alourdir mes pas. Quand j'arrive enfin devant la porte, je m'arrête un instant, le souffle court, ma main suspendue à mi-chemin pour pousser la porte. Mon cœur bat plus vite. Une fraction de seconde, un scénario improbable me traverse l'esprit. Est-ce qu'il est... ? Non... impossible. Je chasse cette pensée avec un soupir nerveux avant de finalement entrer.

Katsuki ?!

Il est là, penché au-dessus de mon bureau, ses doigts effleurant distraitement un morceau de papier posé sur le bois. À peine a-t-il entendu ma voix qu'il se retourne brusquement, un mélange d'agacement et de surprise peint sur son visage.

Bon sang, tu m'as fait peur ! Qu'est-ce que tu fais dans ma chambre ? Je te croyais parti.

Un "merci" aurait suffi, mais apparemment, ça aussi t'en es incapable, grogne-t-il.

Je le dévisage, les sourcils froncés.

Merci pour quoi ?

Il désigne le livre sur le bureau.

Je t'ai ramené un bouquin. Tu avais l'air d'avoir apprécié le premier et celui-ci est plutôt intéressant. Mais comme t'es incapable de dire quoi que ce soit sur celui que je t'ai filé à l'hôpital, je me suis demandé si tu l'avais seulement ouvert... — il s'arrête, se rendant compte de ses propos. Enfin bref, je n'allais pas te le ramener en main propre, ça m'aurait donné l'impression d'être ton larbin. Et vu ton sale caractère aujourd'hui...

Je m'approche du bureau et jette un coup d'œil au livre. Mes doigts effleurent distraitement la couverture, et un souvenir flou me revient : un livre similaire était posé sur la table de chevet à l'hôpital... C'était lui ? Je n'ai même pas encore eu l'occasion de le lire. Je, remarque la collaboration avec All Might, ne pouvant empêcher mes yeux de rouler à cette constatation.

Un léger sourire imperceptible se dessine sur mes lèvres.
T'as fini de bouder ? demandé-je avec une pointe de sarcasme.

—    Et toi, t'as fini de te foutre dans la merde ? réplique -t-il un sourcil levé.

Il marmonne quelque chose d'incompréhensible en se dirigeant vers la porte, son attitude toujours aussi grincheuse. Pourtant un sourire imperceptible se dessine sur mes lèvres, tandis que je chuchote presque un remerciement.

Je le regarde partir, mais mon attention est vite attirée par un détail près du livre. Un petit morceau de papier, plié en deux.
C'est toi qui as déposé ça là ?

Katsuki, qui était presque sorti, se retourne, les sourcils froncés, visiblement agacé.
Quoi ?

Je lève le bout de papier pour qu'il le voie, attendant une réponse.

J'en sais rien. C'est pas moi.

Tandis que je m'apprête à ouvrir le bout de papier, la porte de ma chambre s'ouvre brusquement dans un claquement.

Inari !

La voix grave et vibrante de tension d'oncle Kai résonne dans la pièce. Son entrée est imposante, presque suffocante. Mon regard se tourne vers lui, stupéfaite de le voir ici, alors que sa silhouette imposante remplit toute l'embrasure de la porte. Je réagis instinctivement, glissant le papier dans ma poche, hors de vue.

Il ne prend pas le temps de parler ou de regarder Katsuki. En une fraction de seconde, il traverse la pièce et m'attrape dans ses bras avec une urgence que je lui connaissais rare.

Je reste figée un instant, surprise par son geste. Mais lorsque ses bras se resserrent autour de moi, protecteurs et presque désespérés, c'est comme si quelque chose s'était brisé en moi. Toutes les émotions remontent d'un coup. Le poids de la peur, de la frustration, de la culpabilité... Je me laisse aller, enfouissant mon visage dans son épaule, contenant à peine un sanglot.

Mitsuki m'a tout raconté, murmure-t-il contre mes cheveux, sa voix tremblante malgré son apparente solidité.

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