Désillusion

Elle le repoussa tendrement, avant de s'éloigner à reculons en le regardant d'un air navré. Ne comprenant pas pourquoi elle agissait ainsi, il tenta maladroitement de la retenir auprès de lui. Le bras qu'il tentait d'agripper se dissipa sous ses doigts dans un nuage de fumée, bientôt suivi par le corps de la dame tout entier, jusqu'à ce que son visage ne disparaisse lui aussi sous ses yeux horrifiés.

Son propre cri de désespoir le réveilla, il ouvrit les yeux, tandis que son cœur tambourinait violemment dans sa poitrine. Une lumière grisâtre filtrait à travers les panneaux de la pièce. D'une main, il la chercha à ses côtés, mais n'y trouva que son absence. Il se redressa et considéra cette chambre morne et vide avec un soupir chargé de regret. C'était un brutal et douloureux retour à la réalité, après un doux, mais bien trop court rêve.

Pourquoi son esprit s'évertuait-il à le torturer de la sorte ? Il aurait donné tout ce qu'il possédait pour retourner à cette existence alternative à laquelle on l'avait arraché et dont le souvenir fugace commençait déjà à se faner.

Que deviendraient les protagonistes de ce songe ? Se reverraient-ils ? La frustration d'avoir été si proches et à la fois si loin les pousserait-elle à braver les interdits et à se retrouver à nouveau dans l'intimité de la nuit ? Auraient-ils accès au bonheur que le destin se refuse à leur accorder ?

Lorsque viendrait l'heure de leurs véritables retrouvailles, s'il s'avérait qu'elles arrivent un jour, leurs vies auront-elles pris le pas sur leurs idéaux ? Peut-être ne seraient-ils plus que deux inconnus se regardant avec curiosité au travers d'une pièce bondée, se demandant pourquoi le visage de l'autre leur évoque autant de mélancolie. Combien d'autres scénarios, combien d'autres ramifications, de paradigmes et de chemins de vie seraient envisageables à ce moment-là ?

Il se prit à penser que ces possibilités d'avenir, aussi affligeantes soient-elles, seraient infiniment préférables à son sort actuel.

Il devait se rendre à l'évidence : la guerre faisait sûrement toujours rage au nord, et les chances de victoire étaient si minces qu'il ne pourrait jamais espérer remettre les pieds dans cette contrée. Il ne pouvait se permettre d'espérer la revoir.

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